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Pierre Benghozi, sur le questionnaire « violence » du CSTS

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Dans le cadre du Conseil supérieur du travail social (CSTS), le groupe de travail sur la violence a décidé d'interroger les travailleurs sociaux sur la façon dont ils ressentent cette réalité dans leur pratique quotidienne (1). Le point sur la démarche avec Pierre Benghozi, président de la commission (2).

Quel est l'objectif du groupe de travail sur la violence ? - En fait, le mandat adressé au CSTS par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité a émergé à la suite d'un certain nombre de situations de violence rencontrées sur le terrain du travail social dont se sont fait l'écho certains médias, comme les ASH, et certaines organisations professionnelles. Néanmoins, afin d'éviter les approches négatives et uniquement corporatives, l'objectif du groupe de travail est de resituer cette violence dans son contexte socio-culturel, politique, juridique et institutionnel, d'appréhender ses processus et ses causalités à travers ses multiples manifestations et d'étudier les moyens de la prévenir. C'est donc un sujet colossal que nous abordons à partir des travailleurs sociaux avec l'idée qu'ils sont sans doute les témoins privilégiés de cette réalité. Et c'est la compréhension des violences en général qui nous permettra d'examiner ce qu'il en est dans la pratique quotidienne des professionnels. Pourquoi un questionnaire ? - Ce n'est pas dans la tradition du CSTS de faire des questionnaires, c'est même la première fois. Mais il nous a semblé important d'ouvrir notre réflexion à l'ensemble des intervenants du travail social afin d'avoir d'emblée un aller-retour avec le terrain. Car notre souci est d'être au plus près des préoccupations et des propositions des professionnels. Il s'agit, à partir d'une série de questions directes ou indirectes, de montrer comment les travailleurs sociaux sont eux-mêmes en souffrance par rapport à des situations de violence. Y a-t-il une augmentation des arrêts de travail ? En quoi sont-ils liés à ces phénomènes ? Y a-t-il une surconsommation d'alcool, de tranquillisants ou des problèmes de sommeil ?... Autant d'éléments qui échappent aux statistiques mais n'en constituent pas moins des indicateurs de cette souffrance sourde. Car la violence, c'est aussi une problématique du quotidien, d'usure et pas seulement l'explosion ou la déflagration immédiate. Par ailleurs, certaines questions concernent davantage l'institution (chartes d'établissements, lieux de parole...), laissant entendre qu'il y a des aspects structurels et organisationnels à repenser. Largement centré sur la souffrance des travailleurs sociaux, ce questionnaire ne risque-t-il pas,  d'une certaine façon, de mettre les usagers en accusation ? - Il ne s'agit bien sûr pas pour nous de diaboliser les usagers, ni d'ailleurs les institutions, mais de faire un état des lieux. Effectivement, le questionnaire donne l'impression de montrer surtout en quoi les travailleurs sociaux sont victimes de violences. Mais nous aborderons également la souffrance des usagers dans le cadre de la réflexion générale du groupe de travail à partir de rapports de spécialistes et d'analyses de terrain. Et vous, en tant que psychiatre et psychanalyste, quel regard portez-vous sur ces violences ? - Je distinguerai d'abord deux notions. La violence est désubjectivante, destructrice et symbolicide. L'agressivité, en revanche, interpelle, convoque l'autre. Or, le plus souvent, les violences sont des aspects dérivés d'une agressivité qui n'a pas été entendue. Elles traduisent à mon sens essentiellement des souffrances du lien d'appartenance, liées par exemple au père, aux problèmes de déracinement, d'exclusion... Et toute la question est de trouver des espaces permettant de médiatiser une parole qui, faute d'être entendue, ne s'exprime que par de l'agir. Sachant que toute approche de la violence doit être multidimensionnelle et inscrire le juridique. Propos recueillis par I.S.

Notes

(1)  Voir les 6 pages précédentes.

(2)  Par ailleurs, psychiatre, psychanalyste et thérapeute familial.

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