« L'urgence n'existe pas en travail social... Pourtant, ce lundi 15 novembre 1999, les travailleurs sociaux du sud du Tarn se sont trouvés confrontés à une réelle urgence sociale : la détresse des habitants qui ont vécu, dans la nuit du 12 au 13, la crue du Thoré et les inondations. Le plan ORSEC est déclenché depuis cette nuit-là, les services publics sont mobilisés, les bénévoles à pied d'œuvre. [...] La vallée est meurtrie, endeuillée, et les dégâts sont immenses.
« Rapidement, la DDASS met en place une cellule de crise, dont la maîtrise d'œuvre est confiée à la responsable de l'unité territoriale de Mazamet (2). Les moyens manquent, les locaux sont exigus, mais la coordination fonctionne : toutes les associations sont présentes, des secouristes, des bénévoles anonymes, des travailleurs sociaux. Première mission : recenser les besoins, multiples, et les offres de biens et de services. Deuxième mission :distribuer des secours financiers, en espèces, expression de la solidarité nationale. Beaucoup d'argent et très vite... Pression des décideurs, pression des médias, remontées d'information aux ministères.
« Il faut agir, vite, gérer de l'argent, en proposer, aller au-devant des gens, devancer leur demande, rien à voir avec l'attitude professionnelle des travailleurs sociaux. L'implication est alors double : professionnelle et bénévole. La détresse est grande, elle touche sur un plan humain, mais c'est en tant que professionnels que les travailleurs sociaux sont là. Ce moment difficile [...] les a obligés à s'adapter, à adapter une pratique qui les aurait sans doute incités à prendre plus de recul. En même temps, cette période de crise et de réponse à l'urgence a permis [...] de repérer des situations plus douloureuses, des drames humains, des besoins énormes d'écoute, de soutien, d'empathie, et d'y répondre, grâce aux interventions conjointes de la cellule d'urgence médico-psychologique, des bénévoles et des professionnels.
« Si la coordination a pu fonctionner, au sein de la cellule de crise et autour sur le terrain, c'est bien le résultat d'un travail de partenariat quotidien de longue date entre travailleurs sociaux, associations et communes. Il a permis que la réponse s'organise globalement et ne soit pas parcellaire sur des territoires que chacun se serait appropriés.
« La phase suivante, après l'urgence, a porté sur la mise en place d'une coordination de l'intervention sociale. Le partenariat, à un niveau institutionnel, a permis l'utilisation d'un dossier unique de demande d'aide financière, adapté au sinistre, et l'examen des demandes lors d'une commission locale de coordination financière réunissant la DDASS, le conseil général, la CRAM, la CAF, la Croix-Rouge française et le Centre d'information sur le droit des femmes et des familles [...].
« Cette seconde période a permis aux travailleurs sociaux de retrouver leur savoir-faire professionnel : évaluer la demande, la formaliser, prendre du recul. Mais c'est sans aucun doute plus forts de leur expérience première - pourtant déroutante et porteuse de bien des malaises difficiles à gérer
- et enrichis par ce contact direct, immédiat, sans recul, avec cette détresse tellement différente de la misère et de la pauvreté, qu'ils ont poursuivi leur action et ont retrouvé leurs “marques professionnelles” [...]. »
(1) DDASS 81 : 69, avenue du Maréchal-Foch - 81013 Albi cedex 9 - Tél. 05 63 49 24 24.
(2) Circonscription d'action sanitaire et sociale du conseil général.