Quels sont vos principaux griefs à l'égard des Cotorep ?
- Les Cotorep ont pour mission d'orienter et de reclasser les personnes handicapées. Auparavant, elles doivent évaluer leur taux d'invalidité. Or notre mouvement émet des réserves sur leur possibilité de mener à bien cette évaluation en matière de surdité. La plupart des médecins ne connaissent pas ou connaissent mal ce handicap, et ne sont pas capables de juger si la personne est en mesure de se débrouiller dans un milieu professionnel. Même si l'on ne parle pas ou si l'on s'exprime difficilement, on peut s'adapter grâce à ses aptitudes physiques et intellectuelles. Et pourtant, les Cotorep ont tendance à raisonner à l'égard des sourds de la même manière qu'à l'égard des personnes handicapées mentales. On les envoie dans des centres d'aide par le travail, des établissements spécialisés, alors qu'ils pourraient être intégrés en milieu de travail ordinaire. C'est moins vrai dans les zones urbaines, où les sourds sont plus nombreux, plus organisés. Mais dans les zones rurales, la situation est parfois effrayante. Tout cela provient d'un manque d'information et de formation des personnels. D'autres indices révèlent cette méconnaissance de la surdité. Il arrive que les Cotorep demandent un numéro de téléphone pour joindre la personne. C'est absurde ! Parfois même, leurs personnels ignorent la loi : certains pensent encore que la gratuité de la vignette automobile ne s'applique pas aux sourds, alors que depuis une bonne dizaine d'années, toutes les personnes invalides à plus de 80 % y ont droit.
Le gouvernement vient d'annoncer 29 millions de francs supplémentaires pour ces commissions (3). Qu'en pensez-vous ?
- On parle de renforcer les moyens administratifs et médicaux. C'est bien. Mais nous sommes circonspects. Il y a toujours eu beaucoup de promesses autour des Cotorep et peu de progrès concrets. Par exemple, on crée des postes de médecins coordonnateurs. Quelle sera leur fonction exacte ? Cela signifiera-t-il une amélioration sensible pour les personnes handicapées ? Parmi les autres mesures, on annonce un million de francs pour l'accueil des personnes sourdes dans les Cotorep. Enfin ! Mais là encore, que met-on derrière les mots ? Qui va réaliser cet accueil, des médecins qui utilisent la langue des signes ou des interprètes ?Nous considérons qu'en matière de santé, la confidentialité est de règle entre le praticien et le patient. Il faut qu'il y ait des médecins qui connaissent quelques bases de la langue des signes pour établir une certaine convivialité avec les déficients auditifs.
Que souhaitez-vous pour améliorer le fonctionnement des Cotorep ?
- Avant tout des personnels administratifs et médicaux formés, accoutumés au contact avec les sourds. Nous, associations, sommes prêtes à organiser des séances d'information, afin d'expliquer le quotidien de ces publics. C'est notre rôle. Les Cotorep doivent arrêter de fonctionner en circuit fermé, et les techniciens cesser de croire qu'ils ont la science infuse. C'est ainsi que l'on comblera le manque de communication entre ces commissions et les sourds. Pour le moment, c'est comme s'il y avait un mur de verre entre ces deux mondes.
Propos recueillis pas Céline Gargoly
(1) Voir ce numéro. Le dernier rapport en date sur les Cotorep émanait des inspections générales des affaires sociales et des finances - Voir ASH n° 2103 du 22-01-99.
(2) Mouvement des sourds de France : 40, avenue Gabriel-Péri - 93400 Saint-Ouen - Tél. 01 40 12 57 97.
(3) Voir ASH n° 2173 du 30-06-00.