En vertu du principe constitutionnel du droit à une vie familiale normale, les étrangers établis en France bénéficient du droit au regroupement familial. Ils peuvent se faire rejoindre, sous certaines conditions, par leur conjoint et leurs enfants mineurs. Le demandeur doitrésider régulièrement en France,justifier d'un niveau de ressources et d'un logement adapté pour accueillir sa famille. De leur côté, le conjoint et les enfants du requérant doivent également répondre à certains critères, notamment, vivre à l'étranger au moment de la demande. La décision est prise par le préfet, après une enquête effectuée par les services de l'Office des migrations internationales (OMI).
S'inspirant du rapport de Patrick Weil (1), la loi du 11 mai 1998relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France a assoupli les conditions d'accès à l'exercice de ce droit(2). Elle autorise le regroupement familial desenfants nés d'une première union et améliore les conditions d'appréciation des ressources et de logement de l'étranger demandeur. En outre, le principe de l'accès à une activité professionnelle pour les membres de la famille bénéficiaires de cette mesure est affirmé.
Près de 2 ans après le vote de la loi « Chevènement », le dispositif législatif et réglementaire est désormais bouclé. Le décret du 6 juillet dernier précise les modalités de mise en œuvre de ce droit. Un arrêté du même jour fixe les conditions du contrôle médical effectué par les services de l'OMI. Enfin, une circulaire du 1er mars, commune au ministère de l'Emploi et de la Solidarité et à celui de l'Intérieur, éclaire l'ensemble de ces textes. Elle demande, en particulier, aux services de l'Etat d'examiner les dossiers « selon la lettre de la loi, certes, mais aussi conformément à son esprit d'ouverture ».
Pour prétendre au regroupement familial, le demandeur doit résider régulièrement en France, justifier d'un niveau de ressources et d'un logement adapté pour accueillir sa famille.
L'étranger qui demande à être rejoint par sa famille doit posséder un titre de séjour etrésider régulièrement en Francedepuis au moins un an.
Le demandeur doit être titulaire de l'un des titres de séjour suivants :
• carte de séjour temporaireou, pour les Algériens, certificat de résidence, d'une validité de un an ;
• carte de résident ou, pour les Algériens, certificat de résidence, d'une validité de 10 ans ;
• récépissé de demande de renouvellement de l'un de ces titres.
La loi du 11 mai 1998 a ramené la durée de séjour régulier en France à un an (contre 2 ans antérieurement). Selon le décret du 6 juillet 1999, la preuve de la régularité du séjour peut être apportée par la remise de l'un des titres de séjour énumérés ci-dessus ou par la production de l'un des documents suivants :
• carte de séjour temporaire d'une durée de validité inférieure à un an ;
• autorisation provisoire de séjour ;
• récépissé de demande de titre de séjour ou de demande de renouvellement de titre de séjour ;
• récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié ou d'une demande d'admission au bénéfice de l'asile.
Le requérant doit, selon la loi, justifier de « ressources stables et suffisantes » pour subvenir aux besoins de sa famille.
Tous les revenus personnels alimentant de manière stable le budget de la famille, y compris les revenus de remplacement (indemnités journalières, Assedic...), sont retenus.
Les prestations familiales et l'aide personnalisée au logement sont, en revanche,exclues. En effet, explique la circulaire interministérielle du 1er mars, « il s'agit de prendre en compte les ressources effectivement disponibles ». Or, l'aide personnalisée au logement, versée directement à l'organisme bailleur, ne peut pas être considérée comme telle.
• Loi n° 98-349 du 11 mai 1998 modifiant les articles 29, 30 et 30 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, J.O. du 12-05-98 (voir ASH n° 2071 du 15-05-98).
• Décret n° 99-566 du 6 juillet 1999, J.O. du 8-07-99 (voir ASH n° 2128 du 16-07-99).
• Arrêté du 6 juillet 1999, J.O. du 11-07-99 (voir ASH n° 2128 du 16-07-99).
• Arrêté du 14 décembre 1999, J.O. du 28-12-99.
• Circulaire DPM/DM 2-3/2000/114 NOR/INT/D/00/00048/C du 1er mars 2000, à paraître au B.O.M.E.S. et au B.O.M.I. (voir ASH n° 2158 du 17-03-00).
Par ailleurs, certaines personnes peuvent justifier de ressources non personnelles, procurées par des tierces personnes (une aide financière versée par la famille, par exemple). Même si elles sont suffisantes, elles ne sont pas jugées stables par l'administration. Par contre, les revenus tirés, totalement ou partiellement, du versement d'une pension alimentaire, en vertu d'une décision de justice à la suite d'un divorce, peuvent être considérés comme stables, en fonction de la durée prévisible de leur versement.
Depuis l'entrée en vigueur de la loi, ce sont les ressources du couple et pas seulement celles du demandeur qui sont retenues. Toutefois, précise l'administration, les revenus du conjoint salarié à l'étranger ne sont pas pris en compte (3).
Les ressources sont appréciées par référence à la moyenne du SMIC sur une durée de 12 mois (décret du 6 juillet 1999). Lorsque cette moyenne n'est pas atteinte, une décision favorable peut, quand même, être prise, en tenant compte de l'évolution de la situation de l'intéressé au regard de la stabilité de son emploi et de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande.
Il ne s'agit pas, souligne la circulaire du 1er mars, « d'exiger un SMIC mois par mois ». Aussi, « dès lors que la moyenne des ressources est égale ou supérieure à la moyenne du SMIC, un refus ne peut être opposé au demandeur pour insuffisance de ressources ». A titre d'exemple, une interruption d'emploi, liée ou non à une période de chômage, ne signifie pas nécessairement l'instabilité des ressources. Ainsi, la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée, intervenue peu avant le dépôt de la demande, devra être prise en considération.
De plus, l'administration rappelle que « la loi ne permet pas d'opposer un refus fondé sur le coût du logement excessif par rapport aux ressources déclarées ». D'une manière générale, l'introduction de tout ratio « dépenses/ressources » est irrégulière et susceptible d'être censurée au contentieux.
L'appréciation des ressources doit être réalisée au vu du contrat de travail, quelle qu'en soit la forme juridique : durée indéterminée, durée déterminée (CDD), contrat d'entreprise de travail temporaire...
En règle générale, les CDD qui démontrent la régularité de l'emploi, ainsi que les contrats d'intérim ou de travail temporaire, attestant de ressources suffisantes, doivent conduire les services de l'OMI à conclure à une stabilité des ressources. Par conséquent, des changements d'employeurs ne sauraient, selon l'administration, constituer un motif de refus fondé sur l'instabilité des ressources.
En raison de leur situation particulière, ces 2 catégories d'étrangers peuvent rencontrer des difficultés à prouver la stabilité de leurs ressources. La circulaire du 1er mars invite les services de l'OMI à « informer le demandeur que son conjoint peut toujours le rejoindre, par les procédures de droit commun, en obtenant une carte de séjour visiteur ».
Les étrangers autorisés temporairement à exercer une activité professionnelle salariée en France ne présentent pas, selon la circulaire, de garanties de stabilité, même si leurs ressources sont suffisantes. C'est le cas des travailleurs étrangers séjournant en France sous couvert d'un contrat de travailleur saisonnier, des titulaires d'autorisations provisoires de travail et des stagiaires en formation. Les demandes émanant de ces personnes devront être directement transmises aux services du préfet .
Saisi d'un recours contre le la loi du 11 mai 1998, le Conseil constitutionnel (4) a jugé que les étudiants ne peuvent pas, par principe, être écartés du droit au regroupement familial. Bien que la circulaire du 1er mars reconnaisse que leurs ressources peuvent être suffisantes au regard du critère du SMIC, elle estime, en revanche, que leurstabilité n'est pas garantie. L'administration insiste, toutefois, sur l'obligation d'instruire les demandes dans les conditions normales de la procédure.
Depuis la loi du 11 mai 1998, le demandeur doit disposerà la date d'arrivée de sa famille d'un « logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France ». L'étranger n'est donc plus obligé, comme auparavant, de justifier, au moment où il dépose son dossier, qu'il est déjà en possession de l'habitation dans laquelle il se propose d'accueillir sa famille.
Les services de l'Office des migrations internationales sont chargés de vérifier si les conditions desalubrité, de confort, d'habitabilité et d'occupation fixées par la réglementation sont remplies. Ils doivent contrôler :
• la superficie habitable globale. Elle doit être au moins égale à 16 m2 pour un ménage sans enfants ou 2 personnes, augmentée de 9 m2 par personne (jusqu'à 8 personnes) et de 5 m2 par personne supplémentaire, au-delà de 8 personnes ;
• l'hygiène, le confort et l'habitabilité du logement dans lequel l'étranger veut résider avec sa famille. Ces critères doivent permettre, d'après la circulaire, « une appréciation d'ensemble des capacités que peut offrir un logement pour accueillir une famille de manière décente ».
L'administration insiste sur le fait que les services ne doivent pas accepter « même à titre provisoire », des conditions d'habitation gravement insuffisantes, voire dangereuses (immeubles en péril, logements insalubres ou surpeuplés).
Le décret du 6 juillet dernier fait obligation de présenter, à l'appui de la demande, les originaux des documents relatifs au logement de la famille, tels que : titre de propriété, bail de location, promesse de vente, ou tout autre document de nature à établir que l'étranger disposera d'un logement à la date qu'il précise.
Le demandeur peut être propriétaire ou locataire de son logement. Par ailleurs, lasous-location et la mise à disposition à titre gratuit, y compris l'hébergement par des parents,ne doivent pas être exclues a priori. Dans ce cas, souligne la circulaire interministérielle, l'intéressé devra attester la réalité et la stabilité de la disposition de ces locaux.
Lorsque le demandeur ne dispose pas encore du logement au moment de la demande, la vérification est opérée au vu des documents, établis et signés par le propriétaire ou le vendeur et le demandeur, mentionnant la date de disponibilité, ainsi que la superficie et l'ensemble des caractéristiques permettant d'apprécier le confort et l'habitabilité du logement.
Le requérant devra également être en mesure d'indiquer la date de mise à disposition de son logement. Elle ne saurait « être postérieure à celle prévue pour l'arrivée de la famille », souligne la circulaire du 1er mars.
Le conjoint et les enfants mineurs peuvent bénéficier du regroupement familial, sous réserve que leur présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, et qu'ils résident à l'étranger, lors du dépôt de la demande.
En application de la loi du 11 mai 1998, un étrangerpolygame vivant en France avec un conjoint ne peut pas se voir accorder le bénéfice du regroupement familial pour un autre conjoint.
Aussi, lorsque l'étranger est ressortissant d'un Etat dont la loi autorise la polygamie, il doit souscrire unedéclaration sur l'honneur que le regroupement familial ne créera pas une situation de polygamie sur le territoire français. Par ailleurs, la circulaire du 1er mars demande aux préfets de « vérifier que l'étranger n'a pas déjà fait entrer en France un premier conjoint ». Si tel était le cas, « le demandeur devrait prouver que cette première union a pris fin antérieurement à la demande à la suite d'un décès, d'une procédure de divorce ou d'une autre forme juridique de rupture du lien matrimonial ».
Outre les enfants légitimes ou naturels du couple et ceux dont la filiation n'est établie qu'à l'égard du demandeur ou de son conjoint, le regroupement familial s'adresse aux enfants adoptés, ainsi qu'à ceux nés d'une précédente union.
Le procureur de la République du tribunal de grande instance du domicile du demandeur doit vérifier la régularité et le caractère définitif du jugement d'adoption, simple ou plénière, prononcé à l'étranger.
A cette fin, indique la circulaire du 1er mars, la délégation de l'OMI doit adresser, dès le dépôt du dossier, le document attestant l'adoption accompagné de sa traduction, au procureur de la République. Ce dernier doit faire connaître les conclusions du tribunal à l'OMI « dans le délai de 6 mois imparti au préfet pour prendre sa décision ».
Les mineurs confiés à une tierce personnerésidant en France en vertu d'une délégation d'autorité parentale, totale ou partielle, sont exclus du regroupement familial. S'agissant des enfants d'un ressortissant algérien, l'administration précise, toutefois, que « le regroupement familial est ouvert aux enfants de moins de 18 ans dont l'intéressé a juridiquement la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne ».
Le regroupement familial peut être demandé pour lesenfants mineurs du demandeur ou de son conjoint, dont l'autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux.
La loi du 11 mai 1998 en a étendu le bénéfice aux enfants nés d'un précédent mariage ou d'une précédente union. Dans ce cas, la garde doit avoir été confiée au parent demandeur, au titre de l'autorité parentale, en vertu d'une décision de justice. En outre, l'autre parent doit avoir consenti à la venue de l'enfant en France.
L'administration invite les préfets à « exiger tout document probant, notamment les actes de naissance comportant l'indication de la filiation ». Ils doivent, notamment, prêter une attention particulière aux jugements supplétifs ou de reconnaissance tardive.
La demande peut être faite par l'un des deux conjoints, pour ses propres enfants ou pour ceux de son conjoint. Une telle situation, note la circulaire du 1er mars, « peut également se présenter dans le cas d'un mariage entre un Français et un étranger :le conjoint étranger peut alors solliciter le regroupement familial ».
Pour des motifs tenant à l'intérêt des enfants, la loi du 11 mai 1998 autorise un regroupement familial partiel. La demande doit être accompagnée de la liste des membres de la famille pour lesquels le regroupement est sollicité.
Le décret du 6 juillet 1999 précise que la motivation de la demande peut se fonder, notamment, sur :
• la scolarité et la santé du ou des enfants. Selon la circulaire du 1er mars, une demande motivée par une impossibilité de déplacement, une incompatibilité climatique ou un suivi médical engagé localement pourra être acceptée ;
• les conditions de logement de la famille, qui justifient, au regard de l'intérêt du ou des enfants, que le regroupement ne soit pas demandé pour l'ensemble de la famille. Sur ce point, la circulaire interministérielle du 1er mars ajoute une condition supplémentaire à savoir : l'existence de « motifs médicaux ou sociaux lourds ».
A noter : le regroupement partiel ne s'applique pas aux Algériens.
Seuls les enfants du demandeur et de son conjoint admis au titre du regroupement familial peuvent bénéficier du regroupement. Les enfants d'un autre conjoint en sontdonc exclus, sauf lorsque ce dernier est décédé ou déchu de ses droits parentaux.
En conséquence, en cas de mariage polygamique, les préfets doivent vérifier la filiation des enfants dont le regroupement est demandé.
Le bénéfice du regroupement familial ne concerne que les enfants mineurs de moins de 18 ans.
Toutefois, la limite d'âge est fixée à 21 ans pour les enfants d'un ressortissant de Chypre, de Malte ou de la Turquie, à condition qu'ils soient effectivement à la charge du demandeur. Hormis ce cas, souligne la circulaire précitée, « aucune autorisation de regroupement familial ne doit être accordée pour des enfants de plus de 18 ans ».
A noter : la condition d'âge des enfants s'apprécie au moment du dépôt de la demande.
L'OMI est chargé du contrôle médicaldes membres de la famille pour lesquels le regroupement est demandé. Les conditions dans lesquelles l'examen doit être fait sont définies par l'arrêté du 6 juillet 1999. La visite médicale doit obligatoirement être effectuée par les médecins de l'Office, ceux agréés par lui ou par les médecins agréés auprès des représentants diplomatiques français.
Selon l'administration, à l'issue d'une période transitoire, le contrôle aura lieu en France,après l'arrivée des membres de la famille (et pas à l'étranger, avant le départ vers la France).
Lorsque le résultat de l'examen médical fait apparaître que l'étranger souffre d'une affection nécessitant des soins, ce résultat est communiqué à l'intéressé et au médecin de la direction départemental des affaires sanitaires et sociales (DDASS) concernée. En tant que de besoin, ce dernier informera le médecin chargé des actions sociales dans le département ou celui du service de protection maternelle et infantile et alertera le service social chargé du suivi de la famille.
Les personnes atteintes d'une maladie inscrite au règlement sanitaire international (peste, fièvre jaune et choléra) sont exclues du regroupement familial.
Selon l'arrêté précité, les étrangers toxicomanes, souffrant detuberculose en phase évolutive ou de troubles psychiques de nature à compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, ne remplissent pas les conditions médicales requises. Ils peuvent, néanmoins, en fonction de leur situation personnelle bénéficier d'une dérogation délivrée par le directeur de la DDASS. En conséquence, ils devront faire l'objet de mesures de surveillance sanitaire et s'y soumettre.
En principe, lorsque les membres de la famille sont déjà présents sur le territoire français, le regroupement familial est exclu. Cependant, selon l'administration, la résidence à l'étranger n'exclut pas une présence temporaire en France, par exemple à l'occasion d'une visite au demandeur.
Par ailleurs, d'après le décret du 6 juillet dernier, la procédure peut être admise, dans le cas où 2 étrangers en situation régulière se sont mariés, à condition que le conjoint bénéficiaire soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité d'une durée au moins égale à un an. Dans cette hypothèse, la procédure est mise en œuvre par admission sur place.
L'autorisation d'entrer sur le territoire dans le cadre de la procédure de regroupement familial estdonnée par le préfet du département. La décision est prise aprèsvérification par l'Office des migrations internationales des conditions de ressources et de logement, et après avis motivé sur ces conditions du maire de la commune de résidence de l'étranger ou du maire de la commune où il envisage de s'établir.
Certains étrangers ne relèvent pas, ou qu'en partie, de la législation sur le regroupement familial. Il s'agit :
• des étrangers bénéficiant de conventions internationales. C'est-à-dire les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, ainsi que les membres de leur famille ;
• des membres de la famille d'un Français ;
• des familles de réfugiés et apatrides et des familles d'étrangers bénéficiaires de l'asile territorial ;
• des ressortissants algériens et tunisiens, soumis à des accords bilatéraux particuliers ;
• des conjoints du titulaire d'une carte de séjour temporaire « scientifique ».
A noter : aux termes de conventions bilatérales, les ressortissants du Togo ne sont, à l'heure actuelle, pas concernés par cette réglementation. Toutefois, indique la circulaire du 1er mars, dès publication au Journal officiel de la nouvelle convention signée entre les 2 pays en juin 1996, les Togolais relèveront du régime de droit commun du regroupement familial.
La demande doit être déposée personnellement, dans le département de résidence prévu pour la famille, auprès de la DDASS ou, dans certains départements, de la délégation de l'OMI (5). Elle est établie sur un imprimé dont le modèle a été fixé par arrêté.
La demande doit comporter l'engagement du demandeur :
• de permettre aux agents de l'OMI l'entrée dans le logement prévu pour accueillir la famille, afin d'en vérifier les conditions. Si ce dernier n'est pas disponible, le requérant doit permettre de procéder à une vérification sur pièces ;
• de verser à l'OMI la redevance forfaitaire (6) ;
• de participer, ainsi que sa famille, aux réunions d'information et aux entretiens d'accueil organisés par l'OMI et les services sociaux spécialisés pour faciliter l'installation de la famille (7).
La demande de regroupement familial doit comporter la liste de tous les membres de la famille.
A l'appui de sa demande, le ressortissant étranger doit présenter les originaux :
• des pièces justificatives de l'état civil des membres de sa famille (l'acte de mariage et les actes de naissance des enfants du couple comportant l'établissement du lien de filiation) ;
• de son titre de séjour ou du récépissé de demande de renouvellement ;
• des documents relatifs au logement prévu pour l'accueil de la famille.
En outre, il devra produire, le cas échéant :le jugement d'adoption, s'il s'agit d'un enfant adopté ; l'acte de décès ou la décision de déchéance, si le regroupement est sollicité pour des enfants dont l'un des parents est décédé ou déchu de ses droits ; la décision de la juridiction étrangère, si la demande concerne un enfant confié au titre de l'exercice de l'autorité parentale.
Au vu du dossier complet, une attestation de dépôt est délivrée. L'autorité diplomatique ou consulaire dans la circonscription de laquelle habite la famille du demandeur est immédiatement informée du dépôt de la demande.
Dès réception de la copie de la demande, le préfet doit vérifier que l'étrangerréside bien en situation régulière en France depuis au moins un an. Le cas échéant, il doit informer l'OMI, sans délai, que cette condition n'est pas remplie ou que le demandeur a établi une fausse déclaration. Le préfet doit également s'assurer que la présence en France des membres de la famille n'est pas de nature à troubler l'ordre public.
A ce stade de la procédure, souligne la circulaire du 1er mars, il ne peut y avoir de rejetde la demande qu'en cas de dossier incomplet, de fausses déclarations ou de dossiers manifestement non remplis.
Le consulat de France à l'étranger est compétent pour vérifier les documents d'état civil qui lui sont transmis. Il doit signaler à l'OMI toutes les anomalies. Il doit également vérifier que les membres de la famille résident bien dans le pays d'origine.
Ces vérifications, insiste la circulaire interministérielle, doivent « intervenir dans les meilleurs délais », afin d'éclairer la décision du préfet, avant l'échéance du délai de 6 mois. Cependant, à titre exceptionnel, des informations recueillies tardivement pourront être transmises à l'OMI et remettre en cause une décision favorable du préfet.
La délégation régionale de l'OMI procède aux vérifications des conditions de ressources et de logement.
En cas de doute sur les ressources, l'Office peut saisir la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, d'une demande d'enquête sur l'emploi du requérant.
Pour s'assurer du respect des conditions de logement, les agents de l'OMI sont habilités à se déplacer au domicile du demandeur. Ils ne peuvent, toutefois, pénétrer dans le logement qu'après avoir recueilli le consentement écrit de l'occupant. En cas de refus de ce dernier, les conditions de logement sont réputées non remplies.
Par ailleurs, lorsque les vérifications n'ont pu être effectuées parce que le demandeur ne disposait pas encore du logement nécessaire au moment de la demande, le regroupement familial peut être autorisé si les autres conditions sont remplies. Le contrôle des caractéristiques du logement est réalisé sur pièces.
A l'issue de cette instruction, l'Office communique le dossier au maire de la commune où doit résider la famille et recueille son avis. Lequel est réputé favorable à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter de la communication du dossier. L'administration rappelle que cet avis ne lie pas le préfet, mais qu'il peut « compléter utilement celui de l'OMI ».
Le dossier est ensuite transmis par la délégation de l'OMI à la DDASS. Cette dernière émet un avis de synthèse, qui doit prendre en compte, « l'ensemble des considérations, notamment sociales, afin de guider et d'éclairer la décision du préfet ».
Au vu des propositions de la DDASS, le préfet du département doit statuer sur la demande dans le délai de 6 mois, à compter du dépôt par l'étranger du dossier complet. L'absence de décision préfectorale dans le délai fixé vaut rejet de la demande.
Lorsque la décision de refus est motivée par la non-conformité du logement ou par le caractère non probant des pièces attestant de la disponibilité du logement à l'arrivée de la famille, le demandeur, qui présente un nouveau dossier, dans les 6 mois suivant la notification du refus, ne devra fournir que les pièces justificatives du logement.
Le préfet doit informer le maire, l'OMI et l'autorité diplomatique ou consulaire de la circonscription dans laquelle habite la famille de sa décision et de la date à laquelle elle a été notifiée au demandeur.
En application du décret du 6 juillet 1999, la famille dispose d'un délai de 6 mois maximum à compter de la décision favorable du préfet,pour demander son visa. L'entrée en Francedoit intervenir dans les 3 mois qui suivent sa délivrance. Toutefois, précise la circulaire du 1er mars, « en cas de force majeure, lorsque l'entrée n'a pu intervenir dans ce délai, le consul a la possibilité de délivrer un nouveau visa après accord du préfet pris sur requête motivée du demandeur ».
L'étranger à qui est notifiée une décision de refus peut former un recours gracieux devant le préfet qui a pris la décision et/ou un recours hiérarchique devant le ministre chargé de l'intégration ou, encore, un recours contentieux devant le tribunal administratif.
Le bénéfice du regroupement familial ouvre droit à l'attribution d'un titre de séjour de même nature que celui possédé par la personne rejointe. Depuis la loi du 11 mai 1998, le droit au regroupement ne peut pas, sauf cas particulier, être remis en cause à l'arrivée de la famille en France.
Les membres de la famille, entrés régulièrement sur le territoire français au titre du regroupement familial, reçoivent, de plein droit, un titre de séjour de même nature que celui détenu par la personne qu'ils sont venus rejoindre, c'est-à-dire la carte de séjour temporaire de un an ou la carte de résident.
Ce titre confère à son titulaire le droit d'exercer une activité professionnelle. Celui-ci peut, par conséquent, accéder à des stages de formation professionnelle rémunérés et aux services de l'ANPE pour rechercher un emploi.
La loi du 11 mai 1998 a supprimé la possibilité de remise en cause du regroupement familial à l'arrivée de la famille en France. Mais ce titre de séjour peut être retiré en cas de rupture de la vie commune ou de situation de polygamie.
Dans ce cas, le titre de séjour remis au conjoint peut,pendant l'année suivant sa délivrance, faire l'objet d'un refus de renouvellement, s'il s'agit d'une carte de séjour temporaire ou d'un retrait, s'il s'agit d'une carte de résident.
Par ailleurs, souligne la circulaire du 1er mars, dans le cas où la vie commune entre le demandeur et son conjoint a été rompue juste après la décision, « l'objet même du regroupement du conjoint aura disparu ».
Selon la loi de mai 1998, si un étranger a fait entrer en France, au titre du regroupement familial, plus d'un conjoint ou des enfants autres que ceux du premier conjoint ou d'un autre conjoint décédé ou déchu de ses droits parentaux, son titre de séjour lui est retiré. Celui remis au conjoint, au titre du regroupement familial, doit l'être également.
S. C.
(1) Voir ASH n° 2033 du 22-08-97.
(2) Voir ASH n° 2071 du 15-05-98.
(3) Celui-ci, par hypothèse, ne dispose plus de revenus salariés lorsqu'il quitte son pays.
(4) Décision n° 98-399 DC du 5 mai 1998, J. O. du 12-05-98. Voir ASH n° 2071 du 15-05-98.
(5) Les demandes de regroupement familial peuvent être déposées auprès des services de l'OMI dans les départements suivants : Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne, Gironde, Ille-et-Vilaine, Meurthe-et-Moselle, Nord, Rhône, Paris, Yvelines, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Val-d'Oise, Guyane et Seine-et-Marne (arrêté du 14 décembre 1999, J. O. du 26-12-99).
(6) Un arrêté du 17 mars 1999 fixe le montant de la redevance à 1 750 F pour l'ensemble de la famille, lorsque celle-ci comprend le conjoint et les enfants de moins de 18 ans et 1 050 F pour les ressortissants étrangers bénéficiant du statut de réfugié, dont la famille comprend le conjoint et les enfants âgés de moins de 21 ans ou à charge.
(7) Voir ASH n° 2123 du 11-06-99.