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Médecins du monde plaide pour une aide médicale rénovée

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Faut-il associer les mutuelles et les assurances au financement de la couverture maladie universelle ? Non, répond Nathalie Fouques (1) pour Médecins du monde.

Actualités sociales hebdomadaires  : Promise depuis 1995 et sans cesse repoussée, l'idée d'une assurance maladie universelle n'est-elle pas l'arlésienne ? Nathalie Fouques  : Oui, c'est un peu l'arlésienne. C'est pourquoi nous souhaitons la mise en œuvre la plus rapide possible de la couverture maladie universelle. Or, contrairement à ce qui avait été annoncé, celle-ci ne sera pas applicable au 1er janvier 1999. On nous parle désormais de l'an 2000. Ce qui repousse encore d'une année ce dossier, pourtant prioritaire. ASH  : Etes-vous satisfaits de la proposition d'instaurer un droit d'affiliation au régime général sur critère de résidence ? N.F.  : La création d'une affiliation sur critère subsidiaire de résidence nous semble essentielle. D'autant que Jean-Claude Boulard indique que la notion de résidence demeurerait celle fixée par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 8 janvier 1981. Il nous paraît, en effet, très important que toute personne ayant une résidence effective et stable en France, même non régulière, puisse bénéficier de la couverture maladie universelle. Par contre, on est tout à fait hostile à ce que les mutuelles et les assurances participent à la couverture complémentaire. ASH  : Pourquoi ? N.F.  : Car ces acteurs, contrairement au service public, ont nécessairement des logiques de rentabilité. Et je doute de l'angélisme des mutuelles et des assurances : si elles mettent des billes dans cette histoire, c'est aussi pour récupérer un marché. Nous, finalement, nous trouvions que la loi de 1992 sur l'aide médicale n'était pas si mauvaise, sous réserve qu'on l'aménage. Celle-ci est actuellement injuste : ses conditions d'accès et son barème sont fixés au niveau départemental. C'est ainsi que le plafond de revenus pour y accéder varie, selon les départements, du RMI jusqu'à 3 800 F à Paris. Aussi, nous demandions l'application d'un barème unique applicable sur tout le territoire. Avec l'idée que le niveau retenu soit aligné sur le plus élevé. De plus, pour les personnes ayant des ressources juste supérieures mais toutefois insuffisantes pour accéder à une complémentaire, nous proposions qu'il y ait une aide médicale dégressive en fonction des revenus. L'idée étant d'éviter les effets de seuil actuels. ASH  : On ne peut pourtant pas reprocher à Jean-Claude Boulard de vouloir sortir de l'assistance ? N.F.  : Je veux bien croire que le fait de passer de l'aide médicale à une couverture assurée par les mutuelles et les assurances puisse être une façon de redonner leur dignité aux personnes. Mais, nous sommes très méfiants sur les capacités des mutuelles à gérer ce qui relève actuellement d'une aide sociale pour couvrir des gens qui ne seront économiquement pas rentables. D'autant qu'il y aura inévitablement un phénomène de rattrappage car les mutuelles vont devoir prendre en charge des patients qui ne se sont pas soignés parfois depuis dix ans. Et faire face, dans les premières années, à d'importantes dépenses de soins. Vont-elles suivre ? ASH  : Pour éviter justement « une mutuelle des pauvres », Jean-Claude Boulard propose de négocier une couverture complémentaire de référence. N.F.  : Il faudra qu'il y ait un cahier des charges extrêmement rigoureux. On a eu le cas d'un département où les mutuelles, qui prenaient en charge l'aide médicale, ont refusé de continuer à assurer une personne au motif qu'elle avait suffisamment dépensé. S'il est question de négocier une couverture de référence, dans toute négociation, on lâche du lest forcément. Le risque, c'est d'aboutir à une complémentaire où tout n'est pas pris en charge. Je pense notamment aux dépenses de prothèses auditives, de lunetterie... ASH  : Ce ne serait pas pire qu'aujourd'hui... N.F.  : C'est vrai que l'aide médicale prend très mal en charge les lunettes, par exemple. Il faut débloquer des fonds spéciaux de la sécurité sociale, faire des devis chez les opticiens, c'est très compliqué. C'est pourquoi nous demandions que tous ceux qui ont droit à l'aide médicale soient pris en charge à 100 % pour tous les soins dentaires, les prothèses auditives, la lunetterie. Ces frais seront-ils vraiment mieux remboursés dans le système défendu par Jean-Claude Boulard ? En outre, celui-ci va-t-il vraiment dans le sens d'une simplification des formalités ? ASH  : Que voulez-vous dire ? N.F.  : La simplification des démarches est capitale dans l'accès aux soins. C'est pour cela que nous étions très attachés à ce qu'un seul interlocuteur, la caisse primaire d'assurance maladie, permette d'accéder à la couverture de base et à la complémentaire. Or j'imagine mal que la CPAM devienne le gestionnaire unique des mutuelles... ASH  : Vous demandiez également la généralisation du tiers payant ? N.F.  : C'est vrai. Pour les personnes qui ne bénéficient pas de l'aide médicale - et qui n'auront pas plus droit d'ailleurs à la nouvelle allocation personnalisée santé car elles seront juste au-dessus du seuil d'attribution - l'avance des frais est un réel problème. Aussi, nous demandions que dans toutes les structures de soins, y compris en libéral, on puisse ne payer que le ticket modérateur. Cela ne nous semble pas impossible même s'il y a un énorme frein du côté des professions libérales. Et même si Jean-Claude Boulard nous a dit qu'une généralisation du tiers payant, était totalement utopique. Propos recueillis par I.S.

Notes

(1)  Nathalie Fouques est médecin au centre de soins de Médecins du monde à Paris et membre du comité de pilotage de la « Mission France ». Médecins du monde fait partie du groupe « précarité-santé » de l'Uniopss.

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