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Qui sont les majeurs protégés aujourd'hui ?

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« Globalement, on peut dire de la population des majeurs protégés qu'elle est pauvre, isolée, peu ou pas qualifiée, endettée. » C'est ce que vient confirmer l'étude menée à l'initiative de six fédérations d'associations tutélaires (1), rendue publique lors des assises nationales de la tutelle qu'elles ont organisées, à Paris, du 16 au 18 décembre.

Cette enquête d'envergure, fondée sur l'examen de 70 000 dossiers de personnes suivies par des associations tutélaires, souligne, en effet, que les trois quarts des bénéficiaires de mesures en cours ont des ressources se situant entre le RMI et le SMIC. En outre, plus de 85 % de ces majeurs sont dépourvus de patrimoine immobilier, alors que plus de la moitié des ménages français sont propriétaires. Ces publics, poursuit l'étude, sont « globalement très peu qualifiés  »  : 70 %des majeurs protégés ont un niveau de formation inférieur au CAP, contre 28 % pour la population française. La qualification professionnelle, cependant, augmente, « conséquence des politiques d'éducation menées ces 20 dernières années ». Il en va de même, logiquement, pour l'activité professionnelle. L'emploi - en CAT ou en milieu ordinaire - progresse et représente 20 %des situations, un chiffre qui « surprend par rapport aux représentations traditionnelles de la population des majeurs protégés ».

« Il s'agit essentiellement d'une population isolée », note encore l'étude. Plus de 80 % des ménages concernés sont composés d'un adulte, avec ou sans enfant. Mais ce constat appelle quelques nuances. Les relations à la famille élargie et au voisinage apparaissent en général assez fréquentes et plutôt bonnes. Même si 20 % des personnes sous tutelle déménagent au moins une fois par an, entretenant un « rapport labile au monde », qui les conduit parfois à des ruptures relationnelles « brusques, graves et irrémédiables ». Un public en évolution

Cette enquête met aussi en évidence certaines évolutions majeures du public faisant l'objet d'une mesure de protection. Et notamment une augmentation aux deux extrêmes des âges. La croissance, en effet, est « régulière et marquée » pour les moins de 35 ans, en particulier pour les 18-24 ans, et  « significative » pour les plus de 80 ans , conséquence de l'allongement de la durée de la vie. Les 35-79 ans, toutefois, continuent de constituer la très grande majorité des mesures de protection.

Autre tendance, de moins en moins de personnes sont reconnues handicapées  : leur proportion passe de 32 %, pour les mesures anciennes, à 19 %, pour les mesures ouvertes après le 1er janvier 1998. Les taux d'invalidité inférieurs à 50 %, de leur côté, progressent énormément, passant de 29 à 61 %. En fait, notent les auteurs, « si la pathologie mentale [ou le handicap mental] , au côté du vieillissement, continue à être le principal vecteur d'entrée des personnes dans le système de protection, elle se trouve complexifiée considérablement par d'autres facteurs, notamment les facteurs pris en compte dans les politiques sociales ». Les situations financières dégradées, les problèmes liés au logement, les situations ou risques d'exclusion, la toxicomanie, constituent une part croissante des causes d'ouverture des mesures, et les services sociaux des conseils généraux, des caisses d'allocations familiales et des centres communaux d'action sociale se trouvent de plus en plus à l'origine de la demande de protection, au détriment du corps médical. L'étude souligne ainsi l'émergence d'unpublic « à l'intersection des pathologies mentales et des problématiques sociales ». Celui-ci dispose d' « une modalité d'ancrage dans le social », mais sa situation est si complexe que les services sociaux ne peuvent pas y répondre et sont amenés, après de nombreux mois d'efforts, à proposer une mesure de protection. Ce « public atypique », estime l'enquête, représenterait 20 % de la totalité des majeurs protégés par les associations tutélaires, soit au moins 60 000 personnes.

Ces données seront complétées par une étude commandée, par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, à l'Institut national des études démographiques sur les effectifs par classes d'âge des majeurs protégés depuis 1970, attendue pour mars 2000. Avec le rapport Favard (2) sur le dispositif de protection des majeurs, qui devrait être remis au cours du premier trimestre de l'an prochain, les pouvoirs publics devraient ainsi disposer d'informations suffisantes pour élaborer une « réforme d'ampleur », selon l'expression de Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à l'action sociale, présente lors de ces assises. Une réforme espérée de longue date par les associations tutélaires.

Notes

(1)  L'Union nationale des associations familiales (UNAF), l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (Unapei), la Fédération nationale des associations tutélaires (FNAT), l'Union nationale des associations de sauvegarde de l'enfance et de l'adolescence (Unasea), l'Association nationale des gérants de tutelles et la Fédération Croix-Marine. Contact : UNAF : 28, place Saint-Georges - 75009 Paris - Tél. 01 49 95 36 00.

(2)  Voir ASH n° 2127 du 9-07-99.

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