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La politique d'intégration

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Au lendemain de la remise du rapport du Haut Conseil à l'intégration qui dénonce, notamment, les discriminations face à l'emploi et au logement, Martine Aubry a présenté, au conseil des ministres du 21 octobre, une communication sur la politique d'intégration.

Face à l'inquiétante montée des discriminations raciales, que vient encore de dénoncer le Haut Conseil à l'intégration dans son rapport au Premier ministre , la ministre de l'Emploi et de la Solidarité a exposé, le 21 octobre, ses orientations en faveur de l'intégration des étrangers en France. Prononçant ainsi sa première intervention sur ce thème en 16 mois de gouvernement. Si Martine Aubry reconnaît que la « machine à intégrer » paraît quelque peu grippée, en raison notamment des circonstances économiques et, surtout, de la situation de l'emploi, elle estime néanmoins que le modèle français a« fait ses preuves ». Et que ses principes doivent être réaffirmés. Complément indispensable de la maîtrise des flux migratoires, « l'intégration est possible » et passe par « le respect des droits et devoirs de chacun et des valeurs de notre société, tout en assurant à tous une place digne », a assuré la ministre. Laquelle a exposé une série d'orientations visant à « mieux accueillir en France »,« lutter contre les discriminations, notamment au travail », « faciliter l'acquisition de la nationalité française et adapter la politique des naturalisations aux évolutions de la société ». S'attachant d'ailleurs davantage à rappeler des principes ou des dispositions existantes qu'à annoncer des mesures nouvelles. En outre, remettant à plus tard la fondation d'une autorité administrative de lutte contre les discriminations, qu'appellent de leurs vœux la ministre de la Justice, Elisabeth Guigou, et le Haut Conseil à l'intégration, Martine Aubry a annoncé la création d'un groupe d'étude sur les discriminations  (GED).

Mieux accueillir en France

Il s'agit, pour le gouvernement, de mettre en place une politique d'accueil efficace à destination de toute personne qui vient s'installer régulièrement en France pour au moins un an.

Aujourd'hui, rappelle Martine Aubry, l'accueil personnalisé repose sur l'Etat (plans départementaux d'accueil), l'Office des migrations internationales  (OMI) et le Fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles  (FAS), les travailleurs sociaux intervenant pour orienter les primo-arrivants qui, le cas échéant, peuvent bénéficier d'un crédit d'apprentissage du français.

A terme, a-t-elle annoncé, sans toutefois donner de précisions de date, un lieu unique, dit plate-forme d'accueil sera créé, dans chaque département, avec des locaux adaptés aux rencontres collectives ou personnalisées. Y interviendront de façon coordonnée : les auditeurs sociaux, interprètes, agents publics, travailleurs sociaux, représentants du monde associatif.

L'accueil personnalisé

L'accueil personnalisé, qui ne concernait que les familles arrivant dans le cadre du regroupement familial, est élargi à celles de réfugiés ainsi qu'aux conjoints de Français.

Les familles rejoignantes

Les personnes, déjà présentes en France et qui sont rejointes par leur famille, seront, à cette occasion, invitées à une rencontre avec le service public de l'accueil. Ces réunions seront organisées de façon collective (environ 15 personnes) sous la responsabilité de l'OMI assisté des services d'accueil (SSAE, ASFAM) et des autres associations concernées.

L'accueil des familles elles-mêmes sera amélioré en 1999, dans les 10 départements où l'immigration est la plus importante et, dès les prochaines semaines, en Seine-Saint-Denis et dans le Rhône. Ainsi, les familles bénéficieront, indique la ministre de la Solidarité :

• d'une rencontre collective de présentation de la société française (mode de vie, droits et obligations...), le cas échéant dans la langue d'origine 

• d'un entretien personnalisé, si nécessaire dans la langue d'origine, avec un auditeur social, qui permettra de faire un bilan linguistique et social 

• si besoin, d'un premier entretien avec un travailleur social qui sera le correspondant du nouvel arrivant.

Ces bilans devront permettre de définir la formation ou les modes d'accompagnement devant être mis en place lors de la première année.

Les plans départementaux d'accueil

Ces plans, qui organisent la coordination des services, seront étendus à l'ensemble des départements.

Lutter contre les discriminations

La situation révélée par le Haut Conseil est « préoccupante », juge la ministre qui appelle à une mobilisation de tous et, notamment, de l'Etat. Celle-ci fait de la lutte contre les discriminations un des axes forts de la politique d'intégration, même si la loi « ne peut pas tout ».

En matière de logement

A ce chapitre, il est annoncé que la commission interministérielle pour le logement des populations immigrées  (CILPI)   (1)  - qui est entre autres chargée d'établir un bilan annuel du logement des populations immigrées - serait rapidement réunie. Et que son rapport serait rendu public.

LE PLAN QUINQUENNAL POUR LES FOYERS

Le plan quinquennal pour les foyers de travailleurs migrants prévu dans la convention Etat-UESL relative au 1 %patronal (2), préparé par la CILPI, « sera mis en œuvre dans les prochaines semaines », a affirmé la ministre, soulignant qu'il « n'est pas réaliste de penser qu'on pourra rapidement transformer » ce type de logements. Aussi, des opérations de réhabilitation, de reconstruction ou de démolition, avec le relogement des habitants, mais aussi l'ouverture des foyers à d'autres populations ou l'adaptation de l'équipement pour accueillir dignement les personnes âgées seront décidées dans le cadre de ce plan.

LA GESTION DES FOYERS

La gestion des 700 foyers (qui accueillent environ 140 000 personnes) est assurée pour moitié par la Sonacotra, pour moitié par des associations. Un grand nombre d'entre elles ayant des difficultés économiques, il va être demandé à la CILPI d'organiser un travail de réflexion concernant la définition des conditions de l'équilibre économique de l'activité de gestion des foyers  le système d'aides qui leur sont accordées  la formation des cadres gestionnaires  la restructuration du secteur des organismes gestionnaires.

Dans le monde du travail

Dans le monde du travail, la lutte contre les discriminations passe par la mobilisation des partenaires sociaux, duservice public de l'emploi, le développement des opérations de parrainage des jeunes et lasuppression de l'interdiction pour les étrangers d'exercer certaines activités professionnelles. Le gouvernement ayant en outre demandé l'inscription de la lutte contre les discriminations dans les lignes directrices pour l'emploi pour 1999 qui seront adoptées, à l'échelon européen, en décembre prochain.

LES PARTENAIRES SOCIAUX

Martine Aubry va proposer d'organiser, avant la fin de l'année, une table ronde avec les organisations syndicales. Son objet : rapprocher les diagnostics et, surtout, analyser les dispositions du code du travailpermettant de lutter contre les discriminations. Il s'agira de vérifier si les compétences reconnues aux institutions représentatives du personnel et aux syndicats sont adaptées et s'il faut les compléter. La possibilité d'élargir le champ de la négociation collective ou de modifier les règles relatives à la charge de la preuve, qui pèse aujourd'hui sur les personnes discriminées et qui rend concrètement impossible toute action, sera également examinée. Autre thème que l'Etat abordera avec les partenaires sociaux : l'amélioration de la formation des syndicalistes sur la lutte contre les discriminations.

L'ADMINISTRATION DU TRAVAIL ET DE L'EMPLOI

Le service public de l'emploi

Une circulaire datée du 20 octobre (3) a été adressée aux directions régionales et départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP et DDTEFP) ainsi qu'à l'ANPE et l'AFPA. Rappelant tout d'abord les textes en vigueur, la circulaire attire ensuite leur attention sur lalutte contre les discriminations :

• l'ANPE ne doit répondre à aucune offre d'emploi discriminatoire et dans certaines hypothèses, des actions répressives seront engagées, en liaison avec le parquet 

• l'AFPA doit veiller à l'amélioration de l'accès des jeunes issus de l'immigration aux formations professionnelles, notamment pour les contrats de qualification et les formations menant à l'entreprise et à l'emploi. Un point qui sera abordé avec les branches professionnelles 

• l'ANPE et l'AFPA, dans le cadre du plan national d'action pour l'emploi, « mettront en commun leurs savoir-faire, pour tirer des leçons communes des difficultés rencontrées et des actions positives mises en place »  ;

• le service public de l'emploi est appelé à veiller au développement des actions de médiation et d'accompagnement, notamment par la constitution de réseaux de parrainage (voir ci-après)  

• les services sont invités à s'appuyer sur la circulaire du 13 août 1998 renforçant leur collaboration avec le FAS (4).

En outre, une analyse de toutes les actions entreprises au niveau local dans le domaine de la lutte contre les discriminations sera menée pour le 15 décembre, afin d'envisager une généralisation au niveau national.

Enfin, en cohérence avec l'ensemble de la politique d'intégration conduite par le gouvernement, les services devront apporter leur appui au groupe d'étude sur les discriminations qui sera créé au niveau national pour analyser et observer les phénomènes discriminatoires (voir ci-après).

L'inspection du travail

La lutte contre les discriminations fera partie des objectifs prioritaires qui seront fixés aux inspecteurs du travail pour l'année 1999. Alors que la ministre de la Justice a demandé en juillet dernier aux procureurs de prêter un soin particulier à l'engagement de procédures et au relevé d'infractions (5), « l'action des inspecteurs du travail compétents pour, le cas échéant, transmettre un rapport au parquet, viendra compléter utilement la politique en la matière », souligne le ministère.

LE PARRAINAGE

Le gouvernement souhaite développer les opérations de parrainage mises en œuvre à titre expérimental depuis 1993. Opérations qui, rappelons-le, permettent à des salariés actifs ou récemment retraités d'appuyer des jeunes dans leur recherche d'emploi  (5).

Les jeunes parrainés, explique le ministère,« bénéficieront d'une aide à l'insertion personnalisée qui s'inscrira dans l'action du service public de l'emploi (et notamment le programme TRACE[voir ce numéro, page 11 ]) afin de déboucher sur des contrats de travail ou des formations qualifiantes ».

Dans les prochaines semaines, une charte nationaledevrait être signée avec les fédérations d'employeurs, les responsables des ressources humaines, les groupements d'employeurs. L'idée étant de« s'engager dans une démarche ambitieuse » pour parrainer le plus de jeunes possible (30 000 dès 1999). Ce sont près de 13 500 jeunes qui ont été parrainés en 1997, pour un montant de 25 millions de francs pour les finances de l'Etat et de plus de 5 millions pour les régions, rappelle la ministre. Laquelle annonce « un doublement dès 1999 ». Sachant qu'à terme, les partenaires sollicités (fédérations professionnelles, grandes entreprises, chambres consulaires, organismes de l'alternance) devront autofinancer les réseaux de parrainage, l'Etat « réservant ses financements à des réseaux locaux émanant de structures associatives notamment ».

Outre de définir des principes fondamentaux, la charte« pourrait concrétiser un engagement réciproque de l'Etat et des différents partenaires » pour lutter contre toutes les formes de discrimination ; veiller à ce que toutes les catégories de population aient une égalité de chance dans l'accès ou le retour à l'emploi durable ; ou encore ouvrir la démarche de parrainage aux jeunes en difficulté sociale, aux personnes rencontrant des obstacles à leur insertion en raison de leur origine ethnique, de leur sexe, de leur lieu d'habitation ou de leur âge. Etant entendu qu'une attention particulière devra être portée à l'insertion des jeunes diplômés issus de l'immigration ou des quartiers sensibles.

EXERCICE DE CERTAINES ACTIVITÉS

Martine Aubry a indiqué qu'il sera procédé « à une analyse exhaustive des différentes professions dont l'exercice est interdit, en droit, aux étrangers », ajoutant que« cela ne concerne pas la fonction publique qui relève d'une autre logique, comme l'a relevé le Haut Conseil à l'intégration, mais [qu']en revanche se pose la question du statut de plusieurs professions privées ou de certaines entreprises publiques ». Le gouvernement envisage ainsi desupprimer celles des discriminations légales, datant pour la plupart de l'après-guerre, qui n'ont plus aucune justification.

Le groupe d'étude sur les discriminations

Alors que le Haut Conseil à l'intégration suggère la création d'une autorité indépendante chargée de la lutte contre les discriminations, Martine Aubry n'a pas retenu cette proposition. Elle estime au préalable souhaitable « de vérifier si les structures administratives françaises sont adaptées » à cet objectif. Un rapport sur le sujet a été confié à Jean-Michel Belorgey, conseiller d'Etat, et devrait lui être rendu en février 1999.
Par contre, la ministre a annoncé la création d'un groupe d'étude sur les discriminations sous la forme d'un groupement d'intérêt public qui jouera le rôle d'observatoire et de centre d'analyse. Opérationnel« avant la fin de l'année », doté de la personnalité juridique et d'un budget propre et ayant une « certaine marge d'autonomie », celui-ci associera des chercheurs et des acteurs sociaux (syndicats, entreprises, associations) et sera relayé localement. Il participera à la réflexion sur l'adéquation des structures administratives à l'objectif de lutte contre les discriminations. Un groupe expérimental fonctionne déjà depuis plusieurs mois.

Faciliter l'acquisition de la nationalité française

Toutes procédures confondues, ce sont environ 110 000 personnes qui sont devenues françaises en 1997. Pour la naturalisation par décret, 60 000 décisions positives ont été prises. Mais, la procédure est trop longue et trop complexe.

La réduction des délais d'instruction des dossiers de naturalisation

En application de la loi du 16 mars dernier sur la réforme de la nationalité prévoyant notamment la réduction à 18 mois maximum du délai de réponse aux demandes de naturalisation (6), le ministère promet que les procédures, différentes entre les préfectures, seront harmonisées. Ainsi, la relation par voie postale avec le postulant sera préférée dans la constitution du dossier et les entretiens avec les postulants ne pourront être délégués. De même, lespièces relatives à la constitution du dossier seront allégées.

L'assouplissement des critères

En outre, les principes mêmes de la politique de naturalisation vont être adaptés « aux évolutions de notre société ». Ainsi de nouvelles instructions remplaçant la circulaire du 27 avril 1995 vont-elles être données« pour la fin de l'année 1998 »concernant les points suivants :

• la stabilité de la résidence en France sera appréciée en fonction d'un faisceau d'indices favorables au demandeur, notamment à partir de sa situation au regard des règles de séjour, de ses attaches affectives ou de ses intérêts matériels et professionnels 

• l'appréciation de l'insertion professionnelle des demandeurs sera assouplie. Jusqu'à présent, ceux qui n'avaient pas de contrat de travail, à durée indéterminée notamment, se voyaient refuser par principe la naturalisation. La ministre souhaite que l'on tienne compte du parcours personnel du demandeur, de ses efforts d'insertion et de son dynamisme. Le défaut d'insertion ne sera plus opposé de manière systématique. Ainsi, pour les chômeurs, l'ensemble de la situation familiale et personnelle pourra être prise en compte 

• les critères d'intégrationsociale et culturelle seront également appliqués pour tenir compte du parcours personnel du demandeur 

• la motivation des décisions défavorables sera améliorée.

• 
F. E. - H. M.

Le Haut Conseil à l'intégration dénonce les discriminations face à l'emploi et au logement

Actuellement « quasiment inexistantes en droit et en fait en matière de protection sociale »,les discriminations à l'égard des étrangers mais aussi des Français d'origine étrangère ou d'outre-mer « sont, en revanche, importantes et de plus en plus préoccupantes en matière d'emploi ». C'est le constat que dresse le Haut Conseil à l'intégration - qui voit Roger Fauroux succéder à Simone Veil (7)  - dans un rapport« relatif aux discriminations », remis, le mardi 20 octobre, au Premier ministre (8). Pour les huit sages, il s'agit de réalités« complexes » et variées, depuis l'acte clairement et directement xénophobe, jusqu'aux situations induites par « des systèmes de décision collectifs où les intentions individuelles sont diluées ». Et leur montée, dans chaque domaine de la vie sociale, mais en particulier dans ceux de l'emploi et du logement, constitue aujourd'hui« un péril » pour l'intégration, estiment les rapporteurs.
Reconnaissant que le système de prestations socialesa laissé subsister, « jusqu'à une date récente », des discriminations à l'égard des étrangers, le Haut Conseil considère que« l'égalité de traitement est désormais atteinte » avec la loi du 11 mai 1998 (RESEDA)   (9) supprimant la condition de nationalité pour le bénéfice de l'ensemble des prestations non contributives. Il pointe néanmoins des difficultés persistantes en matière « d'exportabilité » de certaines prestations et d'accès aux droits sociaux. Et là, les étrangers souffrent des mêmes dysfonctionnements que les personnes les plus démunies : délais de carence, complexité du droit. Aussi le rapport plaide-t-il pour que la mise en œuvre de la couverture maladie universelle « ne se traduise pas par une régression des droits aujourd'hui reconnus à certaines catégories d'étrangers, notamment ceux en situation irrégulière ».

Des difficultés d'accès à l'habitat

Citant notamment de nombreuses associations qui dénoncent les discriminations en matière de logement comme des« obstacles majeurs à l'intégration », le rapport dresse en effet un tableau sévère. Non seulement les immigrés, fortement touchés par le chômage, doivent faire face aux difficultés d'accès au parc locatif dues à leur faible niveau de ressources, mais ils supportent d'autres« discriminations plus spécifiques ». A leur arrivée en France, ils occupent ainsi, très souvent des logements précaires (foyers, cités de transit, chambres de bonne), puis la fraction dégradée du parc social ou les immeubles vétustes du parc privé. Et cela, souvent dans des quartiers ou blocs d'habitation où le pourcentage de résidents étrangers atteint des taux (de 80 % à 90 %) qui permettent de parler de« ségrégation spatiale ». Souvent « assignées à résidence » dans l'habitat insalubre ou dégradé, les familles attendent parfois des dizaines d'années une réponse à leur demande de logement social. Or, ces situations ne résultent pas seulement de la précarisation sociale générale, dénonce le Haut Conseil, mais bien également du fait qu'« il existe, tant dans le parc privé que dans le parc public, des discriminations [...] qui se fondent sur le patronyme, sur la couleur de la peau ou sur des représentations collectives négatives associées à l'origine ethnique ». Il réclame donc une plus grande transparence des modalités d'attribution, la revalorisation des aides personnelles, mais surtout, « un engagement renforcé de l'Etat » et notamment des préfets en faveur du logement des immigrés.

La sélection à l'embauche

De même, loin des principes affirmés de non-discrimination, les sages jugent que le niveau de chômage particulièrement élevé des étrangers (deux à trois fois plus touchés que les Français) « ne peut s'expliquer que par l'existence de discriminations ». Présentesdès les dispositifs d'insertion professionnelle (environ 3 % seulement des jeunes en contrat d'apprentissage ou de qualification sont étrangers), les discriminations jouent à plein à l'embauche, qu'elles soient explicites dans les offres d'emploi ou que la « préférence nationale » avance masquée derrière des arguments d'ordre commercial ou de maîtrise de la langue. En outre, l'ANPE et certaines missions locales participent parfois, contre leur gré, à cette sélection en ne présentant pas certains candidats aux employeurs discriminants afin d'éviter l'échec. Et si des entreprises ont expérimenté des procédures de lutte contre le racisme, le Haut Conseil plaide pour un engagement plus net des syndicats et une mobilisation plus importante de l'inspection du travail. Certes, certaines administrations concernées (réseaux régionaux de parrainage lancés par la DPM en 1994, expérimentation visant à l'insertion professionnelle des femmes immigrées menée en 1995 avec la DAS et le service des droits des femmes) ont pris des initiatives, mais elles ne sont pas suffisamment relayées sur le plan politique, déplorent les rapporteurs. Comment alors mieux assurer « l'égalité des droits à l'emploi » ? Les institutions publiques de lutte contre le chômage et de formation professionnelle doivent s'attacher à proposer aux étrangers des formations leur permettant de pallier leurs handicaps liés souvent à leur insuffisante qualification et à leur mauvaise maîtrise de la langue française, estime le Haut Conseil. Mais surtout, celui-ci propose de ne laisse subsister que les interdictions d'accès à certaines professions« justifiées et légitimes ».

Contre la ségrégation scolaire

Des efforts sont également nécessaires dans le domaine scolaire, jugent les rapporteurs. S'ils considèrent globalement, que « les difficultés des élèves issus de l'immigration sont plus révélatrices des insuffisances du système scolaire face aux handicaps socio-économiques et migratoires que de pratiques discriminatoires », ils observent néanmoins la montée dephénomènes inquiétants de ségrégation scolaire. En fait, plus que la forte proportion d'élèves issus de l'immigration dans une même classe ou un même établissement, c'est l'homogénéité sociale et de niveau qui l'accompagne qui semble néfaste, selon les sages :offre scolaire moins variée, sélectivité accrue dans les collèges populaires notamment. Quant aux discriminations vécues au quotidien (images dans les médias et accès à ceux-ci, relations avec la police et la justice, pratiques religieuses), elles sont encore nombreuses et fréquemment dénoncées par les intéressés, mais « difficilement mesurables ». Les rapporteurs préconisent donc, notamment, la mise en place d'outils permettant« d'établir leur existence ».
Et, de manière générale, s'inscrivant en fauxcontre l'établissement de quotas d'étrangers, ils plaident, entre autres propositions, pour la mise en place d'une autorité administrative indépendante« qui doit permettre aux personnes de faire effectivement valoir leurs droits ».

V. L.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2076 du 19-06-98.

(2)  Voir ASH n° 2077 du 26-06-98.

(3)  Circulaire DGEFP n° 98-36 du 20 octobre 1998, à paraître au B. O. T. R.

(4)  Voir ASH n° 2082 du 28-08-98.

(5)  Voir ASH n° 2082 du 28-08-98.

(6)  Voir ASH n° 2063 du 20-03-98.

(7)  Simone Veil, qui le présidait, avait demandé à être déchargée de ses fonctions. Nommé en remplacement de celle-ci par décret du 19 octobre 1998, l'ancien ministre de l'Industrie n'en devient pas pour autant président du Haut Conseil. Celui-ci devant être élu par l'ensemble de ses membres.

(8)  Rapport relatif aux discriminations - Haut Conseil à l'intégration : 56,  rue de Varenne - 75007 Paris - Tél. 01 42 75 85 70.

(9)  Voir ASH n° 2071 du 15-05-98.

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