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Polémique sur l'urgence sociale à Paris

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Alors que la vague de froid faisait plusieurs morts en France parmi les sans domicile fixe, une polémique s'est développée, à Paris, sur le fonctionnement du 115, le numéro d'urgence téléphonique destiné aux sans-abri. Les locaux du SAMU social, qui gère le dispositif dans la capitale, ont d'ailleurs été occupés durant quelques heures, le 23 novembre, en signe de protestation, par des militants de l'association Droits devant et du Comité des sans-logis. Créé il y a un an (1), ce numéro est en effet souvent saturé et dans l'incapacité de répondre rapidement aux appels des personnes en détresse. Il est vrai, soulignent ses responsables, que le 115, comme les autres numéros d'urgence, est encombré par des appels « polluants » provenant, notamment, de mauvais plaisants (2). Pour faciliter l'accès au dispositif la mairie de Paris a annoncé la mise à la disposition du SAMU social de 10 personnes supplémentaires. Et en cas de saturation, l'Etat financera le basculement des appels vers une société d'assistance privée.

Autant de mesures qui, selon les associations de solidarité, ne règleront pas le problème sur le fond. Si elles reconnaissent que le nombre de places d'accueil d'urgence disponibles dans la capitale est à peu près satisfaisant, plusieurs d'entre elles dénoncent le manque de souplesse du système parisien. Celui-ci, expliquent-elles, ne permet pas aux personnes accueillies d'être hébergées plus de trois nuits, voire plus de 24 heures de suite. C'est d'ailleurs pour cette raison que la délégation parisienne du Secours catholique a décidé de se retirer de l'opération Atlas (3) qui vise à organiser l'accueil d'urgence et d'extrême urgence. En effet, la prise en charge est limitée à une seule nuit d'affilée. Ce système « maintient les personnes dans l'urgence et favorise la précarité de leurs conditions de vie », déplore la délégation parisienne du Secours catholique qui se dit en « profond désaccord » avec cette conception de l'urgence. Une critique à laquelle les autres opérateurs d'Atlas répondent que le système a au moins « le mérite d'exister et permet de toucher des personnes qui, autrement, n'iraient jamais dans les lieux d'hébergement ».

« On ne peut pas admettre » que l'on puisse mourir de froid en France, a déclaré pour sa part, le 24 novembre, Lionel Jospin. D'autant, affirme-t-il, que « ce n'est plus un problème d'accueil aujourd'hui. Il y a 65 000 places disponibles, 15 000 places d'urgence, des équipes mobiles du SAMU qui vont vers les gens parce qu'il faut essayer de les trouver »   (4). Pour le Premier ministre, toute la difficulté tient au refus de certaines personnes de « rejoindre les lieux d'hébergement qui, pourtant, sont disponibles ». Le lendemain, en conseil des ministres, le gouvernement a demandé aux préfets « un suivi quotidien du nombre de places disponibles en période de grand froid et une souplesse dans la durée d'hébergement admise ». Et il a tenu à souligner « le rôle majeur des associations » qui « montrent l'exemple de l'indispensable solidarité à l'égard des plus vulnérables ». Quant à Jacques Chirac, il a souhaité que « les divergences sur la méthode ou sur les objectifs laissent place à la mobilisation de tous face à l'urgence sociale ». »

Néanmoins, s'enflamme Danielle Huèges, directrice des Haltes des amis de la rue, « il est malheureux de devoir attendre que des personnes meurent de froid pour que l'on s'intéresse à l'hébergement d'urgence. Cet été, il y a eu sept morts dans la rue et personne n'a rien dit ». Une irritation partagée par la Fédération nationale des centres d'hébergement et de réadaptation sociale (FNARS) pour qui ce « scandale n'est ni nouveau ni ponctuel ». Et elle rappelle qu'il n'existe toujours pas suffisamment de structures pour les jeunes de 18 à 25 ans, les grands marginaux et les personnes souffrant de troubles psychiatriques. En tout état de cause, proteste la fédération, « l'ouverture d'une station de métro [la station Bonne-Nouvelle a été ouverte aux sans-abri à la demande de Martine Aubry et de Jean-Claude Gayssot] est une mesure indigne de notre fin de siècle ». Et, plutôt que des mesures exceptionnelles, elle réclame la création de places supplémentaires en CHRS. Car, pour elle, comme pour beaucoup d'associations, si le dispositif parisien est saturé c'est aussi parce que les places manquent, en aval de l'urgence, dans les structures de réinsertion (5).

Notes

(1)  Voir ASH n° 2094 du 20-11-98.

(2)  Une mission d'inspection de l'IGAS sur les dispositifs de téléphonie sociale est en cours.

(3)  Lancée en 1992 par la DDASS de Paris avec la RATP, la SNCF et des organisations caritatives.

(4)  Sur le dispositif hivernal d'accueil et d'hébergement 1998-1999, voir ce numéro.

(5)  La mairie de Paris publie son guide Solidarité hiver 1998/99 sur les actions menées en direction des personnes en difficulté. Distribué gratuitement dans les lieux d'accueil.

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