En 1997, les caisses d'allocations familiales (CAF) ont consacré plus de 1 milliard de francs aux centres de loisirs accueillant les enfants et près de 1 milliard de francs pour aider les familles pauvres à assumer leurs dépenses de loisirs (en particulier via les bons vacances). Pourtant, explique Bertrand Dubreuil, auteur d'une étude conduite par la CAF de Creil (Oise) (1), « à situation sociale similaire, certaines familles [...] parviennent à s'organiser, grâce aux dispositifs et aides publiques (notamment de la CAF), pour “bénéficier” de loisirs et de vacances, alors que d'autres familles en demeurent exclues ».
En effet, l'enquête, réalisée à partir d'entretiens approfondis, montre, qu'au-delà des contraintes financières ou familiales, le non-recours aux aides signe une faible intégration sociale, caractérisée par « un quotidien sans projets ». Il est également souvent associé à une histoire familiale « marquée par la pauvreté chronique, une certaine instabilité affective et une relative absence d'identité professionnelle ou sociale à laquelle se référer ». S'installent alors, pour ces familles qui ne partent jamais en vacances, un repli sur la sphère domestique et « une crainte du rapport social aux autres ». Et l'expérience d'un premier départ est souvent vécue comme une épreuve. Finalement, « les conduites de loisirs reflètent l'identité du groupe familial transmise au fil du temps, sa cohérence interne et la liberté accordée à chacun de ses membres ». Ce qui, conclut Bertrand Dubreuil, « montre bien qu'une politique d'aides aux familles exclusivement d'ordre financier est insuffisante et que l'accompagnement social des familles doit être mené en tenant compte des identités familiales ».
(1) Conduites de loisirs et identité familiale - Bertrand Dubreuil - Ed. CNAF - 1998 - Disponible gratuitement sur demande écrite au bureau de la recherche de la CNAF : 23, rue Daviel - 75634 Paris cedex 13.