Outre l'article 5 relatif aux heures supplémentaires, déjà présenté dans notre numéro 2157 du 10 mars, la loi Aubry II comporte un article 32 qui garantit aux salariés payés au SMIC le maintien de leur rémunération (paragraphes I à V). Ce même article aménage également la règle de proportionnalité entre la rémunération du salarié à temps partiel et celle du salarié à temps complet occupant un emploi équivalent (paragraphe VI).
Compte tenu de la fixation du salaire minimum sur une base horaire, la rémunération mensuelle des salariés payés au SMIC est directement liée à la durée du travail qu'ils effectuent. La réduction de la durée légale du travail de 39 à 35 heures aurait donc pu conduire mécaniquement à une baisse de leur rémunération. Toutefois, conformément à l'engagement du gouvernement, la loi du 19 janvier 2000 garantit le maintien du salaire au moment du passage à 35 heures par l'octroi d'un complément différentiel de salaire (CDS). Cette garantie s'applique sous réserve de dispositions conventionnelles plus favorables. Le dispositif est transitoire.
La garantie concerne les entreprises qui ont réduit leur durée du travail dans le cadre de la loi Aubry I ou le feront dans celui de la loi Aubry II. Elle joue, indépendamment de la taille de l'entreprise, à compter du 1er janvier 2000. Elle n'a pas d'effet rétroactif sur la période antérieure à cette date (1).
En revanche, le dispositif ne s'applique ni aux entreprises qui ont réduit leur durée du travail à 35 heures avant la loi du 13 juin 1998, ni aux entreprises qui ne l'ont pas encore réduite, tant que cette réduction n'est pas intervenue.
De même, les entreprises nouvelles ne sont pas tenues de verser un complément différentiel de salaire. Le législateur a considéré que les salariés qu'elles embaucheront ne subiront aucun préjudice du fait de la RTT, puisqu'elles auront été créées après la baisse de la durée légale du travail. Mais ces entreprises sont incitées à le faire par le jeu d'aides financières, à condition qu'elles fixent leur durée collective du travail à 35 heures par semaine ou 1 600 heures par an (voir un prochain dossier).
Enfin, le mécanisme de la garantie est sans objet pour les entreprises qui choisissent de maintenir purement et simplement la rémunération, le taux horaire étant donc augmenté. Par définition, les salariés sont alors rémunérés au-dessus du SMIC. Toutefois, selon la circulaire du 3 mars 2000, il convient de vérifier, « notamment en cas d'augmentation échelonnée dans le temps du taux horaire ou de calcul de la rémunération sur la base d'une durée intermédiaire (par exemple, passage de 39 à 32 heures payées 37 heures × un taux horaire revalorisé), que le montant de la garantie est respecté. Cette vérification devra tenir compte des revalorisations futures du montant de la garantie applicable » (fiche n° 21).
Dans notre numéro 2157 du 10 mars 2000, page 15 :
• La nouvelle durée légale du travail
• Les heures supplémentaires
Dans notre numéro 2158 du 17 mars 2000, page 17 :
• L'aménagement du temps de travail
• Le temps de travail des cadres
• Le compte épargne-temps
Dans ce numéro :
• Les effets de la RTT sur la rémunération...
- La garantie de rémunération des salariés au SMIC
- L'entorse au principe de proportionnalité des rémunérations
• ...et le contrat de travail
- La seule diminution du nombre d'heures ne modifie pas le contrat - Le refus d'une modification du contrat - L'exonération de la contribution Delalande
• Les dispositions sur la formation
- La nature des actions
- La mise en œuvre du coïnvestissement - Le financement du coïnvestissement - La protection du salarié
- Le sort des accords antérieurs
Dans un prochain numéro :
• Le travail à temps partiel
• Le travail intermittent
• Les aides à la réduction du temps de travail
• La validation des accords antérieurs
• Les autres mesures
Il s'agit des salariés rémunérés au SMIC ou selon un pourcentage du SMIC (apprentis, handicapés...). La circulaire du 3 mars (fiche n° 21) exclut du dispositif ceux qui sont rémunérés à l'heure et les salariés recrutés pour une durée inférieure au mois.
La garantie de rémunération s'adresse, en premier lieu, aux salariés à temps complet, en place dans l'entreprise au moment de la RTT, et dont l'horaire est réduit depuis le 15 juin 1998 (date d'entrée en vigueur de la loi Aubry I) (art. 32 I de la loi du 19 janvier 2000).
Mais en application du principe « à travail égal, salaire égal », elle bénéficie également aux salariés à temps complet recrutés après la RTT, à condition qu'ils occupent des « emplois équivalents » (voir encadré) à ceux occupés par d'autres salariés bénéficiaires de la garantie (art. 32 II de la loi du 19 janvier 2000).
Les salariés à temps partiel employés à la date de la réduction du temps de travail en dessous de 39 heures, et dont la durée du travail est réduite, bénéficient de la garantie(art. 32 I de la loi du 19 janvier 2000).
Les salariés à temps partiel dont ladurée du travail n'est pas modifiée dans le cadre de la RTT ne connaissent aucune baisse de rémunération à cette occasion. Mais, toujours en raison du principe « à travail égal, salaire égal », la garantie leur est appliquée (leur salaire est donc augmenté), s'ils occupent un « emploi équivalent, par sa nature et sa durée » à celui d'un salarié disposant du complément (art. 32 II de la loi du 19 janvier 2000). Il résulte de ces dispositions que, si aucune réduction de leur temps de travail n'est proposée aux salariés au SMIC à temps partiel d'une entreprise, aucun d'entre eux ne bénéficiera de la garantie (circulaire du 3 mars 2000, fiche n° 21).
Enfin, les salariés à temps partielnouvellement embauchés à temps partiel, bénéficient de la garantie au SMIC à la condition, également, d'occuper « un emploi équivalent, par sa nature et sa durée » à celui occupé par un salarié bénéficiant de la garantie (art. 32 II de la loi du 19 janvier 2000).
Chaque fois, la garantie est calculée à due proportion .
La loi tient compte des situations de différents types de personnels dont la rémunération est calculée en fonction du SMIC (personnes sous contrats en alternance, travailleurs handicapés) (art. 32 IV de la loi du 19 janvier 2000). Elle ne traite pas, en revanche, de la situation des salariés intérimaires et sous contrat à durée déterminée au regard de la garantie. La circulaire du 3 mars apporte cependant des précisions(fiche n° 21).
Contrats en alternance
Les apprentis ainsi que les titulaires de contrats de qualification ou d'orientation, dont la durée du travail est réduite, bénéficient de la garantie de rémunération au prorata de leur rémunération minimale déterminée en pourcentage du SMIC et dont le montant varie en fonction de leur âge.
Le mode de calcul de la rémunération des apprentis ne sera pas modifié, explique le ministère(circulaire du 3 mars, fiche n° 21). Il reste identique quelle que soit la durée du travail pratiquée en entreprise ou centre de formation.
Personnes handicapées
Le calcul de la garantie de ressources, assurée à tout handicapé exerçant une activité professionnelle et fixée par rapport au SMIC, doit intégrer le CDS lorsque sa durée de travail a été réduite.
En outre, la loi prévoit que les travailleurs handicapés employés dans les ateliers protégés ou les centres de distribution de travail à domicile bénéficient également, lorsque leur durée de travail a été réduite, de la garantie de rémunération au prorata de leur rémunération.
La circulaire du 3 mars annonce une instruction particulière. Elle précisera l'articulation entre les aides générales à la RTT et l'aide spécifique apportée par l'Etat au titre de la garantie de ressources.
Salariés intérimaires et sous contrat à durée déterminée
Un salarié temporaire ne peut percevoir une rémunération inférieure au montant de celle que percevrait dans l'entreprise, après période d'essai, un salarié embauché par contrat à durée indéterminée (CDI) de qualification équivalente et occupant le même poste de travail. En conséquence, selon le ministère, le travailleur temporaire qui remplace un salarié bénéficiaire du complément différentiel, y aura droit lui aussi, s'il est employé durant au moins un mois complet dans la même entreprise, compte tenu du caractère mensuel de cette garantie.
S'il s'agit d'un autre cas de recours que le remplacement (surcroît temporaire d'activité, emplois saisonniers...), le salarié percevra, comme un nouvel embauché, le CDS dès lors que d'autres salariés dans l'entreprise, occupant un emploi équivalent, en sont bénéficiaires. La nature du contrat de travail (CDD, CDI) « ne saurait être un élément pris en compte pour apprécier l'équivalence de l'emploi [...], compte tenu du principe d'égalité de rémunération des salariés sous CDD et CDI », avertit la circulaire du 3 mars (fiche n° 21).
S'appuyant sur la jurisprudence, la circulaire du 3 mars (fiche n° 21) précise la notion d'emploi « équivalent ».
Celle-ci est plus large que la notion de poste et un emploi équivalent n'est pas « un emploi identique, ni même similaire ». L'emploi est l'appellation courante sous laquelle sont reconnues les fonctions du salarié. Pour déterminer si un emploi peut être considéré comme équivalent, il faut « porter une appréciation globale sur le contenu concret de l'emploi, au-delà du simple intitulé ». Selon le ministère, doivent ainsi être pris en compte, notamment, « la qualification, la classification, les perspectives de carrière, le niveau hiérarchique ». Le cadre de cette comparaison est l'entreprise. Deux emplois peuvent donc être jugés équivalents même s'ils sont occupés dans des lieux ou des services différents.
Par ailleurs, les durées du travail n'ont pas à être strictement égales, mais proches. A titre d'exemple, souligne la circulaire, des durées de travail comprises entre plus et moins 10 % peuvent être considérées comme équivalentes.
Le salaire comprend, en plus de la rémunération au SMIC horaire appliqué à la nouvelle durée du travail, un complément, de telle sorte que la rémunération mensuelle antérieure soit maintenue.
Ainsi, pour un salarié à temps plein, en poste dans l'entreprise et dont l'horaire est ramené de 39 à 35 heures au 1er janvier 2000, la garantie de rémunération est de6 881, 68 F(39 h×52/12×40, 72 F),dont un complément différentiel de 705, 81 F[6 881, 68 F - (35 h×52/12×40, 72 F) ].
Un salarié embauché au SMIC dans la même entreprise à compter du 1er janvier 2000 sur un emploi équivalent doit également percevoir 6 881, 68 F.
Le maintien de la rémunération antérieure (6 881, 68 F) est garanti, que l'horaire collectif soit réduit à 38, 37, 36 ou 35 heures. Le CDS s'établit alors, selon les mêmes règles de calcul, à : 529, 36 F pour un horaire désormais fixé à 36 heures ; 352, 91 F pour 37 heures ; 176, 45 F pour 38 heures.
Si la durée du travail est réduite en deçà de 35 heures, la garantie de rémunération est calculée à due proportion de l'horaire pratiqué. Ainsi, pour un salarié à temps complet dont l'horaire est ramené de 39 à 32 heures, la garantie est de 6 291, 82 F(6 881, 68×32/35).
A noter que la garantie est assurée à hauteur de 39 heures seulement. Pour un salarié qui travaillait plus de 39 heures, le CDS ne prend pas en compte intégralement la différence entre l'ancien et le nouveau salaire. La RTT se traduira donc par une perte de salaire.
Exemple :
Un salarié au SMIC travaillait 41 heures, pour un salaire total de 7 322, 47 F (6 881, 68 F + 2 heures supplémentaires). Une fois à 35 heures, son salaire est de 6 175, 87 F (35 h×52/12×40, 72 F). La garantie est calculée sur une base de 169 heures, soit 6 881, 68 F, dont 705, 81 F de CDS (6 881, 68 F -6 175, 87 F). Au total, il perd 440, 79 F (7 322, 47 F - 6 881, 68 F).
Au-delà de ces modalités fixées par la loi, la circulaire du 3 mars (fiche n° 21) apporte une série de précisions.
En premier lieu, selon le ministère, la garantie est applicable aux salariés payés au SMIC, mais aussi à ceux qui sont payés juste au-dessus du SMIC, jusqu'au taux horaire de 45, 36 F, au 1er janvier 2000, pour une baisse de 39 à 35 heures.
Exemple :
Pour un salarié payé 43 F de l'heure et dont l'horaire est ramené de 39 à 35 heures au 1er janvier 2000, le montant du CDS sera de : 6 881, 68 F - (35 h×52/12×43 F) =360, 02 F
Par ailleurs, la garantie doit être calculée sur la base de la situation antérieure à la baisse de la durée du travail intervenant en application des lois Aubry I ou II.
Exemple :
Un salarié au SMIC est passé de 39 heures à 37 heures par une RTT antérieure à la loi du 13 juin 1998. Sa durée du travail est fixée à 35 heures à partir du 1er mars 2000.
La garantie de rémunération doit être calculée sur la base de 37 heures (et non de 39 heures) : 37 h×52/12×40, 72 F =6 528, 77 F.
En outre, lorsque l'accord prévoit une baisse par paliers de la durée du travail, après le 15 juin 1998 (date d'entrée en vigueur de la loi Aubry I), la situation de référence pour l'application de la garantie est la situation antérieure à la première baisse intervenue.
Exemple :
Un salarié au SMIC passe, par paliers, de 39 à 37 heures au 1er janvier 1999. Au 1erjanvier 2000, il est à 35 heures. La garantie doit être calculée sur la base de 39 heures et du taux horaire du SMIC alors en vigueur. Il ne peut donc percevoir moins de 6 797, 18 F (39 h×52/12×40, 22 F).
Enfin, le ministère signale que le montant de la garantie accordée à un salarié au SMIC passé à 35 heures reste inchangé en casd'heures supplémentaires. Mais les majorationsde salaire auxquelles ouvrent droit, le cas échéant, les heures effectuées de la 36e à la 39e heure incluses (2), s'ajoutent à la garantie. Ces majorations supplémentaires doivent être calculées sur le taux horaire du SMIC hors complément différentiel. Il avait en effet été expliqué au cours des débats parlementaires que le CDS ne pouvait pas être inclus dans l'assiette des heures supplémentaires « car il ne constitue pas la contrepartie directe des heures effectuées » (J. O. Sén. (C. R.) n° 79 du 5-11-99).
• Loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 et décision du Conseil constitutionnel n° 99-423 DC du 13 janvier 2000, J.O. du 20-01-00.
• Décrets n° 2000-70 (bulletin de paie), n° 2000-73 (allégement de charges sociales) et n° 2000-74 (dispositif d'appui-conseil) du 28 janvier 2000, J.O. du 29-01-00.
• Décrets n° 2000-81 (contrôle de la durée du travail), n° 2000-82 (contingent d'heures supplémentaires), n° 2000-83 (champ d'application de l'allégement de charges sociales), n° 2000-84 (aide incitative pour les entreprises de 20 salariés ou moins et les entreprises nouvelles) du 31 janvier 2000, J.O. du 1-02-00.
• Décret n° 2000-89 du 2 février 2000 (allégement de charges sociales dans les régimes spéciaux), J.O. du 3-02-00.
• Décret n° 2000-113 du 9 février 2000 (consultation des salariés), J.O. du 13-02-00.
• Décret n° 2000-140 du 21 février 2000 (pénalités), J.O. du 22-02-00.
• Décret n° 2000-147 du 23 février 2000 (suspension ou suppression de l'aide incitative prévue par la loi Aubry I), J.O. du 24-02-00.
• Décret n° 2000-150 du 23 février 2000 (suspension ou suppression de l'allégement de charges), J.O. du 26-02-00.
• Circulaire provisoire DSS, DRT, DGEFP n° 01 du 3 février 2000 (allégement de charges, complément différentiel, bulletin de paie), B.O.M.E.S. hors série n° 2000/6 bis du 13 mars 2000.
• Circulaire MES/CAB/2000 003 du 3 mars 2000, B.O.M.E.S. hors série n° 2000/6 bis du 13 mars 2000.
Pour les salariés à temps partiel y ouvrant droit, la garantie est calculée à due proportion.
Selon le ministère (circulaire du 3 mars, fiche n° 21), cette méthode de calcul pour les salariés à temps partiel dont la durée est réduite doit tenir compte de l'amplitude de la réduction qui leur est appliquée par rapport à celle applicable aux salariés à temps plein (39/35). La compensation accordée au salarié à temps partiel ne peut être plus forte que celle qui s'applique aux salariés à temps plein :
• si l'amplitude de sa RTT est inférieure au rapport 39/35, le salarié garde sa rémunération antérieure ;
• si, au contraire, celle-ci est supérieure à 39/35, sa garantie de rémunération doit être déterminée en proportion de sa nouvelle durée du travail.
Exemple :
Un salarié passe de 32 à 30 heures. 32/30 < 39/35. Il garde donc sa rémunération de 32 heures, soit 32 h×52/12×40, 72 F = 5 646, 50 F
Il passe de 32 à 28 heures 32/28 > 39/35. Sa rémunération est fixée à 28/35×6 881, 68 F =5 505, 34 F
Rappelons que les salariés à temps partiel en place dans l'entreprise et dont la durée du travail reste inchangée ont droit à la garantie dès lors qu'un salarié occupant un emploi équivalent par sa nature et sa durée en bénéficie . La circulaire du 3 mars donne l'exemple suivant :
Un salarié à 18 heures au 31 décembre 1999 reste à 18 heures au 1er janvier 2000 dans une entreprise passant de 39 à 35 heures. Si au moins une personne au SMIC, occupant un emploi de nature équivalente, passe à 18 heures dans le cadre de la RTT, celui resté à 18 heures bénéficiera de la garantie qui est accordée à ce salarié.
La loi ne définit pas l'assiette de la garantie. Mais la circulaire du 3 mars confirme les explications avancées au cours des débats : le mécanisme de la garantie s'entend indépendamment des primes qui ne sont pas intégrées actuellement dans l'assiette actuelle du SMIC horaire. Les primes exclues de l'assiette du SMIC (primes d'ancienneté, d'assiduité, prime de transport, prime de chantier...) s'ajouteront donc à la garantie. Elles ne pourront pas être comptabilisées pour atteindre son montant (fiche n° 21).
Autre information communiquée par le ministère : les éléments dont la périodicité de paiement est supérieure à celle de la paie (primes de 13e mois, de vacances, de fin d'année) ne sont pris en compte que pour le mois où ils sont versés.
Le minimum mensuel (salaire de base + complément différentiel) est revalorisé, par arrêté, au 1er juillet en fonction de :
• l'indice des prix à la consommation ;
• de la moitié de l'augmentation du pouvoir d'achat du salaire mensuel de base ouvrier (1/2 TSM).
Le SMIC horaire continuera d'augmenter selon le mécanisme prévu par le code du travail, c'est-à-dire en fonction de l'évolution des prix et de la moitié de l'augmentation du pouvoir d'achat du salaire mensuel de base ouvrier. A ce plancher légal d'augmentation, s'ajoutent éventuellement les « coups de pouce » du gouvernement. La progression du SMIC horaire sera plus rapide que celle de la garantie, rendant sans objet celle-ci à une date fixée au 1er juillet au plus tard (voir ci-dessous).
Le complément différentiel est un élément de salaire de même nature que le SMIC horaire. En tant que tel, il est soumis à cotisations sociales. Il doit figurer sur le bulletin de paie (art. 143-2 modifié du code du travail).
Le CDS n'a pas un caractère indemnitaire. Du reste, souligne le ministère de l'Emploi, le CDS garantit le maintien de la rémunération. Il ne s'agit donc pas d'une modification de la structure de la rémunération, nécessitant l'accord du salarié.
La loi est muette sur le sort du complément différentiel de salaire en cas d'absences du salarié. La circulaire du 3 mars 2000 apporte cependant la réponse(fiche n° 21). En vertu des dispositions sur la mensualisation, en cas d'absence pour congé maladie, un salarié doit percevoir au moins 90 % de la rémunération brute qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler, sauf dispositions conventionnelles plus favorables. Le CDS aurait été payé au salarié s'il avait travaillé. En conséquence, le salarié doit percevoir au moins 90 % de la rémunération brute, CDS inclus.
Le versement du complément différentiel est garanti quels que soient les changements juridiques que pourrait connaître l'entreprise (succession, vente, fusion, transformation du fond, mise en société). Il continuera d'être versé au même niveau que celui perçu à la date de la modification et sera revalorisé dans les mêmes conditions.
Le versement de salaires mensuels inférieurs à la garantie sera sanctionné par une amende pour contravention de la 5e classe (10 000 F au plus, portée à 20 000 F en cas de récidive) (art. R. 154-1 modifié du code du travail).
Le gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 31 décembre 2002, un rapport retraçant l'évolution des rémunérations des salariés bénéficiant de la garantie instituée. Il consultera au préalable la commission nationale de la négociation collective.
Ce rapport précisera les mesures envisagées, en tant que de besoin, pour rendre cette garantie sans objet au plus tard le 1er juillet 2005, compte tenu de l'évolution du salaire mensuel de base ouvrier et de la progression du salaire minimum de croissance. Au vu de ses conclusions, les mesures nécessaires seront arrêtées pour qu'à cette date, la garantie cesse de produire effet.
Les rémunérations des salariés à temps partiel doivent être proportionnelles à celles des salariés occupant à temps complet des emplois équivalents. L'article 32, paragraphe VI, de la loi du 19 janvier 2000 vient aménager ce principe. Ses dispositions sont applicables à tous les salariés, sous réserve des dispositions prévues au paragraphe II pour les salariés au SMIC (garantie au SMIC des salariés nouvellement embauchés et des salariés à temps partiel en poste dont la durée de travail est inchangée).
Ainsi, le complément destiné à assurer le maintien total ou partiel des rémunérations est expressément exclu des éléments de rémunération auxquels s'applique le principe légal de proportionnalité : en dehors des cas prévus, le salarié à temps partiel qui ne réduit pas son temps de travail ou celui qui est embauché après la RTT ne peut pas prétendre à une augmentation proportionnelle de salaire lorsque la durée du travail des salariés à temps complet aura été réduite avec complément de salaireen application d'un accord de branche étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement, sauf stipulation contraire de cet accord (3).
Cette mesure, souligne la circulaire du 3 mars (fiche n° 22), sécurise les accords qui ont prévu que le complément versé aux salariés à temps partiel ayant réduit leur durée du travail serait sans effet sur la rémunération des salariés dont la durée de travail n'est pas modifiée.
Plusieurs dispositions de la loi du 19 janvier 2000 précisent les effets de la réduction du temps de travail sur les contrats des salariés. Il est dit quela seule réduction du temps de travailrésultant d'un accord collectif ne modifie pas le contrat de travail. En revanche, si l'accord a une incidence sur d'autres éléments que la seule durée du travail (par exemple, la rémunération), les salariés peuvent s'y opposer. Leurs licenciements seront alors des licenciements individuels ne reposant pas sur un motif économique. Enfin, la loi crée un nouveau cas d'exonération de la contribution dite « Delalande ».
Selon la jurisprudence, la durée du travail mentionnée au contrat de travail est un élément du contrat qui ne peut pas être modifié sans l'accord du salarié. Mais la loi du 19 janvier 2000 vient énoncer que la « seule diminution du nombre d'heures stipulé au contrat de travail » ne constitue pas une modification du contrat de travail (art. L. 212-3 nouveau du code du travail).
Pour que la règle posée par la loi trouve à s'appliquer, la diminution du nombre d'heures doit résulter d'un accord collectif, ouvrant droit ou non au bénéfice du nouvel allégement de charges sociales. A contrario, la règle ne peut être invoquée lorsque la réduction du temps de travail est décidée unilatéralement par l'employeur. La circulaire du 3 mars confirme ce point(fiche n° 27). A défaut d'accord collectif, un salarié peut donc refuser une diminution de ses heures de travail (4).
Les rémunérations sont fixées dans l'entreprise et relèvent de la responsabilité des partenaires sociaux. Aussi, exception faite de la garantie qu'elle institue pour les salariés payés au SMIC, la loi du 19 janvier 2000 ne définit-elle pas les modalités de l'éventuelle compensation salariale. En pratique, celle-ci peut être assurée soit par une hausse du taux horaire, soit par un complément différentiel.
La circulaire du 3 mars (fiche n° 22) donne les indications suivantes :
• la mise en place d'un complément différentiel n'est pas constitutive, à elle seule, d'une modification du contrat de travail. Il peut toutefois en aller autrement si l'exclusion de ce complément de l'assiette de certaines primes conventionnelles conduit à n'assurer qu'un maintien partiel de la rémunération ;
• le complément a la nature d'un salaire, soumis à cotisations sociales. Il doit figurer sur le bulletin de paie. Le complément « ne modifie donc pas les droits à prestations sociales des salariés », insiste l'administration ;
• le complément ne constituant pas la contrepartie directe d'heures effectuées, il « peut ne pas être inclus dans l'assiette des heures supplémentaires ». Mais les partenaires sociaux peuvent, s'ils le souhaitent, retenir des dispositions plus favorables.
En outre, aucune modification du contrat ne doit résulter, par ailleurs, de l'application de l'accord collectif. Le salarié peut ainsi refuser, sans commettre une faute, une diminution de sa rémunération, un changement de son mode de rémunération ou encore, une profonde modification de ses horaires de travail (passage à un travail en équipe par exemple), explique le ministère de l'Emploi.
Puisque la seule diminution de la durée du travail constitue un simple changement des conditions de travail, les procédures relatives à la modification du contrat de travail ne s'appliquent pas.
Ainsi, l'employeur n'a pas à recueillir l'accord du salarié concerné (5). En pratique, il ne sera pas nécessaire d'établir un avenant au contrat de travail.
De même, il n'a pas à respecter la procédure propre aux modifications du contrat reposant sur un motif économique (information individuelle du salarié par lettre recommandée avec accusé de réception, délai de réponse de un mois...).
Quant au salarié, il ne peut pas s'opposer à la réduction de son temps de travail. Conformément à la jurisprudence, son refus pourra justifier un licenciement pour faute grave, privatif d'indemnités.
Selon la loi du 19 janvier 2000, le licenciement d'un ou plusieurs salariés qui refusent une modification de leur contrat en application d'un accord RTT est « un licenciement individuel ne reposant pas sur un motif économique et est soumis aux dispositions des articles L. 122-14 à L. 122-17 du code du travail » (art. 30 II de la loi du 19 janvier 2000).
Ces dispositions doivent être combinées avec l'article L. 212-3 nouveau du code du travail . L'accord collectif doit donc toucher à des éléments du contrat de travail autres que la seule durée du travail : baisse de la rémunération, changement du mode de rémunération, horaires profondément modifiés...
La rupture du contrat fondée sur le refus d'une modification liée à la réduction du temps de travail n'est pas imputable au salarié. Ce dernier pourra bénéficier des indemnités légales et conventionnelles de licenciement.
Les licenciements ne constituent pas des licenciements pour motif économique. Les obligations inhérentes à ce type de licenciement ne s'appliquent donc pas (procédure spécifique de consultation des représentants du personnel, présentation d'un plan social, proposition d'une convention de conversion, obligation de reclassement, priorité de réembauchage). Ces licenciements ne reposant ni sur un motif personnel, ni sur un motif économique, constituent, selon le ministère, deslicenciements « sui generis » (circulaire du 3 mars 2000, fiche n° 27).
En outre, quel que soit le nombre de salariés concernés, leur licenciement demeure un licenciementindividuel, soumis, par conséquent, à la seule procédure définie par les articles L. 122-14 à L. 122-17 du code du travail : convocation à un entretien préalable, assistance possible d'un conseiller du salarié, notification du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception...
Le salarié peut contester non seulement la régularité, mais aussi la légitimité du licenciement devant le juge prud'homal. Le licenciement doit en effet reposer sur une cause réelle et sérieuse. L'employeur établira donc en quoi la modification du contrat de travail était justifiée.
Un nouveau cas d'exonération de la contribution dite « Delalande » est institué. Pour mémoire, cette cotisation a été créée en 1987 pour protéger les salariés âgés de 50 ans ou plus contre le licenciement. Versé par l'employeur à l'Unedic, son montant varie en fonction de l'âge du salarié et l'effectif de l'entreprise (6).
La loi du 19 janvier 2000 prévoit que l'employeur en est exempté en cas de licenciement motivé par lerefus d'un salarié de 50 ans ou plus d'une modification de son contrat de travail consécutive à une réduction de la durée du travail organisée par accord (art. L. 321-13 modifié du code du travail). Pour les parlementaires, il aurait en effet été anormal, « dans la mesure où ce licenciement trouve son origine dans la loi et la volonté de diminuer la durée du travail,[...] que l'employeur en subisse les conséquences » (Rap. Sén. n° 30, Souvet).
La loi réserve expressément cette exonération au cas où la modification du contrat résulte d'un accord collectif. A contrario, l'employeur licenciant une personne de plus de 50 ans qui refuse une modification de son contrat consécutive à une RTT opérée unilatéralement, sera assujetti à la contribution Delalande.
L'Unedic a déjà présenté les modalités de mise en œuvre de ce nouveau cas d'exonération (7).
Une partie des heures libérées par la réduction du temps de travail peut être mise à profit par les salariés pour le développement de leurs compétences et de leurs qualifications, dès lors que l'autre partie de ces formations est prise sur le temps de travail. En effet, la loi du 19 janvier 2000 ouvre la possibilité, sur le fondement d'un accord collectif et avec l'accord du salarié, que la formation soit, pour partie, effectuée en dehors du temps de travail effectif. Elle introduit ainsi à l'article L. 932-2 du code du travail (8) un deuxième régime de coïnvestissement formation, distinct de celui déjà prévu par l'article L.932-1 du code du travail (9), qui demeure inchangé.
La loi Aubry II codifie préalablement le principe jurisprudentiel selon lequel « l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leurs emplois ». Elle affirme en conséquence que « toute action de formation suivie par le salarié dans le cadre de cette obligation constitue donc un temps de travail effectif ». Cette obligation d'adaptation, rappelle le ministère de l'Emploi (circulaire du 3 mars, fiche n° 20), peut prendre diverses formes : formation, validation des acquis, diversification de l'expérience...
Une fois ce principe posé, la loi admet l'organisation de formations en dehors du temps de travail. Elles doivent viser au « développement des compétences des salariés », ce qui exclut les actions destinées à adapter, entretenir ou actualiser les compétences requises par les activités exercées. Selon la circulaire, la finalité est « la progression professionnelle ». Les actions menées doivent s'inscrire « dans le cadre de parcours visant la qualification et doivent donner lieu autant que possible à des certifications reconnues lorsqu'elles existent, notamment au terme de ce parcours ».
Un accord de branche ou d'entreprise doit fixer les conditions dans lesquelles la formation peut être organisée en partie sur le temps de travail. Un accord national interprofessionnel (ANI) étendu doit au préalable fixer le cadre de ces négociations. Celui-ci devra être défini par un accord de branche étendu pour les entreprises ne relevant pas de l'ANI.
La circulaire du 3 mars (fiche n° 20) apporte deux précisions. D'une part, les accords doivent mentionner la part réalisée durant le temps de travail effectif, le fonctionnement du dispositif (définition des actions, procédures d'accès...), les modalités de recueil de l'accord des salariés et les conditions dans lesquelles ils peuvent demander à bénéficier de ce type de formation. D'autre part, l'absence d'ANI étendu ne fait pas obstacle à ce que des accords de branche ou d'entreprise soient conclus, sous réserve du respect de l'ensemble des nouvelles dispositions légales.
Désormais, le projet de plan de formation examiné par le comité d'entreprise devra tenir compte du résultat des négociations relatives au coïnvestissement de formation, qu'il s'agisse du nouveau dispositif ou de celui préexistant.
Les dépenses exposées pour les actions de développement des compétences des salariés sont imputables au titre du plan de formation, sur l'obligation de participer au développement de la formation professionnelle.
Elles peuvent également l'être au titre du capital de temps de formation.
La loi prévoit une série de garanties pour le salarié.
En premier lieu, les actions de formations doivent être « utilisables à l'initiative du salarié ou recevoir son accord écrit ». Et son refus de participer aux formations menées dans ces conditions « ne constitue ni une faute, ni un motif de licenciement ».
En outre, la rémunération du salarié ne doit pas être modifiée par la mise en œuvre des dispositions sur le coïnvestissement formation. Rappelons que le compte épargne-temps (10) peut être utilisé pour rémunérer les temps de formation effectués hors du temps de travail.
Enfin, pendant la durée de ces formations, le salarié bénéficie de la législation de la sécurité sociale sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Les clauses de formation comprises dans les accords de branche ou d'entreprise conclus dans le prolongement de la loi Aubry I sont validées (art. 17 de la loi du 19 janvier 2000). La période de transition de 3 ans prévue à l'origine a été censurée par le Conseil constitutionnel.
Pour autant, ces clauses ne sont pas toutes applicables de plein droit quel que soit leur contenu : elles doivent respecterles principes généraux posés par la nouvelle loi (les formations s'inscrivant dans le cadre du devoir d'adaptation incombant à l'employeur constituent du temps de travail effectif et les formations de développement des compétences, organisées pour partie hors du temps de travail, doivent être effectuées à la demande du salarié ou recueillir son accord) (art. 28 I de la loi du 19 janvier 2000).
De leur côté, les clauses qui étaient illégales à la date de leur conclusion et qui manquent toujours de base légale au regard de la loi Aubry II ne sont pas validées. Ainsi, la circulaire du 3 mars(fiche n° 26) relève que les clauses des accords ayant exclu de façon globale le temps de formation du temps de travail effectif demeurent incompatibles avec la définition légale du temps de travail effectif et le régime du plan de formation.
(1) Concrètement, pour un salarié au SMIC passé à 35 heures au 1er janvier 1999, qui n'aurait pas été rémunéré sur une base 39 heures, la garantie ne prend effet qu'au 1er janvier 2000. Il n'y a donc pas de rappel de salaire pour l'année 1999.
(2) Pour mémoire, les heures supplémentaires effectuées entre 35 et 39 heures donnent lieu, depuis le 1er février 2000, à une bonification en repos ou en argent, de 10 % en 2000 (2002 dans les entreprises de 20 salariés et moins) et 25 % à compter du 1er janvier 2001 (2003 dans les entreprises de 20 salariés et moins). Voir ASH n° 2157 du 10-03-00.
(3) A contrario, si la RTT résulte d'une décision unilatérale de l'employeur, le principe de proportionnalité devrait continuer à pouvoir être invoqué. La circulaire est cependant muette sur ce point.
(4) Il s'agit toutefois d'une hypothèse d'école. On imagine mal un salarié refuser une simple réduction du temps de travail, avec un salaire inchangé.
(5) Selon la jurisprudence, aucune modification de leur contrat ou de leurs conditions de travail, quelle qu'en soit la cause, ne peut être imposée aux salariés protégés (fonctions syndicales ou de représentation du personnel, salariés mandatés pour négocier un accord RTT). En cas de refus de la diminution de leur durée du travail, l'employeur devra donc engager la procédure spéciale de licenciement (autorisation de l'inspection du travail).
(6) Voir ASH n° 2105 du 5-02-99.
(7) Voir ASH n° 2155 du 25-02-00.
(8) L'ancien article L. 932-2 relatif au capital de temps formation devient l'article L. 932-3.
(9) Ce dernier permet au salarié de suivre une formation qualifiante en partie en dehors de son temps de travail. L'employeur doit s'engager sur les conditions dans lesquelles l'intéressé accédera, dans le délai de un an à l'issue de la formation, à de nouvelles fonctions.
(10) Voir ASH n° 2158 du 17-03-00.