« L'échelle territoriale pertinente du contrat de ville est celle de l'agglomération urbaine, dès lors que ce contrat n'est pas seulement destiné à mettre en œuvre une politique localisée et catégorielle de traitement de l'urgence des quartiers en crise, mais qu'il doit aussi constituer un véritable contrat global de solidarité urbaine. » C'est autour de cette idée que s'articule l'essentiel des propositions formulées par Georges Cavallier, ingénieur des Ponts et Chaussées et ancien directeur de cabinet de Bernard Tapie, lorsque celui-ci était ministre de la Ville, dans son rapport d'étape sur l'élaboration des contrats de ville du XIIe plan, remis à Claude Bartolone. Préparé dans le cadre du groupe de travail interministériel mis en place à la suite du conseil interministériel des villes (CIV) du 30 juin dernier (1), ce document devrait servir de base aux grandes orientations qui pourraient être adoptées par le gouvernement, à la mi-décembre, lors du prochain CIV. Et ce n'est qu'à partir de ces décisions que le groupe de travail rédigera son rapport définitif pour une remise prévue au printemps prochain.
Sur le bilan des actuels contrats de ville, si le rapporteur ne méconnaît pas l'existence d' « éléments positifs » à conforter, il note que la géographie des contrats « n'est que le résultat d'un compromis et entretient les quiproquos entre une politique d'exception et de sélection des sites et une politique de droit commun ouverte à toutes les agglomérations ». En outre, selon lui, les acteurs concernés sont « mal positionnés et souvent démobilisés, tentés par le repli sur leurs champs traditionnels d'intervention ». Autant de faiblesses qui « tiennent moins à un défaut de conception initial qu'à des dérives progressives du sens, dues à de mauvaises conditions de préparation et de mise en œuvre », observe encore Georges Cavallier.
Concrètement, pour lui, les contrats de ville de la nouvelle génération (2000-2006) (2) devraient constituer « le noyau dur » et le « volet solidarité » des futurs contrats d'agglomération, prévus dans le projet de loi d'orientation pour l'aménagement du territoire, présenté en juillet dernier au conseil des ministres (3). Lesquels contrats d'agglomération, rappelle-t-il, devraient eux-mêmes être mis en chantier « en aval » des contrats de plan Etat-région des années 2000-2003, en cours d'élaboration. A cela s'ajoute le projet de loi portant sur l'organisation urbaine et l'intercommunalité qui vise à conférer un cadre institutionnel et des moyens financiers aux aires urbaines de plus de 50 000 habitants (4). L'ensemble devant ainsi constituer les éléments d'une « politique urbaine plus cohérente et plus ambitieuse ».
Georges Cavallier préconise aussi de « renoncer à dessiner, a priori, depuis Paris, une géographie limitée de la contractualisation ». Pour lui, il s'agit, en effet, de prendre en compte « la mobilisation des acteurs locaux » ainsi que « leur capacité à coopérer » et « la qualité de leurs projets ». Il propose, en outre, de mettre en chantier des contrats de ville dans toutes les agglomérations où une « démarche d'analyse préalable » aura abouti à un accord entre le préfet et les collectivités locales sous la forme d'un « document commun d'orientation ». Sur la nature des contrats de ville, le rapporteur recommande la création d'un dispositif à plusieurs étages avec un contrat-cadre établi à l'échelle de l'agglomération, négocié entre le préfet et le président de l'établissement public de coopération intercommunal existant, et des contrats particuliers, territoriaux ou thématiques, qui pourront être signés par les maires, les présidents des conseils général et régional ou encore les bailleurs sociaux, en fonction de leurs compétences respectives. Par ailleurs, en ce qui concerne le calendrier, il souhaite que les directives gouvernementales décrivant l'architecture du dispositif soient rendues publiques, si possible, dans la première quinzaine de décembre. Quant aux travaux préparatoires, ils devraient aboutir, dans chaque agglomération, au plus tard à la mi-1999, à l'établissement d'un « diagnostic partagé » et d'un « document commun d'orientation » fixant un cadre pour l'élaboration des contrats de ville, puis des contrats d'agglomération.
Enfin, l'auteur insiste sur le fait que « les contrats de ville ne constituent pas un point de passage obligé pour la mise en œuvre de la politique de la ville » . Laquelle a, selon lui, « vocation à s'appliquer [...] à l'ensemble du territoire ». Ainsi, lorsqu'un contrat de ville n'aura pu être signé, faute d'accord entre les parties concernées, « l'Etat veillera néanmoins à la situation des habitants des quartiers en difficulté » de cette agglomération, en assurant « un service minimum mettant en œuvre [...] les outils de droit commun » des différents ministères.
(1) Voir ASH n° 2078 du 3-07-98.
(2) Les contrats de ville actuels doivent être prorogés jusqu'au 31 décembre 99.
(3) Voir ASH n° 2081 du 21-08-98.
(4) Voir ASH n° 2091 du 30-10-98.