A la recherche d'alternatives au milieu protégé

Dans le département du Pas-de-Calais, « les listes d'attente d'entrée en centre d'aide par le travail et en atelier protégé ne cessent de croître ». Elles concernaient, respectivement, 2 157 et 873 personnes en 1996, alors que le taux de sortie de ces établissements était inférieur à 4 %. Ce constat, dressé par un certain nombre d'associations spécialisées, et reflet local d'une réalité nationale, est à l'origine du rapport du groupe de travail « établissements et services pour personnes handicapées » du comité départemental Uriopss du Pas-de-Calais. Convaincu de la nécessité de « proposer des solutions alternatives au travail protégé », celui-ci a exploré, dans son département, les expériences innovant en ce sens : accueil « temporaire », « transitoire », « d'urgence » et « passerelles » entre milieux protégé et ordinaire. Si celles-ci se sont développées, à l'initiative notamment du conseil général, elles restent pourtant peu nombreuses face aux besoins, déplorent les rapporteurs. En outre, elles se heurtent à des obstacles d'ordre statutaire et financier, qui les maintiennent dans des situations « de précarité et de fragilité ».

Ainsi, dans le Pas-de-Calais, les cellules d'insertion pour l'emploi des personnes handicapées en milieu ordinaire ont dû cesser leur fonctionnement en 1996, regrette l'Uriopss, « la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ayant suspendu sa subvention en faisant savoir que les personnes en attente d'un CAT ne relevaient pas de sa compétence ». De même, le CAT « les Ateliers du Ternois », qui accueille, à raison d'une journée par semaine, dix adultes handicapés mentaux « en attente » afin de ne pas rompre la prise en charge, a rencontré des difficultés pour leur obtenir une couverture accident du travail. En outre, son action, ne relevant pas du financement du CAT, n'a pas été reconnue par la tutelle DDASS. Or, selon l'Uriopss, ce type d'expérience, qui « propose de gérer positivement l'attente », doit être encouragé, notamment en considérant les CAT comme « établissements ressources pour l'insertion professionnelle en milieu ordinaire ». Par ailleurs, les initiatives en faveur du temps partiel en milieu protégé - « réponses intéressantes au vieillissement et à la fatigabilité », soulèvent le problème de l'accueil pendant le temps non travaillé. Aussi le rapport plaide-t-il pour le développement de structures d'accueil temporaire de jour, légères et souples, complémentaires aux sections occupationnelles, à l'image de celles mises en place par l'Association des parents d'enfants inadaptés à Lens et par l'Association des paralysés de France à Liévin. Car, dans l'attente d'une solution durable adaptée aux personnes, celles-ci « peuvent permettre d'affiner l'orientation Cotorep ». Reste enfin à revoir le statut de la personne handicapée. Déterminé aujourd'hui par la catégorie d'établissement fréquenté, il entretient le cloisonnement et constitue un obstacle majeur à la réalisation d'expériences originales, dénonce le groupe de travail.

Estimant qu' « on ne réglera pas l'ensemble des problèmes en accroissant le nombre de places en CAT », l'Uriopss Nord-Pas-de-Calais souhaite que ce document puisse constituer « une force de proposition auprès des organismes qui veulent innover ». Et qu'il interpelle les pouvoirs publics, afin que les associations à l'origine de projets alternatifs, qui sont souvent en attente d'un relais financier, « vivent [moins] dans la perpétuelle incertitude du lendemain ».

V.L.