Alors que bon nombre de professionnels réclament aujourd'hui la création d'un diplôme de niveau I en travail social, comment se pose la question au niveau européen ? - C'est vrai qu'aujourd'hui en France, les travailleurs sociaux ne peuvent pas accéder directement à la recherche de haut niveau ou à des postes de cadres supérieurs. Ou alors ils doivent poursuivre des trajectoires personnelles de formation, pour l'essentiel, vers des diplômes universitaires de 3e cycle qui ne sont pas toujours bien articulés au travail social. D'où les réflexions actuelles sur la création d'un diplôme de niveau I en travail social en France. Et ce qui est intéressant de voir, c'est que cette question du niveau I ou du doctorat se pose dans la plupart des pays européens. Même dans ceux où il n'y a pas encore d'initiatives en ce sens, comme en Espagne par exemple, il y a des débats à ce sujet. On se rend compte également que dans les ex-pays communistes, comme la Pologne et la Hongrie, où l'on a besoin pour faire face aux nouvelles problématiques sociales de travailleurs sociaux et d'enseignants pour les former, le doctorat en travail social prend une dimension politique et économique importante. Que peut nous apprendre l'Europe ? - On peut déplorer qu'en France, on soit très peu informé sur ce qui se passe en Europe. Nous espérons que notre étude, mais aussi les échanges lors de ce colloque, donneront aux personnes, qui réfléchissent à la création d'un diplôme de niveau I en France, les moyens de se poser les questions différemment. Sachant qu'il n'y a pas de modèle transposable tel quel en raison de l'hétérogénéité des conceptions du travail social et de la diversité des appellations au niveau européen. On s'aperçoit que les doctorats en travail social stricto sensu, comme en Suède, Finlande ou encore en Suisse, sont peu nombreux. En revanche des diplômes supérieurs (dont des doctorats) s'inscrivant pour tout ou partie dans le champ du travail social existent dans de nombreux pays. A noter d'ailleurs que, dans certains Etats, on a pris des dispositions particulières donnant accès au doctorat aux titulaires d'un diplôme en travail social. C'est le cas à Berlin où les diplômés de l'école sociale peuvent intégrer un doctorat de sociologie, pédagogie, philosophie ou sciences politiques pour mener une recherche dans le champ du travail social codirigée par des universitaires et des enseignants d'écoles de travail social. Enfin, un peu partout en Europe, fleurissent des « Masters » plus ou moins professionnalisés (Grande-Bretagne, Allemagne, Pays-Bas, Italie) à un haut niveau (bac + 5) ouvrant un accès au doctorat. Quelle lecture peut-on déjà faire ? - On constate que les questionnements qu'il y a en France sur les débouchés d'un diplôme de niveau I et le type de recherche à promouvoir traversent ces expériences. Notre étude, qui n'est pas terminée, montre bien que les doctorats permettent surtout d'accéder à l'enseignement ou à la recherche et peu aux postes d'encadrement supérieur. Par ailleurs, ce n'est pas parce qu'existe une discipline en travail social, comme en Suède ou en Finlande, que les travailleurs sociaux expérimentés y sont majoritaires. Toutefois la plupart de ces diplômes sont très récents et il est encore trop tôt pour en faire une évaluation. Propos recueillis par I.S.
(1) « Formations supérieures et travail social en Europe » - Organisé par la DAS et l'ONFTS : 1, cité Bergère -75009 Paris - Tél. 01 53 34 14 74.
(2) L'étude coordonnée par l'ETSUP et soutenue par le Fonds social européen, intitulée « Des doctorats en travail social. Initiatives européennes », devrait être bouclée à la fin de l'année 1999. Contact : Françoise Laot - ETSUP : 8, villa Parc-Montsouris - 75014 Paris - Tél. 01 44 16 81 81 - Voir ASH n° 2108 du 26-02-99.