Dans un arrêt du 28 juillet 2000, le Conseil d'Etat a annulé la note technique de la direction de l'action sociale (DAS) du 11 août 1998 (1) qui considérait que les heures de surveillance nocturne effectuées par les éducateurs dans les établissements sociaux et médico-sociaux ne constituaient pas du travail effectif, et se prononçait donc en faveur de l'application des régimes d'équivalence mis en place par les conventions collectives nationales de 1951 et de 1966 (assimilation des neuf premières heures à trois heures de travail effectif).
Selon le Conseil d'Etat, « les heures de surveillance de nuit assurées par les éducateurs, au cours desquelles ils doivent être, de façon permanente, en mesure de répondre à toute sollicitation des pensionnaires de l'établissement afin d'assurer, le cas échéant, leur mission éducative, constituent[...] un temps de travail effectif qui doit être rémunéré comme des heures normales de travail ». Aussi, en déduit-il que, dans la mesure où elle exclut du temps de travail effectif les périodes réalisées par les éducateurs en chambre de veille en se fondant sur l'existence de régimes d'équivalence conventionnels, la note de la DAS méconnaît la définition du travail effectif donnée par l'article L. 212-4 du code du travail tel qu'issu de la loi Aubry I du 13 juin 1998.
Cette décision conforte la jurisprudence de la Cour de cassation du 29 juin 1999 qui avait, elle aussi, affirmé que les heures effectuées en chambre de veille constituaient un travail effectif (2). Jurisprudence confirmée en mai dernier (3). En effet, saisie d'un pourvoi formé contre un arrêt de la cour d'appel de Colmar du 19 mars 1998 (4), la Haute Juridiction relève que « la salariée était, en permanence, présente dans l'établissement et disponible pour intervenir à tout moment, sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, ce qui constituait un travail effectif et non une simple astreinte ». De fait, comme en 1999, elle remet en cause les régimes d'équivalence conventionnels.
A noter que cette dernière décision de la Cour de cassation est intervenue alors même que, pour contrecarrer sa jurisprudence du 29 juin 1999, l'article 29 de la loi Aubry II sur la réduction du temps de travail valide les rémunérations des heures passées en chambre de veille, dès lors qu'il n'y a pas eu de décision de justice définitive. Disposition législative par ailleurs déjà mise à mal dans deux arrêts de cour d'appel qui ont écarté son application pour les litiges faisant l'objet d'une procédure judiciaire au 1er février 2000 (5).
(1) Voir ASH n° 2086 du 25-09-98.
(2) Voir ASH n° 2127 du 9-07-99.
(3) Cass. soc. 16 mai 2000, Goerig c/Institut pour déficients sensoriels Le Phare, n° 2214 F-D.
(4) Voir ASH n° 2080 du 17-07-98.
(5) Voir ASH n° 2175 du 14-07-00.