La direction de la protection judiciaire de la jeunesse a rendu publics, le 13 octobre, les résultats d'une enquête menée par une équipe de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) sur la santé des adolescents de la PJJ (1). Présentée comme la première du genre, celle-ci vise « à mieux connaître leurs situations sociale, familiale et scolaire ainsi que leurs comportements à risques et leurs problèmes de santé ». Réalisée à partir de questionnaires remplis par les jeunes (2), cette étude met en évidence, au-delà de la stricte photographie médicale, « les difficultés multiples, chroniques et graves » qu'ils rencontrent et que connaissent déjà bien souvent les professionnels. Un tableau qui vient souligner une nouvelle fois le manque de moyens des services pour prendre en compte les nombreuses souffrances des adolescents.
La population des jeunes prise en charge par les services de la PJJ cumule les difficultés familiales (plus de la moitié sont issus de familles dissociées), scolaires (âge moyen de fin d'études à 15 ans et demi pour les garçons) et sociales avec des problèmes de santé. Au-delà de ces résultats globaux relativement attendus concernant ces jeunes, l'enquête révèle d'autres aspects moins connus de leur physionomie. Elle rappelle notamment que, malgré les difficultés, l'école et les parents restent bien présents : un jeune sur deux est encore scolarisé et la majorité vit avec sa famille. En outre, elle insiste sur la différence importante entre les garçons (78 % des jeunes de la PJJ) et les filles, qui sont « nettement plus en difficulté » que les précédents. Plus souvent en rupture avec leur famille (53 % vivent chez un de leur parent contre 74 %), elles s'y confient moins que les garçons et parlent plus volontiers aux éducateurs. Et si la fréquence des troubles du sommeil, des maladies chroniques, et des acci- dents multiples est plus importante pour l'ensemble de ces adolescents que pour les jeunes en général, les filles sont encore davantage concernées. Elles se plaignent plus souvent de difficultés d'endormissement, de maux chroniques, et 34 % d'entre elles présentent, selon les chercheurs, une « symptomatologie dépressive » . Sachant que 49 %des jeunes filles (contre 12 % des garçons) ont déjà fait une tentative de suicide. Enfin, elles ont été nettement plus souvent victimes (34 %) de violences sexuelles que les garçons (6 %), même si 41 % d'entre eux ont été également victimes d'une agression physique. Or, alors que la majorité des jeunes a déjà consulté un spécialiste, « l es deux tiers de ceux qui déclarent des problèmes psychologiques ne sont pas engagés dans une prise en charge psychologique », déplore l'étude. Laquelle relève également que la moitié des jeunes « n e parle à personne » quand il s'agit d'un problème psychologique ou de drogue. Un silence d'autant plus préoccupant que les chercheurs constatent, pour les deux sexes indifféremment, une surconsommation de tabac, d'alcool et de cannabis ainsi que d'autres drogues (cocaïne, héroïne et ecstasy) peu consommées chez les jeunes en général : près de 10 %, par exemple, ont déjà pris de l'ecstasy alors que la proportion est de 2 % parmi les moins de 20 ans.
Au vu de « l a gravité de la situation » concernant la santé au sens large de ces adolescents, le rapport préconise donc, entre autres propositions, l'élaboration « d 'un bref questionnaire de santé, à remplir par tout jeune au début d'une mesure de la PJJ ». Une manière, selon les rapporteurs, de mieux connaître les problèmes de santé « souvent difficilement identifiables » et qu'ils jugent généralement « sous-estimés ». De son côté, Sylvie Perdriolle, directeur de la PJJ, a annoncé la décision de créer un pôle santé au sein de l'administration centrale qu'elle dirige. De même, un programme de travail sera prochainement défini avec la MILDT et la direction générale de la santé.
(1) Adolescents de la protection judiciaire de la jeunesse et santé - 1998 - INSERM, DPJJ, MILDT - Disponible à la DPJJ : 251, rue Saint-Honoré - 75038 Paris cedex 01 - Tél. 01 44 77 60 60.
(2) 917 jeunes entre 14 et 21 ans y ont répondu.