Au-delà de ses dispositions visant à prévenir et à réprimer les atteintes à la dignité des victimes, développées dans lesASH n° 2172 du 23-06-00, , la loi du 15 juin 2000 a aussi pour ambition de renforcer le principe de la présomption d'innocence. Plus d'un an de débats parlementaires auront été nécessaires pour voir aboutir un texte qui, selon les propos mêmes de la garde des Sceaux, le 30 mai dernier au Sénat,« aurait pu en réalité justifier quatre grandes lois ». Après la loi du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits, premier pan de la réforme de la justice présentée en octobre 1997 par Elisabeth Guigou, le deuxième volet « pour une justice au service des libertés » est donc désormais opérationnel.
S'inspirant sur de nombreux points des conclusions de la commission présidée par Pierre Truche (1), l'apport principal de ce texte « consiste à rendre notre justice pénale plus respectueuse des libertés, plus proche des citoyens, plus humaine et plus soucieuse de leurs préoccupations, qu'ils soient victimes ou auteurs d'infractions », déclarait Elisabeth Guigou devant l'Assemblée nationale (J. O. A. N. (C. R.) n° 25 du 24-03-99). Cette réforme, explique l'exposé des motifs de la loi, « est indispensable pour rétablir la confiance des citoyens dans leur justice pénale et pour assurer un meilleur équilibre entre les nécessités de la répression et le respect des libertés individuelles ».
Le titre 1er de la loi permet de mieux prendre en compte le principe selon lequel toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente. Ainsi, lesdroits de la défense et le respect du débat contradictoire sont renforcés et les droits des parties au cours de l'instruction et du procès,étendus. De plus, la procédure du témoin assisté, qui permet à une personne faisant l'objet d'une accusation de bénéficier des droits de la défense sans être mise en examen, est améliorée.
« Avec 41 % de détenus provisoires, la France continue à être le pays d'Europe occidentale où le taux de détention provisoire est le plus élevé », s'est alarmée la ministre de la Justice (J. O. A. N. (C. R.) n° 25 du 24-03-99). Plusieurs dispositions de la loi du 15 juin renforcent donc les garanties en matière dedétention provisoire et créent un juge des libertés et de la détention, afin que cette mesure soit prononcée moins souvent et pour moins longtemps. Certaines suggestions des rapports d'enquêtes parlementaires sur les prisons, rendus publics en juillet dernier, sont d'ores et déjà traduites dans la loi (2). C'est le cas, par exemple, du principe d'encellulement individuel des prévenus. Le législateur renforce aussi le droit à être jugé dans un délai raisonnable.
A l'initiative des sénateurs, la loi crée uneprocédure d'appel contre les décisions des cours d'assise. « Les moyens nécessaires à la mise en œuvre ont été obtenus et sont déjà mis en place, avant même que la réforme soit adoptée », s'est réjouie, à ce titre, la garde des Sceaux (J. O. A. N. (C. R.) n° 25 du 24-03-99). Enfin, autre réforme qualifiée d' « historique » par la ministre de la Justice, celle de la libération conditionnelle, qui intègre l'essentiel des propositions remises en février dernier par la commission Farge (3). Simultanément à la publication de la loi, une volumineuse circulaire a été adressée à l'ensemble des juridictions leur exposant, notamment, les dispositions entrant immédiatement en application.
Dans ce numéro :
• Les droits de la défense renforcés
- La garde à vue rénovée
- Le statut de témoin assisté conforté
- La mise en examen mieux encadrée
- Les droits des parties au cours de l'instruction
Dans de prochains numéros :
• La détention provisoire plus limitée
• Le contrôle judiciaire révisé
• La libération conditionnelle judiciarisée
• Le droit à être jugé dans un délai raisonnable
Les droits de la défense et le respect du principe du contradictoire, désormais expressément consacrés en tête du code de procédure pénale, sont garantis, selon des modalités différentes, au cours des phases de l'enquête et de l'instruction. L'objectif étant d'assouplir les conditions de la garde à vue, de développer le recours à la procédure de témoin assisté et de limiter, autant que possible, les détentions provisoires.Sauf dispositions particulières, ces nouvelles règles entreront en vigueur le 1er janvier 2001.
Chaque année, plus de 400 000 personnessont placées en garde à vue. La loi du 15 juin 2000 étend leurs droits et prévoit, en particulier, l'intervention de l'avocat dès le début de cette procédure.
Les régimes d'auditions des personnes contre lesquelles aucun indice ne permet de présumer qu'elles ont commis ou tenté de commettre une infraction, applicables en cas d'enquête de flagrance, d'enquête préliminaire ou d'exécution d'une commission rogatoire du juge d'instruction sont, désormais, uniformisés. La loi du 15 juin veut, ainsi, éviter la mise en garde à vue de simples témoins.
Concrètement, lors d'une enquête de flagrance, « les personnes à l'encontre desquelles il n'existe aucun indice faisant présumer qu'elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ne peuvent être retenues que le temps strictement nécessaire à leur audition » (art. 62, al. 5 nouveau du code de procédure pénale). Une disposition similaire est prévue à l'article 153 en ce qui concerne les commissions rogatoires.
L'article 41 modifié du code de procédure pénale (CPP) rend obligatoire la visite, jusqu'alors facultative, par le procureur de la République des locaux de garde à vue chaque fois qu'il l'estime nécessaire et au moins une fois par trimestre.« Il existe environ 5 000 lieux de garde à vue en France et la mise en œuvre de cette mesure pourrait impliquer une centaine de visites par an pour chaque parquet », note le rapporteur de la loi devant le Sénat (Rap. Sén. n° 419, Jolibois).
En outre, il doit tenir un registre répertoriant le nombre et la fréquence de ces contrôles.
En matière d'enquête de flagrance (art. 63, al. 1 modifié du CPP) et de commission rogatoire(art. 154, al. 1 modifié du CPP), l'officier de police judiciaire qui place une personne en garde à vue doit en informer le procureur de la République,dès le début de la mesure. Auparavant, celui-ci devait être informé « dans les meilleurs délais ». La même règle d'information du procureur est instituée en cas de garde à vue prononcée lors d'une enquête préliminaire (art. 77 modifié du CPP).
La durée de la garde à vue reste fixée à 24 heures. Sa prolongation pour un nouveau délai de 24 heures au plus requiert désormais une autorisation écrite du procureur de la République. Celui-ci peut subordonner cette autorisation à la présentation préalable de la personne concernée (art. 63, al. 2 modifié du CPP).
La nouvelle rédaction de l'article 63-1 du code de procédure pénale précise que la personne gardée à vue doit être informée de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête et de son droit à ne pas répondre aux questionsposées par les enquêteurs. Le législateur a, ainsi, intégré l'article 5-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés, qui prévoit que « toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ».
L'intéressé doit également être informé des nouvelles dispositions de l'article 77-2 du même code qui permet à toute personne ayant été gardée à vue , à l'expiration d'un délai de 6 mois, d'interroger le procureur sur la suite donnée à la procédure.
Les personnes sourdes placées en garde à vue qui ne savent ni lire ni écrire doivent être assistées par un interprète en langue des signes, ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec des sourds. Tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne sourde peut également être utilisé (art. 63-1, al. 4 nouveau du CPP).
De son côté, l'interprète doit prêter serment par écrit d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience.
Des dispositions similaires s'appliquent aux personnes sourdes mises en examen (art. 121, al. 3 nouveau du CPP). Il est de plus indiqué que si la personne sait lire et écrire, « le juge d'instruction peut également communiquer avec elle par écrit ».
Dominique Gillot s'est félicitée de cette« avancée significative pour l'accès à la justice des personnes sourdes et malentendantes » (communiqué du 28 juin 2000). Les règles encadrant l'organisation d'un procès en présence d'un sourd, qui dataient de 1830, étaient devenues« obsolètes », rappelle la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés et ne respectaient pas le principe du droit à un procès équitable posé par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme.
Le procureur de la République doit visiter les locaux des centres de rétention administrative et les zones d'attente, dans lesquels peuvent être retenus lesétrangers en situation irrégulière, au moins une fois par semestre (art. 35 et 35 quater modifiés de l'ordonnance du 2 novembre 1945).
Toute personne gardée à vue a le droit de faire prévenir, sans délai, par téléphone, la personne avec laquelle elle vithabituellement ou l'un de ses parents en ligne directe oul'un de ses frères et sœurs ou son employeur, de la mesure dont elle fait l'objet(art. 63-2 modifié du CPP). Cette obligation, a défendu la députée de l'Hérault, Christine Lazerges (PS), lors des débats devant l'Assemblée nationale, « participe du respect des personnes gardées à vue. De nombreuses familles sont dans une inquiétude folle quand elles attendent un des leurs, souvent un enfant qui ne peut les prévenir » (J. O. A. N. (C. R.) n° 26 du 25-03-99).
Les investigations corporelles internes sur une personne gardée à vue, indispensables aux nécessités de l'enquête, ne peuvent êtreréalisées que par un médecin, requis à cet effet (art. 63-5 nouveau du CPP). Le législateur entend rappeler, de la sorte, « le droit au respect de la dignité physique et morale de chacun » (J. O. A. N. (C. R.) n° 10 du 9-02-00).
Mettant le droit français en harmonie avec les législations des principaux pays européens, la loi du 15 juin prévoit que la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue, ainsi qu'à l'issue de la vingtième heure (et non plus à la fin d'une période de 20 heures) (art. 63-4, al. 1 modifié du CPP). Le bon fonctionnement de ce dispositif« suppose donc l'organisation de services de permanence au sein des conseils de l'Ordre, qui permettent d'éviter qu'une inégalité ne s'instaure entre les personnes gardées à vue selon qu'elles connaissent ou non un avocat prêt à intervenir sur le champ » (Rap. A. N. n° 1468, Lazerges).
L'avocat doit être informé par l'officier de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l'infraction sur laquelle porte l'enquête (art. 63-4, al. 3 modifié du CPP).
En outre, lorsque la garde à vue estprolongée, la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat à l'issue de la douzième heure de cette prolongation (art. 63-4, al. 6 nouveau du CPP).
A noter : les délais d'intervention de l'avocat en cas de délinquance ou de criminalité organisées, de trafics de stupéfiants (après 36 heures de garde à vue) ou de terrorisme (72 heures) demeurent inchangés.
Outre la durée des interrogatoires et les temps de repos, le procès verbal d'audition doit également, désormais, mentionner les heures auxquelles les personnes gardées à vue ont pu s'alimenter(art. 64, al. 1 modifié du CPP).« Il s'agit d'une mesure bienvenue, même si elle ne garantira en rien qu'une personne gardée à vue aura pu s'alimenter convenablement pendant la durée de la garde à vue »,a admis le sénateur Charles Jolibois, rapporteur du texte devant le Sénat (Rap. Sén. n° 283, Jolibois).
A compter du 16 juin 2001, les interrogatoires des mineurs placés en garde à vue serontenregistrés sous forme audiovisuel. L'original de l'enregistrement sera placé sous scellés et sa copie sera versée au dossier (art. 4 VI nouveau de l'ordonnance du 2 février 1945).
Il ne pourra être visionné qu'avant l'audience de jugement en cas de contestation du contenu du procès-verbal d'interrogatoire, sur décision du juge d'instruction ou du juge des enfants saisi par l'une des parties. A l'expiration d'un délai de 5 ans à compter de la date de l'extinction de l'action publique, l'enregistrement original et sa copie devront être détruits dans le délai de un mois.
Les dispositions de la loi du 30 décembre 1996(art. 114, al. 4 à 11 du CPP) prévoyant la possibilité pour l'avocat de se faire délivrer une copie des pièces du dossier avant une première comparution ou une première audition ne sont pas applicables.
A noter : un an après l'entrée en vigueur de cette nouvelle règle, soit le 16 juin 2002, le gouvernement devra présenter au Parlement, un rapport sur le bilan de l'expérimentation du dispositif, afin de préciser les modalités de l'élargissement de cet enregistrement aux majeurs (art. 141 de la loi).
La notion de témoin assisté résulte de la loi du 30 décembre 1987. Celle-ci a permis aux personnes visées dans une plainte avec constitution de partie civile de demander à être entendues en bénéficiant d'un avocat ayant accès au dossier, mais sans faire l'objet d'une inculpation. Puis, la loi du 24 août 1993 a institué une seconde forme de témoin assisté, autorisant le juge d'instruction à entendre, selon cette procédure, une personne nommément visée par le réquisitoire du procureur de la République, qu'il estime ne pas devoir mettre en examen. Ce statut était, jusqu'à présent, peu utilisé, alors qu'il peut permettre« d'éviter ou de retarder certaines mises en examen » (Rap. Sén. n° 419, Jolibois).Aussi, pour inciter les juges d'instruction à recourir plus fréquemment à cette mesure, la loi du 15 juin procède-t-elle à une refonte complète du statut de témoin assisté.
Comme auparavant, toute personne nommément visée par un mémoire introductif et qui n'est pas mise en examen ne peut être entendue que comme témoin assisté (art. 113-1 nouveau du CPP).
En outre, la personne nommément visée par une plainte ou mise en cause par une victime peut, dorénavant, être entendue comme témoin assisté (art. 113-2, al. 1 nouveau du CPP). Lorsqu'elle comparaît devant le juge d'instruction, elle est obligatoirement entendue selon cette procédure si elle en fait la demande.
Enfin, toute personne mise en cause par un témoin ou contre laquelle il existe des indices rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont le juge d'instruction est saisi, peut être entendue comme témoin assisté (art. 113-2, al. 2 nouveau du CPP).
Le témoin assisté bénéficie dudroit à un avocat, qui est avisé préalablement des auditions et a accès au dossier de la procédure (art. 113-3 nouveau du CPP). Il peut également demander à être confronté avec la ou les personnes qui le mettent en cause.
Le témoin assisté ne peut pas être placé sous contrôle judiciaire, ni en détention provisoire, ni faire l'objet d'une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation (art. 113-5 nouveau du CPP).
Il n'est pas tenu de prêter serment (art. 113-7 du CPP).
Lors de la première audition du témoin assisté, le juge d'instruction doit constater son identité, lui donner connaissance du réquisitoire introductif, de la plainte ou de la dénonciation, l'informer de ses droits (art. 113-4 nouveau du CPP). La personne doit indiquer son adresse permanente au juge d'instruction.
Le juge peut informer par lettre recommandée l'intéressé qu'il sera entendu comme témoin assisté. Dans ce cas, le courrier doit comporter les informations énumérées ci-dessus(art. 113-4, al. 2 nouveau du CPP).
En tête du code de procédure pénale, un article préliminaire rappelle de façon solennelle, les principes directeurs de la procédure pénale. Il réaffirme « une conception du procès pénal fondée sur la déclaration des droits de l'Homme et la convention du Conseil de l'Europe » (J. O. A. N. (C. R.) n° 26 du 25-03-99). Ces principes n'ont pas seulement une valeur pédagogique, mais ont aussi une portée juridique puisqu'ils pourront « servir de référence aux juridictions lorsqu'elles devront appliquer et interpréter les autres dispositions du code de procédure pénale », a souligné Elisabeth Guigou devant l'Assemblée nationale (J. O. A. N. (C. R.) n° 26 du 25-03-99).
La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties. Elle doit également garantir la séparation des autorités chargées de l'action publique et des autorités de jugement. Le principe selon lequel « les personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées dans les mêmes règles » est également clairement posé.
« Toute personne suspectée ou poursuivie estprésumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie », affirme le même article. Elle a droit d'être informée des charges retenues contre elle etd'être assistée d'un défenseur. Les mesures de contraintes dont elle peut faire l'objet sont prises sur décision ou sous le contrôle effectif de l'autorité judiciaire. Elles doivent êtrestrictement limitées aux nécessités de la procédure, proportionnées à la gravité de l'infraction reprochée et ne pas porter atteinte à la dignité de la personne.
Par ailleurs, l'article préliminaire pose le principe selon lequel il doit être statué sur l'accusation d'une personne dans un délai raisonnable. De plus, tout condamné a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction.
Enfin, déplorant le fait que « l'essentiel de l'instruction soit conduit à charge » (Rap. A. N. n° 1468, Lazerges), le législateur rappelle le principe selon lequel le juge d'instruction instruit à charge et à décharge (art. 81, al. 1 modifié du CPP). Et ce, pour inciter« chaque magistrat instructeur à garder à l'esprit l'objectivité qui doit être la sienne dans la conduite d'une information judiciaire » (Rap. Sén. n° 419, Jolibois).
A tout moment de la procédure, le témoin assisté peut demander à être mis en examen. Il bénéficie alors, dès sa demande, de l'ensemble des droits de la défense (art. 113-6 du CPP).
En outre, s'il apparaît, au cours de la procédure, que des indices graves ou concordants justifient la mise en examen du témoin assisté, le juge ne peut y procéder qu'après avoir informé l'intéressé de son intention et l'avoir mis en mesure de faire connaître ses observations.
En cas d'appel d'une ordonnance de non-lieu, le témoin assisté peut, par l'intermédiaire de son avocat, faire valoir ses observations devant la chambre d'accusation.
Afin de distinguer plus clairement les procédures applicables, d'une part, au témoin assisté et, d'autre part, au simple témoin, certaines dispositions du code de procédure pénale sont réécrites.
Par ailleurs, l'article 101 du même code est complété. Il dispose que le témoin cité ou convoqué par le juge, devra être avisé que, s'il ne comparaît pas ou refuse de comparaître, il pourra y être contraint par la force publique. En outre, le fait pour une personne citée comme témoin de ne pas comparaître, sans excuse ni justification, devant le juge d'instruction est passible d'une amende de 25 000 F (art. 434-15-1 nouveau du CP).
Par concordance avec les dispositions relatives à la garde à vue et à la mise en examen, le juge d'instruction doit nommer d'office un interprète en langue des signes pour assister le témoin sourd, lors de son audition (art. 102, al. 3 nouveau du CPP).
Il faut, plaidait Elisabeth Guigou devant les députés, « limiter la mise en examen aux cas où elle est vraiment nécessaire et la faire précéder d'un débat contradictoire ». A cette fin, la loi subordonne désormais cette procédure à l'existence d'indices précis. La mise en examen doit également être précédée d'un entretien entre le juge d'instruction et la personne concernée.
Le juge d'instruction ne peut prononcer de mise en examen que pour des personnes « à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer comme auteur ou comme complice à la commission des infractions dont il est saisi » (art. 80-1 modifié du CPP).
Préalablement à la mise en examen, le juge d'instruction doit avoir entendu les observations de la personne, ou lui avoir donner les moyens de le faire, en étant assistée de son avocat, soit au cours de l'interrogatoire de première comparution, soit en tant que témoin assisté (art. 80-1, al. 2 modifié du CPP). Enfin, pour encourager le recours à cette dernière procédure (voir ci-dessus), la loi prévoit que le juge ne procède à la mise en examen que s'il estime « ne pas pouvoir recourir à la procédure de témoin assisté » (art. 80-1, al. 3 modifié du CPP).
Le juge d'instruction peut informer une personne par lettre recommandée qu'elle est convoquée, dans un délai compris entre 10 jours et un mois, à une première comparution (art. 80-2 rétabli du CPP). La lettre doit indiquer la date et l'heure de la convocation. Elle donne également connaissance à la personne de chacun des faits dont le magistrat est saisi et pour lesquels la mise en examen est envisagée, et précise leur qualification juridique. La lettre signale aussi à la personne son droit de choisir un avocat ou de demander qu'il en soit désigné un d'office. Enfin, elle mentionne que la mise en examen ne pourra intervenir qu'à l'issue de la première comparution de la personne devant le juge d'instruction. Ce dernier peut également faire notifier la convocation par un officier de police judiciaire.
Par coordination, l'article 116-1 du même code, prévoyant la possibilité pour la personne mise en examen de demander à comparaître lorsque le juge tardait à la convoquer, est abrogé.
En cas d'annulation d'une mise en examen par la chambre de l'instruction, la personne est considérée comme témoin assisté (voir ci-dessus) à compter de son interrogatoire de première comparution et pour l'ensemble de ses interrogatoires ultérieurs, jusqu'à l'issue de l'information (art. 174-1 nouveau du CPP).
Lorsque la personne mise en examen est détenue, elle peut choisir directement son avocat par courrier. Alors qu'auparavant, cette désignation était effectuée par l'intermédiaire du juge d'instruction.« Soucieux de permettre à la personne détenue de faire valoir ses droits plus rapidement », le législateur a, en effet, prévu que, dans ce cas, la désignation de son avocat puisse résulter d'une simple copie au juge d'instruction de sa lettre demandant à cet avocat d'assurer sa défense. « En pratique, cette disposition permettra à l'avocat de la personne détenue de venir voir le juge d'instruction avec la lettre de son client pour obtenir le permis de visite et consulter son dossier » (Rap. A. N. n° 1468, Lazerges).
Afin d'éviter d'éventuelles contestations, le choix de l'avocat devra être expressémentconfirmé dans un délai de 15 jours au juge d'instruction par la personne mise en examen (art. 115, al. 2 nouveau du CPP).
Afin de « donner l'égalité des armes à la défense et à l'accusation », selon les termes de la ministre de la Justice, la loi du 15 juin instaure le droit pour toutes les parties de demander tous les actes utiles :perquisitions, auditions, reconstitutions, confrontations, expertises et transports sur les lieux.
L'article 82-1 du code de procédure pénale permet aux parties, au cours de l'information, de saisir le juge d'une demande écrite et motivée afin qu'il soit procédé « à tous les actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité ».
Poursuivant le mouvement amorcé avec la loi du 4 janvier 1993 pour renforcer le contradictoire pendant l'instruction, le législateur place les parties « sur un pied d'égalité avec le procureur de la République ». « Les parties pourront désormais demander l'audition d'une autre personne mise en examen, la mise en examen d'une personne ou son placement sous écoute téléphonique, sans pour autant alourdir la procédure d'instruction puisque le juge pourra facilement refuser les demandes qu'il n'estime pas fondées » (Rap. A. N. n° 1468, Lazerges). La demande doit porter sur des actes déterminés et quand elle concerne une audition, préciser l'identité de la personne dont l'audition est demandée.
Lorsque la demande porte sur un transport sur les lieux ou sur l'audition d'un témoin, la personne mise en examen peut demander à être assistée de son avocat(art. 82-2 nouveau du CPP). « Si un avocat peut être présent lors de l'audition d'un témoin clé au cours de l'instruction, il pourra peut-être lui poser des questions propres à démonter que l'accusation est infondée », expliquait Elisabeth Guigou lors des débats parlementaires (J. O. A. N. (C. R.) n° 25 du 24-03-99).
Le législateur a modifié la rédaction de l'article 120 du code de procédure pénale, afin depermettre aux parties d'intervenir de manière plus active dans les interrogatoires et les confrontations. Ainsi, le juge d'instruction conserve la direction des interrogatoires, confrontations et auditions. Mais, désormais, « le procureur de la République et les avocats des parties peuvent poser des questions ou présenter de brèves observations ».
Le juge détermine l'ordre des questions et peut y mettre un terme lorsqu'il s'estime suffisamment informé. En outre, il peut s'opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l'information ou à la dignité de la personne.
Les droits des parties en ce qui concerne les expertises ordonnées au cours de l'instruction sont renforcés. Désormais, lorsque le ministère public ou une partie demandent une expertise, ils peuvent préciser les questions qu'ils voudraient voir poser à l'expert(art. 156, al. 1 modifié du CPP).
En outre, les avocats des parties peuvent obtenir une copie intégrale du rapport d'expertise (art. 167, al. 1 modifié du CPP).
(1) Voir ASH n° 2032 du 18-07-97.
(2) Voir ASH n° 2174 du 7-07-00.
(3) Voir ASH n° 2155 du 25-02-00.