« Entre 1960 et 2010, le nombre de personnes âgées de 65 ans et plus dans les 15 pays de l'Union européenne aura plus que doublé, passant de 34 à 69 millions. » Et la proportion des plus de 80 ans, de 1,6 % de la population en 1960, a atteint 3,7 % en 1997 et devrait progresser jusqu'à 5,6 %en 2010, selon une étude des services statistiques du ministère de l'Emploi et de la Solidarité (1). La France se situe parmi les pays les plus « vieux », avec la Suède, l'Italie, le Royaume-Uni, le Danemark et l'Allemagne.
Quelles sont les politiques de prise en charge de ce nombre croissant de personnes dépendantes de soins médicaux et d'assistance à la vie quotidienne ? Les auteurs distinguent trois grands groupes de pays. Les « beveridgiens » - Danemark, Suède, Finlande, Royaume-Uni, Irlande - ont instauré un niveau de protection sociale et des services de soins à domicile très importants, largement pris en charge par la collectivité (les Anglo-Saxons étant toutefois moins « généreux » que les Nordiques). A côté, les « bismarckiens » - Allemagne, Autriche, Luxembourg - ont mis en place une « assurance dépendance » sous la forme d'une nouvelle branche de l'assurance sociale, réservée aux personnes ayant le plus besoin d'assistance pour les actes essentiels de la vie. En Allemagne, « le vieillissement n'est pas appréhendé comme une cause de dépendance », et les prestations ne varient pas selon les revenus, mais selon le besoin d'aide, précisent les auteurs. Enfin, les pays d´Europe du Sud privilégient une logique d'aide sociale, en dispensant des aides aux personnes dont les ressources sont trop faibles pour faire face à des besoins liés au handicap ou à la vieillesse.
L'aide familiale menacée
Quoi qu'il en soit, « dans la majorité des pays, la plus grande partie des soins reste assurée dans le cadre familial », souligne l'étude. Ainsi, en France, « 80 % des personnes lourdement dépendantes reçoivent l'aide de leurs proches, dont 50 % de manière exclusive ». Mais la part des personnes âgées vivant avec leurs enfants varie beaucoup selon qu'on se situe au nord ou au sud de l'Europe : elles ne sont que 2 % dans ce cas au Danemark, 12 % au Royaume-Uni, 18 % en France, 42 % au Portugal.
Faisant des projections dans l'avenir, l'étude soulève une « diminution potentielle des capacités d'aide familiale » préoccupante : en clair, le rapport entre le nombre de femmes de 45 à 69 ans, qui sont les plus aidantes, et celui des personnes âgées, diminue. De plus, ces femmes d'âge mûr sont de plus en plus actives. « Il paraît donc peu probable que l'aide informelle puisse, notamment dans les pays du sud, jouer spontanément un rôle aussi important » qu'aujourd'hui, concluent les auteurs. C'est dans cette perspective que l'Allemagne, la Suède, la Finlande ou le Royaume-Uni développent depuis quelques années des prestations aux personnes s'occupant des plus de 65 ans (rémunération, cotisation à leur propre retraite, par exemple).
Dans pratiquement tous les pays, « l'expansion des placements en institutions a touché à sa fin dans les années 80 », excepté pour les personnes de plus de 80 ans, relève enfin l'enquête. Les gouvernements européens préfèrent désormais développer le maintien à domicile et les nouveaux services de proximité.
(1) « La prise en charge de la dépendance des personnes âgées : une comparaison internationale » - Etudes et résultats n° 74 - Juillet 2000 - DREES.