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Sida et précarité

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 L'apparition d'une maladie chronique grave déclenche une rupture dans la vie de la personne, obligée d'entreprendre un travail d'acceptation et de recomposition identitaire. Si de nombreuses études ont décortiqué cette phase de reconstruction chez les malades socialement bien intégrés, aucune, jusqu'à présent, n'avait porté sur des patients confrontés à une maladie mortelle alors même qu'ils sont en grande précarité. Sans emploi, ressources ou logement. Toxicomanes, délinquants ou prostitués. Cette lacune est désormais comblée par le passionnant travail de Sophia Rosman. De 1987 à 1991, la sociologue de l'Inserm s'est immergée au sein de l'association parisienne APARTS, qui propose à des séropositifs, fragilisés socialement, un hébergement temporaire dans des « appartements thérapeutiques ». L'auteur analyse l'évolution de ce dispositif original, qui offre une prise en charge « globale » (suivi médical, aide sociale et accompagnement psychologique), en une étude sociologique très acérée. Qui présente un double intérêt. Non seulement, elle met bien en évidence la complexité des interactions entre précarité et sida (la maladie comme facteur d'aggravation de la situation ou comme occasion pour reconstruire une « insertion » ), mais elle interroge, sans complaisance, les tensions nées du projet même d'APARTS. Tensions entre une logique de volontariat associatif (s'accompagnant d'une grande proximité avec les malades) et une logique d'entreprise visant à établir l'association dans le champ sanitaire et social qui a, pour pendant, une distance accrue avec les résidents. Tension entre la prise en charge d'une maladie mortelle et celle d'une situation de précarité sociale, second axe que l'association finira par privilégier. Enfin, tensions entre l'obligation de faire « sortir » les résidents et la volonté de leur offrir un dernier lieu de vie. Car, comment tenir un objectif de réinsertion sociale, via un séjour limité dans l'appartement, avec des patients atteints d'une maladie mortelle, même si les progrès médicaux reculent l'échéance ? D'où la « souffrance » de certains travailleurs sociaux ne sachant plus comment définir leurs objectifs, ni s'il faut qualifier leur action en termes de succès ou d'échec. Sophia Rosman, elle, ne parle jamais d'échec. Au contraire. APARTS, conclut-elle, a su bâtir, malgré les ambiguïtés de son projet, un « instrument important de gestion positive du temps qui reste à vivre ». A.F. Sida et précarité. Une double vulnérabilité  - Sophia Rosman - Ed. L'Harmattan - 170 F.

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