Le 30 juin 1975, le législateur votait deux des lois majeures dans le domaine de l'action sociale. La première est un texte d'orientation qui détermine l'ensemble des droits fondamentaux des personnes handicapées. La seconde, communément appelée « loi sociale » - corollaire de la loi hospitalière de 1971 dans le champ sanitaire -,régit les procédures de création, d'autorisation et de tarification des établissements et des services sociaux et médico-sociaux. Elle définit également les rapports entre les organismes gestionnaires de structures, les usagers et les collectivités publiques.
Au fil des années, les nombreuses modifications législatives, pas toujours coordonnées, dont elle a fait l'objet (voir encadré), ont contribué au manque de lisibilité du dispositif. Parallèlement, de nouvelles formules d'établissements ont vu le jour et se sont multipliées (lieux de vie, services d'accompagnement à la vie sociale...), sans que leur existence juridique soit reconnue par la loi. Les nombreuses critiques sur l'incapacité de la loi à s'adapter à l'évolution du contexte social, formulées tant par la Cour des comptes que l'inspection générale des affaires sociales, en 1995, ou encore les acteurs concernés, ont conduit, l'année suivante, Jacques Barrot, alors ministre des Affaires sociales, à lancer les premières pistes d'un projet de réforme (1). Celui-ci s'articulait autour des 4 axes suivants :
• mieux affirmer la place des usagers et de leurs familles ;
• mieux définir le champ d'application de la loi en précisant le statut juridique des établissements, des services et des prestations concernés ;
• mettre en œuvre uneconcertation et une coordination plus institutionnelle et plus opérationnelle ;
• promouvoir une régulation plus efficace du dispositif social et médico-social.
Sur cette base, la direction de l'action sociale (DAS) a élaboré un projet de réforme de la loi sociale, dont Pierre Gauthier avait développé les objectifs dans les ASH (2). Il s'agit, expliquait-il, en mai 1998, « de mieux couvrir le champ social pour des raisons à la fois de reconnaissance et de sécurité juridique [...], d'assurer une meilleure couverture du territoire par des équipements ou services, le plus souvent privés, dont la fonction d'intérêt général est incontestable [...] et, enfin, d'arriver à une meilleure prise en compte de l'usager ». L'avant-projet de réforme de la loi de 1975 a, depuis, fait l'objet de nombreuses concertations avec l'ensemble des acteurs concernés. La dissolution de l'Assemblée nationale et le changement de majorité qui en a résulté expliquent, pour partie, le retard pris par les pouvoirs publics pour présenter officiellement au Parlement un texte pourtant très attendu dans le secteur. Pour accompagner le travail du gouvernement, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a confié, en juin dernier, une mission sur ce sujet au député Pascal Terrasse (PS, Ardèche) (3). Celui-ci organise un colloque, le 8 février à l'Assemblée nationale, au cours duquel Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, pourrait présenter les grandes lignes de la réforme de la loi « sociale ». Cette réforme, si l'on en croit les propos tenus par le Premier ministre, le 25 janvier devant le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) (4), pourrait être, enfin, engagée avant la fin de la session parlementaire. Soit près de 4 ans après son annonce. Reste à savoir s'il s'agira d'une réforme en profondeur ou d'un nouveau toilettage de certaines dispositions.
Dans l'attente, les ASH rappellent les principales dispositions de la loi sociale relatives aux droits des usagers, aux procédures de création, de financement, de fermeture des établissements et services sociaux et présentent, sur la base du document de travail soumis aux acteurs du secteur par la direction de l'action sociale, en décembre 1998 et toujours d'actualité, les axes que la réforme pourrait prévoir.
Au sens de la loi du 30 juin 1975, sont des institutions sociales et médico- sociales tous les organismes publics ou privés qui, à titre principal et d'une manière permanente :
• mènent, avec le concours de travailleurs sociaux, d'équipes pluridisciplinaires, des actions à caractère social ou médico-social, notamment des actions d'information, deprévention, de dépistage, d'orientation, de soutien, de maintien à domicile ;
• accueillent, hébergent ou placent dans des familles des mineurs ou des adultes qui requièrent une protection particulière ;
• reçoivent des jeunes travailleurs ;
• hébergent des personnes âgées.
La loi du 29 juillet 1998 de lutte contre les exclusions a récemment élargi les missions des institutions sociales et médico-sociales à laréinsertion sociale et professionnelle et à l'insertion par l'économique (5). Elle a, par ailleurs, étendu les activités de ces organismes à la prise en compte des « situations de détresse ». Ainsi, les institutions sociales assurent également :
• avec ou sans hébergement, dans leur cadre ordinaire de vie, l'éducation spéciale, l'adaptation ou la réinsertion sociale ou professionnelle, l'aide par le travail ou l'insertion par l'activité économique, au bénéfice despersonnes handicapées ou inadaptées, ainsi que des personnes ou des familles en détresse ;
• des soins ambulatoires et des actions d'accompagnement social et deréinsertion en faveur des personnes présentant une consommation d'alcool à risque ou nocive, ou atteintes de dépendance alcoolique.
La loi de 1975 a prévu d'associer les usagers, les familles et les personnels au fonctionnement des établissements publics ou privés sociaux et médico-sociaux par la création de conseils d'établissement. En revanche, les services à caractère social ou médico- social intervenant dans le maintien à domicile ou l'action éducative ne sont pas concernés.
Rappelons que le conseil d'établissement donne son avis et peut faire des propositions sur toute question relative au fonctionnement de l'équipement.
La loi n° 75-535 du 30 juin 1975 (J. O. du 1-07-75) a, en 25 ans, fait l'objet de très nombreux aménagements législatifs. Pas toujours coordonnés, ceux-ci contribuent au manque de lisibilité du texte, déploré par les acteurs de l'action sociale.
• Articles 32 à 48 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, J. O. du 23-07-83.
• Loi n° 86-17 du 6 janvier 1986 adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière d'aide sociale et de santé, J. O. du 8-01-86.
• Article 10-I de la loi n° 86-29 du 9 janvier 1986 portant dispositions diverses relatives aux collectivités locales, J. O. du 10-01-86.
• Article 5 de la loi n° 86-972 du 19 août 1986 portant dispositions diverses relatives aux collectivités locales, J. O. du 22-08-86.
• Article 13 de la loi n° 86-1308 du 29 décembre 1986 portant adaptation du régime administratif et financier de la ville de Paris, J. O. du 30-12-86.
• Article 13 de la loi n° 89-899 du 18 décembre 1989 relative à la protection et à la promotion de la santé de la famille et de l'enfance et adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière d'aide sociale et de santé, J. O. du 19-12-89.
• Article 83 de la loi n° 85-10 du 3 janvier 1985 portant diverses dispositions d'ordre social, J. O. du 4-01-85.
• Articles 25 et 26 de la loi n° 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre social, J. O. du 26-07-85.
• Article 2 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 portant diverses dispositions d'ordre social, J. O. du 4-01-92.
• Article 33 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale, J. O. du 27-12-98 (voir ASH n° 2101 du 8-01-99) (rectifié par l'article 34 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre de financement de la sécurité sociale pour 2000, J. O. du 30-12-99).
• Article 135 de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 de finances pour 1999, J. O. du 31-12-98(voir ASH n° 2106 du 12-02-99).
• Article 48 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle, J. O. du 28-07-99 (voir ASH n° 2132 du 10-09-99).
• Loi n° 78-11 du 4-01-78 modifiant et complétant la loi de 1975, J. O. du 5-01-78.
• Articles 8 et 9 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, J. O. du 11-01-86.
• Article 1er de la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989 relative à l'accueil par des particuliers à leur domicile à titre onéreux de personnes âgées ou handicapées adultes, J. O. du 12-07-89.
• Article 35 de la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière, J. O. du 2-08-91.
• Loi n° 96-1076 du 11 décembre 1996 tendant à assurer une prise en charge adaptée de l'autisme, J. O. du 12-12-96.
• Articles 22 à 24, 26 et 29 à 31 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 instituant une prestation spécifique dépendance, J. O. du 25-01-97 (voir ASH n° 2021 du 2-05-97).
• Articles 72, 134, 139, 151 et 157 I de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, J. O. du 31-07-98 (voir, notamment, ASH n° 2084 du 11-09-98).
En application de la loi du 24 janvier 1997 sur la prestation spécifique dépendance (PSD), lesétablissements d'hébergement pour personnes âgées doivent élaborer un règlement intérieur garantissant, notamment, les droits des résidents et le respect de leur intimité. Le projet de règlement est soumis à l'avis du conseil d'établissement.
Par ailleurs, un contrat de séjour doit être établi entre l'établissement pour personnes âgées et la personne accueillie (ou son tuteur), lors de l'admission de celle-ci dans la structure.
A noter : ces obligations légales n'existent pas, actuellement, dans les autres types d'établissements ou de services soumis à la loi de 1975.
En vue d'assurer le respect du droit à une vie familiale des membres des familles accueillies dans les établissements ou services, la loi contre les exclusions oblige ces derniers à rechercher une solution évitant la séparation. Si une telle solution ne peut être trouvée, ils doivent établir, avec les personnes accueillies, un projet propre à permettre leur réunion dans les plus brefs délais, et assurer le suivi de ce projet jusqu'à ce qu'il aboutisse.
Là encore, ces garanties ne concernent que certains établissements ou services entrant dans le champ d'application de la loi, qui demeure donc très lacunaire.
• Les droits des personnes bénéficiaires et de leur entourage : ce qu'envisage la DAS...
Afin de respecter les droits de l'usager, quelle que soit la structure d'accueil, la proposition de la direction de l'action sociale vise à garantir, à chaque personne accueillie, le droit à un projet individualisé et global. Le libre choix entre maintien à domicile et accueil en établissement, le respect de sadignité et de sa vie privée, la possibilité de recourir, en cas de difficulté, aux services d'un médiateur et une information sur le respect de ses droits fondamentaux, y compris d'ordre patrimonial, seraient également prévus par la loi et étendus à toutes les structures entrant dans son champ d'application.
A cet effet, seraient rédigés et remis à chaque usager une charte de la personne accueillie et unlivret d'accueil. Cette personne serait également signataire d'un contrat de séjour passé avec le représentant de la structure d'accueil.
Par ailleurs, tout équipement aurait l'obligation d'élaborer un projet d'établissement ou de service, établi en lien avec les représentants des usagers, de leurs familles, de leurs associations représentatives et des personnels, pour une durée maximale de 5 ans, susceptible de renouvellement.
Enfin, le règlement intérieur, que chaque établissement ou service devrait obligatoirement préparer, définirait les droits, obligations et modalités d'expression des usagers.
La loi du 30 juin 1975 prévoit la mise en place d'un schéma départemental, destiné à préciser la nature des besoins sociaux et, en particulier, de ceux qui justifient la création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux adaptés. Afin de garantir la souplesse du dispositif, le législateur a prévu que la réponse aux besoins puisse également être apportée « par une autre voie » que la seule création d'établissements. Le schéma doit également mentionner les perspectives de développement ou de redéploiement de ces structures et préciser les critères d'évaluation des actions conduites, ainsi que les modalités de la collaboration et de la coordinationentre l'Etat, les collectivités publiques et les organismes concernés.
Après consultation d'une commission ad hoc, composée des représentants des institutions sanitaires et sociales, de leurs usagers, ainsi que des professionnels de santé et des travailleurs sociaux, le schéma départemental est arrêté par le président du conseil général. Toutefois, les dispositions du schéma relatives aux structures proposant des prestations fournies concurremment par l'Etat, un organisme d'assurance maladie ou d'allocations familiales et le département, doivent être arrêtées conjointement par le président du conseil général et le préfet.
La loi n'a fixé aucune règle de délai, ni aucune sanction en cas de non-élaboration du schéma. En revanche, elle prévoit, sans plus de précisions, que celui-ci doit être périodiquement révisé.
• Le dispositif de planification : ce qu'envisage la DAS...
Le document de travail de la direction de l'action sociale envisage de remplacer les actuels schémas départementaux des établissements sociaux et médico-sociaux par des schémas de l'organisation sociale et médico-sociale. Pluriannuels et réactualisés tous les 5 ans, ils auraient pour objet de prévoir et susciter les évolutions nécessaires de l'offre sociale et médico- sociale, en vue de satisfaire de manière optimale les besoins de la population.
Ils seraient, par ailleurs, articulés avec lesschémas régionaux de l'organisation sanitaireet devraient prévoir les modalités de coopération des structures médico-sociales entre elles et avec les établissements de santé.
Actuellement indicatifs, leur portée juridique serait considérablement renforcée. En effet, l'autorité administrative pourrait refuser la création d'une structure jugée incompatible avec le schéma. Et, symétriquement, un promoteur pourrait se prévaloir de celui-ci pour obtenir la création d'un équipement.
La compétence des conseils national et régionaux de l'organisation sanitaire et sociale serait, de plus, élargie. Ces comités se réuniraient au moins une fois par an pour analyser l'évolution des besoins des populations et proposer les priorités de l'action sociale et médico-sociale susceptibles de faire l'objet de programmes coordonnés entre l'Etat, les collectivités départementales et les organismes de protection sociale.
Les procédures de création, detransformation ou d'extension importante de la plupart des établissements et services sociaux et médico- sociaux sont soumises à un avis motivé du comité régional de l'organisation sanitaire et sociale (CROSS).
Il s'agit des structures suivantes, dépendant d'une institution sociale ou médico-sociale définie ci-dessus :
• établissements recevant habituellement des mineurs relevant de l'aide sociale à l'enfance et maisons d'enfants à caractère social, centres de placements familiaux et établissements maternels ;
• établissements médico-éducatifs qui accueillent en internat, en externat ou en cure ambulatoire des jeunes handicapés ou inadaptés ;
• établissements d'enseignement qui dispensent à titre principal une éducation spéciale aux jeunes handicapés ou inadaptés ;
• établissements d'éducation surveillée relevant du ministère de la Justice ;
• établissements qui assurent l'hébergement des personnes âgées ou des adultes handicapés ;
• établissements d'aide par le travail ;
• foyers de jeunes travailleurs.
La loi du 29 juillet 1998 contre les exclusions aétendu le champ de la loi de 1975 à l'ensemble du secteur de l'urgence sociale et de l'adaptation. Les structures et services, comportant ou non un hébergement, tels les SAMU sociaux ou les équipes de rue, sont désormais pris en compte. Ainsi, sont ajoutés à la liste des établissements et services dont la création est soumise à la procédure particulière de la loi de 1975 :
• les structures et services comportant ou non un hébergement assurant, avec le concours de travailleurs sociaux et d'équipes pluridisciplinaires,l'accueil, notamment dans les situations d'urgence, le soutien ou l'accompagnement social, l'adaptation à la vie active et l'insertion sociale et professionnelle des personnes ou des familles en détresse ;
• les centres offrant en cure ambulatoire des soins et des actions d'accompagnement social et de réinsertion.
En outre, les projets de création, de transformation ou d'extension importante de certains services à caractère social ou médico-social intervenant dans le maintien à domicile ou l'action éducative sont soumis à la même procédure de passage devant le CROSS.
De même, sauf dérogation prévue par la loi de juillet 1989, cette procédure d'avis préalable du CROSS s'applique aux personnes qui accueillent habituellement de manière temporaire ou permanente, à temps complet ou partiel, à leur domicile, et à titre onéreux, plus de 2 personnes âgées ou handicapéesadultes.
• L'absence de statut de certaines structures : ce qu'envisage la DAS...
Nombre de services ou d'établissements sont actuellement dépourvus de fondement juridique, ce qui expose les gestionnaires et les usagers à une certaine précarité. Pour combler cette lacune, la direction de l'action sociale envisage, dans le cadre de la réforme de la loi de 1975, de donner une base légale, par exemple aux foyers à double tarification, aux lieux de vie et aux services d'accompagnement social.
Par ailleurs, la loi clarifierait le statut des structures expérimentales, en permettant plus facilement dedéroger aux normes habituelles en ce qui concerne la mise en œuvre de techniques nouvelles de prise en charge, la nature des populations accueillies et les modalités de tarification.
Une personne publique ou privée qui a l'intention de créer, de transformer ou d'étendre de façon importante un équipement social doit, dans un premier temps, solliciter l'avis du comité régional de l'organisation sanitaire et sociale si son projet présente un intérêt régional ou départemental.
Le CROSS se prononce également sur les projets de décision tendant au retrait de l'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ou de l'autorisation de dispenser des soins aux assurés sociaux, ainsi que sur ceux relatifs à la fermeture d'établissements ou de services ouverts sans autorisation.
De plus, le CROSS est compétent pour donner un avis sur les demandes de dérogation aux normes « en vue de réalisations de type expérimental ».
De son côté, le conseil national de l'organisation sanitaire et sociale est compétent pour se prononcer sur les projets d'établissements présentant unintérêt national ou destinés à héberger des personnes atteintes de handicaps rares.
Le CROSS doit donner un avis motivé sur l'opportunité du projet, que la décision de création relève de l'Etat ou du département. Il se prononce, d'une part, en fonction des besoins quantitatifs ou qualitatifs de la population et, d'autre part, des équipements existants ou prévus. Il ne dispose pas de pouvoir décisionnel.
Son avis est un préalable à la décision, destiné à éclairer l'autorité publique habilitée à autoriser la création.
• Les modalités d'examen et d'autorisation des projets : ce qu'envisage la DAS...
Actuellement, les dossiers de création d'établissements ou de services répondant aux critères définis ci-dessus font l'objet d'un avis du comité régional de l'organisation sanitaire et social, sans que celui-ci ait une vision d'ensemble des projets de création de structures dans la région concernée. Aussi, la direction de l'action sociale envisage-t-elle, dans le cadre de la réforme de la loi de 1975, de transposer au secteur médico-social le système des « fenêtres » d'examen, en vigueur dans le secteur sanitaire. Ainsi, lesdemandes d'autorisation ou de renouvellement d'autorisation d'établissements et services de même nature seraient toutes reçues au cours de périodes fixées par voie réglementaire, afin d'êtreexaminées sans qu'il soit tenu compte de l'ordre de dépôt des dossiers.
Seuls pourraient être autorisés les projets compatibles avec les schémas d'organisation sociale et médico-sociale, satisfaisant aux normes de fonctionnement en vigueur et précisant les modalités d'évaluation des prestations rendues.
C'est, d'ailleurs, au vu des résultats d'une évaluation, que les autorisations de créer, données pour une durée de 10 ans, pourraient être renouvelées.
La décision d'autoriser la création d'un établissement diffère, selon la nature juridique, publique ou privée, de l'équipement envisagé. De plus, quelle que soit la nature de l'institution sociale ou médico- sociale gestionnaire, si les travaux n'ont pas reçu un commencement d'exécution avant l'expiration d'un délai de 3 ans à compter de la date de l'autorisation, celle-ci est réputée caduque.
La loi de 1975 subordonne la création, la transformation ou l'extension d'un établissement privé à une autorisation délivrée avant tout commencement d'exécution du projet.
Depuis la décentralisation, le président du conseil général délivre l'autorisation de création, de transformation ou d'extension :
• des établissements recevant habituellement des mineurs relevant de l'aide sociale, des maisons d'enfants à caractère social, des centres de placements familiaux et des établissements maternels ;
• des établissements qui assurent l'hébergement des personnes âgées et des adultes handicapés.
L'autorisation est délivrée conjointement par le préfet et le président du conseil général, pour les établissements et services auxquels l'autorité judiciaire confie directement et habituellement des mineurs. Il en est de même pour les foyers à double tarification accueillant des adultes handicapés.
L'autorité compétente de l'Etat, à savoir le préfet de région, délivre les autorisations concernant le projets de création, d'extension ou de transformation des autres établissements, c'est-à-dire de ceux dépendant d'un financement de l'Etat ou de l'assurance maladie (centres d'hébergement ou de réinsertion sociale, institut médico-éducatif...).
La création des établissements et services par une personne de droit public obéit à une procédure différente selon que le projet fait appel à un financement du département, de l'Etat ou d'un organisme d'assurance maladie.
Lorsque les prestations que l'établissement fournira entrent dans le domaine de compétence du département, la création de l'établissement doit recevoir l'avis, et non pas l'autorisation, du président du conseil général. Cette disposition résulte du principe de non-soumission d'une collectivité territoriale à la tutelle d'une autre collectivité.
En revanche, lorsque les prestations relèvent de la compétence de l'Etat ou d'un organisme de sécurité sociale, la création est soumise à une autorisation du préfet, dans les mêmes conditions que pour les établissements privés (voir ci-dessus).
L'autorisation est accordée si le projet répond aux besoins qualitatifs et quantitatifs de la population, tels qu'ils ont été appréciés par la collectivité publique compétente et par le CROSS.
• L'évaluation de l'activité des institutions : ce qu'envisage la DAS...
Selon le document de travail de la direction de l'action sociale sur la réforme de la loi de 1975, les structures auraient l'obligation de faire procéder à uneévaluation de leurs prestations à l'aide de références et de recommandations de bonne pratique, élaborées par voie réglementaire, avec le concours d'un Conseil national de l'action sociale et médico-sociale, et grâce aux recommandations de bonne gestion définies conjointement avec les autorités chargées de la tarification.
Par ailleurs, pour pouvoir obtenir une autorisation de créer, il serait nécessaire à tout promoteur de préciser dans le dossier CROSS les techniques d'évaluation utilisées.
Enfin, c'est au vu des résultats d'une évaluation que les autorisations administratives de fonctionner seraient, le cas échéant, renouvelées.
L'autorisation accordée par le préfet et/ou par le président du conseil général vautautorisation de fonctionner sous réserve, pour les établissements, d'un contrôle de conformité aux normes, opéré après l'achèvement des travaux et avant la mise en service.
Elle vaut aussi, sauf mention contraire, habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale et autorisation de dispenser des soins remboursables aux assurés sociaux. Rappelons que la prise en charge par la sécurité sociale ou l'aide sociale des prestations fournies par les établissements constitue le mode le plus fréquent de financement des établissements sociaux et médico-sociaux.
Selon la nature de l'établissement du service créé, l'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale est délivrée soit par le président du conseil général, soit par le préfet. L'autorisation de dispenser des soins, qui engagent les dépenses de sécurité sociale, est toujours délivrée par le préfet.
L'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale doit obligatoirement préciser :
• les catégories des bénéficiaires et la capacité d'accueil ;
• les objectifs poursuivis et les moyens mis en œuvre ;
• les modalités de transmission de l'information : la nature et la forme des documents administratifs, financiers et comptables, les renseignements statistiques.
L'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ou l'autorisation à délivrer des soins aux assurés sociaux peuvent être refusées, pour tout ou partie de la capacité prévue, lorsque les coûts de fonctionnement sont manifestement hors de proportion avec le service rendu ou avec ceux des établissements fournissant des services analogues.
En outre, la loi de finances pour 1999, celle de financement de la sécurité sociale pour 1999, puis la loi du 27 juillet 1999 sur la couverture maladie universelle (6), ont posé le principe del'opposabilité des enveloppes de dépenses,dans le secteur social et médico-social, assurées par l'Etat, l'assurance maladie et les départements, à l'instar de ce qui se pratique dans les établissements de santé depuis l'ordonnance hospitalière du 24 avril 1996.
En conséquence, l'habilitation ou l'autorisation peuvent être refusées si les coûts de fonctionnement sont susceptibles d'entraîner, pour le budget de l'Etat, pour ceux des organismes de sécurité sociale ou pour celui du département, des charges injustifiées ou excessives, compte tenu des enveloppes de crédits limitatifs.
L'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale peut être retirée pour des motifs fondés sur :
• l'évolution des besoins. Dans ce cas, l'autorité doit préalablement demander à l'établissement ou au service de modifier sa capacité en fonction de l'évolution des besoins. La demande, motivée, doit préciser le délai, supérieur à 6 mois, dans lequel l'établissement doit prendre les dispositions requises ;
• la méconnaissance d'une disposition essentielle de l'habilitation ou de la convention ;
• la disproportion entre le coût de fonctionnement et les services rendus ;
• la charge excessive qu'elle représente pour la collectivité publique ou les organismes assurant le financement.
La tarification des établissements sociaux et médico-sociaux privés est fixée de façon différente en fonction du type d'établissement concerné. Certaines structures font l'objet d'une tarification arrêtée de façon exclusive soit par l'Etat, soit par le département, d'autres sont tarifées de façon conjointe ou mixte par les deux autorités.
Sont sous compétence tarifaire de l'Etat :
• les établissements financés au titre de l'aide sociale de l'Etat, comme les centres d'aide par le travail et les centres d'hébergement et de réinsertion sociale ;
La loi du 6 janvier 1986 a soumis les conventions collectives de travail, les conventions d'entreprises ou d'établissements et les accords de retraite applicables aux salariés des établissements ou services à caractère social ou sanitaire à but non lucratif dont les dépenses de fonctionnement sont supportées par des personnes publiques ou des organismes de sécurité sociale à une procédure d'agrément préalable. Celui-ci est donné par le ministre compétent, après avis d'une commission. Une fois l'agrément donné, la convention collective devient opposable au financeur public.
*Faut-il maintenir l'opposabilité des conventions collectives ?
C'est ce que prévoit le document de travail de la direction de l'action sociale de décembre 1998. La question suscite, néanmoins, un vif débat parmi les acteurs de l'action sociale (financeurs, gestionnaires, syndicats d'employeurs et de salariés). Les uns considèrentl'opposabilité des conventions collectives incompatible avec celle des enveloppes financières. Les autresestiment que l'abrogation de l'opposabilité des conventionscréerait les conditions d'une déqualification des personnels dont pâtiraient, au final, les usagers.
• les établissements et services pour personnes handicapées financés par la sécurité sociale, tels que les maisons d'accueil spécialisées et les instituts médico-éducatifs. La tarification est effectuée par le préfet, après avis de la caisse régionale d'assurance maladie ;
• les établissements financés par le ministère de la Justice, c'est-à-dire les services de l'éducation surveillée et les services de consultation et d'orientation éducative.
Le président du conseil général est seul compétent pour arrêter le prix de journée des structures suivantes :
• les établissements pour personnes âgées habilités à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale départementale ;
• les établissements d'hébergement pour personnes handicapées habilités à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale départementale ;
• les établissements de protection de l'enfance.
Les deux autorités de tarification, le département et l'Etat, doivent approuver l'unique tarification des prestations. Les établissements ou services « habilités justice », auxquels l'autorité judiciaire confie directement et habituellement des mineurs, sont concernés par cette disposition. Si un désaccord entre ces deux autorités ne permet pas de fixer le budget au 31 janvier de l'année considérée, la tarification des établissements est fixée par les ministres compétents.
S'agissant des centres d'action médico-sociale précoce, dont le financement est assuré conjointement par l'assurance maladie et le département, leur dotation globale annuelle est arrêtée conjointement par le président du conseil général et le préfet du département, après avis de la caisse régionale d'assurance maladie.
Les deux autorités de tarification fixent lefinancement de prestations différentes au sein d'un même établissement. C'est le cas des logements-foyers, des foyers à double tarification pour handicapés et des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, dont les règles de tarification ont été récemment modifiées (7).
Pour ce type de structures, la tarification se fait en deux temps. Celle des prestations remboursables aux assurés sociaux est d'abord arrêtée par le préfet, après avis du président du conseil général, et, le cas échéant, de la caisse régionale d'assurance maladie. Au vu de cette décision, le président du conseil général fixe la tarification des autres prestations, notamment celles d'hébergement.
• La répartition des compétences : ce qu'envisage la DAS...
La réforme de la loi du 30 juin 1975 « ne sera pas une réforme de la répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales. Le projet de réforme de la loi de 1975, avec des outils simples et souples, vise à faciliter le partenariat. Pas plus. », affirmait, dès 1998, Pierre Gauthier aux ASH (voir notre n° 2072 du 22-05-98). La direction de l'action sociale a, par conséquent, travaillé à compétences constantes. Il ne serait pas mis fin à l'enchevêtrement actuel des compétences de l'Etat et des départements... Une meilleure coordination des actions sociales et médico-sociales de l'Etat et du département pourrait, néanmoins, être organisée par voie de conventions.
Un établissement peut être fermé pour plusieurs raisons. Outre la suppression d'un équipement décidée par l'organisme gestionnaire, unéquipement ouvert sans autorisation peut êtrefermé par l'autorité qui aurait été compétente pour en autoriser la création.
Par ailleurs, au titre de l'ordre public, le représentant de l'Etat peut décider la fermeture d'un établissement, lorsque les normes réglementaires ne sont pas respectées, ou encore quand la santé, la sécurité ou le bien-être physique ou moral des usagers se trouvent menacés. •
Sophie Courault et Laurent Cocquebert
La loi du 29 juillet 1998 contre les exclusions (8) a clarifié, modernisé et consolidé les fondements juridiques, financiers, pédagogiques et administratifs du dispositif de formation des travailleurs sociaux.
La loi du 30 juin 1975 fait désormais expressément référence aux 3 types de formations sociales dispensées : initiales, permanentes et supérieures. Elle définit la mission des établissements publics et privés. Ceux-ci contribuent à la qualification et à la promotion des professionnels et des personnels salariés et non salariés engagés dans la lutte contre l'exclusion, la prévention ou la réparation des handicaps ou inadaptations, la promotion du développement social. Le législateur reconnaît aux établissements un rôle de participation au service public de la formation.
La loi contre les exclusions a égalementdéconcentré la procédure d'agrément des établissements de formation, au niveau de la région ou de l'académie. Pour l'obtenir, ceux-ci s'engagent, notamment, à recruter des personnels directeurs et formateurs inscrits sur une liste d'aptitude nationale et à respecter la liste d'aptitude nationale et les orientations du schéma national des formations sociales (9).
(1) Voir ASH n° 1991 du 4-10-96.
(2) Voir ASH n° 2072 du 22-05-98.
(3) Voir ASH n° 2126 du 2-07-99.
(4) Voir ASH n° 2151 du 28-01-00.
(5) Voir ASH n° 2084 du 11-09-98.
(6) Voir ASH n° 2132 du 10-09-99.
(7) Voir ASH n° 2117 du 30-04-99.
(8) Voir ASH n° 2084 du 11-09-98.
(9) Voir ASH n° 2120 du 21-05-99.