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Une réflexion nationale sur les expériences de correspondants de nuit

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Réunis le 27 avril à Rennes, ville pionnière qui a mis en place en 1996 un service de correspondants de nuit, les représentants d'une soixantaine de communes ont tenté de tirer le bilan de ces expériences de médiation urbaine. Et une vingtaine d'entre elles (1) ont saisi l'occasion pour créer le comité constitutif d'une « association des villes correspondants de nuit » qui sera chargé de mettre en commun démarches et réflexions. Se développant un peu partout en France, soit à l'initiative du réseau des régies de quartiers (2), soit, comme c'est le cas à Rennes, à celle des municipalités via une association ad hoc, elles suscitent autant d'engouement que d'interrogations sur leur positionnement face aux autres intervenants : police, travailleurs sociaux, bailleurs sociaux. En outre, souligne Jean-Yves Gérard, adjoint au maire  (PS) de Rennes et président de l'association Optima, qui gère les correspondants de nuit, « aucun autre métier de la médiation ne fait l'objet d'un tel travail de structuration ».

Des ambivalences à lever

A cet égard l'ouvrage présenté lors de ce colloque et réalisé par Optima   (3) qui dresse un bilan de trois années de pratiques est tout à fait intéressant. Et ce, d'autant que les options défendues - correspondants devant de préférence ne pas résider dans le quartier, participation financière des habitants par exemple -sont différentes de celles choisies pour de nombreuses expériences menées par le réseau des régies de quartiers. Et vient donc compléter le Guide des correspondants de nuit que le réseau avait publié (4).

Il reprend notamment, sous forme de synthèse, l'étude menée par l'université de Rennes-II sur le service des médiateurs nocturnes rennais (5). « Peut-on, d'ores et déjà, considérer que le dispositif [...] constitue un nouvel outil de gestion de la cohabitation résidentielle transposable à d'autres sites urbains ? », se sont, entre autres, demandé les chercheurs. Et si, à l'issue de leur enquête, il apparaît que les correspondants de nuit ont acquis une forte légitimité, émergent également des zones d'ombres et une série de difficultés. Ainsi, selon l'étude, les correspon-dants parviennent à restaurer une forme de contrôle social, mais « il n'est pas certain qu'ils disposent de la possibilité de pallier la carence communautaire ». Or, celle-ci est bien, de l'avis des auteurs, à l'origine de la tendance des habitants « à se décharger sur un tiers dans la prise en charge des difficultés de la cohabitation résidentielle ». Par ailleurs, la légitimité des correspondants de nuit est fragilisée par la difficulté à délimiter leurs fonctions  : entre volonté de collaboration étroite et insistance sur la complémentarité, l'ambivalence (notamment dans les relations avec la police) est parfois grande. D'autant qu'elle se double « d'une forte imprécision attachée à l'usage du terme de médiation »   : difficulté à argumenter la distinction avec le travail social, réduction parfois à de la surveillance ou à de la communication.

L'urgence d'une clarification se fait donc sentir, conclut l'étude, en particulier sur les liens police/correspondants de nuit. Car, de l'avis des représentants institutionnels que les chercheurs ont rencontrés, « la municipalisation du service n'offre pas de garantie suffisante face au risque de dérive sécuritaire ». Ils plaident donc pour l'instauration d'un véritable statut juridique du correspondant de nuit à l'échelle nationale. D'autres s'opposent en revanche farouchement à l'institutionnalisation de ces dispositifs, donnant leur préférence à la restauration de la continuité du service public, voire de son prolongement dans la nuit. Si le débat reste ouvert, il est clair, estiment les auteurs, que ces expériences ne pourront perdurer sans que soit clairement levée « l'ambiguïté entre une fonction répressive et une fonction préventive ».

Notes

(1)  Villes fondatrices : Arles, Aubervilliers, Blois, Cergy, Château-Thierry, Chevilly-la-Rue, Clichy-la-Garenne, La Rochelle, Le Blanc-Mesnil, Lormont, Nantes, Pau, Pontoise, Rennes, Strasbourg, Valentigney.

(2)  Voir ASH n° 2085 du 18-09-98.

(3)  Correspondants de nuit. Eléments pour une politique publique locale - Optima : 30, rue Louis-Hémon - 35200 Rennes - Tél. 02 99 50 61 14. L'ouvrage sera diffusé notamment dans les préfectures, chez les bailleurs sociaux, dans les directions départementales de la police judiciaire.

(4)  Voir ASH n° 2073 du 29-05-98.

(5)  Les correspondants de nuit : l'émergence d'une profession incertaine - Laboratoire de recherche en sciences humaines et sociales : Campus Rennes-II-Villejean : 6, av. Gaston-Berger - 35000 Rennes. Tél. 02 99 14 10 00.

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