Après le cri d'alerte du Syndicat national des associations pour la sauvegarde de l'enfant à l'adulte (Snasea) sur la détérioration du climat social (1), les syndicats de salariés s'alarment de l'application de la loi Aubry. « Une réelle inquiétude s'exprime collectivement sur le devenir du secteur social et médico-social à but non lucratif », analyse la FNAS-FO, non signataire des accords nationaux dans la branche associative sanitaire et sociale. Dénonçant « les inégalités de traitement et de comportement des tutelles », lors de l'instruction de l'agrément des accords locaux, le syndicat s'insurge contre la mise en cause de l'unicité des conditions de travail et des conventions collectives. Colère également à la CFDT Santé-sociaux qui, en tant que signataire cette fois, dénonce les refus d'agrément et les sursis à statuer prolongés pour les accords locaux. Aussi, lance-t-elle un mouvement d'action national décentralisé avec un temps fort, le 11 janvier 2000, qui sera également l'occasion de manifester son refus de l'exclusion des salariés à temps partiel de la réduction du temps de travail dans la branche aide à domicile (BAD).
Impasse dans la BAD
L'ultime réunion de négociation sur la RTT dans la BAD s'est, en effet, soldée par un échec, le 10 décembre. Certaines fédérations employeurs, notamment l'Unassad et l'Unadmr, proposaient de modifier l'accord signé le 24 juin et rejeté par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité pour cause de « déséquilibre » financier (2). Elles souhaitaient appliquer la RTT uniquement aux salariés travaillant plus de 35 heures par semaine, tout en révisant, en contrepartie, les grilles salariales au bénéfice des personnels les plus mal rémunérés. De façon, souligne Emmanuel Verny, directeur général de l'Unassad, « que les bas salaires n'aient pas le sentiment de rester à l'écart d'une évolution sociale ». Cette proposition, qui se traduisait pas une augmentation moyenne de 5 % des salaires, au lieu des 11,4 % induits par une application générale de la RTT, s'est heurtée à une double fin de non- recevoir. Celle d'une partie des fédérations employeurs, la Fnafad et la Fnaafp-CSF (3), et celle des syndicats de salariés, la CFDT Santé-sociaux et la CFTC Santé-sociaux.
Tous se rejoignent pour juger inacceptable que 80 % des 120 000 salariés de la branche se retrouvent exclus de la réduction du temps de travail. « Nous en avons assez que les gens du secteur soient systématiquement marginalisés », s'irrite la CFDT Santé-sociaux. « A travail égal, salaire égal », renchérit la CFTC, qui refuse les disparités de taux de salaires horaires qu'un tel accord instituerait. Dans cette situation de blocage, les accords au niveau local sont toujours possibles. Mais il sera certainement difficile de trouver des signataires. En outre, la formule présente le désavantage de laisser les associations seules pour affronter le passage aux 35 heures. Il est probable, donc, estime l'Unassad, qu' « il ne va rien se passer, sinon le versement de 10 % pour les heures supplémentaires dans le fonds spécial prévu par la loi ». Ce qui entraînerait, étant donné le petit nombre de salariés concernés, un faible renchérissement du coût du travail.
Appels dispersés aux pouvoirs publics
Cet immobilisme, cependant, paraît insupportable à l'ensemble des partenaires sociaux, qui, chacun de leur côté, tentent de mobiliser les pouvoirs publics sur la situation critique de la branche aide à domicile. Ainsi, la CFDT Santé-sociaux, qui a introduit un recours gracieux auprès du ministère de l'Emploi et de la Solidarité pour que soit revue la décision de non-agrément, sera reçue le 21 décembre à la direction de l'action sociale. Elle souhaite que le gouvernement se penche sur les problèmes de fond du secteur, notamment celui du financement, pour lesquels elle estime que « ce n'est pas aux partenaires sociaux d'amener des solutions ». Même volonté également de remettre tout à plat de la part de l'Unassad : le 13 décembre, cette fédération a envoyé une lettre à Lionel Jospin, lui demandant, en substance, de manifester une réelle volonté d'aider le secteur à surmonter l'ensemble de ses difficultés.
(1) Voir ASH n° 2145 du 10-12-99.
(2) Voir ASH n° 2139 du 29-10-99.
(3) Voir ASH n° 2145 du 10-12-99.