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Loi contre les exclusions

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Nous poursuivons la présentation de la loi du 29 juillet 1998 contre les exclusions avec les dispositions relatives à l'exercice de la citoyenneté et aux moyens d'existence.

Deux chapitres de la loi du 29 juillet dernier contre les exclusions portent, l'un, sur l' « exercice de la citoyenneté », l'autre, sur les « moyens d'existence ».

Celui sur la citoyenneté succède, au sein du titre premier de la loi intitulé « De l'accès aux droits », aux chapitres sur l'accès à l'emploi, l'accès au logement et l'accès aux soins. En effet, « l'exercice de la citoyenneté par tous est une des conditions de la lutte contre les exclusions », affirme l'exposé des motifs de la loi. Laquelle organise en conséquence le droit de vote des personnes sans domicile fixe ainsi que leur accès à l'aide juridictionnelle. Sur amendements introduits par l'Assemblée nationale, la loi facilite également la syndicalisation des demandeurs d'emploi et leur permet de bénéficier du congé de formation syndicale. Des mesures dont la logique est proche de celle qui a inspiré les dispositions de la loi sur la représentation des chômeurs auprès des échelons locaux de l'ANPE et de l'AFPA, présentées dans notre numéro 2085 du 18-09-98, page 2 7 et qui ont déjà fait l'objet d'une circulaire d'application (1).

Le chapitre sur les « moyens d'existence » prend place, quant à lui, dans le titre II de la loi consacré plus spécialement à la « prévention des exclusions ». Il institue un chèque d'accompagnement personnalisé destiné à faciliter la vie quotidienne des personnes démunies et comporte un certain nombre de mesures visant à apporter des garanties aux familles : droit à un compte bancaire, droit à une fourniture minimale d'énergie, d'eau et de téléphone. Dans un même objectif, il affirme l'insaisissabilité ou renforce l'encadrement des saisies de certains minima sociaux et de prestations de sécurité sociale.

Garantir l'exercice de la citoyenneté

Ce chapitre est composé de deux séries de mesures. L'une, conformément au projet de loi initial, concerne lespersonnes sans domicile fixe. L'autre a trait auxdemandeurs d'emploi.

Les mesures en faveur des sans domicile fixe

L'INSCRIPTION SUR LES LISTES ÉLECTORALES (art. 81)

Le code électoral est modifié pour permettre aux personnes sans domicile fixe d'accéder au droit de vote.

L'article 81 de la loi contre les exclusions résorbe « une zone de non-droit », a expliqué le rapporteur devant l'Assemblée nationale (Rap. A. N. n° 856, Le Garrec). En effet, l'article 11 du code électoral prévoit l'inscription, sur leur demande, de toutes les personnes qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis 6 mois au moins ou y acquittent depuis au moins 5 ans des contributions directes. Or, par définition, « ceux qui n'ont plus de domicile n'entrent pas dans ces critères » alors pourtant que, selon l'article 3 de la Constitution, « sont électeurs [...] tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques ». Mais surtout, a poursuivi le rapporteur, « l'exclusion civique est une des formes de l'exclusion. Elle peut apparaître secondaire par rapport au droit au logement, à des conditions de vie décentes, au travail... Mais il s'agit, en fait, d'un pas supplémentaire dans le processus. »

La loi contre les exclusions introduit donc dans le code électoral un nouvel article L. 15-1 pour prévoir le principe de l'inscription sur les listes électorales des personnes qui ne peuvent fournir la preuve d'un domicile ou d'une résidence et auxquelles la loi n'a pas fixé une commune de rattachement. Le mécanisme retient unedémarche volontaire des intéressés, lesquels devront déposer une demande auprès de la mairie de la ville où est situé l'organisme d'accueil agréé de leur choix. La loi envisage deux modes de rattachement de la personne sans domicile à un organisme agréé :

• soit cet organisme est mentionné depuis 6 mois au moins sur sa carte nationale d'identité ;

• soit cet organisme a fourni une attestation établissant qu'il est bien en relation avec elle depuis 6 mois.

Ce dispositif est fortement inspiré de celui qui régit, depuis 1994, la délivrance d'une carte d'identité aux personnes sans domicile fixe. Du fait de leur inscription, indiquent également les travaux parlementaires, les intéressés « deviendront éligibles [...]. En effet, le titre d'électeur de la commune confère l'éligibilité au conseil municipal [...]. Il en va de même pour le conseil général [...] et pour le mandat de conseiller régional [...] » (Rap. A. N. n° 856, Le Garrec).

L'article 18 du code électoral est également modifié afin de prévoir désormais que, pour les personnes sans domicile ou sans résidence, l'adresse mentionnée sur les listes électorales est celle de l'organisme d'accueil auquel elles ont demandé leur rattachement.

L'ACCÈS À L'AIDE JURIDICTIONNELLE (art. 82)

La loi contre les exclusions permet aussi aux personnes sans domicile fixe de bénéficier de l'aide juridictionnelle.

La loi du 10 juillet 1991 a instauré une aide juridictionnelle, totale ou partielle, pour les personnes qui n'ont pas un niveau de ressources suffisantes. Mais, «  si cette voie d'accès au juge ne pose pas de problèmes spécifiques s'agissant de certaines personnes en situation précaire et si les plafonds de ressources sont situés à un niveau suffisant pour leur permettre de bénéficier de l'aide, la loi ne peut [...] être considérée comme satisfaisante sur un point précis concernant les sans domicile fixe » (Rap. A. N. n° 856, Le Garrec). En effet, l'article 13 de la loi de 1991 a mis en place un bureau d'aide juridictionnelle auprès de chaque tribunal d'instance, chargé d'instruire les demandes. Et dispose que « le demandeur peut adresser sa demande au bureau du lieu de son domicile ».

La loi contre les exclusions complète donc l'article 13 afin de prévoir une dérogation spécifique pour ceux qui n'ont pas de domicile et qui, par définition, ne peuvent remplir cette condition. Ainsi, désormais, « s'il n'a pas de domicile fixe, le demandeur peut adresser sa demande au bureau d'aide juridictionnelle établi au siège de la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve l'organisme d'accueil choisi par lui ». Sachant qu'il ne doit pas nécessairement s'agir d'un organisme agréé. De même, le demandeur n'a pas à faire la preuve d'absence de domicile. Par ailleurs, la loi ajoute que, pour les besoins de la procédure d'aide juridictionnelle, le demandeur est réputé domicilié à cet organisme d'accueil. Ainsi, lorsque au cours de la procédure, l'intéressé est rattaché à plusieurs centres d'accueil, c'est celui d'où la demande initiale émane qui sera retenu.

Les mesures en faveur des demandeurs d'emploi

LEUR ADHÉSION AUX ORGANISATIONS SYNDICALES (art. 78)

L'article L. 411-7 du code du travail disposait que les personnes qui ont cessé l'exercice de leurs fonctions ou de leur profession, si elles l'avaient exercée au moins un an, pouvaient soit continuer à faire partie d'un syndicat professionnel de salariés, soit adhérer à un syndicat professionnel de leur choix. L'article 78 modifie ces dispositions en supprimant la mention relative à l'année préalable d'exercice de l'activité professionnelle. Une mesure « de nature à réduire la fracture apparue au cours de l'hiver dernier entre les syndicats institutionnels engagés dans la gestion paritaire des organismes de sécurité sociale et les associations ou coordinations de chômeurs » (Rap. Sén. n° 450, Seillier).

LEUR ACCÈS À LA FORMATION SYNDICALE (art. 79)

L'article 79 permet aux demandeurs d'emploi de participer aux stages de formation économique, sociale et syndicalesans perdre leurs droits à l'indemnisation chômage.

Selon l'article L. 451-1 du code du travail, les salariés désireux de participer à des stages ou sessions de formation économique et sociale ou de formation syndicale, organisés par des centres rattachés à des organisations syndicales de salariés ou des instituts spécialisés, ont droit, sur leur demande, à un ou plusieurs congés. La durée totale de chacun d'entre eux ne peut être inférieure à 2 jours. Elle ne peut excéder 12 jours par an pour un salarié et 18 jours s'il est animateur des stages ou sessions ou s'il est appelé à exercer des responsabilités syndicales.

La loi du 29 juillet 1998 complète ces dispositions en indiquant que les demandeurs d'emploi peuvent participer à ces stages, dans la limite des durées de 12 et 18 jours par période annuelle prévues pour les salariés. Etant précisé qu'ils conservent le revenu de remplacement auquel ils ont droit pendant toute la durée du stage.

Assurer les moyens d'existence

A ce chapitre figure, tout d'abord, la légalisation du système des « titres-services »déjà expérimenté depuis quelques années par les collectivités territoriales et le secteur associatif. Ensuite, comme la loi du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit les y autorisait, de nombreuses banques refusaient, jusqu'à présent, de domicilier les petits comptes qu'elles estimaient ne pas être suffisamment rémunérateurs. La loi du 29 juillet inverse cette logique en posant solennellement le principe du droit à un compte bancaire. Par ailleurs, le droit des personnes démunies à une aide de la collectivité pour la fourniture d'eau et d'énergie est élargi. Enfin, la loi rend incessible et insaisissable l'allocation d'insertion et l'allocation de solidarité spécifique d'une part, les prestations en nature d'assurance maladie d'autre part. Elleaménage également les conditions de saisie partielle de certaines prestations familiales et des pensions d'invalidité.

Le chèque d'accompagnement personnalisé (art. 73)

LA LÉGALISATION...

L'article 73 de la loi contre les exclusions insère un nouvel article L. 1611-6 dans le code général des collectivités territoriales. Selon ce dernier, « dans le cadre des actions sociales qui concernent notamment l'alimentation, l'hygiène, l'habillement et les transports, des actions éducatives, culturelles, sportives ou deloisirs [qu'ils] mènent, à l'exclusion de l'aide sociale légale, lescollectivités territoriales, lesétablissements publics de coopération intercommunale, les centres communaux et intercommunaux d'action sociale et les caisses des écoles peuvent remettre aux personnes qui rencontrent des difficultés sociales des titres dénommés “chèque d'accompagnement personnalisé” pour acquérir des biens et services dans les catégories définies par la collectivité ou l'établissement public ». Ces dispositions sont également applicables aux associations de solidarité agréées au plan national.

Concrètement, le bénéficiaire du chèque peut acquérir, à hauteur du montant figurant sur sa valeur faciale, auprès d'un réseau de prestataires, les biens, les produits ou services prévus sur le chèque. Les valeurs faciales sont modulées de façon à permettre aux distributeurs de pouvoir tenir compte des différentes situations tant économiques que sociales. Le bénéficiaire ne peut pas en obtenir le remboursement, même partiel.

Ces titres sont cédés aux distributeurs par les émetteurs contre paiement de leur valeur libératoire et, le cas échéant, d'une commission. Tout émetteur doit ouvrir un compte auprès d'un établissement de crédit ou d'un organisme ou des services de certains réseaux (La Poste, le Trésor public...) intitulé « compte de chèques d'accompagnement personnalisé » et en faire la déclaration préalable auprès d'une commission spécialisée.

Les titres ont une valeur limitée à l'année civile et la période d'utilisation dont ils font mention. Le remboursement doit être demandé par le prestataire avant la fin du deuxième mois suivant l'expiration de leur période de validité.

Un décret en Conseil d'Etat fixera notamment : les caractéristiques de sécurisation et les mentions obligatoires figurant sur le chèque d'accompagnement personnalisé ; les conditions d'utilisation et de remboursement des chèques  les modalités de prise en compte de ces titres dans la comptabilité des services et organismes publics  les modalités d'organisation et de contrôle du système entre les différents partenaires.

A noter : les chèques sont exonérés du paiement du droit de timbre dit de « dimension », prévu à l'article 902 du code général des impôts, comme c'est déjà le cas pour les titres-restaurants et les chèques-vacances.

Gratuité de la carte nationale d'identité

Citons pour mémoire que l'article 80 de la loi du 29 juillet dernier avait instauré l'exonération du droit de timbre pour la délivrance de la carte d'identité, aux personnes ayant un niveau de ressources ne dépassant pas le montant du revenu minimum d'insertion (RMI). Or, depuis le 1er septembre dernier, tous les citoyens français bénéficient désormais de cette exonération (2). Devenu sans objet, l'article 80 sera donc abrogé par le projet de loi de finances pour 1999.

…D'UNE EXPÉRIMENTATION

La formule du titre-services était déjà expérimentée, depuis près de 5 ans, par des collectivités territoriales, des CCAS, mais aussi par le secteur associatif et plus particulièrement les grandes organisations caritatives (Secours catholique, Secours populaire, Fondation de France, Aides, Fondation abbé-Pierre...), des permanences d'accueil, d'information et d'orientation, des missions locales ou encore le Fonds d'aide aux jeunes.

A l'instar du titre-restaurant, le titre de services a l'avantage « de bien cibler les interventions sociales à un moindre coût pour la collectivité en offrant à ses bénéficiaires l'usage d'un moyen de paiement préservant leur dignité, leur choix, leurs coutumes et contraintes alimentaires à l'aide d'un très large réseau national aussi bien dans la grande distribution que dans le commerce de proximité », a souligné le rapporteur devant le Sénat (Rap. Sén. n° 450, Seillier).

Le droit au compte bancaire (art. 137)

L'OUVERTURE DU COMPTE

Toute personne physique résidant en France, dépourvue d'un compte de dépôt, a droit à l'ouverture d'un tel compte dans l'établissement de crédit de son choix ou auprès des services financiers de La Poste ou du Trésor public. Ce droit est également reconnu aux personnes faisant l'objet d'un interdit bancaire.

L'ouverture d'un tel compte se fait après remise auprès de l'établissement de crédit d'unedéclaration sur l'honneur attestant que le demandeur ne dispose d'aucun compte. Dès le premier refus de l'organisme bancaire choisi, l'intéressé a la possibilité de saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne soit un établissement de crédit, soit les services financiers de La Poste ou du Trésor public. Rappelons que, jusqu'à la promulgation de cette loi, les personnes devaient essuyer plusieurs refus de la part des organismes bancaires avant de pouvoir saisir la Banque de France.

Ces établissements ne pourront limiter les services liés à l'ouverture d'un compte de dépôt aux services bancaires de base que dans des conditions définies par décret. Lequel définira très précisément la liste des services bancaires de base. Celle-ci devrait comprendre « les opérations courantes de retrait, de dépôt, de virement et la mise à disposition d'une carte de retrait interbancaire », a indiqué Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux PME, au commerce et à l'artisanat, lors des débats parlementaires (J. O. A. N. (C. R.) n° 50 du 20-05-98). Seront en outre fixées par décret les conditions tarifaires applicables lorsqu'un établissement bancaire désigné par la Banque de France décide de limiter l'utilisation du compte de dépôt aux services bancaires de base.

LA CLÔTURE DU COMPTE

Toute décision de clôture de compte à l'initiative de l'établissement de crédit désigné par la Banque de France doit faire l'objet d'une notification écrite et motivée adressée au client et à la Banque de France pour information. Un délai minimum de 45 jours doit être consenti obligatoirement au titulaire du compte.

LA DÉLIVRANCE D'UN CERTIFICAT DE NON-PAIEMENT

Dans le cadre de la prévention et de la lutte contre l'exclusion bancaire, un dispositif est mis en place en vue de « mettre un terme à la multiplication des présentations des chèques sur un compte non provisionné et d'éviter ainsi l'accumulation de frais bancaires souvent lourds de conséquences sociales pour le défaillant » (J. O. Sén.  (C. R.) n° 62 du 9-07-98).

Ce dispositif, qui résulte d'un amendement sénatorial, limite à deux le nombre des présentations d'un chèque au cours d'undélai légal de 30 jours. A l'issue de ce délai, et seulement si une provision n'est pas constituée sur le compte du tireur, un certificat de non-paiement est délivré, à sa demande, au bénéficiaire du chèque impayé.

Tout versement effectué par le tireur sur le compte duquel a été émis le chèque impayé est affecté en priorité à la constitution d'une provision pour le paiement intégral de celui-ci.

L'information des détenus (art. 83)

L'article 83 de la loi prévoit que les personnes condamnées à une peine d'emprisonnement ont droit pendant l'exécution de leur peine, « à une information sur leurs droits sociaux de nature à faciliter leur réinsertion ». Disposition qui a pour objet d'apporter « une réponse de principe au problème de l'information des populations condamnées à une peine d'emprisonnement » (Rap. Sén. n° 450, Seillier).

La fourniture d'eau, d'énergie et de téléphone (art.136)

Le chapitre III de la loi du 1er décembre 1988 instituant le revenu minimum d'insertion, portant sur l'accès des personnes précaires à une fourniture d'eau et à l'énergie, est élargi et renforcé.

LES SERVICES TÉLÉPHONIQUES

L'article 43-5 de la loi de 1988 affirmait le droit pour les personnes démunies à une aide de la collectivité pour accéder ou préserver son accès à une fourniture d'eau et d'énergie (électricité et gaz). Cette garantie est désormais étendue aux services téléphoniques.

La mise en œuvre de cette disposition doit être examinée en liaison avec la réglementation européenne. Pour mémoire, une loi de 1996 sur les télécommunications, prise en application de directives européennes, prévoit la création d'un « service universel » du téléphone qui doit comporter la mise en place detarifs minorés pour les personnes ayant de faibles ressources ou handicapées et la possibilité de préserver, en cas d'impayés, un service restreint consistant dans le maintien de la réception des appels et dans l'accès aux numéros verts ou d'urgence. Un dispositif qui n'est toutefois pas « réellement mis en œuvre de manière systématique à ce jour », a constaté Bernard Seillier devant le Sénat (Rap. Sén. n° 450, Seillier). L'exposé des motifs confirme l'intervention prochaine d'un texte réglementaire.

L'indexation de l'ASS et de l'AI (art. 131)

Consacrant l'engagement pris par le Premier ministre lors de son intervention télévisée du 21 janvier 1998, à la suite des mouvements de chômeurs (3), la loi contre les exclusions garantit l'indexation annuelle sur l'évolution des prix du montant de l'allocation d'insertion  (AI) et de l'allocation de solidarité spécifique  (ASS) (art. L. 351-9 et L. 351-10 du code du travail modifiés).
Pour mémoire, les taux journaliers de l'AI et de l'ASS à taux plein, non revalorisés plusieurs années durant, sont respectivement fixés, depuis le 1er janvier 1998, à 56, 37 F (4) et 80, 02 F  (3). La mesure d'indexation « permettra de maintenir le pouvoir d'achat de l'allocation et d'aligner ainsi le régime des différents minima sociaux » (Rap. Sén. n° 450, Seillier). Rappelons que :

• le RMI est révisé en principe deux fois par an, en fonction de l'évolution des prix. En pratique, toutefois, une seule revalorisation a lieu le 1er janvier de chaque année du fait du faible taux de l'inflation ;

• l'allocation de parent isolé  (API) évolue comme les prestations familiales, c'est-à-dire en fonction de la base mensuelle de calcul des allocations familiales. Laquelle est revalorisée une ou plusieurs fois par an conformément à l'évolution des prix à la consommation hors tabac prévue dans le rapport économique et financier annexé à la loi de finances pour l'année civile à venir

• le minimum vieillesse (ainsi que l'allocation de veuvage, l'allocation adulte handicapé et le minimum invalidité qui y sont liés par référence) évoluent comme les pensions de retraite qui sont elles-mêmes indexées sur les prix.

LE MAINTIEN EN CAS D'IMPAYÉ

Par ailleurs, l'article 136 de la loi contre les exclusions complète le principe de l'aide à l'accès ou la préservation de l'accès aux services par celui dumaintien de la fourniture d'eau et d'énergie en cas de non-paiement jusqu'à l'intervention du dispositif d'aide défini par voie conventionnelle (voir ci-après). Cette disposition ne vise pas les services téléphoniques.

LE DISPOSITIF CONVENTIONNEL D'AIDE

Enfin, le dispositif conventionnel d'aide et de prévention organisé par l'article 43-6 de la loi de 1988, jusqu'alors destiné à faire face aux seules dépenses d'électricité et de gaz, est étendu aux dépenses d'eau.

Dans sa nouvelle version, cet article prévoit donc la conclusion de conventions nationales entre l'Etat, EDF, GDF ainsi que, désormais, les distributeurs d'eau pour définir, notamment, le montant et les modalités de leur concours financiers respectifs. Des conventions départementales doivent être mises en œuvre avec l'Etat, EDF, GDF, chaque distributeur d'énergie ou d'eau, chaque collectivité territoriale ou groupement de collectivités concerné qui le souhaite et, le cas échéant, avec chaque CCAS, les organismes de protection sociale et les associations de solidarité. Par ailleurs, outre les actions préventives et éducatives en matière de maîtrise d'énergie ou d'eau, ces conventions départementales déterminent également dorénavant les conditions d'application des conventions nationales.

Pour mémoire, ont été conclues en 1996, une charte « solidarité-énergie », entre l'Etat, EDF et GDF et une charte « solidarité-eau » entre l'Etat et les distributeurs d'eau. Cette dernière, qui ne concerne que les personnes abonnées directement aux services publics de l'eau, a fait l'objet d'une circulaire d'application en octobre 1997 (5).

L'insaisissabilité totale ou partielle de moyens d'existence

L'ALLOCATION D'INSERTION ET L'ALLOCATION DE SOLIDARITÉ SPÉCIFIQUE (art. 127)

La loi contre les exclusions pose le principe du caractère incessible et insaisissable de l'allocation d'insertion et de l'allocation de solidarité spécifique (art.  351-10 nouveau du code du travail).

Ces deux minima sociaux bénéficient donc dorénavant du même régime protecteur que celui mis en place au titre du revenu minimum d'insertion par l'article 31 de la loi du 1er décembre 1988.

Les modalités selon lesquelles les établissements bancaires doivent garantir le caractère insaisissable des prestations sont également fixées. Elles sont identiques au dispositif déjà prévu pour le RMI. Il est ainsi précisé que « lesblocages de comptes courants de dépôts ou d'avances ne peuvent avoir pour effet de faire obstacle à leur insaisissabilité ». En outre, « nonobstant toute opposition, les bénéficiaires dont l'allocation d'insertion ou l'allocation de solidarité spécifique est servie par versement à un compte courant de dépôts ou d'avances peuvent effectuer mensuellement des retraits de ce compte dans la limite du montant de leur allocation ».

LES PRESTATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE

Prestations d'assurance maladie (art. 130)

La loi contre les exclusions prévoit également l'insaisissabilité et l'incessibilité desprestations en nature d'assurance maladie, sauf pour le recouvrement des prestations indûment versées à la suite d'une manœuvre frauduleuse ou d'unefausse déclaration de l'assuré (art. L. 322-7 nouveau du code de la sécurité sociale).

Les prestations concernées sont celles relatives :

• à la couverture des frais médicaux

• aux frais de transport

• aux frais d'hébergement et de traitement des enfants handicapés dans les établissements spécialisés

• à la couverture de soins relatifs à l'interruption volontaire de grossesse ;

• aux frais relatifs aux examens de santé obligatoires 

• aux frais de vaccination.

Comme pour l'ASS et l'AI, il est précisé que le blocage des comptes bancaires ne fait pas obstacle à l'insaisissabilité et à l'incessibilité de ces prestations.

Signalons en outre qu'une circulaire de la CNAM fait le point sur l'application de ces dispositions (6).

Prestations familiales (art. 129)

La loi contre les exclusions institue une limitation à la saisissabilité partielle des prestations familiales.

L'article L. 534-4 du code de la sécurité sociale pose le principe de l'insaisissabilité des prestations familiales. Il existe cependant deux dérogations à l'interdiction des saisies :

• toutes les prestations familiales peuvent faire l' « objet d'une action en récupération de l'indu lorsqu'elles ont été versées à la suite d'une manœuvre frauduleuse ou d'une fausse déclaration »  ;

• certaines prestations familiales peuvent être saisies pour le recouvrement de dettes alimentaires liées à la nourriture, l'entretien et l'éducation des enfants puisqu'elles ont été précisément servies aux parents dans ce but. Il s'agit de l'allocation pour jeune enfant, des allocations familiales, du complément familial, de l'allocation de rentrée scolaire, de l'allocation de soutien familial, de l'allocation parentale d'éducation et de l'allocation d'éducation spéciale pour les frais d'hébergement ou de soins.

Or, s'agissant de cette deuxième dérogation, la procédure applicable étant celle de la saisie-attribution, dès sa notification à la caisse d'allocations familiales, elle entraîne le blocage des prestations saisissables pendant le nombre de mois nécessaires à l'extinction de la dette. Ce qui peut s'avérer « particulièrement préjudiciable pour des familles en difficulté pour lesquelles les prestations familiales sont un élément essentiel de leurs ressources et en tout cas un gage de stabilité de leurs revenus » (Rap. A. N. n° 856, Le Garrec).

Aussi la loi contre les exclusions modifie-t-elle l'article L. 553-4 afin de prévoir qu'un pourcentage minimal du montant mensuel des prestations familiales ne pourra être saisi, même dans les cas où la loi autorise cette saisie. Pour la détermination du taux maximum de la saisie, la loi renvoie au décret prévu à l'article L. 553-2 du code de la sécurité sociale pour la récupération d'indu. Décret annoncé par la loi dite « Famille » de 1994 mais qui n'est pas encore paru. En tout état de cause, relèvent les travaux parlementaires (Rap. Sén. n° 450, Seillier), ce renvoi permettra d'ajuster le niveau de saisie à la situation spécifique de la famille en tenant compte notamment de sa composition, de son niveau de revenus, du poids de ses charges de logement.

Pensions d'invalidité (art. 129)

S'agissant des pensions d'invalidité, l'article L. 355-2 du code de la sécurité sociale dispose déjà qu'elles sont cessibles et saisissables dans la limite de 90 % pour le paiement des frais d'hospitalisation. La loi contre les exclusions vient compléter cette disposition en indiquant que le montant de la saisie sur unrappel de pension doit s'apprécier en rapportant l'ensemble de la quotité saisissable au montant dû par échéance mensuelle ou trimestrielle.

Florence Elguiz avec Sophie Courault

Notes

(1)  Voir ASH n° 2090 du 23-10-98.

(2)  Voir ASH n° 2082 du 28-08-98.

(3)  Voir ASH n° 2056 du 30-01-98.

(4)  Voir ASH n° 2062 du 13-03-98 (3)  Voir ASH n° 2062 du 13-03-98.

(5)  Voir ASH n° 2046 du 21-11-97.

(6)  Circulaire CNAM n° 95/98 du 26 octobre 1998.

LES POLITIQUES SOCIALES

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