Après deux incendies criminels dans des centres médico-sociaux du département, au printemps dernier, et l'agression au couteau, par un usager (renvoyé d'un CHRS la veille pour cause de violence), d'un assistant de service social au centre communal d'action sociale de Lons-le-Saunier (Jura), le 23 août, « la coupe est pleine et l'émotion vive ». Les travailleurs sociaux du département sont tous « atteints et concernés », explique Yves Ramelet, secrétaire de la CFDT Interco du Jura (1).
Dans une lettre ouverte, adressée le 16 septembre, à Martine Aubry, le syndicat a souhaité se faire l'écho du désarroi des profes- sionnels, parfois de leur colère. « Lors de nos permanences, nous sommes de plus en plus confrontés à des individus dangereux qui n'ont plus rien à perdre. Or, comme les sapeurs-pompiers, attaqués dans les banlieues, les travailleurs sociaux se sentent peu soutenus dans la mission qui est la leur auprès des publics les plus atteints par la précarité », écrit-il. Des forces de l'ordre qui « tardent à intervenir » et une psychiatrie hospitalière qui « n'informe pas » de la sortie d'un malade connu pour avoir déjà agressé contribuent à l'insécurité et au sentiment de solitude des professionnels face à la violence, estiment les travailleurs sociaux jurassiens.
Ceux-ci dénoncent également les effets pervers de la loi contre les exclusions, quand les moyens ne suivent pas. Ce texte, en accentuant l'aspect « millefeuille » des dispositifs, « augmente l'incompréhension des usagers », explique la CFDT Interco. En outre, relayée par les médias, la loi fait état « de droit au logement et de droit au travail, alors même que, sur le terrain, nous n'avons pas d'outil supplémentaire pour répondre aux revendications ainsi créées. Cela laisse à penser que ces droits constituent des “droits créances” des plus démunis envers l'Etat. »
La CFDT Interco réclame à la ministre de l'Emploi et de la Solidarité une série de mesures immédiates visant à rendre plus efficace la protection, notamment via une coordination plus étroite entre les services sociaux et les forces de sécurité, au niveau local. Plus en amont, elle demande une simplification - pour une meilleure lisibilité - des mesures d'aides, ainsi que la mise en place de concertations nationale et locales « pour répertorier ces agressions et y réfléchir ». Certes, il existe déjà des débuts de réponses, commente Yves Ramelet, notamment les réflexions du Conseil supérieur du travail social au niveau national (2), et la mise à la disposition des professionnels agressés d'un psychologue et d'un avocat, par le conseil général du Jura. Mais c'est surtout, selon lui, « en termes de coordination et de communication des différents acteurs, sur le sujet de la violence, qu'il faut réfléchir. En particulier entre les services de santé mentale, les centres d'hébergements et les guichets sociaux
- CCAS, CAF et services de tutelle. »
(1) CFDT Interco du Jura : BP 26 - 76, rue Saint- Désiré - 39001 Lons-le-Saunier - Tél. 03 84 24 10 50.
(2) Voir ASH n° 2134 du 24-09-99.