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CMU : la rançon du succès, selon la députée Odette Grzegrzulka

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Moins de trois mois après l'entrée en vigueur de la loi sur la couverture maladie universelle (CMU)   (1), Odette Grzegrzulka, députée de l'Aisne  (PS), en a dressé, le 15 mars, un premier bilan d'application devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. « Le succès manifeste » de cette loi ne saurait, cependant, occulter les dysfonctionnements, notamment en matière de gestion de la protection complémentaire de santé.

Un succès mal préparé

La députée se félicite de la réussite de la campagne nationale d'information et du transfert des fichiers départementaux de l'aide médicale, qui s'est, « à de rares exceptions près, bien déroulé ». Toutefois, elle regrette que le retard pris dans l'élaboration des textes réglementaires et des guides d'information ait entraîné une formation ralentie et incomplète des agents des caisses de sécurité sociale et une organisation tardive de tous les acteurs.

Par ailleurs, elle déplore l'engorgement des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), « débordées par l'afflux des demandeurs ». Ce phénomène n'est pas terminé, estime la parlementaire, qui craint d'autres périodes de surchauffe, à l'occasion des demandes de renouvellement et des déclarations de revenus. Les difficultés liées à la gestion du panier de biens et de services vont également « représenter pour les caisses un coût non négligeable en termes de temps ».

En outre, les documents d'information destinés aux demandeurs ont été « distribués au compte-gouttes » et « le dépliant a rarement été disponible dans les caisses d'assurance maladie pour les assurés ».

L'insuffisante implication des acteurs de terrain

Les groupes de travail sur la CMU, mis en place par les préfets (2), l'ont été « tardivement et ont été peu fréquemment réunis ». Il en a résulté « une absence de dynamique locale ». De plus, le bilan montre « la faible implication des élus nationaux et locaux », ainsi que «  l'inaction, les réactions tardives et faibles des départements dans le redéploiement de leurs moyens financiers et humains consacrés hier à l'aide sociale ».

La députée de l'Aisne condamne également le désengagement de la plupart des centres communaux d'action sociale (CCAS) du dispositif. Une attitude jugée d'autant plus regrettable que ces organismes « ont une expérience irremplaçable dans l'accueil, le conseil et l'accompagnement des personnes démunies et une connaissance approfondie des populations concernées ». Elle souligne tout autant l'implication encore limitée des associations dans la mise en œuvre de la CMU, provoquée par la diffusion insuffisante des guides relais.

La mainmise des CPAM sur la couverture complémentaire « Plus de huit bénéficiaires de la couverture complémentaire CMU sur dix ont aujourd'hui choisi leur caisse d'assurance maladie comme gestionnaire », indique le bilan. Cette faible mutualisation est due à l'illisibilité de la liste des organisations complémentaires, à la méconnaissance par la population concernée des avantages d'une mutuelle et à la simplicité de la gestion directe par une caisse d'assurance maladie.

Au-delà de ces difficultés, Odette Grzegrzulka observe « des dysfonctionnements majeurs » dans les relations entre les CPAM et certaines mutuelles. Il en résulte, souligne-t-elle, que « le choix du bénéficiaire de la CMU ne peut s'exercer véritablement de manière libre et éclairée, ce qui fait dire [...] que cette liberté est factice ». Or,  rappelle-t-elle, « l'intention du législateur était bien de mettre en place une couverture complémentaire CMU, certes gratuite, mais proche du droit commun [...]. Le choix de la caisse d'assurance maladie dans cet esprit, ne devait constituer qu'une sécurité pour que le dispositif fonctionne en cas de carence des organismes complémentaires. » De plus, le rapport constate que « le partenariat entre les CPAM et les organismes complémentaires n'est pas respecté »   (3). A ce sujet, la parlementaire condamne « des comportements inquiétants de la part de CPAM tentées par la captation de cette nouvelle clientèle ». L'obligation légale faite au bénéficiaire de la CMU de conserver la mutuelle ou le contrat d'assurance qu'il avait antérieurement n'est pas suivie. Une situation qui fait craindre à la députée de l'Aisne un désengagement à venir des organismes complémentaires. Pourtant, répète-t-elle, « l'esprit de la loi était de favoriser la mutualisation des bénéficiaires de la CMU pour éviter de les sortir du droit commun, dans la logique de la recherche d'une véritable insertion de ces personnes ».

Corriger les dysfonctionnements

Face à ce constat, l'élue recommande une simplification du dossier de demande de CMU, dont elle juge la notice explicative « illisible ». De plus, contrairement à ce qui avait été annoncé, elle observe que les pièces justificatives sont « nombreuses et complexes à réunir ». Elle estime également nécessaire d'harmoniser certaines notions (foyer, ressources...) et d'apporter des précisions sur l'interprétation des textes, notamment pour les étrangers en situation irrégulière.

Par ailleurs, elle propose de soutenir les associations par une procédure d'agrément national et de prévoir des actions de communication locale ciblée destinées aux populations les plus marginalisées, qui n'ont pas pu être touchées par les campagnes générales et nationales.

Enfin, Odette Grzegrzulka suggère de confier aux centres communaux d'action sociale le soin de monter les dossiers de demande de CMU. Pour cela, elle prône la conclusion d'un protocole national liant les CCAS et la CNAM, leur confiant explicitement une « mission de pré-accueil et d'accueil des demandeurs de CMU et prévoyant une rémunération proportionnelle au nombre de dossiers transmis ».

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Notes

(1)  Voir ASH n° 2147 du 24-12-99.

(2)  Voir ASH n° 2146 du 17-12-99.

(3)  Le10 mars 1999, la CNAM, la FNMF, la FFSA et le CITP, ont conclu un accord sur la mise en œuvre de la CMU, limitant l'intervention des CPAM. Voir ASH n° 2117 du 30-04-99.

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