Comment a évolué l'image de la personne souffrant de troubles psychiques ? - Disons que ce problème d'image ne concerne plus seulement les familles des malades, mais la société tout entière. Il faut bien se rendre compte en effet que la vie des personnes souffrant de troubles psychiques est en train de se modifier considérablement. Alors qu'autrefois, elles étaient hospitalisées très longtemps et très souvent, la majorité d'entre elles vit désormais dans la cité. Et tout le problème est de savoir comment celle-ci peut les accueillir et les insérer. Car les images négatives du passé avec les hospitalisations, l'isolement sont encore bien ancrées dans les esprits. De plus, les médias parfois insistent sur l'aspect difficile de la maladie psychique, en montrant, à l'instar de certaines émissions récentes, des centres spécialisés dans les cas les plus lourds. Or ces derniers sont loin d'être représentatifs. Nous pensons donc que s'il y a une information correcte sur la situation des personnes qui souffrent de troubles psychiques et donc « un autre regard », elles seront mieux accueillies dans la cité. Mais cela suppose qu'on explique que les troubles psychiques sont une maladie qui peut être soignée. Et qu'avec un accompagnement adapté, la vie dans la société redevient possible. Les pouvoirs publics ont-ils fait suffisamment d'efforts en matière d'information ? - Non, mais il faut bien admettre qu'informer sur la maladie psychique est difficile et nécessite beaucoup de prudence : de quoi parle-t-on ? Que peut-on dire aux gens ? Pourtant ce travail d'information et de prévention est très important, car la maladie survient la plupart du temps à l'adolescence sans qu'on s'y attende, les personnes ne présentant pas ou très peu de signes avant-coureurs. Sans compter qu'il est souvent difficile de distinguer ce qui relève de la crise d'adolescence ou d'un début de pathologie. Néanmoins, plus tôt on interviendra, plus le patient aura de chances de retrouver un équilibre. Or la première réaction des familles est de se protéger et de se taire. Alors que c'est au contraire en en parlant à d'autres qu'on arrive à trouver des solutions. C'est pour cela que l'Unafam joue un rôle majeur à travers ses permanences qui, dans tous les départements, permettent aux familles concernées de se sentir accueillies et de sortir de leur isolement. Que demandez-vous aux pouvoirs publics ? - Nous leur demandons, de façon très ferme, de chiffrer et de mettre à sa juste place l'accompagnement des personnes malades psychiques dans la cité. Car toute la difficulté est de savoir si, dans le cadre de la restructuration hospitalière, les moyens qui étaient affectés aux hôpitaux se retrouvent bien dans les structures d'accompagnement. Or ce ne sont pas les mêmes unités de mesure. Auparavant il suffisait de regarder le nombre de lits. Aujourd'hui, avec le secteur psychiatrique, ce critère n'a plus aucun sens. D'où la nécessité d'inventer un nouvel instrument destiné à mesurer si les moyens de l'accompagnement dans la cité sont suffisants. Par exemple, pour avoir un rendez-vous dans certains centres médico-psychologiques, il faut deux mois... Signe que là, il y a un manque. Propos recueillis par Isabelle Sarazin
(1) « L'image de la personne malade psychique à travers les sociétés », du 4 au 6 juin 1999 à Lorient - Unafam : 12, villa Compoint - 75017 Paris - Tél. 01 53 06 30 43.