Dès qu'il se produit une flambée de violence dans les quartiers sensibles en France, un accrochage entre des bandes de jeunes et la police, les médias et les hommes politiques évoquent le syndrome américain de la violence dans les ghettos. Un raccourci hâtif, même s'il existe des convergences, qui révèle l'inquiétude grandissante face aux violences urbaines et les incertitudes actuelles sur les moyens d'endiguer le phénomène, souligne la politologue Sophie Body-Gendrot. Faut-il opter pour le « tout-répressif » comme aux Etats-Unis ou concentrer les moyens sur la prévention ?Comment assurer la sécurité sans tomber dans une approche sécuritaire ? A partir d'une enquête menée notamment dans des villes américaines et françaises, cette spécialiste des violences urbaines a tenté de comprendre les politiques nationales et surtout leur traduction sur le terrain. La France n'a bien évidemment pas à s'engager dans le courant fortement punitif des Etats-Unis (et du Royaume-Uni) qui consiste à « juger des mineurs comme des adultes, envoyer des malades mentaux à la chaise électrique, faire de l'incarcération la solution à tous les maux », estime Sophie Body-Gendrot. Néanmoins, les villes de Chicago et de New York ont également permis, grâce à une redynamisation de la police et à la mobilisation des habitants, d'obtenir d'excellents résultats, juge-t-elle. Des mesures, dont pourrait peut-être s'inspirer la France, où « la politique actuelle se fait hésitante, soulignant son attachement à l'approche éducative, refusant un droit d'ingérence dans la vie des individus et des familles à problèmes et ne se dotant ni d'outils, ni de personnels adéquats pour permettre le rétablissement de la sûreté dans ces quartiers ».
D'où, pour la politologue, la nécessité de développer une « voie médiane » : redonner ses lettres de noblesse à la police de proximité, responsabiliser davantage les juges, enseignants, travailleurs sociaux et favoriser l'esprit d'innovation.
Les villes face à l'insécurité -Des ghettos américains aux banlieues françaises - Sophie Body-Gendrot -Ed. Bayard - 130 F.