La loi du 18 décembre relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits constitue, selon Elisabeth Guigou, garde des Sceaux, « la clé de voûte du premier volet de la réforme de la justice au service des citoyens ». Elle redéfinit l'accès au droit pour en faire un élément fondamental de la citoyenneté mais aussi un moyen de prévenir les litiges et de favoriser leur résolution amiable.
Rappelons que la loi du 29 juillet relative à la lutte contre les exclusions a déjà permis aux personnes sans domicile fixe de bénéficier de l'aide juridictionnelle (1). La loi, dont l'objet est de permettre aux plus démunis d'accéder à la justice, poursuit cette action en s'articulant autour de deux grands objectifs :
• apporter des réponses diversifiées au règlement des conflits, sans nécessairement devoir recourir au tribunal. A ce titre, la loi élargit le champ d'application de l'aide juridictionnelle à la transaction avant instance et renforce l'aide à l'intervention de l'avocat prévue en matière pénale
• mettre en place dans chaque département un lieu où les citoyens pourront disposer d'une information sur leurs droits. C'est le rôle des conseils départementaux de l'accès aux droits, qui remplacent les anciens conseils départementaux de l'aide juridique, et des maisons de justice dont l'existence est légalement reconnue.
La loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique est aménagée en conséquence.
Pour que l'accès au droit ne se transforme pas mécaniquement en accès à la justice, la loi du 18 décembre procède à la révision de la loi du 10 juillet 1991 ayant institué l'aide juridictionnelle (2). Aide destinée, rappelons-le, à assurer l'égalité des citoyens devant la justice, grâce à la prise en charge par l'Etat des frais exposés par les personnes dont les ressources financières sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits. A cet effet, le champ d'application de l'aide juridictionnelle est étendu et ses conditions d'attribution et de retrait aménagées.
« L'accès au droit ne signifie pas toujours recours au juge », plaide la ministre de la Justice, dans l'exposé des motifs. A cet égard, la loi a pour objectif d'encourager les personnes démunies à faire valoir leurs droits sans pour autant recourir nécessairement au juge. L'extension du champ d'application de l'aide juridictionnelle à la transaction avant instance traduit cette volonté.
Le champ d'application de l'aide juridictionnelle est étendu aux transactions conclues avant qu'une instance ne soit introduite devant une juridiction.
Jusqu'alors, l'aide juridictionnelle pouvait être accordée, pour tout ou partie de l'instance, en matière gracieuse ou contentieuse, en demande ou en défense, devant une juridiction ainsi qu'à l'occasion de l'exécution d'une décision de justice ou de tout autre titre exécutoire. En revanche, elle ne pouvait pas être obtenue en vue de la recherche d'un accord négocié entre les parties avant toute saisine d'une juridiction. Ainsi, a souligné Jacques Brunhes, rapporteur du projet de loi devant l'Assemblée nationale,« on se trouve donc actuellement dans une situation pour le moins critiquable qui incite les personnes les plus démunies à saisir la justice pour pouvoir bénéficier d'un avocat par l'intermédiaire de l'aide juridictionnelle, alors même qu'[elles] souhaiteraient conclure leur différend par une transaction » (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
Pour remédier à cette situation, l'article 1er de la loi du 18 décembre vient préciser que l'aide juridictionnelle, définie à l'article 10 de la loi de 1991,pourra également être accordée en vue de parvenir, avant l'introduction de l'instance, à une transaction. Rappelons que cette dernière est définie par le code civil comme un « contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ». Cette extension ne concerne que la transaction, sachant que les procédures de conciliation et de médiation civile intervenant sous le contrôle du juge après la saisine d'une juridiction sont d'ores et déjà couvertes par l'aide juridictionnelle.
Par coordination, il est dorénavant précisé que le bureau d'aide juridictionnelle est chargé de se prononcer non seulement sur les demandes d'admission à l'aide juridictionnelle relatives aux instances portées devant les juridictions du premier et du second degré et à l'exécution de leurs décisions, comme c'était le cas jusqu'à présent, mais également sur les demandes d'admission relatives aux transactions conclues avant l'introduction d'une instance.
Les dispositions relatives à la rémunération des avocats en cas de transaction sont également aménagées, cela afin de lesinciter à proposer à leur client derecourir à ce mode non judiciaire de règlement des conflits.
Désormais, les transactions conclues avant comme pendant l'instance ouvriront droit à une rétribution de l'avocat, d'un montant identique à celle due par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle à l'occasion d'une instance donnant lieu à un jugement.
En outre, en cas d'échec de la tentative de transaction avant introduction d'une instance, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle percevra tout de même une rétribution, sous réserve toutefois d'apporter la justification de l'importance et du sérieux des diligences accomplies, dans un délai de 6 mois à compter de la décision d'admission. Un décret fixera le montant de cette rémunération.
La loi du 18 décembre institue uneprocédure simplifiée d'examen des demandes d'aide ne présentant pas de difficulté sérieuse, mais surtout, « dans un souci de maîtrise de la dépense d'aide juridictionnelle », signale l'exposé des motifs, elle encadre plus précisément les conditions de retrait de cette aide.
La loi de 1991 permettait déjà auprésident du bureau ou de la section compétente ou au vice-président en cas d'absence ou d'empêchement du président de rejeter les demandes « manifestement irrecevables ou dénuées de fondement » ou émanant « d'une personne dont les ressources excèdent manifestement le plafond d'admission ». Désormais, ils peuvent également admettre seuls les demandes ne présentant manifestement pas de difficulté sérieuse. Sachant que c'est souvent le cas pour les demandes d'aide juridictionnelle pénale lorsque le critère de ressources est rempli (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
En outre, pour permettre au président, ou le cas échéant au vice-président, de se prononcer en toute connaissance de cause, la loi lui donne le pouvoir d'ordonner les mesures d'investigation nécessaires,« ce qui devrait permettre un contrôle plus rigoureux du respect des conditions de ressources » (Rap. Sén. n° 41, Dejoie). Il est également précisé qu'il pourra rejeter la demande si les documents ou renseignements exigés ne sont pas communiqués, sans motif légitime, dans le délai imparti. Délai généralement fixé à un mois. En tout état de cause, a-t-il été souligné, « le rejet pour non-respect du délai fixé n'est qu'une simple faculté pour le président » (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
La nouvelle loi attribue au greffier en chef du tribunal de grande instance ou de la cour d'appel, en sa qualité de vice-président du bureau de l'aide juridictionnelle, la présidence en cas d'empêchement ou d'absence du président. Il pourra également se substituer à lui dans l'exercice de ses compétences propres concernant « les demandes ne présentant manifestement pas de difficulté sérieuse ».
Les procédures de retrait de l'aide juridictionnelle sont simplifiées et unifiées afin d'en faciliter la mise en œuvre.
La loi de 1991 avait déjà prévu le remboursement de l'aide juridictionnelle en cas de retour à meilleure fortune et en cas de procédures dilatoires ou abusives. Ainsi, lorsque la décision passée en force de chose jugée a procuré au bénéficiaire de l'aide des ressources telles que si elles avaient existé au jour de la demande, celle-ci n'aurait pas été accordée, même partiellement, et que les dépens ont été mis à la charge de l'intéressé, les sommes exposées par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle doivent être remboursées par le bénéficiaire dans les mêmes proportions que les dépens. En outre, lorsque le juge estime que la procédure engagée par le bénéficiaire de l'aide est dilatoire ou abusive, il peut lui en demander le remboursement.
Parallèlement à ces procédures de remboursement qui font intervenir la juridiction de jugement, l'article 50 de la loi de 1991 a prévu des mécanismes de retrait obligatoire ou facultatif décidés par le bureau d'aide juridictionnelle :l'aide est ainsi obligatoirement retirée lorsqu'il apparaît qu'elle a été obtenue à la suite de déclarations ou au vu de pièces inexactes. Elle peut également être retirée pour tout ou partie en cas de retour à meilleure fortune indépendante de l'instance.
Or, ces mesures qui permettent d'éviter des aides injustifiées sont rarement utilisées. Aussi,« dans un souci de maîtrise des dépenses d'aide juridictionnelle » (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes), le ministère a décidé de les simplifier en les regroupant dans une procédure unique de retrait décidée par le bureau d'aide juridictionnelle.
Ainsi, la loi réécrit le deuxième alinéa de l'article 50 de la loi de 1991 afin d'intégrer deux nouveaux cas. Au total, trois cas de retrait facultatif, décidés par le bureau d'aide juridictionnelle, sont donc désormais prévus :
• le retour à meilleure fortune indépendant de l'instance
• le retour à meilleure fortune dû au gain du procès. Dans le cadre des nouvelles dispositions, le retrait de l'aide en cas de retour à meilleure fortune lié au jugement devient facultatif et la condition liée aux dépens disparaît
• celui de la procédure jugée dilatoire ou abusive par la juridiction de jugement.
La loi de 1991 prévoyait déjà l'information du bénéficiaire lors de la notification de son admission à l'aide juridictionnelle, sur les conséquences d'une perte de procès ou d'une condamnation aux dépens, ainsi que sur les procédures de remboursement de l'aide en cas de retour à meilleure fortune à la suite du jugement ou de procédure dilatoire ou abusive. En revanche, la procédure de retrait de l'aide ne faisait l'objet d'aucune publicité.
La loi du 18 décembre comble cette lacune et prévoit une information générale du bénéficiaire sur le retrait et ses conséquences.
La possibilité pour l'avocat de demander des honoraires à son client à la suite du gain de son procès est désormais subordonnée à un retrait préalable de l'aide juridictionnelle.
La loi de 1991 permettait à l'avocat désigné de demander des honoraires à son client bénéficiaire de l'aide juridictionnelle lorsque celui-ci était revenu à meilleure fortune par suite du gain de son procès, à deux conditions : la décision devait être passée en force de chose jugée et le bâtonnier de l'ordre auquel appartient l'avocat devait l'avoir autorisé. Pour inciter les avocats à demander le retrait de l'aide juridictionnelle lorsque la situation de leur client le justifie, la loi remplace l'autorisation du bâtonnier par l'exigence du retrait préalable de l'aide juridictionnelle.
Par une incohérence des législations existantes, les anciens combattants, qui bénéficient pourtant, à titre dérogatoire, de la gratuité des frais d'avocat quel que soit leur niveau de ressources, ne pouvaient pas obtenir l'aide juridique pour les contentieux relevant des juridictions compétentes en matière de pensions militaires. Les avocats devaient donc supporter cette charge financière. La nouvelle loi aligne désormais les deux régimes.
La deuxième partie de la loi de 1991 consacrée à l'aide à l'accès au droit et qui s'articulait en deux titres portant, l'un sur l'aide à l'accès à la consultation et l'autre sur l'assistance au cours de procédures non juridictionnelles, est aménagée. Dans un souci de clarification, sa structure est réorganisée autour de deux titres relatifs à la définition et à la mise en œuvre de l'accès au droit. Enfin, le conseil départemental de l'aide juridique devient le conseil départemental de l'accès au droit.
L'article 53 de la loi de 1991 se limitait à indiquer que l'accès au droit comprenait l'aide à la consultation et l'assistance au cours des procédures non juridictionnelles. Trois articles complétaient cette définition générale. L'article 59 circonscrivait le champ de l'aide à la consulta tion aux « droits et obligations relatifs aux droits fondamentaux et aux conditions essentielles de vie du bénéficiaire ». Quant aux articles 60 et 63, ils définissaient ce que l'aide à la consultation et l'assistance au cours des procédures non juridictionnelles permettaient à leurs bénéficiaires d'obtenir : d'une part, des informations sur l'étendue de leurs droits et obligations, des conseils sur les moyens de faire valoir leurs droits et une assistance en vue de l'établissement d'un acte juridique d'autre part, une assistance devant les commissions à caractère non juridictionnel et devant les administrations en vue d'obtenir une décision ou d'exercer un recours préalable obligatoire.
L'article 9 de la loi du 18 décembre crée un titre premier relatif à la définition de l'aide à l'accès au droit et rassemble, dans un article unique, le contenu des actions menées, leur finalité, leurs modalités et les conditions d'exercice propres à l'aide à la consultation juridique.
Désormais, l'aide à l'accès au droit se décline en quatre types d'actions :
• l'information des personnes sur leurs droits et obligations en général (et non plus seulement sur ceux relatifs aux droits fondamentaux et aux conditions essentielles de vie) ainsi que leur orientation vers des organismes chargés de la mise en œuvre de ces droits
• l'aide dans l'accomplissement de toute démarche en vue de l'exercice d'un droit ou de l'exécution d'une obligation de nature juridique, qui n'est plus limitée à l'assistance au cours des procédures non juridictionnelles
• la consultation en matière juridique
• l'assistance à la rédaction et à la conclusion des actes juridiques.
La loi précise à présent que les actions menées dans le cadre de l'aide à l'accès au droit doivent être « conduites de manière à favoriser le règlement amiable des litiges ». Une disposition qui « participe de l'esprit général de la réforme proposée, qui privilégie la résolution amiable des litiges sur le réflexe contentieux » (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
En complément de la loi du 29 juillet dernier contre les exclusions, l'article 9 de la loi du 18 décembre précise que les modalités de l'aide à l'accès au droit doivent être adaptées aux besoins des personnes en situation de grande précarité. Selon les travaux parlementaires, cela signifie « que devront être encouragées toutes les démarches consistant à aller à la rencontre des plus démunis, sur les lieux qu'ils fréquentent, pour les informer de leurs droits mais aussi de leurs obligations » (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
En outre, sont maintenues les dispositions relatives à l'aide à l'accès au droit en faveur des Français établis hors de France (compétence du conseil départemental siégeant à Paris en l'absence de lien des intéressés avec un autre département).
Enfin, la loi confie la détermination des conditions dans lesquelles s'exercera l'aide à la consultation en matière juridique à un conseil départemental appelé à se substituer à l'actuel conseil départemental d'aide juridique et qui reçoit la dénomination nouvelle de « conseil départemental de l'accès au droit ».
Comme auparavant, l'aide à la consultation en matière juridique devra s'exercer dans le respect des règles déontologiques applicables aux personnes qui en sont chargées et des dispositions de droit commun de la loi du 31 décembre 1971 qui régit la consultation en matière juridique. En d'autres termes, les destinataires de la consultation bénéficieront des mêmes garanties de compétence du consultant, que celle-ci soit donnée dans le cadre de l'accès au droit ou direc- tement par des professionnels du droit. Dans cette catégorie entrent non seulement les avocats, les notaires ou les huissiers mais aussi les associations et fondations reconnues d'utilité publique, les associations exerçant leur activité dans le domaine du logement ou encore les associations familiales qui peuvent donner à leurs membres des consultations juridiques sur des questions se rapportant directement à leur objet.
Le texte procède, au sein de la deuxième partie de la loi de 1991 consacrée à l'aide à l'accès au droit, à une nouvelle rédaction des articles 54 à 60 qu'il regroupe sous un titre II intitulé « Mise en œuvre de l'aide à l'accès au droit ». Dans le cadre de cette nouvelle présentation, les modifications ont essentiellement pour objet de « favoriser la généralisation des conseils départementaux et leur rôle d'aide à l'accès au droit » (Rap. Sén. n° 41, Dejoie).
L'article 10 redéfinit tout d'abord les missions du conseil départemental.
Dans son ancienne version, l'article 54 de la loi de 1991 confiait au conseil :
• l'évaluation des besoins d'accès au droit
• la détermination et la mise en œuvre d'une politique d'aide à l'accès au droit
• l'évaluation de la qualité du fonctionnement des services organisés pour l'aide à l'accès au droit
• la recherche, la collecte et la répartition des fonds destinés à l'aide à l'accès au droit
• la rédaction d'un rapport annuel sur l'aide juridictionnelle et sur l'aide à l'accès au droit dans le département.
La nouvelle rédaction de cet article maintient ces différentes missions et apporte des précisions complémentaires, les dispositions relatives à la collecte et à la répartition des fonds étant renvoyées à l'article 57 .
Le nouveau conseil départemental sera donc toujours chargé de recenser les besoins, de définir une politique d'accès au droit, dont le caractère « local » est précisé afin de permettre une prise en compte de la situation particulière du département, et d'évaluer la qualité des actions menées dans ce domaine.
En outre, pour assurer une meilleure information du public sur les actions d'aide à l'accès au droit menées dans le département, le conseil devra dorénavant dresser et diffuser un inventaire de ces actions.
Par ailleurs, « de manière à ce que le conseil soit lui-même mieux informé et puisse rechercher une meilleure cohérence des actions menées » (Rap. Sén. n° 41, Dejoie), il devra systématiquement être averti de tout projet d'action dans ce domaine préalablement à sa mise en œuvre, de même qu'il sera consulté sur toute demande de concours financier de l'Etat préalablement à son attribution.
Enfin, « dans un souci d'équité et d'aménagement du territoire », il devra désormais veiller à une bonne répartition territoriale des instances qui contribuent à favoriser l'accès au droit « afin que, au sein d'un même département, certaines communes n'accaparent pas tous les services tandis que d'autres seraient négligées » (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
Il devra également entreprendre des campagnes de sensibilisation et de formation auprès des personnes chargées de la mise en œuvre de l'aide à l'accès au droit.
Pour mener à bien ses missions, le conseil départemental, comme auparavant, passera des conventions avec les organismes et personnes concernées et pourra participer au financement des actions menées.
S'agissant du statut juridique du nouveau conseil, la loi maintient le statut du conseil départemental d'aide juridique, c'est-à-dire un groupement d'intérêt public (GIP). Sachant que « par rapport à une simple association, qui offre certes plus de souplesse, cette formule présente l'avantage d'exiger des engagements précis de la part des membres et de permettre un meilleur contrôle de l'emploi des fonds publics » (Rap. Sén. n° 41, Dejoie).
La loi du 18 décembre reconnaît le rôle prépondérant joué par les associations en matière d'accès au droit et les intègre parmi les membres de droit.
Outre les membres fondateurs déjà existants (l'Etat, le département, l'ordre des avocats du département, la caisse de règlements pécuniaires des avocats, la chambre départementale des huissiers de justice, la chambre de discipline des avoués près la cour d'appel, et, à Paris, l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation), s'ajoutent désormais :
• l'association départementale des maires
• une association œuvrant dans le domaine de l'accès au droit, désignée conjointement par le président du TGI et les membres du conseil, sur proposition du préfet.
Signalons, enfin, que la chambre de discipline des commissaires-priseurs ne fait plus partie des membres de droit de ce conseil.
Le conseil départemental est présidé par le président du tribunal d'instance du chef-lieu du département, qui a voix prépondérante en cas de partage égal des voix. Il est désormais indiqué que les fonctions de commissaire du gouvernement seront exercées par le procureur de la République près le tribunal de grande instance du chef- lieu du département.
La convention constitutive devra toujours déterminer « les modalités de participation des membres au financement des activités ou celles de l'association des moyens de toute nature mis par chacun à la disposition du groupement ». En outre, elle devra préciser les conditions dans lesquelles le conseil pourra accueillir en son sein d'autres membres personnes morales de droit public ou privé.
Pour faciliter la constitution du GIP sans le priver de la présence de tous les intervenants concernés par l'aide à l'accès au droit, la loi permet d'associer aux travaux du conseil départemental des personnes n'ayant pas la qualité de membre fondateur du groupement.
Désormais, le président pourra donc appeler à siéger au conseil départemental, avec voix consultative :
• des représentants des communes ou des groupements de communes du département
• des représentants d'organismes ne faisant pas partie du noyau dur du GIP
• toute personne reconnue pour ses activités en matière d'aide à l'accès au droit et de résolution amiable des litiges.
La nouvelle loi autorise les 27 conseils départementaux d'aide juridique existants à poursuivre leurs activités dans le régime actuel, à titre transitoire, jusqu'à expiration de la durée fixée dans leur convention constitutive, et, au plus tard, à l'expiration d'un délai de 5 ans à compter du 18 décembre, date de promulgation de la loi.
La nouvelle rédaction de l'article 57 de la loi de 1991 regroupe désormais différentes dispositions figurant jusqu'à présent aux articles 54, 56 et 61 sans les modifier sur le fond.
Le financement de l'aide à l'accès au droit est notamment assuré par :
• les partenaires de l'Etat, du département et des autres membres du GIP prévus par la convention constitutive
• les contributions des caisses des règlements pécuniaires des barreaux du ressort
• les participations des organismes professionnels des professions judiciaires et juridiques
• les subventions accordées par les collectivités territoriales, les établissements publics, les organismes de sécurité sociale et toute autre participation.
Le conseil départemental pourra, comme par le passé, conclure des conventions dont la finalité est cependant précisée :
• avec les membres des professions juridiques ou judiciaires réglementées (ou leurs organismes professionnels) ou avec les personnes autorisées à donner des consultations juridiques afin de « définir les modalités de leur participation aux actions d'aide à l'accès au droit » ;
• avec les centres communaux d'action sociale ou toute autre organisme public ou privé, afin « d'obtenir leur concours pour la mise en œuvre de l'aide à l'accès au droit ».
Il appartient toujours au conseil départemental de fixer le montant des frais de consultation pouvant être laissés à la charge du bénéficiaire de l'aide, suivant un barème établi en fonction de deux critères : les ressources de l'intéressé et la nature de la consultation.
La loi de 1991 établit une liste non exhaustive des financements de l'aide à l'accès au droit, au nombre desquels figure la participation de l'Etat en tant que membre du GIP. Elle précise en outre que, pour compenser les disparités entre les départements et soutenir des initiatives d'intérêt général, l'Etat peut, de plus, participer par voie de convention à la prise en charge d'actions mises en œuvre par le conseil départemental de l'aide juridique. Dans la rédaction que lui donne la nouvelle loi, l'article 69 prévoit que les consultations juridiques organisées dans le cadre de l'aide à l'accès au droit font l'objet d'une tarification dans des conditions fixées par voie réglementaire. « Cela permettra d'unifier les pratiques sur l'ensemble du territoire, d'autant plus qu'une partie du montant des frais de consultation pourra rester à la charge du bénéficiaire », a fait valoir le rapporteur devant les députés (Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
L'aide à l'intervention de l'avocat, jusqu'ici limitée à la garde à vue, est désormais étendue par la loi à la médiation pénale et, pour les mineurs délinquants, à la procédure de réparation.
« Aucun dispositif ne permet actuellement aux personnes démunies de financer leur assistance par un avocat au cours d'une procédure de médiation pénale engagée par le procureur de la République, préalablement à toute poursuite », indique le rapporteur du projet de loi au Sénat (Rap. Sén. n° 41, Dejoie). La loi en élargissant le champ d'application de l'aide juridique à la médiation pénale entend combler cette lacune.
La médiation pénale est une voie médiane entre le classement sans suite et la poursuite pénale. Elle constitue une réponse judiciaire adaptée à des infractions telles que les dégradations, les violences légères ou à des affaires de faible gravité relevant du contentieux pénal de la famille, ou à des contentieux de voisinage, souligne l'exposé des motifs.
L'article 13 de la loi a donc pour objet d'étendre le champ de l'aide juridique ajoutant, à l'aide à l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue, la médiation pénale. Rappelons que la médiation pénale, instituée par la loi du 4 janvier 1993, permet au procureur de la République de recourir à une telle procédure « s'il lui apparaît qu'elle est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction et de contribuer au reclassement de l'auteur de l'infraction ». Si un accord est trouvé, l'affaire est classée sans suite par le parquet, sans qu'il y ait extinction de l'action publique. Cette nouvelle aide, accordée par le président ou le vice-président du bureau d'aide juridictionnelle, pourra bénéficier aussi bien à la victime qu'à la personne mise en cause.
L'aide juridictionnelle est également étendue à la procédure prévue à l'article 12-1 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative aux mineurs délinquants. Procédure de réparation spécifique aux mineurs décidée par le procureur de la République à l'égard de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité.« Il semble opportun de faire bénéficier les mineurs faisant l'objet d'une mesure prévue par cet article de garanties de défense aussi favorables que celles qui sont accordées à un majeur dans le cadre d'une médiation pénale », a justifié le rapporteur du projet au Sénat (Rap. Sén. n° 41, Dejoie).
Les dispositions relatives à la rémunération de l'avocat sont aménagées en conséquence, et un décret en Conseil d'Etat en fixera le montant.
La loi donne un cadre légal à l'existence des maisons de justice et du droit et définit leurs missions.
Tout en reconnaissant « le caractère très positif » des expériences réalisées, le rapporteur au Sénat a toutefois précisé « qu'une généralisation systématique des maisons de justice n'apparaît pas souhaitable car une telle généralisation risquerait d'entraîner l'organisation d'une sorte de justice parallèle offrant moins de garanties que les tribunaux » (Rap. Sén. n° 41, Dejoie).
Au nombre d'une quarantaine actuellement, les maisons de justice, parfois appelées antennes de justice, sont implantées dans les quartiers dits difficiles et assurent une présence judiciaire en dehors du palais de justice, cela afin de répondre plus efficacement à la petite délinquance grâce à la mise en œuvre de mesures alternatives aux poursuites : médiation pénale, réparation pour les mineurs, simple rappel à la loi... Des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse et des membres des comités de probation d'aide aux libérés interviennent fréquemment dans le cadre des maisons de justice. Créées de manière pragmatique par des conventions conclues entre les autorités judiciaires, les collectivités locales et les différents partenaires intéressés, elles sont financées par des crédits du ministère de la Justice, des crédits affectés à la politique de la ville et les dotations des collectivités locales.
Un rapport de 1995 présenté par Gérard Vignoble, alors député, avait souligné les inconvénients de l'absence de cadre juridique défini (3). Une circulaire du 19 mars 1996 avait rappelé les objectifs des maisons de justice, émis des recommandations quant à leur organisation et leur fonctionnement et élaboré une convention type de fonctionnement (4).
La loi du 18 décembre définit les missions des maisons de justice et du droit, placées dorénavant sous l'autorité des chefs des tribunaux de grande instance. Mais elle est « volontairement concise, afin de laisser le maximum de souplesse à des structures qui doivent avant tout tenir compte des réalités locales », souligne le rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale(Rap. A. N. n° 1019, Brunhes).
En assurant une présence judiciaire de proximité, les maisons de justice et du droit concourent :
• à la prévention de la délinquance
• aux politiques d'aide aux victimes et d'accès au droit.
En outre, la loi prévoit qu'elles peuvent intervenir dans les domaines suivants :
• les mesures alternatives au traitement pénal
• les actions tendant à larésolution amiable des litiges.
Les modalités de création et de fonctionnement des maisons de justice et du droit sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat, qui devrait, selon les rapporteurs, reprendre les grandes lignes de la circulaire de 1996 précitée ainsi que celle de la convention type.
La loi institue une coresponsabilité du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République en plaçant les maisons de justice sous l'autorité des chefs du TGI, ce qui « illustre la volonté de la chancellerie de développer au sein de ces structures le traitement des affaires civiles » (Rap. A. N. n ° 1019, Brunhes).
Sophie Courault et Florence Elguiz
L'article 22 de la loi du 18 décembre 1998 adapte à la situation particulière de la collectivité territoriale de Mayotte les dispositions législatives nouvelles. L'ordonnance du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle est ainsi partiellement modifiée pour tenir compte, notamment, de l'extension du champ d'application de l'aide juridictionnelle à la transaction avant instance et à la médiation pénale.
Des dispositions de transposition analogues sont prises concernant les territoires d'outre-mer mais uniquement en matière pénale, la procédure civile relevant de la compétence des territoires.
(1) Voir ASH n° 2093 du 13-11-98.
(2) Voir ASH n° 1780 du 10-04-92 et n° 1781 du 17-04-92.
(3) Voir ASH n° 1919 du 24-03-95.
(4) Voir ASH n° 1976 du 24-05-96.