Annoncée dans le cadre du plan triennal de lutte contre les exclusions (1), la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle (CMU) permet à tout résident stable et régulier, qui n'a pas de droits ouverts auprès d'un régime de sécurité sociale, de bénéficier, sur seule justification de sa résidence, des prestations en nature du régime général. L'affiliation estimmédiate, dès le dépôt de la demande, et automatique.
« Plus on est modeste, plus on est précaire, plus le bénéfice d'une garantie complémentaire est essentiel. La réalité est pourtant inverse :plus vous êtes exposé moins vous êtes protégé », déclarait Martine Aubry, le 27 avril, lors de l'ouverture de la discussion sur le projet de loi à l'Assemblée nationale. Aussi, au-delà de la couverture de base, la loi prévoit, pour les personnes répondant à une condition de ressources, la prise en charge du ticket modérateur et du forfait journalier, ainsi que des modalités de remboursement adaptées pour les prothèses, notamment en matière dentaire et optique. Ce droit est assorti de la dispense d'avance de frais.
Pour leur couverture complémentaire, les bénéficiaires peuvent choisir entre les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), l'adhésion à une mutuelle ou la souscription d'un contrat auprès d'une institution de prévoyance ou d'une société d'assurances.
Au total, 6 millions de personnes en situation précaire pourront se faire soigner gratuitement, pour un coût global chiffré, par le gouvernement, à 9 milliards de francs en année pleine. Le financement de cette nouvelle protection repose sur des transferts financiers consécutifs à la disparition de l'aide médicale départementale et de l'assurance personnelle, une augmentation de la participation de l'Etatet l'instauration d'une taxe nouvelle sur le chiffre d'affaires santé des mutuelles et des sociétés d'assurances.
Qualifié de « grande avancée sociale » par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, ce texte n'aura pourtant pas réussi à rassembler les parlementaires, bien que personne n'en ait contesté l'objectif : permettre un réel accès de tous aux soins. Pour certains élus, comme pour les associations de solidarité, l'effet de seuilinstitué par la loi constitue une nouvelle source d'exclusion (2). De même, le choix d'une gestion partenariale, par les CPAM et les organismes complémentaires, du volet protection complémentaire a été vivement contesté. Accusant le gouvernement de créer une« pseudo-complémentaire », les sénateurs de l'opposition avaient, alors, opposé à la couverture maladie universelle la création d'une allocation personnalisée à la santé. Calquée sur l'aide personnalisée au logement, cette prestation dégressive aurait permis d'aider les plus démunis à payer eux-mêmes leurs cotisations auprès des organismes de protection complémentaire.
Par ailleurs, les députés de l'opposition (groupes DL, RPR et UDF) ont saisi le Conseil constitutionnel (3), dénonçant la rupture d'égalité entre les assurés sociaux, du fait de l'effet de seuil. En outre, ils considéraient que le monopole donné aux CPAM, pour gérer le régime de base, plaçait ces dernières en situation de concurrence déloyale, vis-à-vis des mutuelles et des sociétés d'assurances, pour la gestion de la couverture complémentaire. Des arguments que le Conseil constitutionnel a rejeté, le 23 juillet. De son côté, la Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles a, dès le 19 juillet, déposé 2 plaintes auprès de la Commission européenne. La première pour « aide d'Etat non notifiée » à la Commission et la seconde pour « abus de position dominante ».
L'entrée en vigueur de la CMU est fixée au1er janvier 2000, sous réserve de certaines dispositions particulières aux dates d'effet spécifiques. Il reste donc moins de 6 mois au gouvernement pour publier l'ensemble des textes d'application et à la caisse nationale d'assurance maladie pour conclure avec les professionnels de santé les accords indispensables à sa mise en œuvre effective.
Enfin, sous le titre V du texte, se cache une« miniloi portant diverses mesures d'ordre sanitaire et sociale » (Rap. A. N. n° 1518, tome II, Recours). Le calendrier parlementaire n'ayant pas permis d'inscrire un tel texte à l'ordre du jour, le gouvernement a saisi l'opportunité de rattacher diverses mesures de « modernisation sanitaire et sociale » à la CMU, pour les faire voter par le législateur. Celles-ci feront l'objet d'une étude dans un prochain numéro.
La sécurité sociale a été créée par une ordonnance du 4 octobre1945. A l'époque, trois principes fondamentaux sont affirmés : la généralisation de la sécurité sociale à toute la population, l'unité des institutions et l'universalité des risques. Toutefois, l'affiliation à la sécurité sociale étant liée à l'exercice d'une activité professionnelle ou assimilée, la généralisation complète du système ne pourra jamais être atteinte.
La loi du 2 janvier 1978 crée l'assurance personnelle facultative. Là encore, la généralisation de la sécurité sociale reste théorique : les personnes les plus démunies demeurent en dehors du champ. En 1988, un nouveau pas est franchi : le bénéfice du RMI ouvre le droit à une affiliation automatique à l'assurance personnelle, c'est-à-dire à la sécurité sociale de base pour les allocataires non couverts par un régime obligatoire d'assurance maladie. En1992, une réforme de l'aide médicale protège davantage les allocataires du RMI en instaurant une prise en charge à 100 % de leurs dépenses maladie, c'est-à-dire en couvrant aussi la part complémentaire.
Aujourd'hui, quelque 150 000 personnes sont toujours exclues du système. La CMU leur donne, enfin, une couverture pour leurs frais de santé. L'idée d'une assurance maladie généralisée, conforme à l'ambition proclamée en 1945, se trouve désormais concrétisée. Même si on peut encore déplorer, à l'instar de certaines associations de solidarité (4), l'effet de seuil induit par la loi, ainsi que l'exclusion des étrangers en situation irrégulière de ce nouveau dispositif.
La loi garantit à tous un droit à être affilié au régime général de sécurité sociale sur critère de résidence. Cette affiliation confère à son bénéficiaire un droit immédiat et personnel à la prise en charge de ses frais de santé. Le régime facultatif de l'assurance personnelle est, par conséquent, supprimé.
Le droit à l'affiliation au régime général est ouvert à tous, sur le seul critère de résidence stable et régulière. Les personnes dont les revenus sont inférieurs à un certain montant sontexonérées de cotisation.
Toute personne, quelle que soit sa nationalité, résidant de façon stable et régulière en France ou dans un département d'outre-mer, est obligatoirement affiliée au régime général de sécurité sociale, dès lors qu'elle n'a droit, à aucun autre titre, aux prestations en nature d'un régime d'assurance maladie et maternité.
Le critère de résidence stable et régulière sera précisé par décret. Le code de la sécurité sociale exigeant une durée de résidence en France de 3 mois pour prétendre au bénéfice du régime de l'aide sociale, « il est possible que cette durée soit celle retenue par le décret », a indiqué Jean-Claude Boulard, rapporteur du projet de loi devant l'Assemblée nationale (5) (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les contrats d'assurance privés souscrits par les personnes qui, n'étant pas couvertes par un régime obligatoire, n'avaient pas fait le choix de l'assurance personnelle, seront résiliés de plein droit à compter de la date d'affiliation au régime général. Les cotisations ou primes serontremboursées au prorata de la durée du contrat restant à courir.
Si la garantie offerte par ces contrats est supérieure à celle qu'assure le régime général, le contrat pourra être maintenu en vigueur par un avenant et avec une réduction de prime.
Selon le rapporteur du projet de loi, Jean-Claude Boulard, en 1995, 61 000 personnes avaient souscrit une assurance au premier franc, dont 61 % de frontaliers et 6, 3 %d'expatriés.
Les demandeurs sans domicile fixe doivent élire domicile auprès d'un organisme agréé à cet effet par l'autorité administrative ou d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale.
Les modalités d'application de cet article sont renvoyées à un décret.
Les pupilles de l'Etat qui, jusqu'à présent, relevaient de l'aide médicale, sont affiliés au régime général sur critère de résidence.
Bien qu'elles résident ou séjournent en France, certaines personnes n'ont pas vocation à être affiliées au régime général sur critère de résidence.
Il s'agit, outre des membres du corps diplomatique ou consulaire, des personnes en séjour sur le territoire national pour suivre un traitement médical ou une cure, dont la prise en charge relève du système de protection sociale de leur pays, et des travailleurs frontaliers résidant en France. Ces derniers peuvent, en effet, choisir d'être affiliés dans le pays où ils travaillent.
Par ailleurs, le législateur a également expressément exclu de la CMU :
• les étudiants. Les étudiants de l'enseignement supérieur, des écoles techniques supérieures, des grandes écoles et des classes du second degré préparatoires à ces écoles, « qui ne sont ni assurés sociaux ni ayants droit d'assuré social demeurent affiliés obligatoirement à leurs régimes d'assurance sociale spécifiques et ce, même s'ils sont ayants droit d'une personne affiliée au régime général sur la base du nouveau critère de résidence » ;
• les ministres des cultes
• et les membres des congrégations et collectivités religieuses.
Ces trois catégories de personnes conservent leurs régimes spécifiques. Afin d'harmoniser leur situation avec celle des bénéficiaires de la CMU, la loi supprime le lien existant entre le versement des prestations et le paiement régulier des cotisations.
Les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond, qui sera fixé par décret, seront affiliées gratuitement au régime général.
Ce plafond devrait, selon les indications données par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité aux parlementaires (Rap. A. N. n° 1518, Boulard), s'établir à :
• 3 500 F par mois pour une personne isolée
• 5 200 F pour 2 personnes
• 6 300 F pour 3 personnes
• 7 700 F pour 4 personnes
• et 1 400 F en plus par personne supplémentaire.
Il sera révisé chaque année, pour tenir compte de l'évolution des prix.
En revanche, les intéressés dont les ressources sont supérieures à ce seuil devrontacquitter une cotisation. Son montant sera fixé en pourcentage des revenus, en prenant pour référence le mode de calcul utilisé pour l'appréciation du seuil déclenchant l'exonération du paiement de la CSG. Un décret déterminera le taux et les modalités de calcul de cette cotisation, ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis.
La question de l'effet de seuil a fait l'objet de vives polémiques, autant au Parlement que dans la société civile. Rappelons que, dans un premier temps, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale avait adopté un amendement destiné, d'une part, à relever le seuil à 3 800 F pour une personne seule (qui est le seuil de pauvreté fixé par l'INSEE) et, d'autre part, à instaurer une cotisation dégressive jusqu'au SMIC. Cette mesure aurait permis d'étendre le dispositif à 2 millions de personnes supplémentaires. Son coût a été chiffré par le gouvernement à 2 milliards de francs.
Saisi par les députés de l'opposition, qui dénonçaient l'effet couperet induit par le plafond de ressources, le Conseil constitutionnel a indiqué dans un communiqué en date du 23 juillet que « eu égard au but que s'est fixé le législateur- assurer la prise en charge intégrale des dépenses de santé des personnes disposant de faibles ressources et les dispenser d'avance de frais - il lui était loisible de fixer le principe d'un plafond de ressources pour déterminer les bénéficiaires du nouveau régime ». Toutefois, cette instance a émis une réserve quant aux montants des plafonds de ressources qui seront fixés par décret. Ceux-ci devront, en effet, « respecter les dispositions du préambule de la Constitution de 1946 » (6).
A noter : les personnes handicapées,titulaires de l'allocation aux adultes handicapés(3 540, 41 F/mois), ne sont pas concernées par l'effet de seuil. Elles bénéficient, en effet, des prestations maladie et maternité au titre de l'article L. 381-27 du code de la sécurité sociale. En outre, les personnes prises en charge à 100 % en raison d'une affection de longue durée, continueront à bénéficier de la gratuité des soins pour cette pathologie.
Désormais sans objet, le chapitre du code de la sécurité sociale relatif à l'assurance personnelle est abrogé. Créée par la loi du 2 janvier 1978, cette assurance concerne les personnes résidant en France dans des conditions régulières depuis 3 mois et susceptibles de n'être couvertes par aucun des régimes obligatoires existants. L'affiliation est facultative. Elle ouvredroit aux prestations du régime général, moyennant le paiement d'une cotisation (7). Les cotisations des personnes dont les ressources se situent au-dessous d'un plafond peuvent être prises en charge par le fonds de solidarité vieillesse (pour les personnes âgées), par les caisses d'allocations familiales ou, en dernier ressort, par l'aide médicale de l'Etat ou des départements.
Toutefois, ces dispositions demeurent en vigueur pour la répartition du solde des opérations de recettes et de dépenses du régime de l'assurance personnelle afférent à l'exercice 1999.
Le versement des prestations n'est plus subordonné à l'acquittement des cotisations. En conséquence, les dispositions du code de la sécurité sociale liant le paiement des cotisations à l'ouverture du droit aux prestations en nature de l'assurance maladie et maternité sont supprimées.
Cependant, il est prévu « qu'en cas demauvaise foi du bénéficiaire », le versement des prestations en nature de l'assurance maladie pourra être suspendu, dans des conditions qui seront fixées par décret. Néanmoins, est-il précisé, « cette sanction n'affecte pas les ayants droitde la personne convaincue de mauvaise foi ». Selon Jean-Claude Boulard, « cette disposition, qui déroge au schéma général de la loi, répond à la situation particulière des régimes telles la CANAM et la MSA, qui sont confrontés à des campagnes d'appel au refus de cotiser » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Toute personne qui s'adresse à une caisse de sécurité sociale peut, sur justification de sa résidence et de son identité, prétendre immédiatement aux prestations en nature du régime général.
Toute personne déclarant, auprès d'une caisse primaire d'assurance maladie, ne pas bénéficier des prestations en nature d'un régime de maladie et de maternité est immédiatement affiliée au régime général. Cette affiliation est conditionnée par le critère de résidence stable et régulière en France métropolitaine ou dans un DOM et par la production d'un document faisant foi de l'identité du demandeur.
L'affiliation est immédiate puisque lebénéfice des prestations en nature estouvert dès le dépôt de la demande. La caisse pressentie ne recherche qu'a posteriori si la personne concernée est susceptible de relever d'un autre régime existant. Une disposition qui« répond à la situation de personnes se trouvant en position d'extrême précarité et ignorantes de leur situation au regard de l'assurance maladie ou trop marginalisées pour entreprendre certaines démarches à caractère administratif » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
A noter : la loi ne vise que les prestations en nature du régime général.
L'automaticité résulte, notamment, de l'implication, dans le dispositif, des associations et des acteurs institutionnels. A ce titre, le texte prévoit la possibilité pour les services sociaux, les associations ou les organismes à but non lucratif agréés par le préfet et les établissements de santé d'accompagner les personnes dans leurs démarches d'affiliation au régime général. Ceux-ci sont également habilités à transmettre les documents à l'organisme compétent, avec l'accord de l'intéressé.
La loi crée le statut d'ayant droit autonome, qui permet aux ayants droit de l'assuré social d'être personnellement remboursés de leurs frais de santé. Désormais, dès l'âge de 16 ans et non plus de 18 ans, les enfants d'un assuré social peuvent devenir ayants droit autonomes. Le législateur répond ainsi à la situation des jeunes vivant chez leurs parents et qui souhaitent avoir accès à certains soins ou actes de prévention, de façon autonome, et à ceux en rupture de liens familiaux. Sont visés les enfants non salariés à la charge de l'assuré ou de son conjoint, qu'ils soient légitimes, naturels, reconnus ou non, adoptifs, pupilles de la nation dont l'assuré est tuteur, ou enfants recueillis, et :
• placés en apprentissage, jusqu'à 18 ans
• qui poursuivent leurs études, jusqu'à 20 ans
• qui, par suite d'infirmités ou de maladies chroniques, sont dans l'impossibilité de se livrer à un travail salarié, jusqu'à 20 ans.
En outre, sauf refus exprès de leur part, les conjoints et ascendants de personnes affiliées au régime général acquièrent automatiquement le statut d'ayant droit autonome. Il s'agit :
• du conjoint de l'assuré
• de l'ascendant, du descendant, du collatéral jusqu'au troisième degré ou de l'allié au même degré de l'assuré social, qui vit sous le même toit que celui-ci et se consacre exclusivement aux travaux du ménage et à l'éducation des enfants à charge de l'assuré
• de la personne qui vit maritalement avec un assuré social et se trouve à sa charge effective, totale et permanente. A cet égard, la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (PACS) (8) reconnaît les mêmes droits aux personnes liées à un assuré social par un PACS
• de la personne qui vit de façon non maritale avec l'assuré social depuis 12 mois consécutifs et se trouve à sa charge effective, totale et permanente.
Par ailleurs, les enfants mineurs pris en charge par lesservices de l'aide sociale à l'enfance peuvent, à la demande des personnes ou établissements qui en assument l'accueil ou la garde, être identifiés de façon autonome au sein du régime de l'assuré. Ces personnes ou établissements perçoivent alors les prestations en nature pour le compte de ce dernier.
Dans tous les cas, les personnes concernées demeurent ayants droit, mais peuvent être personnellement remboursées de leurs dépenses de santé, sans avoir à passer par le compte de l'assuré social dont elles relèvent. « Le lien qui lie l'ayant droit autonome au régime maladie et maternité demeure la première affiliation de l'assuré social. Il n'y a donc pas lieu, au plan administratif, de procéder à une affiliation et une immatriculation nouvelle ce dispositif dispense les intéressés de démarches souvent vécues comme dissuasives et ne crée pas de surcharge de gestion de dossiers pour les caisses », a expliqué Jean-Claude Boulard (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
La continuité des droits constitue, après l'immédiateté et l'automaticité, le troisième principe posé par le législateur. Il est défini a contrario, puisque la loi précise qu' « une personne ne peut perdre le bénéfice des prestations en nature des assurances maladie et maternité que si elle cesse de remplir la condition de résidence ou si elle est présumée absente [au sens du code civil] » (9).
S'il s'avère que l'assuré relève en fait d'un autre régime d'assurance maladie que celui versant les prestations, ce dernier ne peut interrompre ses versements tant que l'organisme compétent ne s'est pas effectivement substitué à lui. Le législateur a voulu, ainsi, éviter toute possibilité de rupture ou d'interruption de prise en charge.
Les personnes résidant de manière stable et régulière en France métropolitaine ou dans un DOM et dont les revenus sont inférieurs à un plafond de ressources bénéficient également d'une couverture complémentaire en matière de santé et de la dispense d'avance de frais. Elles peuvent s'adresser à la CPAM dont elles dépendent, à une mutuelle ou une société d'assurances.
La loi pose le principe du droit à une couverture complémentaire gratuite en matière de santé, pour les personnes dont les revenus sont les plus faibles. Le plafond de ressources, qui sera révisé chaque année pour tenir compte de l'évolution des prix, varie selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge.
Les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond, fixé par décret, ont droit à une couverture complémentaire en matière de santé. Son montant devrait s'établir à :
• 3 500 F par mois pour une personne isolée
• 5 200 F pour 2 personnes
• 6 300 F pour 3 personnes
• 7 700 F pour 4 personnes
• et 1 400 F en plus par personne supplémentaire.
Selon l'étude d'impact, le plafond de ressources permet de couvrir :
• les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation d'insertion, dès lors qu'ils ne cumulent pas cette prestation avec d'autres ressources
• les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé, dès lors qu'ils ne perçoivent plus l'allocation pour jeune enfant
• la plupart des ménages composés de plusieurs personnes dont les ressources sont constituées par le minimum de l'allocation unique dégressive à taux plein
• les actifs isolés : sans enfants, percevant au plus 60 % du SMIC avec un enfant, percevant au plus 87 % du SMIC avec deux enfants de moins de 10 ans, percevant au plus 73 % du SMIC avec deux enfants de plus de 10 ans, percevant au plus 91 % du SMIC
• les couples actifs : sans enfants, percevant au plus 87 % du SMIC avec un enfant, percevant au plus 103 % du SMIC et pas d'allocations familiales avec deux enfants de moins de 10 ans, percevant au plus 92 % du SMIC avec deux enfants de plus de 10 ans, percevant au plus 110 % du SMIC.
En revanche, seront exclus du champ de la couverture complémentaire : les bénéficiaires du minimum vieillesse et les personnes seules titulaires de l'allocation aux adultes handicapés. Tout en considérant que leur situation pose un réel problème, Jean-Claude Boulard s'est« opposé à un relèvement du seuil au niveau de ces minima sociaux ».
Les conditions d'âge, de domicile et de ressources permettant de déterminer si une personne est à la charge d'un foyer sont renvoyées à un décret.
La loi ouvre un droit personnel à la couverture complémentaire aux mineurs de 16 ans ou plus en situation de rupture familiale, qui en font expressément la demande. Ils bénéficieront ainsi de cette couverture en leur nom propre. Toutefois, pour éviter les fraudes et les abus, l'organisme prestataire choisi par le mineur a la faculté d'exercer une action en récupération à l'encontre des parents qui disposent de ressources supérieures au plafond.
« Il conviendra par ailleurs que le décret d'application de cette disposition précise la notion de “rupture familiale” qui doit être mieux définie pour être pleinement applicable », a souligné Jean-Claude Boulard(Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les allocataires du RMI ont, d'office, droit à la protection complémentaire en matière de santé. Il ne s'agit pas d'un avantage supplémentaire accordé à ces personnes, qui bénéficient d'ailleurs déjà de l'aide médicale gratuite,« mais plutôt d'une disposition pragmatique qui permettra d'accélérer les demandes d'ouverture au droit à la couverture complémentaire CMU » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les titulaires de l'aide médicale au 1er janvier 2000 (date d'entrée en vigueur de la CMU) ont accès, de plein droit, à la couverture complémentaire, jusqu'à l'expiration de leur droit à l'aide médicale et, en tout état de cause, jusqu'au 31 mars 2000.
Ces délais permettront de « mieux gérer la transition entre l'ancien régime de l'aide médicale et celui de la CMU ». Pour renseigner les personnes concernées par l'un ou l'autre de ces régimes, « des campagnes d'information seront menées en leur direction, à l'initiative, notamment, des caisses d'assurance maladie et des conseils généraux » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les caisses primaires d'assurance maladie sont chargées d'apprécier les ressources du postulant à la protection complémentaire en matière de santé.
L'ensemble des ressources du foyer est pris en compte pour la détermination du droit à la complémentaire,après déduction des charges consécutives aux versements des pensions et obligations alimentaires. Sont toutefois exclues : certaines prestations à objet spécialisé et tout ou partie des rémunérations de nature professionnelle, lorsque celles-ci ont été interrompues.
La liste des prestations et des rémunérations, les périodes de référence et les modalités particulières de détermination des ressources provenant d'une activité non salariée seront précisées par décret. « Celui-ci pourrait reprendre les règles actuellement applicables pour apprécier le droit au revenu minimum d'insertion », a précisé Jean-Claude Boulard (Rap. A. N. n° 1518, Boulard). Ainsi, seraient exclues des ressources à prendre en compte :l'allocation parentale d'éducation, l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation pour jeune enfant ou encore la majoration pour tierce personne. Les aides forfaitaires au logement seraient, pour leur part, évaluées à un taux forfaitaire identique à celui prévu pour l'attribution du RMI.
Les caisses d'assurance maladie, saisies d'une demande de couverture complémentaire, peuvent contrôler le niveau de ressources du demandeur auprès des Assedic, afin de vérifier que l'indemnité chômage, éventuellement perçue, ne place pas celui-ci au-dessus du plafond de ressources.
Les informations demandées doivent être strictement limitées aux données nécessaires à l'accomplissement de cette mission, les personnes intéressées devant être informées de la possibilité de ces échanges d'information.
Les personnes qui remplissent les conditions requises ont droit à une protection complémentaire gratuite en matière de santé. La prise en charge des dépenses, au titre de cette couverture, n'intervient que d'une façon subsidiaire.
Les bénéficiaires de la protection en matière de santé, affiliés au régime général sur critère de résidence, sont expressément exonérés de cotisation. La question de la rupture du lien entre cotisation et droit aux prestations a fait l'objet de nombreux débats. « Devant le coût du recouvrement d'une cotisation de faible montant et la difficulté de sanctionner le non-versement de cette cotisation par la fermeture des droits sociaux ouverts, le choix a été fait de la gratuité en dépit de l'avantage que pourrait présenter une contribution modeste », a expliqué Jean-Claude Boulard. Toutefois, a-t-il reconnu, « celle-ci correspondrait sans doute mieux à une logique d'insertion, tout en rapprochant les bénéficiaires de la CMU du droit commun » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
La couverture complémentaire est définie comme un droit qui s'exerce « sans contrepartie contributive ». Elle joue sous réserve de l'application des dispositions plus favorables dont certaines personnes sont susceptibles de bénéficier (régimes spéciaux, régime local d'Alsace-Moselle, certains accords obligatoires de prévoyance d'entreprise, règles relatives aux affections de longue durée...).
La protection complémentaire ouvre droitgratuitement à la prise en charge :
• du ticket modérateur, dans la limite des tarifs de responsabilité des prestations couvertes par les régimes obligatoires
• du forfait hospitalierexigé des personnes admises dans les établissements hospitaliers ou médico-sociaux, sans limitation de durée
• des frais concernant les soins dentaires prothétiques ou d'orthopédie dento-faciale
• et des dispositifs médicaux (10). Les conditions de prise charge de ces frais (liste des dispositifs et limite du montant des frais pris en charge) seront précisées par arrêtés. Ces textes « devront “cibler” les soins et les dispositifs les plus essentiels à l'amélioration de l'état de santé de ces personnes » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Pour permettre un accès effectif aux soins, les bénéficiaires de la protection complémentaire sont dispensés de l'avance de frais pour les dépenses prises en charge par les régimes obligatoires des assurances maladie et maternité, ainsi que pour les frais énumérés ci-dessus.
Un décret déterminera les modalités de cette dispense de frais, c'est-à-dire les conditions de remboursement, par les organismes d'assurance maladie, des honoraires et des frais de santé aux professionnels et établissements de soins.
En outre, la dispense d'avance de frais s'étend aux personnes recourant à un médecin référent ou à un médecin spécialiste « correspondant » de ce dernier. Il s'agit, selon le rapporteur, « d'une pre- mière réponse aux problèmes posés par l'introduction d'un seuil pour le bénéfice de la CMU, car le mécanisme du tiers payant est de nature à en atténuer les effets » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Le gouvernement doit présenter au Parlement, tous les 2 ans, un rapport d'évaluation de la loi sur la CMU. Il devra s'appuyer, notamment, sur les travaux de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, présidé par Marie-Thérèse Join-Lambert (11), et du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion (12), dont Jean-Claude Boulard assure la présidence. Rappelons que ces deux instances ont été créées par la loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998.
La loi met en place des mécanismes destinés à permettre aux bénéficiaires de la couverture complémentaire de ne pas se voir facturer les dépassements des tarifs de sécurité sociale. Des accords en ce sens devront être conclus entre les différents professionnels de santé concernés.
Le texte prévoit l'impossibilité, pour les médecins conventionnés, quel que soit leur secteur (I et II), de pratiquer un dépassement de tarif de leurs honoraires, rémunérations et frais accessoires, à l'égard des bénéficiaires de la CMU.
Toutefois, cette impossibilité pourra être levée, « en cas d'exigence particulière du patient » (supplément d'honoraires pour des visites à domicile ou de nuit, par exemple).
La loi donne la possibilité aux organismes d'assurance maladie, ainsi qu'aux mutuelles, aux institutions de prévoyance et aux sociétés d'assurances, de conclure des accords, à l'échelon local ou national, avec les distributeurs de dispositifs médicaux à usage individuel, notamment en ce qui concerne laqualité, les prix maximaux pratiqués et les modalités de dispense d'avance des frais.
« Il pourra s'agir d'accords avec tout distributeur de ces dispositifs, tels que le pharmacien, mais aussi l'opticien pour une paire de lunettes ou le vendeur spécialisé de chaise roulante, au profit de l'ensemble des assurés », a précisé le rapporteur du projet de loi devant l'Assemblée nationale (Rap. A. N. n° 1518, Boulard). Cependant, s'est-il interrogé,« on peut se demander comment pourront se concilier des accords locaux avec des accords nationaux. Il en résultera vraisemblablement des situations inégales par région ou par département en fonction de l'existence, ou de l'inexistence, de tels accords » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Le contenu obligatoire de ces accords qui devront comporter des « dispositions adaptées à la situation des bénéficiaires du droit à la protection complémentaire en matière de santé » est défini. Ainsi, concernant les dispositifs médicaux pour lesquels un arrêté interministériel aura fixé un prix maximal de remboursement, les accords devront prévoir :
• soit l'obligation du distributeur de proposer un dispositif à un prix n'excédant pas le montant des frais pris en charge
• soit le montant maximal pouvant être facturé au bénéficiaire.
En l'absence d'accord ou lorsque ses dispositions ne répondent pas aux conditions définies par la loi, l'Etat se substitue aux parties. Il fixe alors, par arrêté, les prix ou les plafonds de coût de ces dispositifs.
Pour les soins dentaires ou d'orthopédie dento-faciale, dont les tarifs, honoraires et frais accessoires dus aux chirurgiens-dentistes peuvent faire l'objet d'un dépassement, la convention passée, chaque année, entre les caisses d'assurance maladie et les dentistes devra obligatoirement prévoir unplafonnement pour les bénéficiaires de la CMU.
Là encore, à défaut de disposition conventionnelle, les plafonds seront fixés par arrêté.
Le service de la prestation complémentaire est assuré, au choix du bénéficiaire, par sa CPAM, par une mutuelle ou par une entreprise d'assurances ayant déclaré vouloir participer à ce dispositif. Le droit à la protection complémentaire est ouvert pour une durée de un an renouvelable.
La loi offre aux bénéficiaires de la couverture complémentaire le choix de leur organisme d'affiliation ou d'adhésion. Il peut s'agir :
• d'une caisse primaire d'assurance maladie, gestionnaire de ces prestations pour le compte de l'Etat. Concrètement, les dépenses engagées seront prises en charge intégralement par l'Etat et non par la sécurité sociale
• ou d'un organisme complémentaire : mutuelle, institution de prévoyance ou société d'assurances.
Le principe de ce choix a fait l'objet d'un vaste débat. D'aucuns considèrent que les caisses d'assurance maladie ne doivent pas intervenir dans le champ de la protection complémentaire. D'autres, au contraire, estiment que le choix ainsi laissé aux bénéficiaires de la CMU garantit l'application effective de cette couverture, en raison de la simplicité que présente l'affiliation à une caisse unique.
Soucieuses d'éviter une concurrence« sur leurs terrains respectifs », la caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), la Fédération nationale de la mutualité française et la Fédération française des sociétés d'assurances ont conclu un protocole d'accord définissant les règles communes qu'elles entendent appliquer pour la mise en œuvre de la couverture complémentaire CMU (13). Aux termes de celui-ci, les caisses primaires d'assurance maladies'engagent à n'intervenir « qu'en cas de carence constatée » des organismes de protection complémentaire. En outre, un second protocole, également signé par la Fédération des mutuelles de France, a défini le « panier de biens et services éligibles au remboursement » (14).
Un document vivement critiqué par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, qui, s'il est appliqué par les institutions signataires, risque fort, sur le terrain, de compliquer la mise en œuvre effective de la loi.
La demande d'attribution de la protection complémentaire, accompagnée de l'indication du choix opéré par le demandeur, est faite auprès de la caisse de son régime d'affiliation. Ce principe dit du « guichet unique » doit permettre de simplifier la démarche d'ouverture des droits. A charge pour la CPAM d'informer l'organisme complémentaire sélectionné par l'intéressé.
Une disposition permet aux services sociaux, aux associations ou organismes à but non lucratif agréés par le préfet et aux établissements de santé d'informer les personnes désirant bénéficier de la couverture complémentaire et de les accompagner dans leurs démarches, si elles le souhaitent.
La décision d'admission est prise par le préfet. Il peut déléguer ce pouvoir au directeur de la caisse locale d'assurance maladie du régime général, de la mutualité sociale agricole ou des professionnels non salariés non agricoles. « Les critères d'attribution devant être contrôlés par les caisses, celles-ci seront les véritables autorités chargées d'examiner les demandes et d'y répondre » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
La décision doit être notifiée à l'intéressé dans un délai qui sera fixé par décret. Elle est susceptible d'un recours contentieux devant la commission départementale d'aide sociale. En l'absence de notification de la décision, la demande est considérée comme acceptée.
Lorsque la situation l'exige, le bénéfice de la protection complémentaire en matière de santé est attribué, dès le dépôt de la demande, aux personnes présumées remplir les conditions d'admission à la couverture de base et à la couverture complémentaire. Le bénéfice de cette protection est interrompu si la vérification de la situation du bénéficiaire démontre que les conditions ne sont pas remplies.
La réticence du bénéficiaire de la protection complémentaire à fournir les informations requises, ou la fausse déclaration intentionnelle, entraîne la nullité de l'adhésion et du contrat.
Quiconque se rend coupable de fraude ou de fausse déclaration pour obtenir ou faire obtenir le bénéfice de la protection complémentaire en matière de santé est passible d'une peine de 3 ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende.
De plus, les infractions aux prescriptions des articles L. 861-3 et L. 861-8 sont punies d'une amende de 100 000 F.
Les caisses d'assurance maladie et les organismes complémentaires peuvent obtenir le remboursement des prestations qu'ils ont versées à tort. En cas de précarité de la situation du demandeur, la dette peut être remise ou réduite, sur décision de l'autorité administrative compétente.
Les dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux règles de prescription sont applicables aux bénéficiaires de la protection complémentaire en matière de santé et aux caisses primaires, ainsi qu'aux organismes de protection complémentaire.
Les mutuelles, compagnies d'assurances et institutions de prévoyance qui souhaitent participer à la CMU doivent en manifester leur intention par une déclaration, dont le modèle sera fixé par arrêté.
L'ensemble des organismes parties prenantes à la CMU sont inscrits sur une liste établie et diffusée par la direction régionale des affaires sanitaires et sociales. Elle devra être communiquée aux « associations, services sociaux, organismes à but non lucratif et établissements de santé ». Sur ce point, le Conseil constitutionnel a décidé que les CPAM ont l'obligation « d'informer les assurés de la possibilité de choix qui s'offre [aux bénéficiaires] et de leur communiquer, à cette fin, la liste des organismes de protection sociale complémentaire ayant déclaré vouloir participer à ce dispositif ».
En cas de manquement d'un organisme complémentaire à ses obligations - refus d'inscription d'un bénéficiaire de la CMU ou non-respect des obligations relatives au contenu de la couverture complémentaire -, le préfet a la possibilité de le retirer de la liste. Les conditions dans lesquelles le retrait est prononcé et le délai au terme duquel une nouvelle déclaration peut être établie seront fixés par décret.
Un organisme complémentaire ayant choisi de participer au dispositif de la CMU ne peut, en aucun cas, refuser l'inscription ou l'adhésion d'une personne bénéficiaire de la couverture complémentaire qui l'aurait choisi lors du dépôt de sa demande. « Cette disposition affirme donc fortement l'impossibilité totale de tout procédé de sélection des bénéficiaires de la CMU par un organisme complémentaire » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les personnes qui, avant d'être admises au bénéfice de la protection complémentaire, étaient titulaires d'un contrat de droit commun, peuvent obtenir de plein droit la résiliation de la garantie souscrite auprès de cet organisme, et en choisir un autre, ou préférer leur caisse d'assurance maladie. Elles peuvent aussi exiger du même organisme qu'il gère, pour leur compte, leur couverture complémentaire CMU dans les conditions prévues par la loi.
De fait, une mutuelle sera obligée de participer au dispositif, même si elle n'est pas inscrite sur la liste. Dans ce deuxième cas, l'organisme assureur doit proposer au bénéficiaire de la protection complémentaire, pour la partie de son contrat initial qui excède cette protection, un contrat correspondant à des conditions tarifaires de droit commun.
Les cotisations ou primes afférentes aux contrats ou partie des contrats initiaux sont remboursées par les organismes qui les ont perçues, au prorata de la durée du contrat restant à courir.
A noter : ces dispositions ne s'appliquent pas aux garanties souscrites dans le cadre d'un accord collectif obligatoire d'entreprise.
La loi étend le contenu des clauses obligatoires des négociations collectives d'entreprise à l'obligation d'engager, chaque année, des négociations en vue de la création d'unrégime de prévoyance maladie par accord de branche ou d'entreprise, lorsque les salariés de l'entreprise concernée ne sont pas couverts par un tel accord.
En outre, une clause relative à l'accès à un régime de prévoyance maladie doit obligatoirement figurer dans les conventions collectives nationales de branche pour que celles-ci puissent être étendues.
La durée d'attribution des droits à la protection complémentaire est fixée à un an,renouvelable, aussi longtemps que les critères d'attribution sont remplis. En conséquence,« la situation du bénéficiaire, s'agissant tant de sa résidence que du niveau de ses ressources, peut donc évoluer, au cours de l'année où les droits ont été reconnus, et ne plus correspondre aux critères d'attribution sans que ses droits lui soient retirés » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
La loi prévoit que les organismes d'assurance maladie qui auront été choisis par les bénéficiaires de la couverture complémentaire sont tenus d'assurer, pour leur compte, la gestion des prestations en nature auxquelles ils ont droit. En effet, ceux-ci « ne peuvent refuser cette prise en charge ». Laquelle prend effet à la date de la décision du préfet ou du directeur de la caisse d'assurance maladie.
La couverture complémentaire, pour les bénéficiaires ayant opté pour un organisme complémentaire, est effective dès réception, par ce dernier, du document attestant de l'ouverture de leur droit.
Si, à l'issue de la période de un an, l'assuré dépasse le plafond de ressources, l'organisme complémentaire choisi est tenu de lui proposer de prolonger sa couverture, pour une nouvelle période de un an, à un tarif n'excédant pas un plafond fixé par arrêté. Ainsi, « le “sortant” du dispositif CMU aura la possibilité de rentrer progressivement dans le droit commun. Il se verra en effet ouvrir un tarif spécial pendant un an » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Cette possibilité n'est offerte qu'aux personnes qui ont décidé d'adhérer à une mutuelle ou une société d'assurances. Les bénéficiaires de la CMU sont donc incités « à choisir une mutuelle, une institution de prévoyance ou une société d'assurances pour gérer leur couverture complémentaire » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Le financement de la couverture maladie de base est assuré par des transferts financiers liés à la suppression de l'assurance personnelle et de l'aide médicale départementale. Celui de la protection complémentaire provient d'une participation de l'Etat et de l'instauration d'une nouvelle taxe, due, par les mutuelles et les sociétés d'assurances, sur leur chiffre d'affaires santé.
La couverture maladie de base est financée par différents transferts financiers.
La disparition de l'assurance personnelle entraîne la suppression des cotisations versées, à ce titre, par :
• le fonds de solidarité vieillesse (FSV). A ce titre, la part du produit des droits sur les alcools, perçus par cet organisme, est diminuée de 5 %
• la caisse nationale des allocations familiales (CNAF). La part du produit des prélèvements sociaux opérés sur les revenus du patrimoine et affectée à la CNAF est ramenée de 50 % à 22 %. Il en va de même pour les prélèvements sociaux assis sur les produits du patrimoine (réduits de 50 % à 22 %). Cela constitue, selon Jean-Claude Boulard, un manque à gagner de 200 à 300 millions de francs par an pour la CNAF. Mais, estime-t-il, « cette perte de recette correspond, en fait, à une mise en conformité des charges réelles de la CNAF avec les compétences qui devaient lui incomber » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
L'assurance maladie perçoit donc :
• une fraction du produit des droits sur les tabacs, dans des conditions qui seront fixées par la loi de finances pour 2000
• les 5 % des droits de consommation sur les alcools qui étaient auparavant affectés au FSV
• les 28 % des prélèvements sur les produits du patrimoine, qui étaient jusqu'à présent attribués à la CNAF.
En outre, la cotisation due par les personnes assurant leur véhicule automobile est désormais perçue au profit de la seule CNAM. Auparavant, ces prélèvements étaient répartis entre les différents régimes, dont les régimes spéciaux.
Les départements n'ayant plus à supporter les charges d'aide médicale et du fait du transfert à l'Etat de compétences qui résultent de la mise en place de la couverture maladie universelle, la dotation générale de décentralisation (DGD) est diminuée.
Evaluée à environ 15 milliards de francs par an, elle est réduite d'un montant égal à l'allégement de charges provenant des dépenses réalisées au titre de l'aide médicale départementale pour 1997 (1), diminué de 5 % (pour tenir compte des charges indues). La réduction de la DGD est ensuite individualisée par département, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges résultant des transferts de compétences.
En outre, comme les crédits correspondant à l'aide médicale des bénéficiaires du RMI sont désormais inscrits dans la CMU, les sommes que les départements doivent consacrer à l'insertion des allocataires du RMI passent de 20 % à 17 %, pour la métropole (16, 5 % dans les DOM), du montant des crédits versés par l'Etat au titre de l'allocation dans le département.
(1) Sont exclus des dépenses d'aide médicale : les crédits de personnel, certains crédits sanitaires, comme ceux destinés à la lutte contre la tuberculose et des crédits de dépenses sociales, en particulier les crédits d'insertion du RMI.
Pour atténuer l'effet de seuil , les parlementaires ont adopté un amendement prévoyant la possibilité, pour les organismes complémentaires, de créer un fonds d'accompagnement à la protection complémentaire des personnes dont les ressources sont supérieures au plafond. Il sera alimenté par des contributions volontaires des organismes complémentaires.
La loi supprime les contingents communaux d'aide sociale. En contrepartie, chaque commune verra sa dotation forfaitaire diminuer. Les sommes ainsi dégagées viendront abonder la dotation globale de fonctionnement du département. Rappelons que les contingents communaux d'aide sociale représentent la participation financière des communes aux dépenses d'aide sociale des départements.
Actuellement, cette participation s'effectue sur la base des besoins des départements, de leur potentiel fiscal et des dépenses d'aide sociale. La contribution de chaque commune, au-delà d'un élément fixe qui correspond à la contribution versée en 1984, comprend un élément pouvant varier en fonction de critères fondés sur :
• la situation de la commune au regard de sa dotation globale de fonctionnement ou de son potentiel fiscal
• le nombre de bénéficiaires des prestations d'aide sociale ou d'admissions à l'aide sociale
• la structure de la population par classe d'âge ou la situation de l'emploi.
De ce fait, les taux de participation des communes aux dépenses d'aide sociale s'avèrent très variables.
Un « fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie » est créé. il prend la forme juridique d'un établissement public à caractère administratif.
La composition de son conseil d'administration et de son conseil de surveillance est renvoyée à un décret. Toutefois, le législateur a prévu la participation au conseil de surveillance de représentants :
• du Parlement
• d'associations œuvrant dans le domaine économique et social en faveur des populations les plus démunies
• des régimes obligatoires d'assurance maladie
• et des organismes de protection sociale complémentaire.
Les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds seront également fixées par décret.
Les dépenses du fonds sont constituées par :
• le remboursement intégral aux organismes de sécurité sociale des dépenses engagées au titre de la couverture complémentaire. Il s'agit d'un calcul forfaitaire, tenant compte du coût moyen que représente un affilié multiplié par le nombre de personnes prises en charge
• le remboursement, dans la limite de 1 500 F par an (soit 375 F par trimestre) et par assuré, aux mutuelles et assurances des sommes qu'elles consacrent à la prise en charge des bénéficiaires de la couverture complémentaire. Elles obtiendront un crédit d'impôt (voir ci-après).
• les frais de gestion administrative du fonds.
Elles sont constituées par :
• une dotation d'équilibre de l'Etat
• une contribution à versements trimestriels de 1, 75 % des organismes de protection sociale complémentaire, assise sur le montant hors taxes des cotisations et primes afférentes à la couverture des risques liés aux frais de santé, recouvrées au cours d'un trimestre civil, au titre de leur activité réalisée en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer.
Concrètement, les mutuelles, les institutions de prévoyance et les sociétés d'assurancesdéduisent, chaque trimestre, du montant de la contribution qu'elles doivent acquitter, une somme égale au produit de 375 F par le nombre de bénéficiaires de la couverture complémentaire. Lorsque le montant de la contribution due est inférieur à celui de la déduction, les organismes demandent au fonds le versement de cette différence.
Pour le Conseil constitutionnel, « s'il est vrai que les conditions de compensation des dépenses engagées[...] ne sont pas les mêmes selon que le choix des intéressés se porte sur un organisme de protection sociale complémentaire », cette situation est justifiée par le fait que « les organismes d'assurance maladie ont l'obligation de prendre en charge [...] la couverture complémentaire [alors que] en revanche les organismes de protection sociale complémentaire ont la simple faculté de participer au dispositif et la liberté de s'en retirer ».
Le solde annuel des dépenses et des recettes du fonds doit être nul. •
Sophie Courault
La loi refonde le titre du code de la famille et de l'aide sociale relatif à l'aide médicale de l'Etat. Les dispositions concernant l'aide médicale départementale sont supprimées.
Les étrangers résidant en France de manière irrégulière et dont les ressources ne dépassent pas le plafond de ressources prévu par la loi CMU ont droit à l'aide médicale de l'Etat. Cette exception à la régularité du séjour répond à « l'obligation de porter secours en cas de besoin urgent ou pour des raisons humanitaires à tout individu en situation de détresse » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard). Les étrangers en situation irrégulière sans domicile fixe doivent élire domicile auprès d'un organisme agréé ou auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale.
Le plafond de ressources en deçà duquel le droit à l'aide médicale sera ouvert est identique à celui retenu pour bénéficier d'une couverture médicale gratuite. L'aide médicale couvre également les ayants droit. Elle concerne, comme précédemment, les soins hospitaliers, y compris les consultations externes, et, pour les personnes justifiant d'une résidence ininterrompue en France depuis au moins 3 ans, les soins de ville.
De même, toute personne non résidente, présente sur le territoire français et dont l'état de santé le justifie, peut, par décision individuelle, bénéficier de l'aide médicale de l'Etat. Cette disposition recouvre deux hypothèses : des opérations humanitaires liées à des conflits et des cas individuels de Français n'ayant plus de liens avec la France, rapatriés de façon urgente.
La demande d'aide médicale peut, comme auparavant, être déposée auprès d'un organisme d'assurance maladie d'un centre communal d'action sociale du lieu de résidence de l'intéressé des services sanitaires et sociaux du département de résidence des associations ou organismes à but non lucratif agréés à cet effet par décision du représentant de l'Etat dans le département.
L'organisme, auprès duquel la demande a été déposée, établit un dossier et doit le transmettre, dans les 8 jours, à la caisse d'assurance maladie, qui en assure l'instruction pour le compte de l'Etat. L'admission à l'aide médicale de l'Etat est décidée par le préfet, pour unedurée de un an, qui peut déléguer ce pouvoir au directeur de la caisse primaire d'assurance maladie. Auparavant cette compétence appartenait au président du conseil général.
Les demandeurs, dont la situation l'exige, sont admis immédiatement au bénéfice de l'aide médicale de l'Etat.
Les prestations prises en charge par l'aide médicale de l'Etat peuvent être recouvrées auprès des personnes tenues à l'obligation alimentaire à l'égard des bénéficiaires de cette aide. Les demandeurs sont informés du recouvrement possible auprès des personnes tenues à l'obligation alimentaire. Les dispositions de l'article 144 du code de la famille et de l'aide sociale ne sont pas applicables.
(1) Voir ASH n° 2061 du 6-03-98.
(2) Voir ASH n° 2126 du 2-07-99.
(3) Voir ASH n° 2127 du 9-07-99.
(4) Voir notamment ASH n° 2126 du 2-07-99.
(5) Le député Jean-Claude Boulard (PS, Sarthe) avait été chargé par le gouvernement d'une mission sur la mise en place d'une couverture maladie de base et complémentaire. La loi sur la CMU est inspirée des conclusions de son rapport. Voir ASH n° 2085 du 18-09-98.
(6) Le préambule de la Constitution de 1946 « garantit à tous, notamment, à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ».
(7) Voir ASH n° 2128 du 16-07-99.
(8) Voir ASH n° 2114 du 9-04-99.
(9) La constatation de la présomption de l'absence, au sens de l'article 112 du code civil, permet au juge de procéder aux actes nécessaires à la représentation de la personne présumée disparue, à l'entretien de la famille ou aux charges du mariage, notamment.
(10) Les dispositifs médicaux à usage individuel sont des produits destinés à des fins de diagnostic, de prévention ou de traitement d'une maladie, d'une blessure ou d'un handicap.
(11) Voir ASH n° 2124 du 18-06-99.
(12) Voir ASH n° 2124 du 18-06