Faut-il sanctionner pénalement les parents défaillants vis-à-vis de leurs enfants ? En condamnant, le 8 mars, une mère de famille à six mois d'emprisonnement, dont un ferme, pour « défaut d'éducation », le tribunal correctionnel de Mulhouse repose à nouveau la question de l'usage par les magistrats de l'article 227-17 du nouveau code pénal (1). Disposition qui punit « le fait, par le père ou la mère [...] de se soustraire, sans motif légitime à ses obligations légales au point de compromettre gravement la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation de son enfant mineur ».
Ce n'est pas une bonne réponse, rétorque le Syndicat de la magistrature (2), qui se dit « hostile à l'utilisation de cet article » pour sanctionner des parents qui font échec aux mesures éducatives, décidées par le juge des enfants . « On nie le rôle de ce dernier qui a, sur le plan civil, les moyens d'agir », s'insurge Anne Crenier-Vaudano, présidente du Syndicat. L'opposition est également vive au SNPES- PJJ-FSU (3) où l'on s'inquiète, notamment, de l'augmentation, depuis plusieurs mois, de ce type de jugements au tribunal correctionnel de Bobigny. Ces décisions « mettent en cause des femmes seules avec enfants » et pénalisent ainsi une population en situation de précarité économique, dénonce Anne Leclerc, sa secrétaire nationale. Or, « lorsqu'il y a des problèmes d'éducation, les enfants peuvent être placés, ce qui constitue déjà une sanction », souligne-t-elle.
L'avis est plus nuancé au SPJJ-FEN-UNSA (4) où l'on admet qu'en « ultime recours » et « avec prudence », l'article 227-17 peut être utilisé. « Ce qui n'empêche pas qu'il y a toujours une action éducative à mener en parallèle. Car la sanction pénale n'a de sens que si elle vient recoudre ce qui a été déchiré », insiste Michel Guerlavais, son secrétaire général. « Il est important effectivement que la société ait la possibilité de sanctionner des parents qui par leurs comportements peuvent mettre en danger leurs enfants », ajoute dans le même sens Bernard Cavat, directeur de service et secrétaire général d'Education et société. Mais cela doit rester l'exception, car « les parents ont plutôt besoin d'être aidés que sanctionnés ». Et dans cet esprit, le responsable invite notamment les travailleurs sociaux à la « plus grande vigilance » pour que leurs écrits transmis aux magistrats « ne soient pas connotés de jugement moral sur les familles ».
(1) Pour plus de précisions, voir le site Internet des ASH.
(2) Syndicat de la magistrature - 6, passage Salarnié - 75011 Paris - Tél. 01 48 05 47 88.
(3) SNPES-PJJ-FSU : 54, rue de l'Arbre-Sec - 75001 Paris - Tél. 01 42 60 11 49.
(4) SPJJ-FEN-UNSA : 48, rue La Bruyère - 75009 Paris - Tél. 01 40 16 78 13.