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Les orientations de la protection judiciaire de la jeunesse

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A la suite du renforcement, par le Conseil de sécurité intérieure du 27 janvier dernier, des mesures prises en matière de délinquance juvénile, une circulaire du ministère de la Justice définit les orientations de la protection judiciaire de la jeunesse. En outre, les premiers éléments concernant les centres de placement immédiat sont diffusés. Ainsi que le nouveau cahier des charges des centres éducatifs renforcés.

(Circulaire PJJ NOR JUS 99 500 35 C du 24 février 1999, non publiée)

Le 27 janvier dernier, à l'issue du Conseil de sécurité intérieure, le gouvernement a arrêté de nouvelles mesures pour lutter contre la délinquance des mineurs (1). Des dispositions s'inscrivant, pour la plupart, dans le prolongement de celles adoptées lors du précédent conseil en date du 8 juin 1998 (2) et qu'elles sont venues conforter avec, notamment, la mise en place de 50 centres de placement immédiat ainsi que l'augmentation du nombre des centres éducatifs renforcés et des classes-relais. Pour permettre à la protection judiciaire de la jeunesse  (PJJ) de répondre à ses missions, le gouvernement a décidé de lui attribuer « des moyens sans précédent », affirme Sylvie Perdriolle, directrice de la PJJ, dans une circulaire commentée aux directeurs régionaux et départementaux, lors d'une réunion le 8 mars, et que nous reproduisons ci-après. Ce même jour, les syndicats de la PJJ ont reçu du ministère le nouveau cahier des charges des centres éducatifs renforcés, dont nous présentons les grandes lignes (voir encadré). Un document qui n'est pas encore finalisé pour les centres de placement immédiat. Toutefois, dans une lettre de cadrage également reçue par les syndicats le 8 mars, l'administration apporte d'ores et déjà d'utiles précisions sur ce nouveau dispositif (voir encadré).

Annonçant « la création de 1 000 emplois d'éducateurs d'ici à 2001 [et] le développement de projets qui feront appel au secteur public et au secteur associatif habilité », la circulaire du 24 février ouvre trois axes de travail qui permettront aux services « de construire des réponses à la hauteur des difficultés que vivent les mineurs qui leur sont confiés par l'autorité judiciaire ». En premier lieu, les méthodes d'action éducative doivent être renouvelées pour mettre en place un accompagnement éducatif soutenu auprès des mineurs. Il s'agit « de s'atta- cher particulièrement aux contenus de l'action conduite à l'égard des préadolescents et adolescents délinquants et en danger confiés par décision de justice », explique la direction de la PJJ. Etant précisé que le secteur associatif habilité doit être associé à la mise en œuvre de ces orientations, dans le respect de l'organisation propre aux associations. Ensuite, la priorité doit être donnée à la prise en charge des mineurs délinquants. Enfin, la territorialisation de l'action de la PJJ doit être poursuivie. Son articulation avec l'ensemble des acteurs institutionnels ou associatifs « doit encore progresser » et la couverture des besoins être poursuivie dans certains départements.

Le texte de la circulaire d'orientation du 24 février 1999 relative à la protection judiciaire de la jeunesse

[...]

I - RENOUVELER LES MÉTHODES DE L'ACTION ÉDUCATIVE

« La première analyse épidémiologique relative aux publics suivis par le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse a été réalisée en septembre 1998 par l'Inserm. Selon ses résultats, ces mineurs cumulent des difficultés multiples, graves et chroniques dans tous les domaines de la vie quotidienne : un mineur sur deux est issu d'une famille dissociée, un sur dix a un parent décédé ; ils quittent la vie scolaire en moyenne vers 15 ans et demi, les filles connaissent un taux de tentative de suicide très au-dessus de celui de la population générale, ils pratiquent une consommation précoce d'alcool, de tabac, de médicaments et de hachisch  les violences agies et subies font partie de leur quotidien. »

Cette étude montre aussi que la famille reste un point d'appui important pour ces jeunes.

Cette étude vient confirmer l'analyse selon laquelle les mineurs confiés aux services éducatifs vivent des situations marquées par des difficultés nouvelles que les personnels, dans l'action éducative qu'ils mènent au quotidien, ont pu constater et analyser depuis plusieurs années.

Les professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse sont également témoins du développement des comportements de violence des mineurs, qu'ils les constatent dans l'environnement familial et social de ces derniers, ou qu'ils y soient confrontés dans les structures où ils partagent avec eux la vie quotidienne. Ces comportements créent des tensions qui ne peuvent rester sans réponse.

Le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse et le secteur associatif sont interrogés sur leurs capacités d'action ainsi que sur la pertinence de leurs réponses face aux nouveaux problèmes posés par les publics qu'ils suivent. Le nouveau contexte social, économique et familial des mineurs oblige à la fois à améliorer la connaissance des publics suivis et à repenser les différents modes d'intervention éducative auprès des mineurs. Ces derniers doivent tendre vers la mise en place d'un accompagnement éducatif soutenu dans les différents modes de prise en charge.

1. Se doter des outils de connaissance des publics suivis

Une meilleure connaissance des publics suivis doit permettre de mieux définir le projet éducatif adapté à chaque mineur et, pour l'administration de la protection judiciaire de la jeunesse, de contribuer utilement à l'élaboration des politiques publiques.

1.1. Mieux définir les projets éducatifs

Les résultats de l'étude épidémiologique cités brièvement ci-dessus rappellent que tout projet pédagogique nécessite une bonne connaissance des publics suivis. Des publics différents appellent des pédagogies différentes pour tenir compte de l'âge, du sexe, des comporte- ments, du contexte territorial, des motifs de la saisine par les magistrats. Ce travail de connaissance doit être en permanence actualisé.

Un projet éducatif doit être élaboré pour chaque mineur. Il importe pour ce faire de connaître ses difficultés et d'explorer toutes les questions le concernant : situation familiale, contexte social, état de santé, bilan scolaire ou bilan de compétences, consommation de drogues, comportements à risques, violences subies. Une exploration suffisamment construite de ces questions à travers une approche interdisciplinaire permet aussi de mobiliser le mineur concerné par l'intérêt qui lui est porté.

1.2. Contribuer à l'élaboration des politiques publiques

Chaque service détient une connaissance significative, à partir des mesures suivies, des conditions de vie des jeunes sur un territoire donné et, en conséquence, a une réelle capacité d'expertise qui peut éclairer l'élaboration des politiques publiques.

Cette fonction d'expertise des services de la protection judiciaire de la jeunesse est, à ce jour, souvent sollicitée par les administrations concernées par les mêmes questions, notamment dans le cadre de la politique de la ville. Elle est essentielle pour l'élaboration des contrats locaux de sécurité et des politiques locales en général. Elle peut, cependant, être encore améliorée.

Vous veillerez à garantir la production régulière et fiable des statistiques relatives à l'activité des services et à favoriser la création d'outils complémentaires d'études ou simplement d'élaboration commune des connaissances.

A cet égard, la démarche des observatoires partagés de données entre juridictions et services des conseils généraux apparaît pertinente et devra être développée. La contribution des CREAIHN ou d'autres organismes régionaux pourra être sollicitée à ce titre.

2. Mettre en place un accompagnement éducatif soutenu

Les nouvelles difficultés auxquelles sont confrontés les mineurs faisant l'objet d'une décision de justice ainsi que leurs familles, mais aussi l'affaiblissement des potentiels de réponses en termes d'insertion et d'intégration existants dans l'environnement social, imposent de repenser les modalités de l'accompagnement éducatif.

La fonction de relais assurée par le travail éducatif dans la démarche plus globale de réinsertion sociale acquiert une importance d'autant plus grande, lorsque les familles sont particulièrement démunies pour se projeter dans un avenir possible.

La mise en œuvre d'un accompagnement éducatif soutenu auprès des uns et des autres est aujourd'hui une nécessité absolue qui passe par une présence plus affirmée des adultes et par le recours à des outils spécifiques permettant de construire cette présence.

2.1. Aider les parents à exercer leurs responsabilités éducatives

L'inventaire des modalités de travail avec les familles, qui a été effectué par la direction au cours de ces derniers mois et qui vous sera prochainement diffusé, fait apparaître que si beaucoup de structures disposent d'un protocole d'accueil des familles au début de la mesure éducative, tel n'est pas le cas pour les modalités de travail au cours de la mesure. Certains services invoquent la surcharge de travail, d'autres contestent l'idée qu'il ne s'agisse que d'une question de moyens et évoquent une plus grande difficulté à s'adresser aux parents.

La conduite de l'action éducative doit tendre à favoriser l'exercice de leurs responsabilités éducatives par les parents, à faire en sorte qu'ils soient réellement acteurs de l'évolution de leurs enfants, notamment lorsqu'ils sont placés. Leur implication dans le déroulement de la mesure est essentielle pour l'évolution des mineurs concernés.

Il convient de rappeler à cet égard que les décisions de justice relatives aux mineurs en danger ou délinquants ne transfèrent pas l'exercice de l'autorité parentale aux services saisis. En matière civile, les textes demandent que soit porté aide et conseil à la famille. En matière pénale, les parents sont obligatoirement convoqués à tous les stades de la procédure, comme en matière civile. Ils doivent être rappelés à leurs responsabilités éducatives, ainsi que l'indique la circulaire du 15 juillet 1998 relative à la politique pénale (3). Ils sont, en outre, civilement responsables des dommages commis par leurs enfants.

En raison des caractéristiques du public suivi sur décision de justice, une attention particulière doit notamment être portée dans la conduite de l'action éducative au maintien des relations des adolescents avec leur père et la famille de leur père, quand les familles sont dissociées, ce qui est le cas d'une situation sur deux (contre une sur cinq dans la population générale) et crée des pertes de références importantes pour les mineurs.

La connaissance ou la reconnaissance des contextes culturels des histoires familiales des mineurs étrangers ou d'origine étrangère est un préalable souvent indispensable à leur intégration.

Enfin, doivent être chaque fois évaluées les ressources éducatives de la famille élargie.

Les travaux engagés avec les parents ou avec des associations familiales par un certain nombre de services du secteur public et du secteur associatif devront être diffusés et les projets en ce sens soutenus ou mis en œuvre.

2.2. Renforcer la présence éducative auprès des mineurs pris en charge

Les rapports précités sur le traitement de la délinquance des mineurs et la prise en charge des mineurs ont souligné l'écart existant entre les nouveaux besoins de ces mineurs et les réponses qui s'avèrent en partie inadaptées parce qu'elles ont été mises en place, pour la plupart,  à une autre période et dans un autre contexte.

Ils soulignent la nécessité d'organiser une permanence de l'accompagnement éducatif, une présence accrue des professionnels auprès des mineurs et de réaliser avec eux des projets qui puissent les remobiliser. Ils critiquent la discontinuité des parcours des mineurs qui réitèrent des infractions ou qui connaissent les difficultés les plus graves et au regard de cette discontinuité, l'absence d'articulation suffisante des institutions concernées et même des services concernés à l'intérieur de chacune de ces institutions.

Les mineurs suivis par les services éducatifs ont pour la grande majorité d'entre eux été confrontés à une défaillance de la présence des adultes au moment où cette présence est la plus nécessaire et structurante. L'objectif de réinsertion de ces mineurs dans la vie sociale passe par un premier objectif de remobilisation de l'individu, de restructuration de la personne (travail sur la motivation, le projet, l'estime de soi, le respect de l'autre...). Cet objectif, pour être atteint, suppose que le mineur reconstruise une relation positive avec l'adulte. Toutes les stratégies éducatives envisagées passent par cette reconstruction qui implique la présence des professionnels au quotidien, dans des actions et des temps partagés avec les mineurs.

Cette dimension plus intensive de l'accompagnement éducatif suppose un renouvellement des pratiques professionnelles qui mettent en œuvre des projets qui font appel à des supports d'activité et à la mobilisation des réseaux existants dans l'environnement des mineurs.

La présence soutenue des professionnels auprès des jeunes doit pouvoir se décliner dans les différentes fonctions éducatives.

Pour le milieu ouvert, elle implique des méthodes de travail qui intègrent la prise en compte de l'environnement du mineur et la construction de projets communs. L'exercice de la mesure individuelle doit être relayé par des temps d'échange, qui peuvent être collectifs, entre personnels du service et mineurs, mais aussi avec les familles.

En hébergement, c'est l'élaboration d'un projet d'activités de jour reposant sur les moyens propres de l'institution mais aussi sur les ressources du dispositif départemental et des partenaires qui constituera le support privilégié de l'accompagnement éducatif quotidien.

Ces différents points seront abordés dans la troisième partie de ce titre.

2.3. Développer les partenariats éducatifs

L'action éducative doit pouvoir s'appuyer sur de multiples ressources qui sont, pour partie, extérieures à l'institution. Près de 500 associations contribuent à ce jour à l'insertion sociale ou professionnelle des mineurs placés sous protection judiciaire, dans des domaines très variés :sport, scolarité, santé, culture, action professionnelle... Cette collaboration permet de diversifier les réponses éducatives, de multiplier les projets innovants, de faire bénéficier les mineurs suivis d'un accès à des équipements locaux. Le travail éducatif doit prendre en compte la recherche de solutions concrètes pour les jeunes sur les problèmes de santé, de scolarité, de formation ou d'accès à l'emploi.

Trois domaines d'intervention sont prioritaires au regard de l'évolution du public : la scolarisation, la santé, et l'insertion sociale et professionnelles des mineurs âgés de plus de 16 ans.

2.3.1. La scolarisation

La grande majorité des mineurs suivis par les services éducatifs ne possède pas les acquis de base qui conditionnent une possible insertion sociale. C'est la possibilité même de comprendre les règles du jeu social et, par conséquent, d'espérer s'y faire une place, qui leur est ainsi refusée.

En outre, les jeunes sans qualification voient diminuer, plus que par le passé, leurs chances d'entrer dans le monde de l'emploi, ce qui tend à détruire chez eux le désir de se projeter dans un avenir personnel et collectif.

L'école demeure le lieu privilégié des apprentissages fondamentaux et de la socialisation, parfois le seul lieu où les jeunes peuvent acquérir les codes, les repères et les usages pour vivre en société. La nécessité du maintien en scolarité des mineurs de moins de 16 ans, sous la responsabilité de l'Education nationale, doit être constamment réaffirmée.

En application de la circulaire conjointe entre le ministre de l'Education nationale et le ministre de la Justice en date du 25 août 1985, les collaborations entre ces deux administrations n'ont cessé de se renforcer, de se développer et de se diversifier.

Les actions suivantes doivent être poursuivies ou développées :

 les directeurs départementaux de la protection judiciaire de la jeunesse, avec les inspecteurs d'académie et les conseils généraux doivent organiser des commissions de suivi des élèves en risque de marginalisation afin de permettre la recherche précoce de solutions pédagogiques et éducatives adaptées 

 les services doivent développer des actions de suivi scolaire, en lien avec les parents et les enseignants, afin de mobiliser les mineurs et de prévenir leur exclusion 

 l'aménagement de la prise en charge scolaire doit figurer parmi les objectifs éducatifs des services. Parmi les élèves soumis à l'obligation scolaire, certains ont cessé toute fréquentation du collège et d'autres manifestent des comportements incompatibles avec les règles susceptibles de permettre leur présence dans les établissements.

Des modalités pédagogiques et éducatives particulières doivent être proposées à ces élèves : une priorité sera accordée aux classes-relais en collège, avec la participation éventuelle de personnels de la protection judiciaire de la jeunesse ou leur expertise technique.

Sur ce point, le Conseil de sécurité intérieure du 27 janvier 1999 a accéléré le plan de développement des classes-relais pour que 250 puissent fonctionner d'ici l'année 2000 et décidé la création d'internats par le ministère de l'Education nationale, notamment pour les jeunes issus des quartiers sensibles. Une note conjointe avec le directeur de l'enseignement scolaire vous sera prochainement adressée sur ce sujet.

2.3.2. La santé des mineurs

Selon la définition de l'Organisation mondiale de la santé, la santé est un état de bien-être physique, psychique et social et pas seulement l'absence de maladie ou d'infirmité.

Les rapports précités, et plus particulièrement l'enquête de l'Inserm, font apparaître les difficultés aggravées de santé rencontrées par les mineurs suivis, ainsi que l'importance des conduites addictives et celle des comportements à risque (violences et tentatives de suicide). Par ailleurs, de plus en plus de mineurs présentent des difficultés importantes sur le plan psychologique et psychiatrique et requièrent une prise en charge éducative spécialisée.

La connaissance des troubles rencontrés et l'accès aux soins constituent des modalités indispensables de l'action éducative. Les actions qui permettent aux mineurs d'être sensibilisés à leur santé peuvent être multiples et faire appel au sport, à l'hygiène, à l'alimentation, aux vaccinations, etc. La santé peut constituer un thème d'action éducative tout comme l'action éducative peut être de nature à améliorer la santé des mineurs.

Une enquête récente menée conjointement par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse et la direction générale de la santé fait apparaître que si la mise en place d'un partenariat avec les différents acteurs de santé et en particulier les intersecteurs de psychiatrie infanto-juvénile est reconnue par tous comme une nécessité, les situations sont très contrastées selon les départements.

C'est pourquoi les directeurs territoriaux doivent s'attacher à l'élaboration des partenariats utiles en liaison avec les directeurs régionaux et départementaux de l'action sanitaire et sociale.

Il est important à ce titre qu'ils participent aux instances compétentes telles que les conférences régionales de santé ou les comités départementaux de santé mentale et qu'ils organisent un maillage avec l'ensemble des acteurs de santé s'occupant des adolescents : pédiatres, réseau de médecins généralistes pouvant intervenir de manière régulière auprès des services, intersecteur de psychiatrie infanto-juvénile. Les infirmiers et les psychologues qui interviennent auprès des services doivent être les premiers promoteurs de ces partenariats.

Un programme d'actions en matière de santé sera annoncé d'ici la fin du premier semestre 1999.

2.3.3. L'insertion professionnelle

L'accès des jeunes pris en charge aux dispositifs de droit commun doit demeurer un objectif des services éducatifs.

Les directeurs régionaux s'attacheront à ce que les publics les plus en difficulté soient pris en compte dans les programmes régionaux de formation et d'insertion professionnelle. Cet objectif doit être inscrit de manière prioritaire à l'occasion de la négociation des prochains contrats de plan Etat-région.

Les directeurs départementaux devront veiller à ce que soient développées des actions permettant l'accès à des activités professionnelles ou d'insertion professionnelle, en particulier pour les mineurs qui ne peuvent bénéficier des dispositifs de droit commun.

Des actions d'insertion professionnelle peuvent, en effet, être développées localement en s'appuyant sur un partenariat très diversifié :les réseaux d'entreprises (création d'un réseau local d'employeurs, appel à des entreprises et structures d'insertion ou aux plans locaux d'insertion par l'économique lorsqu'ils existent)   les missions locales et les PAIO  les agences locales pour l'emploi  les associations de formation professionnelle  les organismes qui mettront en œuvre des actions dans le cadre du programme TRACE, etc.

Certaines actions partenariales sont susceptibles d'être cofinancées par le Fonds social européen. De même, les actions de solidarité internationale peuvent bénéficier d'un cofinancement du secrétariat à la coopération dans le cadre des opérations Ville-Vie-Vacances.

Enfin, le partenariat peut concerner des actions de parrainage par des particuliers bénévoles ou des associations qui accompagnent les mineurs dans leurs démarches d'insertion et de formation ou qui les familiarisent avec le monde de l'entreprise, comme c'est le cas de l'association de retraités du monde de l'entreprise Agir-abcd avec laquelle une convention a été signée en septembre 1998.

3. Mettre en œuvre l'accompagnement éducatif soutenu dans chacune des fonctions éducatives

3.1. L'action éducative en milieu ouvert

Pour mobiliser des préadolescents et adolescents autour de projets éducatifs concrets, les services doivent pouvoir faire appel à plusieurs méthodes d'intervention : la construction d'une relation person-nalisée, l'apport d'une approche clinique mais aussi, et dans le même temps, l'appel à des supports d'action diversifiés : remise à niveau scolaire, travail sur la santé, actions culturelles et sportives...

Le partage de projets au quotidien avec les mineurs suivis rend une rencontre possible avec les adultes qui les conduisent, et permet aussi de développer des relations en groupe. Les actions déjà engagées à ce titre par de nombreux services devront être développées.

Pour réaliser cet accompagnement éducatif plus soutenu, il conviendra plus particulièrement de s'attacher aux modalités de mise en œuvre suivantes :

 les services devront définir leur lien avec le dispositif d'accueil de jour départemental et, de manière plus générale, les collaborations avec toutes les instances et personnes ressources (services publics, associations, bénévoles...) susceptibles de proposer des activités pour renforcer et prolonger l'action éducative 

 une meilleure articulation doit être trouvée entre les services qui prennent en charge directement les mineurs  elle est à rechercher en priorité avec les services de l'Education nationale pour permettre la rescolarisation des mineurs suivis, avec les services de santé pour permettre un suivi et des prises en charge effectives, et avec les missions locales pour l'insertion professionnelle 

 l'inscription territoriale des services doit faciliter la connaissance du contexte d'intervention, le travail en partenariat, la mobilisation des associations et des professionnels ou bénévoles qui peuvent intervenir auprès des mineurs et de leurs familles.

Par ailleurs, il convient de réfléchir, en concertation avec les juridictions, à l'opportunité de concevoir et mettre en place une modalité de travail éducatif permettant un renforcement de l'intervention pendant une durée courte chaque fois que cela s'avère nécessaire : certaines situations requièrent, en effet, une présence forte plusieurs fois par semaine, pendant le ou les premiers mois d'intervention.

3.2. Le placement des mineurs

La prise en charge des adolescents les plus difficiles, placés sur décision de justice, est aujourd'hui fragilisée, aussi bien dans les établissements du secteur public que dans ceux du secteur associatif.

Les raisons de cette crise sont multiples : mineurs non accueillis dans d'autres dispositifs, violence accrue des comportements, difficultés propres au secteur public liées à la gestion des personnels. La dimension de l'activité de jour, totalement présente dans les anciens internats, a été déléguée à d'autres institutions qui, pour nombre d'entre elles, ne répondent plus. Certains mineurs placés peuvent être insérés dans la journée dans d'autres structures, mais ce n'est plus le cas de la majorité d'entre eux, au moins lors du premier mois d'accueil.

Il est indispensable d'élaborer, pour tous les mineurs qui font l'objet d'une décision de placement, une pédagogie de l'accompagnement éducatif au quotidien.

3.2.1. Mettre en place un projet d'activités pour les mineurs placés

L'insertion dans les dispositifs de droit commun doit être l'objectif prioritaire pour les mineurs placés. Dans l'attente d'une telle insertion,  chaque mineur placé doit pouvoir accéder ou doit être conduit à suivre une activité de jour, péri-scolaire, d'insertion professionnelle, ou autre qui permette d'engager avec lui une action éducative. Les projets de service devront définir une organisation des contenus de la journée à partir de la présence des adultes et d'activités partagées avec les mineurs, en s'appuyant sur des ressources internes et externes.

Les directeurs territoriaux doivent s'attacher à ce que, pour le secteur public, l'articulation avec le dispositif d'accueil de jour soit expressément précisée dans les projets de service, de même que les partenariats ou l'appel aux intervenants extérieurs utiles.

Des actions conjointes entre secteur public et associatif habilité peuvent également être retenues.

Enfin, la décision de recruter des emplois-jeunes qui vient d'être prise par le gouvernement permettra de développer des activités dans la journée pour les jeunes qui ne sont inscrits dans aucune activité scolaire ou professionnelle, sous la responsabilité d'un éducateur (activités sportives, culturelles, artistiques, soutien scolaire, etc.).

3.2.2. Organiser le placement immédiat

L'accueil immédiat des mineurs requiert une méthode d'intervention spécifique : un temps d'évaluation et d'observation pendant une durée déterminée doit permettre de définir un projet pour les mineurs accueillis et une orientation utile. Les projets pédagogiques doivent être élaborés au regard de cette spécificité.

L'organisation d'un dispositif d'accueil associant le secteur public, le secteur associatif et l'aide sociale à l'enfance est nécessaire dans chaque département.

Les directeurs départementaux de la protection judiciaire de la jeunesse ont été chargés de la mise en place d'une cellule de coordination en concertation avec les juridictions, en premier lieu dans les 26 départements prioritaires, conformément aux décisions du Conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998. Ce dispositif a vocation à s'appliquer dans tous les départements.

Les modalités particulières de placement dans les centres de placement immédiat sont développées dans la deuxième partie.

Je rappelle, enfin, que l'organisation d'un dispositif d'accueil immédiat, quelle qu'en soit la forme, est indissociable de l'accueil à moyen terme, c'est-à-dire d'une organisation régionale qui doit permettre d'accueillir l'ensemble des jeunes au terme d'un bilan-orientation et qui doit comprendre une articulation forte avec les services éducatifs auprès des tribunaux pour enfants.

3.2.3. Diversifier les modalités de placement

Le placement des mineurs renvoie à des problématiques très diverses, qu'il s'agisse des âges, des histoires individuelles ou des objectifs de prise en charge que l'on assigne aux foyers. L'accueil d'urgence et la prise en charge dans la durée, les situations de crise et les projets d'insertion individuels ne peuvent être abordés de la même manière. Les mêmes réponses ne peuvent pas être apportées pour de très jeunes mineurs déscolarisés et pour des quasi-majeurs sans activité.

C'est pourquoi les directeurs territoriaux devront s'attacher à ce que chaque ressort régional ou, pour les grands départements très urbanisés, départemental, dispose d'une gamme de réponses appropriées et coordonnées entre secteur public et associatif de la protection judiciaire de la jeunesse et soumise à une concertation régulière avec les juridictions concernées. Un tel dispositif devra comprendre, outre les solutions concernant l'accueil immédiat et les projets de rupture, des formules de foyers scolaires, des solutions d'hébergement individualisé et le recours au placement en familles d'accueil.

Ces modalités d'accueil doivent être coordonnées pour éviter les ruptures de parcours des mineurs. Ainsi, un mineur accueilli en foyer doit pouvoir bénéficier de séjours de rupture ou de placements en famille d'accueil s'il y a lieu  de tels réseaux de prise en charge devraient, à terme, limiter les renvois des mineurs des structures.

3.3. Les dispositifs d'activités de jour

Les dispositifs d'accueil de jour ont, pour objectif, la remobilisation du mineur en vue de son insertion sociale et professionnelle. L'objectif n'est plus la qualification professionnelle seule, d'autres services peuvent intervenir à ce titre, mais l'accompagnement d'un mineur lors d'un parcours à construire avec lui, en fixant des objectifs déterminés autour, notamment, de la socialisation, des capacités relationnelles du jeune, du développement des compétences de base et de l'acquisition ou réacquisition des savoirs de base, de la confrontation à la pratique professionnelle, de l'accès aux dispositifs de droit commun, ainsi que cela a été déjà abordé lors du comité technique paritaire national sur l'insertion sociale et professionnelle en 1994.

Doivent être associées des activités culturelles ou sportives aux actions à vocation plus professionnelle.

Ceci requiert de développer des pédagogies adaptées, diversifiées, faisant appel à un travail individuel et de groupe, et de s'appuyer sur des partenariats actifs, tels des réseaux d'entreprise ou des associations prêtes à exercer un parrainage à l'égard des mineurs. Les parents, les familles peuvent être expressément associés à ces projets qui permettent de redonner des perspectives pour leurs enfants.

L'ensemble des supports d'activité qui constituent dans un département une gamme de réponses dans ce cadre doit concourir à la mission d'accueil de jour des mineurs les plus en difficulté. Dans chaque département les moyens existants devront être fédérés.

Pour le secteur public, les centres de jour ont vocation à mettre en œuvre des politiques d'insertion. Les activités qu'ils développent doivent, selon des conditions à définir dans le projet départemental, bénéficier à des mineurs qui nécessitent immédiatement une prise en charge éducative de jour pendant le temps nécessaire à la construction d'un projet individuel. La coordination de ces activités doit permettre de constituer un dispositif d'accueil de jour ouvert à tous les mineurs suivis par les services du département.

II. PRENDRE EN CHARGE LES MINEURS DÉLINQUANTS

La délinquance juvénile a connu ces dernières années une évolution préoccupante qui a conduit le gouvernement à arrêter lors des conseils de sécurité intérieure des 8 juin 1998 et 27 janvier 1999 un plan de lutte qui mobilise l'ensemble des services de l'Etat. Cette mobilisation se traduit pour l'administration de la protection judiciaire de la jeunesse par une priorité donnée à la prise en charge des mineurs délinquants.

Quatre points feront l'objet de développements : la spécificité de l'action éducative en matière pénale, le placement de mineurs délinquants, le suivi des mineurs incarcérés et les services éducatifs près les tribunaux (SEAT).

2.1. La spécificité de l'action éducative en matière pénale

L'ordonnance du 2 février 1945 édicte un principe de responsabilité pénale atténuée pour les mineurs, graduée selon l'âge de l'auteur de l'infraction et donne la priorité à l'éducation des mineurs et à la recherche d'une dimension éducative dans toute sanction.

L'action éducative conduite à l'égard d'un mineur délinquant doit prendre en compte à la fois la connaissance et la reconnaissance de l'histoire culturelle, familiale et singulière de ce mineur et la portée de l'acte commis. Le mineur doit pouvoir accéder à ce principe de responsabilité, indispensable pour l'élaboration de sa propre personnalité, et retrouver une capacité d'échanges avec son environnement. En cela, l'action éducative se distingue de celle conduite à l'égard des mineurs en danger.

Travailler sur l'acte commis, c'est, à partir de l'analyse des faits, conduire le mineur à une meilleure compréhension de cet acte et de sa responsabilité. Ce travail autour de l'acte doit donc traverser tout le déroulement de la mesure éducative pour aider le mineur à progresser dans sa compréhension des limites et des interdits.

L'action éducative menée auprès du mineur délinquant doit également prendre en compte la sanction prononcée. Loin d'être opposées, sanction et éducation sont deux dimensions indissociables de l'action éducative exercée dans un cadre pénal.

Si la démarche d'aide est, dans tous les cas, au cœur de l'action éducative, celle-ci, lorsqu'elle s'exerce dans le cadre pénal, ne peut faire l'économie de la part d'autorité et de contrainte nécessaires pour que le mineur reconnaisse son acte et le répare. Toute démarche d'éducation implique une capacité de transmission des valeurs, des interdits et une part de contrainte. La contrainte est présente dans l'action éducative menée dans le cadre judiciaire, qu'il soit civil ou pénal. Le travail éducatif mené s'appuie sur ce cadre et doit s'efforcer de le rendre lisible pour le mineur. En ce sens, l'adhésion du mineur au projet éducatif est un objectif et non un préalable.

Ces particularités de l'intervention éducative doivent être mises en œuvre dans les différentes mesures et peines prononcées en matière pénale. Elles impliquent également de veiller tout particulièrement à la continuité de l'action éducative des mineurs, notamment lorsqu'ils sont placés ou incarcérés.

2.1.1. L'exercice des mesures et des peines prononcées au titre de l'ordonnance du 2 février 1945

Le développement des mesures de réparation constitue une prio rité. Leur intérêt pédagogique est certain. Cette mesure conduit le mineur à réaliser un acte positif suite à l'infraction commise. Les parents sont associés à la mise en œuvre de la mesure. Une médiation avec la victime peut être engagée. Cette mesure présente, en outre, l'intérêt d'associer de multiples intervenants pour sa mise en œuvre :sociétés de transport, de logement, collectivités locales, écoles...

Elle peut figurer dans les contrats locaux de sécurité, faire l'objet de discussions dans le cadre des conseils communaux de prévention de la délinquance.

Les directeurs départementaux devront organiser le dispositif de mise en œuvre de cette mesure qui doit associer le secteur public et le secteur associatif habilité, en concertation avec les juridictions.

Des travaux seront engagés sur les contenus qui peuvent être donnés à cette mesure, les dynamiques qu'elle a permis de créer, les conditions qui favorisent la restauration de liens avec l'environnement social.

Pleinement reconnue dans le cas de la liberté surveillée et, plus récemment, de la réparation, l'approche éducative vaut tout autant pour la mesure de contrôle judiciaire.

L'exercice de cette mesure doit se faire dans la recherche de contenus éducatifs afin de trouver une articulation entre ces derniers et les obligations imposées par le contrôle judiciaire. Le travail sur la dimension éducative de ce type de mesures demande à être élaboré davantage et doit faire l'objet de débats professionnels.

Il en va de même pour ce qui concerne la mise en œuvre des peines de travail d'intérêt général et de sursis avec mise à l'épreuve.

2.1.2. Organiser la continuité des parcours éducatifs des mineurs

La délinquance juvénile se caractérise par la réitération d'infractions par les mêmes mineurs, sur de courtes durées. L'ensemble des rapports précités soulignent la discontinuité des parcours de ces mineurs et les dangers d'incohérence qui en résultent pour l'action conduite.

Toute interruption dans le parcours éducatif favorise le risque de récidive. Le rôle de “fil rouge” de l'action éducative tenu par les services de milieu ouvert est déterminant pour que le passage dans les différentes structures de prises en charge correspondent à une évolution et non à une juxtaposition d'échecs.

Les directeurs départementaux devront veiller, chaque fois qu'un mineur délinquant fait l'objet d'une nouvelle décision judiciaire, à ce que le service désigné initialement reste le service référent du mineur. Ils examineront avec les services éducatifs auprès des tribunaux et les services de milieu ouvert, les modalités de mise en œuvre possible de cet objectif sur chaque ressort et associeront les juridictions à cette démarche.

De même, quand une décision d'éloignement est ordonnée, le service référent doit assurer la continuité du suivi du mineur. En effet, une décision de rupture ou d'éloignement d'un mineur motivée par son intérêt ou par la gravité des faits commis, est ordonnée pour une durée qui sera déterminée par l'évolution de la situation. Il demeure indispensable de suivre cette évolution et de permettre des décisions cohérentes.

2.2. Le placement des mineurs délinquants

La spécificité des décisions de placement des mineurs délinquants est qu'une partie importante de ces décisions est prise dans l'urgence, soit par le parquet lorsqu'un mineur est interpellé la nuit, soit par le juge des enfants ou le juge d'instruction suite à une décision du parquet de déférer le mineur au tribunal. C'est pourquoi il est indispensable de mieux organiser et d'augmenter la capacité d'accueil immédiat des mineurs délinquants.

En outre, la gravité des faits commis ou le contexte de vie du mineur peut conduire le magistrat compétent à demander qu'il soit placé dans un lieu éloigné du lieu de commission de l'infraction ou de son environnement quotidien.

2.2.1. Les centres de placement immédiat

Lors du Conseil de sécurité intérieure du 27 janvier 1999, le gouvernement a décidé la création de 50 centres de placement immédiat strictement contrôlés entre 1999 et 2001. Ces centres s'appuient sur l'expérience acquise depuis plusieurs années par une dizaine de foyers spécialisés dans l'accueil d'urgence.

Ils auront pour mission d'accueillir sans délai les mineurs placés par un magistrat, en priorité sur le fondement des dispositions de l'ordonnance du 2 février 1945 et devront réaliser un bilan permettant l'orientation du mineur : bilan psychologique, scolaire, professionnel, familial, de santé, dans un délai de 3 à 4 mois.

Les mineurs délinquants placés au stade de l'instruction devront faire l'objet d'un contrôle strict pour éviter qu'ils ne quittent le centre sans l'autorisation et l'encadrement du personnel.

Les moyens en personnels seront renforcés.

Ces centres devront s'inscrire dans le dispositif départemental et régional de coordination défini ci-dessus.

Un cahier des charges définissant les modalités d'intervention des centres de placement immédiat est en cours d'élaboration et vous sera prochainement transmis  [NDLR : une lettre de cadrage donne cependant déjà d'utiles précisions, voir ci-dessous].

2.2.2. Mettre en œuvre des projets d'action éducative autour d'un temps de rupture

Le nombre des centres éducatifs renforcés sera porté à 100 dans les deux prochaines années. Conçus comme un élément du dispositif régional, ils s'adressent en priorité aux mineurs délinquants pour qui il apparaît nécessaire d'organiser une rupture avec leurs conditions de vie habituelle.

Le principe de ces dispositifs est l'encadrement quotidien des mineurs sur une durée déterminée. Ils doivent permettre un temps de rupture afin de confronter les mineurs à des rythmes et des modes de vie différents de ceux qu'ils ont précédemment connus. La présence quotidienne de personnels partageant avec les mineurs des projets constitue la condition indispensable pour structurer de nouveaux comportements.

Les projets pédagogiques peuvent être très divers, ce qui est déjà le cas à ce jour, à la condition de répondre aux objectifs qui seront définis dans le nouveau cahier des charges  [NDLR : voir encadré, ].

Lorsque la rupture implique un éloignement géographique, les directeurs départementaux des départements d'origine des mineurs concernés devront définir des modalités de travail avec les départements d'accueil afin de favoriser le suivi de l'action éducative et faciliter le contrôle des lieux d'accueil, notamment lorsqu'il s'agit de lieux de vie.

Premiers éléments d'information sur les centres de placement immédiat

Dans l'attente du cahier des charges, la lettre de cadrage adressée début mars par le ministère de la Justice aux syndicats de la protection judiciaire de la jeunesse donne des premières informations sur les centres de placement immédiat. Ces derniers, est-il indiqué, prendront en charge les mineurs dont le placement « doit permettre de répondre à la nécessité d'éloigner certains mineurs de leur contexte de vie habituel soit pour des raisons d'ordre public, soit parce que le maintien dans cet environnement est pour eux un facteur de danger ».

Le placement peut être ordonné en application de l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante mais aussi, « exceptionnellement », des dispositions du code civil sur l'assistance éducative, souligne le document. Le type de contrôle exercé au sein de l'établissement sur les mineurs étant déterminé par ce cadre judiciaire. Lorsque le placement intervient dans le cadre d'une instruction correctionnelle ou criminelle, la décision est prise par le juge des enfants ou le juge d'instruction chargé des affaires de mineurs. Le placement peut être assorti d'une mesure de contrôle judiciaire pour les plus de 13 ans (obligation de résider dans le centre, de suivre un enseignement scolaire ou professionnel, de ne pas se présenter dans certains lieux ou de ne pas fréquenter certaines personnes...).

La capacité de ces centres, qui auront une vocation interdépartementale, sera de 10 à 12 places, parfois de 6 à 8 seulement. Outre l'appui du dispositif éducatif départemental, chaque structure du secteur public comportera, pour l'accueil de 10 à 12 mineurs, 1 directeur, 1 chef de service éducatif, 9 éducateurs, 1 psychologue, 2 agents techniques d'éducation, 2 ouvriers professionnels, 1 secrétaire. Les centres accueilleront en priorité les mineurs âgés de 13 à 18 ans. Ceux qui ont entre 10 et 13 ans pourront également y être placés. Pour ces derniers cependant, le ministère juge « plus opportun » de rechercher des « solutions d'accueil individualisées ».

Les centres devront mettre en œuvre un « projet de service ». Il prévoira une organisation du centre permettant d'assurer la continuité des actions éducatives en groupe ou individualisées à l'intérieur ou à l'extérieur et devra répondre à une série d'exigences :

  l'immédiateté de l'accueil. Au cours d'un premier entretien, le directeur du centre, notamment, informera le jeune sur le règlement de la structure et son fonctionnement, lui expliquera l'objectif du placement ainsi que la place et le rôle des adultes. Les parents doivent être invités à participer à cet entretien ou, au moins, être rencontrés dans les délais les plus brefs. Le travail avec les familles devant être « clairement défini dans le fonctionnement institutionnel du centre »  

  un contrôle strict et un encadrement éducatif permanent des activités du mineur. Les activités individuelles et/ou collectives (soutien scolaire, ateliers divers, sports...) mises en place dans la journée, à l'intérieur ou à l'extérieur du centre, auront pour objectif « de remobiliser les mineurs, de permettre l'observation de leur comportement et leur réajustement, d'évaluer leurs capacités et leurs besoins ». Le nombre des personnels devra permettre un encadrement permanent des mineurs. Les nuits devront être gérées en double, avec un veilleur de nuit et un éducateur 

  l'orientation du mineur. Elle devra se faire dans un délai de 1 à 3 mois, sauf cas particulier. La proposition du centre, qui fera l'objet d'un rapport au juge, sera formulée après réalisation d'un bilan complet du jeune.

Un cadre national pour les centres éducatifs renforcés

Afin d'établir « les références communes qui fondent la spécificité des centres éducatifs renforcés par rapport aux autres modes de prise en charge », le ministère de la Justice a élaboré un cadre national fixé par un cahier des charges qui vient d'être soumis aux syndicats.

Ces centres sont des petites unités d'hébergement pouvant accueillir un groupe de 8 mineurs maximum, est-il indiqué. Leur idée force réside « dans la mise en place d'un accompagnement permanent des mineurs, dans les actes de la vie quotidienne comme dans les différentes démarches de remobilisation ». Accompagnement éducatif permanent qui doit créer les conditions d'une rupture pour les mineurs placés.

Les mineurs pris en charge sont « ceux qui ne relèvent pas (ou pas encore) d'une prise en charge collective traditionnelle mais qui ont besoin pour un temps limité d'être éloignés de leur milieu naturel ». Il s'agit, explique le ministère, de mineurs délinquants en grande difficulté, placés dans le cadre de l'ordonnance de 1945. La possibilité d'y placer des mineurs sur le fondement de l'assistance éducative peut cependant être négociée avec les conseils généraux.

La prise en charge a lieu pendant une durée limitée, autour de 3 mois, parfois jusqu'à 6 mois. Ce temps court doit permettre « l'évaluation des jeunes, de leur situation et des potentialités existantes en termes de solutions éducatives durables ».

Les centres peuvent être publics, associatifs ou mixtes, peut-on encore lire. Les normes concernant le nombre de jeunes accueillis et celui de leurs encadrants, fixées au sein d'une fourchette, sont fonction du contenu des projets.

« Le maintien de la mesure de milieu ouvert parallèlement au placement doit permettre une continuité éducative au-delà du temps de prise en charge dans le centre », note également le document. Les autres services éducatifs, hébergements ou dispositifs d'activités de jour sont, quant à eux, dans une position de partenaires ou d'accueil à la sortie du centre. La coordination est de la responsabilité des directeurs régionaux et départementaux de la PJJ. »

Dans le secteur public, les équipes éducatives doivent se composer « d'éducateurs, d'agents techniques d'éducation et, selon les possibilités, d'un chef de service éducatif fonctionnel, tous volontaires avec, si nécessaire et dans une proportion réduite, l'appoint possible de nouveaux titulaires sortant de formation ». L'équipe éducative doit comporter au maximum 6 personnels, « avec dans ce cas un nombre de mineurs accueillis équivalent à celui des encadrants ». Enfin, il est précisé que, dans le secteur associatif habilité, le coût global d'un centre ne devra pas excéder 2 800 000 F pour un fonctionnement annuel de 310 journées et une prise en charge minimale de 6 jeunes.

2.3. Le suivi des mineurs incarcérés

Lorsqu'un mineur est détenu, les services de la protection judiciaire de la jeunesse gardent une mission de suivi. Un service référent doit être désigné à cette fin. Autant que possible, il doit s'agir du service qui assurait précédemment l'accompagnement éducatif du mineur.

La participation des services de la protection judiciaire de la jeunesse aux “commissions incarcération” dans leur double dimension : institutionnelle d'une part, suivi individuel des mineurs incarcérés d'autre part, ainsi qu'aux commissions d'application des peines lorsqu'elles concernent un mineur, leur collaboration à l'élaboration des projets de service des quartiers mineurs représentent autant d'axes à investir. Il convient de définir et d'articuler le rôle de chacun dans le but d'améliorer les conditions de détention et de suivi des mineurs incarcérés.

Un soin tout particulier devra être apporté à la préparation et l'organisation de leur sortie en liaison avec les services qui prendront alors le relais de l'action menée en détention : organismes d'insertion, Education nationale, services sociaux et de santé...

Des travaux spécifiques sont engagés avec les services de l'administration pénitentiaire sur l'ensemble de ces points.

2.4. Le rôle du service éducatif auprès du tribunal

Le service éducatif auprès du tribunal occupe une place charnière entre la juridiction et l'ensemble des services, notamment dans l'exercice des décisions pénales.

La prévention de l'incarcération est la mission prioritaire du service éducatif auprès du tribunal.

Les directeurs régionaux sont chargés de la coordination des dispositifs d'accueil des mineurs qui font l'objet d'une demande de mandat de dépôt, entre départements, lorsque les besoins et les ressources territoriales l'imposent. Un dispositif régional devra notamment être mis en place dans la région Ile-de-France.

Les directeurs départementaux doivent organiser le recensement des places d'accueil disponibles chaque jour dans les structures éducatives pour que des solutions utiles soient systématiquement proposées aux magistrats en alternative à l'incarcération. Il leur appartient de déterminer les modalités de mise en œuvre utiles à cette fin, et notamment d'assurer la coordination entre services, en particulier entre les services éducatifs auprès du tribunal et les autres services.

Toutefois, il apparaît nécessaire de réaliser un état des lieux des différentes mesures exercées et des problèmes rencontrés par chaque service éducatif. Il devra conduire à faire le choix des missions qui leur sont dévolues dans le cadre de la politique départementale. C'est à partir de cette redéfinition des missions qu'une politique d'ensemble pour les services éducatifs auprès des tribunaux sera déterminée par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.

Des travaux ont déjà été réalisés par les services de la protection judiciaire de la jeunesse. Ils permettront de préparer un comité technique paritaire national en 1999 sur ce sujet.

III. LA TERRITORIALISATION DE L'ACTION DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

Les orientations qui viennent d'être développées requièrent une mise en œuvre adaptée au contexte territorial, une association étroite des acteurs concernés, une fédération plus grande des moyens du secteur public et du secteur associatif.

3.1. Conduire une politique publique adaptée au contexte territorial

La protection judiciaire de la jeunesse est une administration du ministère de la Justice, placée sous l'autorité du garde des Sceaux, dont la mission est la détermination des politiques et l'organisation des moyens qui permettent l'exécution de décisions de justice concernant les mineurs délinquants, les mineurs en danger et les jeunes majeurs.

Ces décisions de justice sont exercées par le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse et le secteur associatif habilité. Son contexte d'intervention est aujourd'hui celui de la décentralisation, en particulier en matière d'action sociale et de formation professionnelle.

La conduite de politiques adaptées à l'échelon territorial requiert une collaboration constante avec les juridictions, une participation accrue du secteur associatif habilité et, une coordination régulière avec les administrations d'Etat compétentes à l'égard des mineurs, ainsi qu'avec les collectivités locales.

3.1.1. Renforcer la coordination avec les juridictions

Le dispositif français de protection de l'enfance est fondé, d'une part, sur le principe de spécialisation d'une même juridiction en matière civile et pénale, d'autre part, sur l'interaction entre le judiciaire et l'éducatif dont les rôles sont distincts et complémentaires. De la qualité des relations entre les magistrats et les professionnels qui exécutent les mesures prononcées dépend la cohérence de l'action éducative menée à l'égard des mineurs et l'efficacité du dispositif départemental de protection de l'enfance.

Par ailleurs, les directeurs territoriaux sont chargés, en application du décret du 14 janvier 1988, d'harmoniser les actions du secteur public et du secteur associatif habilité sur leur ressort, de définir et d'évaluer les besoins de prise en charge, de diriger l'activité des services du secteur public.

A cette fin, il est indispensable qu'une coordination régulière et continue s'instaure avec les différentes instances de la justice : parquet et siège, à l'échelon régional et départemental.

Les directeurs départementaux de la protection judiciaire de la jeunesse doivent notamment veiller à maintenir des échanges continus avec les présidents et procureurs de la République des juridictions de leur ressort et avec les magistrats spécialisés pour mineurs, parquets des mineurs et tribunaux pour enfants ainsi que le précise la circulaire du 15 juillet 1998.

Ces échanges doivent porter sur l'élaboration des projets et schémas départementaux. Ils devront également s'attacher à la conduite de l'action éducative pour les mineurs difficiles ou très en difficulté et, à cette fin, organiser des réunions de travail. En effet, face à la complexité de certaines situations, il n'est possible d'élaborer des propositions de travail utiles que si une concertation régulière existe entre les différents acteurs de l'institution judiciaire. Ceci est déterminant pour l'organisation de l'accueil immédiat ainsi que pour la prévention de l'incar- cération des mineurs et l'élaboration de projets éducatifs appropriés.

A ce titre, ces travaux devront associer les responsables territoriaux de l'administration pénitentiaire.

3.1.2. Faire participer le secteur associatif

Le secteur associatif habilité exerce les deux tiers des décisions de justice. Il constitue un acteur essentiel des politiques conduites. Il doit être associé plus étroitement à la mise en œuvre des orientations ci-dessus définies.

Les travaux engagés sur le renouvellement des méthodes d'action éducative devront associer les responsables et les professionnels des établissements et services du secteur associatif habilité.

Leur concours est en effet indispensable pour permettre, d'une part, leur participation à l'évolution des pratiques professionnelles, d'autre part la définition des modalités d'articulation des capacités et des moyens des deux secteurs.

Il appartient aux directeurs territoriaux de définir, à chaque échelon, les modalités de concertation appropriée et de rechercher les modalités d'action qui permettent de développer les réponses adaptées.

Ils devront veiller à solliciter la participation du secteur associatif habilité, en priorité, pour le développement de l'exercice des mesures de réparation et de l'accueil des mineurs délinquants.

Les procédures d'habilitation doivent permettre de définir plus précisément le champ d'intervention des associations, au regard des orientations définies. Des conventions peuvent en préciser des modalités d'action ou d'organisation.

3.1.3. Développer un partenariat avec les administrations de l'Etat

Les services extérieurs de la protection judiciaire de la jeunesse ne sont pas placés sous l'autorité des préfets. Cependant, il appartient aux directeurs territoriaux de participer, dans le respect des attributions de chacun, aux réunions suscitées par les préfets avec les chefs de services des autres administrations de l'Etat. Cette coordination est indispensable, notamment pour la politique de la ville et pour la prépa-ration des contrats de plan entre l'Etat et les régions.

L'effort de l'Etat pour développer une stratégie de prévention de la délinquance urbaine implique que les services déconcentrés soient en capacité d'inscrire l'action de la protection judiciaire de la jeunesse dans les différents dispositifs de la politique de la ville. Les directeurs départementaux veilleront à être présents dans les instances où se définit une politique locale en matière de prévention et de traitement de la délinquance juvénile. Une importance particulière sera portée aux cellules justice-ville qui permettent la coordination de l'action des juridictions et des services déconcentrés.

En outre, il appartient aux directeurs départementaux de la protection judiciaire de la jeunesse d'organiser leur représentation, par délégation, dans les différentes instances de concertation. Ils sont seuls habilités à signer des protocoles d'accord avec différents services pour la prise en charge des publics suivis, les instructions de ces actions pouvant être déléguées aux directeurs de service.

3.1.4. Poursuivre l'élaboration de schémas départementaux conjoints avec les conseils généraux

La démarche des schémas départementaux conjoints prescrite par la loi du 6 janvier 1986 sur la décentralisation dans le domaine de l'action sociale est encore loin d'avoir produit tous ses effets puisque moins d'un quart des départements ont signé un schéma. Plusieurs séries de causes peuvent être avancées pour expliquer la situation actuelle :insuffisante définition du cadre par la loi, difficulté d'engagement pluriannuel, temps de réorganisation des collectivités territoriales...

Cette démarche doit pourtant être poursuivie :elle permet, par la confrontation des analyses des différents intervenants de définir des priorités communes, de rationaliser les dispositifs en renforçant les complémentarités, et d'élaborer les réponses utiles.

Aussi, les directeurs régionaux et départementaux doivent veiller tout particulièrement à la poursuite de ces travaux. En l'absence de schéma, des travaux peuvent être conduits et aboutir à des conventions ou protocoles concernant des actions spécifiques.

Je rappelle qu'a été engagé avec l'Assemblée des présidents de conseils généraux et le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, un travail de diagnostic et d'évaluation dans une quinzaine de départements, en matière de signalements, de coordination entre les partenaires du dispositif de protection de l'enfance, de schémas départementaux et de prévention de la délinquance pour déboucher sur des recommandations de travail. Il sera lancé le 30 mars prochain et se déroulera pendant un an.

3.2. Poursuivre la mise en œuvre d'une politique départementale

C'est à l'échelon du département que se construit une politique cohérente d'action éducative.

La circulaire du 22 juin 1990 relative au projet de service de la protection judiciaire de la jeunesse a conduit à élaborer, pour le secteur public, une démarche de schéma départemental. Les indicateurs élaborés en 1990 et 1993 seront réexaminés et actualisés. Cette démarche fera l'objet de nouvelles instructions. D'ores et déjà, les directeurs territoriaux devront s'attacher à ce que les projets départementaux garantissent les priorités d'action du secteur public ci-dessus définies.

Ils doivent, d'autre part, s'attacher à coordonner l'action des différents services du secteur public et du secteur associatif habilité et à fédérer leurs capacités afin de mettre en place dans chaque ressort un dispositif éducatif approprié.

3.2.1. Organiser la continuité de l'action éducative et l'animation pédagogique

L'organisation de la continuité de l'action éducative est aujourd'hui indispensable pour garantir le renforcement - dans certains cas la permanence - de la présence éducative auprès des jeunes confiés à la protection judiciaire de la jeunesse.

L'évolution des méthodes de l'action éducative est marquée par une diversification croissante des réponses reposant sur l'individualisation des prises en charge et la territorialisation de l'action éducative. L'une et l'autre ont conduit à la mobilisation de supports éducatifs de plus en plus diversifiés et innovants, que ce soient en matière d'insertion professionnelle, de remise à niveau scolaire, de

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