Quelles sont vos préoccupations ?
- Il manque toujours des réponses adaptées aux besoins des personnes handicapées mentales. Certes, le programme pluriannuel de création de places en établissements spécialisés a le mérite d'exister. Toutefois, même s'il a été enrichi par les annonces du Premier ministre en janvier dernier (2), il reste insuffisant. Il ne répond qu'à la moitié des besoins recensés. Par exemple, beaucoup d'enfants handicapés mentaux ne peuvent accéder à l'école, faute d'un accompagnement adapté. Ou encore, dans certains départements, les listes d'attente sont telles à l'entrée des centres d'aide par le travail que des jeunes, sortis à 20 ans d'instituts médico- éducatifs, ne peuvent y être admis que vers 26-27 ans. Les solutions en matière d'hébergement sont inégales localement. Cet état de fait renvoie d'ailleurs au principe d'équité entre les différents territoires. Sur ce point, nous serons très vigilants sur le rôle d'impulsion et de garant de la justice sociale que doit jouer l'Etat : la qualité d'accueil et la dignité d'une personne ne peuvent pas dépendre du lieu géographique où elle vit !
Depuis longtemps les associations du secteur ont alerté les pouvoirs publics sur le problème des personnes handicapées vieillissantes. Que comptez-vous faire sur ce dossier ?
- Il faut absolument sensibiliser nos élus sur le fait que la personne handicapée qui vieillit reste une personne handicapée. Nous attendons une réponse rapide sur ce dossier brûlant. Nous demandons notamment que l'on réforme l'aide sociale en intégrant à la fois les principes généraux communs aux personnes ayant atteint 60 ans et en prenant en compte les spécificités liées au handicap. Il faut permettre à la personne handicapée âgée soit de demeurer dans son lieu de vie - domicile ou foyer -, soit d'intégrer des lieux d'accueil ordinaire en ayant les accompagnements nécessaires, soit encore de bénéficier d'un accueil spécialisé adapté.
Beaucoup s'inquiètent du développement de la médecine prédictive et des tests génétiques. Quelle est votre position sur ce sujet ?
- Justement, l'une de nos priorités sera l'éthique. L'Unapei doit se positionner clairement sur les questions, porteuses d'espérance, relevant des techniques préventives et des nouvelles thérapies, mais encore entourées de nombreuses inconnues. Car, dans tous les cas, le pouvoir médical ne doit pas faire disparaître la liberté individuelle et la possibilité de choix de chacun. Par exemple, les tests de dépistage effectués en cours de grossesse ne doivent pas, s'ils révèlent une anomalie de l'enfant à naître, ôter aux parents le choix de le garder ou non. Or la pression médicale, au nom d'une conception du handicap « incurable », empêche parfois les familles de décider par elles- mêmes. Il ne s'agit pas d'être contre l'interruption volontaire de grossesse, mais d'affirmer qu'à partir du diagnostic médical, la décision prise par les parents est toujours la bonne.
Deux tiers des établissements adhérant à l'Unapei ont signé un accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail. Quel bilan dressez-vous ?
- Nous sommes très inquiets, notamment dans les établissements fonctionnant avec internat permanent, comme les maisons d'accueil spécialisées et les foyers. Il a fallu négocier chaque fois des accords respectant l'équilibre financier. Et leur mise en œuvre pose d'énormes problèmes : rares sont les associations qui parviennent à maintenir la qualité d'accompagnement des personnes accueillies. Et plus les structures sont petites, plus la situation est critique. Le maintien de la qualité exige une aide supplémentaire de l'Etat. Et j'ai bien l'intention de rencontrer prochainement madame Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, pour lui faire part de nos grandes craintes sur le sujet.
Propos recueillis par Isabelle Sarazin
(1) A l'occasion de son congrès organisé du 2 au 4 juin à Paris- Unapei : 15, rue Coysevox - 75876 Paris cedex 18 - Tél. 01 44 85 50 50.
(2) Voir ASH n° 2151 du 28-01-00.