Pourquoi avoir organisé ce colloque européen sur l'action sociale locale ?
- Cela peut sembler antinomique de parler d'action sociale locale et d'Europe. Mais il faut bien voir d'une part que les questions sociales sont européennes : les pays sont confrontés aux mêmes préoccupations -vieillissement démographique, violences urbaines, lutte contre la pauvreté - même si le curseur n'est pas partout au même niveau. D'autre part, les politiques à mettre en œuvre supposent le concours de ceux
- élus, professionnels, associations
- qui tentent d'y répondre au quotidien. Et à cet égard, les acteurs locaux disposent d'une expertise et d'un savoir-faire qu'ils aimeraient voir reconnus. En clair, l'Unccas et les sept réseaux européens partenaires
- qui travaillent ensemble déjà depuis longtemps
- estiment que leur expérience doit servir à la construction de l'Europe sociale. Et veulent y être associés.
Quel regard portez-vous sur l'Europe sociale ?
- Jusqu'ici, l'Union ne s'est pas tellement préoccupée des questions sociales, renvoyant cette responsabilité aux Etats membres, au motif qu'il fallait respecter les différences culturelles. C'est bien l'une des caractéristiques des acteurs locaux de savoir faire vivre ces différences. Mais encore faut-il qu'il y ait un socle commun de droits sociaux qui assure une continuité dans la protection des personnes dans l'espace européen. Par exemple, qu'un citoyen, titulaire d'un revenu minimum dans un Etat, ne le perde pas s'il est amené à habiter avec sa famille 500 kilomètres plus loin. Une Europe de cette nature est inconcevable.
Concrètement, quelles sont vos attentes par rapport à l'Union ?
- Nous demandons à être associés à la conception et à l'élaboration des politiques sociales européennes, mais aussi soutenus afin de pouvoir échanger et confronter nos pratiques. Les acteurs sur le terrain ont souvent peu de moyens et peu de temps à consacrer à cela. Il faut donc des moyens supplémentaires pour développer les programmes d'échanges afin de valoriser les expériences réussies ; créer par exemple une banque de données de savoir-faire locaux. Il faut également rendre plus accessibles les financements : les dossiers à remplir pour bénéficier des fonds sociaux européens sont très complexes et les délais de versement peu adaptés aux situations.
Comment comptez-vous vous faire entendre des gouvernements ?
- Demain, dans le cadre du colloque de Lille, nous allons rendre publique une déclaration finale insistant sur la nécessité de reconnaître la part des acteurs locaux dans l'élaboration d'une Europe solidaire. Notre crainte, c'est qu'à quelques mois de la signature du traité de Nice sur les droits fondamentaux en Europe, on n'ait pas encore pris la mesure du défi majeur que représentent les questions sociales. Pourtant, ou il y aura des engagements concrets en ce domaine, ou l'Europe sociale sera sans consistance. Et nous sommes bien décidés, chacun dans nos réseaux respectifs, à interpeller sur ce sujet les ministres concernés, les institutions européennes, les syndicats...
Propos recueillis par Isabelle Sarazin
(1) L'Association des maires de France, European Anti Poverty Network, European Social Action Network, Eurocities, Quartiers en crise, Réseau européen des directeurs de services sociaux, Villes ouvertes - Unccas : 6, rue Faidherbe - BP 568 - 59208 Tourcoing cedex - Tél. 03 20 28 07 50.