Pourquoi des états généraux des formateurs ? - A l'articulation de la demande sociale, de la commande politique et des besoins explicites et implicites des usagers, les formateurs sont aujourd'hui confrontés à plusieurs dérives. La première d'entre elles concerne l'hypertechnicisation du travail éducatif et social. Avec notamment la mise en place de démarches qualité et d'évaluation poussées qui entraînent un traitement uniforme des problématiques rencontrées. Or nous sommes, nous, convaincus que ces problématiques sont et doivent rester éminemment singulières. Le deuxième dysfonctionnement porte sur les moyens financiers alloués aux écoles de formation ou à l'action sociale : ceux-ci sont de plus en plus liés à des décisions politiques, prises à des fins électoralistes. Enfin, dernier problème : l'inflation de la production au détriment de l'analyse et de la recherche. Témoins privilégiés de certaines réalités, les formateurs, tout comme les travailleurs sociaux, devraient pouvoir élaborer des propositions concrètes susceptibles de prévenir les stigmatisations, les rejets et les exclusions que nous observons. Dans ce contexte, les états généraux ont pour objectif d'aider les professionnels à sortir de leur isolement et de mettre en question ces différentes dérives. Comment avez-vous conçu le programme ? - De manière assez ouverte et élargie. Alors qu'à l'origine, l'AFORSSSE est une association de formateurs d'écoles d'éducateurs et de centres du travail social, nous avons souhaité ne pas nous limiter à ces acteurs et accueillir l'ensemble des personnes qui, dans le champ social, se posent des questions sur la formation. En ce sens, nous avons prévu un certain nombre d'intervenants ayant des approches théoriques différentes, mais liés par la volonté de répondre réellement aux besoins d'un citoyen ou d'un usager. Et non pas à une pression sociale qui tenterait d'exclure ou de contenir tout comportement ou toute identité qui la gênerait. Alors que des personnes se trouvent aujourd'hui dans des souffrances sociales, psychiques ou identitaires, notre vocation n'est pas de les cloisonner ou de leur faire acquérir des comportements attendus par le collectif, mais plutôt de les accompagner pour qu'elles trouvent leur propre identité avec leurs différences dans la société. Comptez-vous déboucher sur des propositions concrètes ? - Tout à fait. Au-delà des propositions destinées à lutter contre les dérives décrites plus haut, ces états généraux devraient également permettre le démarrage d'un travail de recherche et de recueil de témoignages par rapport à la question de la violence et de la souffrance dans le champ social. Parallèlement à l'enquête actuellement menée par le Conseil supérieur du travail social (2) qui concerne plus directement les travail leurs sociaux, nous aimerions, pour notre part, créer des commissions réunissant aussi des usagers et des formateurs. Propos recueillis par N.M.
(1) AFORSSSE : 26, rue Campmas - 33130 Bègles - Tél. 05 56 49 07 64.
(2) Voir ASH n° 2103 du 22-01-99.