Le conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) devait examiner le 18 mars le plan stratégique d'action pour 1999-2002 de réforme globale du système de santé, dévoilé quelques jours plus tôt par son président Jean-Marie Spaeth. Ce plan comprend 22 mesures couvrant l'ensemble du secteur de la santé y compris des domaines, tel celui de l'hôpital, qui ne relèvent pas directement de la compétence de l'assurance maladie. Censé permettre de dégager 62 milliards de francs d'économies sur quatre ans, le plan stratégique d'action s'inscrit dans un contexte de forte hausse des dépenses de santé. Selon les dernières statistiques de la CNAM, celles-ci ont en effet augmenté de 1,9 % en janvier dernier, avec une évolution des dépenses de soins de ville de+ 2,8 % sur un an. Si les dépenses des établissements médico-sociaux et des cliniques privées sont orientées à la baisse (respectivement - 3 % et - 3,5 %), celles des hôpitaux publics, en revanche, progressent de 2,4 % en janvier.
« L'assurance maladie est aujourd'hui un payeur aveugle », déplore Gilles Johanet, directeur de la CNAM. Aussi, son plan vise-t-il à permettre à l'assurance maladie de devenir un « acheteur avisé ».
Dans ce secteur, 20 milliards de francs d'économies sont attendues des différentes mesures envisagées. La CNAM propose notamment un double système de sélection du conventionnement des médecins. Le conventionnement serait fondé, d'une part sur le niveau de compétence des professionnels de santé (à ce titre une certification publique régulière - tous les sept ans - de leur niveau de compétence est envisagée) et, d'autre part, sur les besoins sanitaires. Ainsi, dans les régions et les disciplines où existe une surdensité médicale, le conventionnement ne serait possible qu'à hauteur du remplacement des départs de médecins. En outre, le champ de conventionnement pourrait être modulé en fonction de l'habilitation professionnelle.
Dans le souci de plafonner les dépassements d'honoraires, la CNAM suggère par ailleurs de passer un contrat avec les médecins à honoraires libres.
Concernant la régulation des dépenses médicales, elle envisage la mise en place d'un dispositif qui combine une régulation collective des dépenses par la fixation d'enveloppes de dépenses médicales et une récupération individuelle d'une partie des dépassements auprès des professionnels. Enfin, en matière de dépenses de soins dentaires, une redéfinition des domaines d'intervention de l'assurance maladie permettrait notamment de donner la priorité aux soins en direction des jeunes qui pourraient ainsi bénéficier d'une prise en charge à 100 % pour les soins et les prothèses.
L'implication des assurés dans la démarche qualité suppose, selon Gilles Johanet, de rendre obligatoire l'usage du carnet de santé « et demain du volet de santé de la carte Vitale » et de conditionner le niveau de remboursement du patient à sa présentation. Ainsi, le taux de remboursement pourrait être réduit de 10 points à compter du 1er janvier 2000 pour les actes non inscrits sur le carnet de santé, sauf cas de force majeure. De plus, le plan propose, à partir de cette même date, de majorer de 10 points le taux de prise en charge des actes effectués dans le cadre d'une option de continuité des soins (option du médecin référent). A l'inverse, le refus systématique de continuité et de transparence des données sanitaires de la part du patient ne lui ouvrirait pas droit à cet avantage.
Enfin, l'assurance maladie proposerait un bilan de soins aux personnes non atteintes par une affection de longue durée, mais qui ont cependant une consommation de soins élevée et qui n'ont pas opté pour une démarche de continuité des soins. L'objectif étant de permettre « aux patients de s'approprier progressivement une démarche optimale de soins ».
Une série de mesures visent entre autres à développer la chirurgie ambulatoire, à harmoniser la prise en charge de l'insuffisance rénale (soit une économie de 1,2 milliard de francs), et à intégrer les frais de transports sanitaires dans le budget des hôpitaux. Sur ce dernier point, l'économie réalisée serait de 780 millions de francs.
La CNAM propose d'étendre son expérience de contrôle sur l'offre de soins de ville et des cliniques privées aux hôpitaux publics et d'harmoniser les modes de financement des soins hospitaliers, publics et privés. En outre, la gestion du patrimoine hospitalier serait confiée à une agence nationale créée à cet effet. Le gain attendu de ces mesures est évalué à 32 milliards de francs.
La CNAM suggère enfin de fixer les tarifs de remboursement par classe de médicaments. Ce mode de remboursement commencerait à s'appliquer aux médicaments génériques avant d'être étendu à toutes les classes de médicaments à l'exception des médicaments réellement innovants ; ce qui représente une économie de 8,5 milliards de francs. Par ailleurs, les conditions de prise en charge des cures thermales seraient réexaminées.