Le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, élaboré par les ministères de l'Equipement, de la Ville et le secrétariat d'Etat au logement, a été présenté au conseil des ministres du 2 février. Il devrait être débattu devant le Parlement au printemps. L'ambition du gouvernement est de favoriser un développement plus harmonieux des agglomérations et de lutter contre la ségrégation urbaine. Le texte s'inscrit dans la continuité de la loi du 25 juin 1999 sur l'aménagement et le développement durable du territoire (1) et de celle relative au renforcement de la coopération intercommunale (2).
Réussir la mixité urbaine
L'une des principales dispositions du projet consiste à introduire une pression financière supplémentaire sur les communes situées dans des agglomérations de plus de 50 000 habitants qui ne respectent pas le quota de 20 % de logements locatifs sociaux. En effet, le principe de la mixité sociale, défini par la loi d'orientation sur la ville du 13 juillet 1991 (3), n'a pas été appliqué partout de façon satisfaisante. Aussi, la future loi prévoit-elle d'infliger à ces communes, à partir de 2002, une pénalité de 1 000 F par logement HLM manquant (doublée au bout de trois ans en cas de carence). Le produit de la taxe irait à la communauté urbaine ou l'agglomération, ou, à défaut, à un établissement foncier local, pour réaliser des logements sociaux. De plus, les préfets pourraient se substituer aux maires ne satisfaisant pas à ces obligations. Objectif affiché par le gouvernement : rattraper en 20 ans un retard estimé à 450 000 logements sociaux, soit, pour un millier de communes, la construction de 22 000 logements sociaux par an.
Assurer une offre d'habitat diversifiée et de qualité
Des mesures visent à fonder, par des dispositions de principe, le statut et la pérennité du parc de logements HLM. D'autre part, la solidarité entre bailleurs sociaux, dont certains connaissent de vraies difficultés, serait également renforcée au travers du mécanisme de financement de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLS), lui-même réformé.
En outre, pour créer les conditions d'un dialogue régulier entre organismes HLM et locataires, en particulier avant toute opération de travaux importants, des plans de concertation locative seraient élaborés au sein de chaque organisme HLM.
Par ailleurs, des mesures visent à prévenir et traiter les problèmes des copropriétés dégradées et des logements insalubres, suite notamment au rapport Bouché (4). Les procédures de lutte contre l'insalubrité seraient unifiées et pourraient être déclenchées par le maire, sous l'autorité du préfet. Il est également proposé de donner compétence aux préfets pour exécuter d'office des travaux de mise hors d'état, afin d'éviter toute nouvelle occupation des locaux après évacuation des lieux. Autre point : le paiement du loyer serait suspendu pendant la durée de validité de l'arrêté d'insalubrité ou de péril et le propriétaire aurait l'obligation de procéder au relogement des occupants de bonne foi, en cas d'interdiction définitive d'habiter, ou à leur hébergement pendant la durée des travaux, en cas d'interdiction temporaire. Enfin, le champ d'intervention de l'ANAH sera élargi.
Le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées a rendu un avis favorable sur le texte, le 1er février. Toutefois, il aimerait « avoir la confirmation que la taxation prévue soit suffisamment incitative pour éviter que certaines communes “achètent” la non-mixité ».
Le Haut Comité déplore aussi que les mesures relatives à la pérennité du parc de logements HLM, inspirées de son dernier rapport (5), se limitent aux organismes HLM. Il aurait souhaité que la liste soit élargie, notamment aux logements conventionnés construits par les collecteurs du 1 % et à ceux bâtis par le secteur associatif.
De plus, le Haut Comité regrette que l'appel à la garantie de la CGLS, en substitution à celle des communes, pour le logement d'insertion ne soit pas abordé, alors qu'il représente un obstacle majeur à la création de logements très sociaux. Il suggère également de permettre l'accès à la caisse à des organismes associatifs spécifiquement agréés, sous réserve de payer la redevance.
Satisfait des dispositions préventives sur les copropriétés dégradées, le Haut Comité estime cependant qu'un audit périodique devrait être obligatoire pour toutes les copropriétés, en particulier sur les éléments de sécurité et les gros travaux à envisager. Enfin, concernant les mesures de lutte contre l'insalubrité, l'effort d'uniformisation des procédures devrait être traduit plus fortement dans le projet de loi, « sous peine de choix pernicieux vers la procédure la moins contraignante ». L'obligation de relogement est jugée par le Haut Comité à même de dissuader les « marchands de sommeil », mais « elle doit être mieux encadrée juridiquement ».
(1) Voir ASH n° 2125 du 25-06-99.
(2) Voir ASH n° 2151 du 28-01-00.
(3) Elle contraint les communes de plus de 200 000 habitants à réaliser au moins 20 % de logements sociaux.
(4) Voir ASH n° 2117 du 30-04-99.
(5) Voir ASH n° 2128 du 16-07-99.