Jusqu'à dimanche, vous organisez la IIIe semaine pour l'emploi des handicapés. Avec quels objectifs ? - Nous voulons recueillir 2 000 offres d'emploi pour l'an 2000 (2). Notre premier objectif est de sensibiliser les chefs d'entreprise qui n'ont jamais embauché de handicapés, en leur proposant de rencontrer une personne porteuse de compétences. A travers une campagne de communication fortement relayée, nous jouons sur l'émotion. Nous voulons toucher les décideurs, mais à partir d'une image de réussite. Nous disons non à la compassion, oui à l'intégration. Notre deuxième objectif est de constituer un réseau de « passeurs » pour l'emploi des handicapés, des volontaires prêts à donner un coup de main tout au long de l'année. Par exemple, en diffusant des CV de personnes handicapées dans leurs entreprises ou en participant à un comité de ville. En fait, nous recherchons des avocats pour plaider la cause des handicapés dans l'entreprise. Il faut renforcer le lobbying citoyen. En trois ans, l'état d'esprit des chefs d'entreprise a-t-il évolué ? - C'est un travail de fourmi. 150 entreprises ont participé à la première édition de notre opération, 350 l'an dernier. Et celles-ci nous restent fidèles. C'est un encouragement. Un sondage européen (3), réalisé à l'occasion de cette IIIe semaine, montre que le handicap physique est reconnu comme un frein important à l'embauche par 82 % des chefs d'entreprise. En revanche, 84 % de ceux ayant déjà des salariés handicapés physiques déclarent ne pas avoir rencontré de problèmes particuliers lors de leur recrutement. Ces deux chiffres illustrent le travail encore à accomplir. La France compte 170 000 handicapés au chômage et le taux d'emploi de cette population stagne, depuis plusieurs années, autour de 4 %. Votre opération n'est-elle pas qu'un coup d'épée dans l'eau ? - Non, sinon nous ne la ferions pas. C'est un travail peu gratifiant, à juger sur la durée. Ce ne sont pas les lois et les dispositifs qui font évoluer les mentalités et les comportements. Nous sommes donc condamnés à ce travail de persuasion et de communication. Et les associations sont les mieux placées pour le mener. Ce n'est pas facile, mais il faut continuer. Que préconisez-vous pour améliorer l'insertion professionnelle des handicapés ? - La France s'est dotée de la législation et du dispositif d'aides financières les mieux organisés d'Europe. Pourtant, nos résultats en matière d'insertion professionnelle des personnes handicapées ne sont pas meilleurs que ceux affichés par nos voisins. Nous ne sommes pas très efficaces. Aussi, la priorité consiste-t-elle à développer des actions concrètes de formation et de qualification. Nous souffrons du faible niveau de formation des personnes en grande difficulté. Exemple : d'ici à la fin de la semaine, nous aurons collecté quelque 800 offres d'emploi dans le secteur de l'hôtellerie et du tourisme... qui ne seront pas pourvus. C'est du gâchis. En augmentant le niveau de qualification des handicapés, nous pourrions multiplier par deux les résultats de l'Agefiph et passer de 40 000 à 80 000 personnes reclassées chaque année. Propos recueillis par Jean-Yves Guéguen
(1) L'adapt : Tour Essor 93 - 14/16, rue Scandicci - 93508 Pantin cedex - Tél. 01 48 10 12 46.
(2) Contre 1 000 la première année et 1 300 l'an dernier. Les entreprises souhaitant proposer des offres d'emploi doivent contacter le 0803 03 4000.
(3) Enquête exclusive L'adapt-Louis Harris réalisée en octobre 1999 auprès de 257 chefs d'entreprise européens, en Allemagne, Espagne, France, Italie et au Royaume-Uni.