« Moi je suis né dans ce quartier. Le seul boulot que je sais faire, c'est celui-ci. Moi, je suis né avec le social, et je crois que je vais mourir avec » (animateur, 28 ans). « Le social, je l'ai découvert dans mon quartier et dans ma famille. Quand on a connu ce que j'ai connu, on ne peut plus se taire. Il faut faire en sorte que cela n'arrive plus aux autres » (animatrice, 28 ans)... Ils sont nombreux, souvent émouvants, les témoignages des assistants sociaux, animateurs et éducateurs d'origine étrangère de la région Nord-Pas-de-Calais recueillis par Emmanuel Jovelin. Analysant les facteurs qui ont mené ces fils et filles des banlieues vers le travail social, ce doctorant en sociologie révèle des logiques de professionnalisation multiples et souvent entremêlées : vocation, liée à la similitude entre leur milieu d'origine et celui où ils sont amenés à intervenir repli, pour les « accidentés biographiques », jeunes en échec scolaire ou surdiplômés confrontés au chômage promotion sociale, pour ceux qui ont voulu faire mentir l'adage « fils d'ouvrier, tu deviendras ouvrier »... Derrière la description des parcours, transparaît le difficile passage du rôle de « leader de quartier », bénévole ou payé occasionnellement, à celui de professionnel. Difficile, car en basculant du rôle d' « objet » à celui d' « acteur » du dispositif social, ces travailleurs sociaux d'origine étrangère ont conscience d'être instrumentalisés par les pouvoirs publics, qui leur attribuent une mission de contrôle et de pacification. C.G. Devenir travailleur social aujourd'hui. Vocation ou repli ? - L'exemple des éducateurs, animateurs et assistants sociaux d'origine étrangère - Emmanuel Jovelin -Ed. L'Harmattan - 130 F.
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Devenir travailleur social aujourd'hui. Vocation ou repli ?
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