La médiation locative consiste pour un organisme à s'interposer entre un propriétaire bailleur et un locataire, soit en pratiquant la sous-location, soit en assurant la gestion de logements loués. Afin de contribuer à la mise en œuvre du droit au logement, certains organismes comme les associations Pact-Arim et les agences immobilière à vocation sociale (AIVS) ont développé de tels outils, pour accompagner les personnes en difficulté dans leur recherche d'un logement adapté et durable. L'instauration d'une telle intermédiation est, en effet, souvent une condition indispensable pour lever la réticence des bailleurs à l'accueil de ces familles. La médiation locative permet ainsi « de faciliter le logement des personnes défavorisées dans le parc privé puisque le propriétaire est assuré de percevoir un loyer, le risque locatif étant pris en charge par l'organisme médiateur » (Rap. A. N. n° 856, tome III, Cacheux).
Toutefois, cette intervention a un coût plus élevé qu'une gestion locative classique, la population visée étant socialement et financièrement fragilisée. Afin de conforter la médiation locative, la loi du 29 juillet 1998 de lutte contre les exclusions a institué une aide au profit des associations et des organismes à but non lucratif qui pratiquent la sous-location ou la gestion immobilière de logements destinés à des personnes défavorisées.
Exclusive de l'aide aux organismes logeant à titre temporaire des personnes défavorisées (1), elle est accordée aux organismes agréés par le préfet qui ont conclu une convention avec l'Etat. Le montant de l'aide est attribué par logement, de façon forfaitaire.
L'aide est financée par l'Etat. Selon le secrétariat d'Etat au logement,20 000 logements par an pourront ainsi y être admis, ce qui représente un coût de 60 millions de francs par an pour 1999.
A noter : ce dispositif est applicable dans les départements d'outre-mer.
Seuls certains organismes qui pratiquent la sous-location ou la gestion immobilière au profit de personnes défavorisées sont éligibles à l'aide. Il s'agit :
• des associations
• des centres communaux ou intercommunaux d'action sociale
• des organismes à but non lucratif
• des unions d'économie sociale.
Toutes autres formes de statuts sont donc exclues. Ainsi, les agences commerciales et les sociétés anonymes autres que les unions d'économie sociale ne peuvent y prétendre.
La demande d'aide doit être déposée par l'organisme concerné auprès du préfet de département.
Pour pouvoir bénéficier de l'aide forfaitaire à la médiation locative, les organismes doivent pratiquer la sous-location ou la gestion immobilière au profit de personnes défavorisées, être agréés et avoir conclu une convention avec l'Etat.
Seuls les logements pris à bail par l'organisme et sous-loués par lui (dont les baux glissants), ainsi que les logements qu'il a pris en mandat de gestion sont susceptibles d'être pris en compte pour l'attribution de l'aide. S'agissant de ces derniers, l'administration souligne que le contenu du mandat doit permettre à l'organisme concerné de disposer d'une réelle maîtrise sur les conditions d'attribution des logements.
Les préfets doivent privilégier la mobilisation du parc privé. Mais ils doivent toutefois veiller à ce que les logements concernés répondent bien à la définition de logements « décents », au sens de la loi Besson du 31 mai 1990 (2). A cet égard, les préfets doivent vérifier que les logements présentent un niveau de qualité satisfaisant, et respectent au minimum les règles minimales d'habitabilité ou les conditions d'éligibilité aux allocations de logement familiale (ALF) ou sociale (ALS) (3). En outre, les logements doivent être situés dans un périmètre géographique permettant une réelle possibilité d'insertion des occupants, ou à défaut bénéficiant d'une desserte correcte par les transports en commun.
Dans le parc public HLM, les préfets ne peuvent, sauf exception, accepter que des baux glissants, et devront bien vérifier la réalité du transfert de bail.
En revanche, sont exclus de l'aide les logements dont l'organisme est propriétaire ainsi que ceux qui font l'objet d'un bail à réhabilitation (4), sauf si le preneur les a donnés en mandat de gestion à l'organisme concerné.
• Article 40 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998, J. O. du 31-07-98.
• Décret n° 98-1029 du 13 novembre 1998, J. O. du 15-11-98.
• Circulaire UHC/IUH/31 n° 98-105 du 20 novembre 1998, B. O. M. E. L. T. T. n° 23 du 25-12-98.
L'aide est destinée à permettre d'accroître l'offre de logements en direction des personnes défavorisées. Sont tout particulièrement visés, les publics prioritaires des plans départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD). Concrètement, il s'agit des ménages qui sont sans logement, en cours d'expulsion, ou logés dans des taudis, des habitations insalubres précaires ou de fortune, ou encore, de ceux qui sont confrontés à un cumul de difficultés financières et d'insertion sociale.
L'aide doit donc être inscrite dans le cadre du PDALPD.
Les associations, les centres communaux et intercommunaux d'action sociale, les autres organismes à but non lucratif et les unions d'économie sociale, doivent obligatoirement avoir fait l'objet d'un agrément préalable pour bénéficier de l'aide forfaitaire.
A ce titre, les préfets devront veiller à ce que les organismes concernés présentent des garanties quant à leur fiabilité financière et leurs « capacité-références antérieures », leurs implantations locales, leurs compétences sociales et la qualification de leurs personnels, indique l'administration.
Les organismes qui pratiquent des activités de gestion immobilière pour le compte d'un bailleur privé dans le cadre d'un mandat de gestion ne peuvent obtenir l'agrément que s'ils sont en possession de la carte professionnelle et, par conséquent, s'ils respectent les conditions correspondantes en matière de garanties financières, d'assurance et de diplôme. L'organisme doit être effectivement titulaire de la carte professionnelle, le seul fait d'en avoir fait la demande ne pouvant pas donner lieu à l'agrément.
L'agrément est délivré sans limitation de durée. Toutefois, en cas de manquement grave et après mise en demeure restée infructueuse, il peut être retiré à tout moment par le préfet.
Le bilan d'occupation annuel doit, notamment, faire apparaître le nombre de logements maximal inscrit dans la convention triennale pour bénéficier de l'aide, ainsi que le nombre de logements prévu dans la convention annuelle financière. Doivent également y figurer des indications portant sur le type de logements effectivement mobilisés pendant tout ou partie de la durée de la convention et leur implantation exacte (ville, rue et numéro) et sur la forme juridique de la mobilisation du logement (sous-location, bail glissant, mandat de gestion). En outre, tout en respectant l'anonymat des ménages occupants, le bilan doit préciser le statut de l'occupation et ses caractéristiques selon les catégories des ménages (personnes isolées, familles monoparentales...), le montant et la nature des ressources des personnes (RMI, SMIC...), la durée d'occupation. Si le logement a changé d'occupant au cours de la période, chaque occupation devra être clairement identifiée dans le bilan.
La convention est conclue pour une période de 3 ans, à compter du premier jour du mois suivant sa signature, entre le préfet et l'organisme concerné. Elle doit s'inscrire dans les politiques définies par les PDALPD et le Fonds de solidarité pour le logement (FSL). Elle fixe le nombre maximal de logements concernés par l'aide forfaitaire et le montant prévisionnel de l'aide pour la première année d'application. Elle prévoit également la présentation d'un bilan annuel d'occupation de ces logements.
La convention détermine le nombre maximal et les caractéristiques techniques des logements qui peuvent obtenir de l'aide forfaitaire, ainsi que les engagements de l'organisme en ce qui concerne les ménages bénéficiaires.
Le nombre maximal de logements pouvant se voir attribuer de l'aide constitue le plafond du nombre de logements pour lequel l'organisme concerné pourra être aidé durant la période. Les modalités d'attribution de ceux-ci devront figurer dans la convention. Etant précisé que les critères retenus doivent être ceux définis dans le PDALPD, « notamment au bénéfice des publics prioritaires du plan ». L'administration attire, par ailleurs, l'attention des préfets sur la nécessité que, dans le cadre de la convention,l'organisme s'engage sur la salubrité du parc public.
En outre, la convention fixe, pour une durée de un an renouvelable, à compter du même premier jour du mois suivant la date de sa signature, le calcul et le montant de l'aide attribuée et les modalités de son renouvellement.
Enfin, la convention doit également prévoir la production d'un bilan annuel d'occupation de ces logements (voir encadré ci-contre) et préciser la nature des données qui devront y figurer. La signature de l'avenant financier annuel ou d'une nouvelle convention triennale est subordonnée à la production de ce bilan.
La convention est signée entre l'organisme pratiquant la sous-location ou la gestion immobilière et le préfet du département.
Elle peut être étendue à d'autres partenaires, tels les collectivités locales et les bailleurs qui apportent leur concours financier. Lequel peut venir, soit en complément de l'aide forfaitaire de l'Etat pour augmenter le montant de l'aide globale, soit en déduction pour permettre une augmentation du nombre de logements mobilisés.
S'agissant du parc public, les préfets doivent s'attacher à ce que les organismes bailleurs soient parties à la convention et y participent à hauteur du risque locatif transféré à l'organisme pratiquant l'intermédiation. Dans ce cas, les préfets doivent privilégier la participation venant en déduction de l'aide de l'Etat.
La convention peut être résiliée par l'une ou l'autre des parties avec un préavis de 3 mois. Toutefois, en cas de non-respect de la convention ou en l'absence de production du bilan, le préfet peut résilier la convention dans le délai de un mois après mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception.
Dans la limite du montant prévisionnel prévu dans la convention et dans ses avenants annuels, l'aide attribuée chaque année est calculée en fonction du nombre de logements pris à bail ou en gestion immobilière et mis à disposition des personnes défavorisées.
Le montant forfaitaire annuel de l'aide est fixé par logement à 3 200 F en Ile-de-France et à 2 900 F sur le reste du territoire. Il est actualisé au 1er janvier de chaque année, en fonction de la variation annuelle de l'indice du coût de la construction, par arrêté des ministres chargés du budget, des affaires sociales et du logement.
Le montant maximal de l'aide est calculé par période de 12 mois renouvelable, à partir du montant forfaitaire annuel et du nombre de logements inscrit dans la convention financière annuelle.
La périodicité de la liquidation de l'aide, trimestrielle ou semestrielle, est prévue dans la convention.
Un acompte représentant 30 % du montant prévisionnel de l'aide peut être versé à la signature de la convention et de l'avenant annuel au bénéficiaire de l'aide. Toutefois, cette possibilité est réservée aux organismes qui gèrent déjà, sous forme de bail ou de mandat de gestion, un nombre de logements supérieur à 30 % du nombre maximal de logements concernés par l'aide forfaitaire et fixé dans la convention. En outre, ceux-ci doivent être attribués à des ménages dans des conditions identiques à celles définies par la convention.
Exemple : une convention signée en mars 1999 (démarrant donc le 1er avril 1999) fixe à 50 logements le nombre maximal de logements aidés sur 3 ans, mais à seulement 30 leur nombre pour la première année. L'aide financière de l'Etat pour la période allant du 1er avril 1999 au 31 mars 2000, sera de 2 900 F x 30 = 87 000 F (hors Ile-de-France). Le montant de l'acompte a uquel l'organisme aura éventuellement droit est égal à 30 %de 87 000 F, soit 26 100 F .
Chaque mois, les préfets doivent vérifier que les logements ouvrant droit à l'aide sont effectivement pris à bail ou en mandat de gestion par l'organisme concerné et sont attribués dans les conditions prévues par la convention.
Cependant, la vacance temporaire du logement, en l'attente de la désignation du ménage attributaire ou en cas de départ du ménage, ne remet pas en cause le droit à l'aide. Les temps de vacance devront toutefois, dans les deux cas, être les plus brefs possibles, souligne l'administration.
En outre, dans le cas de baux glissants d'une durée inférieure à un an (durée légale de la convention financière), l'occupation sera réputée effective pour la durée de un an, quel que soit le temps passé par l'occupant sous le statut de sous-location précédant le glissement du bail. Enfin, les préfets doivent s'assurer lors de la signature des avenants financiers ou du renouvellement triennal des conventions, que l'aide déjà apportée aux logements en sous-location dont l'organisme demande le renouvellement n'a pas entraîné pour leurs occupants un maintien dans le temps plus que nécessaire de leur statut de sous-locataire.
L'aide forfaitaire à la médiation locative n'a pas vocation à se substituer aux autres aides existantes. Ainsi en fonction de la situation particulière des ménages concernés, rien ne s'oppose, selon la circulaire, « à ce que des missions d'accompagnement social lié au logement soient parallèlement décidées par le Fonds de solidarité pour le logement pour les ménages accueillis dans les logements faisant l'objet d'une aide forfaitaire ».
De même, le FSL peut soit accorder une aide directe aux ménages dont la situation le justifie, soit garantir le paiement des loyers.
En revanche, l'aide forfaitaire est exclusive de l'aide aux organismes logeant à titre temporaire des personnes défavorisées (ALT). L'ALT s'inscrit, en effet, dans une autre logique, celle de l'hébergement en urgence de ménages en difficulté. En outre, souligne l'administration, le versement direct de cette prestation à l'association ou au centre communal d'action sociale limite les risques encourus par ceux-ci. Aussi, les services de l'Etat doivent-ils vérifier auprès des caisses d'allocations familiales que les logements bénéficiant de l'aide forfaitaire à la médiation locative n'ont pas, au cours de la même période, bénéficié de l'ALT.
Sophie Courault
(1) Voir ASH n° 2098 du 18-12-98.
(2) Au sens de la loi Besson, les personnes ou les familles éprouvant des difficultés particulières en raison de l'inadaptation de leurs ressources ou de leurs conditions d'existence ont droit à une aide par la collectivité pour accéder à un logement décent et indépendant ou s'y maintenir.
(3) La superficie minimale du logement pour l'attribution de l'ALF est de 16 m2 pour 2 personnes, plus 9 m2 par personne supplémentaire dans la limite de 70 m2 pour 8 personnes et plus elle est de 9 m2 pour une personne seule, augmentée de 7 m2 par personne supplémentaire pour le droit à l'ALS. En outre, pour les deux allocations, le logement doit disposer d'un poste d'eau potable, de moyens d'évacuation des eaux usées, d'un W.-C. particulier dans les maisons individuelles ou d'un W.-C. commun situé à l'étage ou semi-étage dans les immeubles collectifs et d'un moyen de chauffage.
(4) Le bail à réhabilitation est un contrat par lequel un immeuble est loué à un preneur en vue de son amélioration par des travaux, de sa location à usage d'habitation, notamment à des personnes défavorisées pendant la durée du bail (12 ans au minimum), et de sa restitution en bon état d'entretien.