Recevoir la newsletter

A quand la CMU ?

Article réservé aux abonnés

« La couverture maladie universelle promise pour janvier 1999 verra-t-elle le jour à cette date ? » , s'impatiente la FNARS après la remise du rapport de Jean-Claude Boulard, le 8 septembre. Même si le Premier ministre comme Martine Aubry ont voulu calmer les esprits en annonçant qu'un projet de loi serait déposé au Parlement « dans les délais les plus brefs et au plus tard avant la fin de l'automne » . Et que les concertations nécessaires allaient être engagées avec les partenaires concernés.

Chargé d'une mission sur le sujet par le Premier ministre, le député Jean-Claude Boulard  (PS) vient de lui remettre, le 8 septembre, ses conclusions (1), attendues à l'origine avant l'été. Pas question tout d'abord pour lui de voir dans la substitution même de la notion de couverture maladie universelle  (CMU) à celle d'assurance maladie universelle, un simple changement sémantique. Cette «  démarche d'extension du droit » s'oppose aux soins spécifiques pour personnes en difficulté et prévient le risque de «  création d'une filière sanitaire des pauvres ». Il s'agit d' « inclure les exclus dans la couverture de tous ». Objectif qui, ajoute-t-il, implique également un renforcement de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé et des filières de soins.

Concrètement, le rapport propose trois scénarios, tout en affichant clairement sa préférence. Premier d'entre eux, « la couverture décentralisée encadrée » vise à étendre la portée de l'aide médicale, financée pour l'essentiel par les conseils généraux tout en corrigeant ses insuffisances. Simple, ce système a pourtant le défaut de rester dans une logique d'assistance et n'enthousiasme guère les conseils généraux «  qui ne souhaitent pas conserver cette compétence », argue Jean-Claude Boulard.

D'où sa deuxième hypothèse : « la couverture centralisée ». Il s'agirait, dans ce cas, d'instaurer un droit d'affiliation au régime général sur critère subsidiaire de résidence pour la couverture de base. Quant au régime complémentaire, il serait greffé sur le régime général et accessible sous condition de ressources. Dans ce cadre, l'aide médicale des départements serait recentralisée. Si ce scénario a le mérite de créer un guichet unique et répond ainsi à une demande forte des associations - la FNARS, par exemple, insiste sur son attachement à «  la prise en charge de tous par l'assurance maladie y compris en matière de couverture complémentaire sous condition de ressources »   -, il risque néanmoins de créer un effet de seuil important. En outre, objecte le député, les partenaires sociaux et les acteurs de la couverture complémentaire y sont plutôt hostiles.

Aussi, le rapport propose-t-il d'envisager « la couverture partenariale ». Le régime de base serait centralisé comme dans l'hypothèse précédente. Et l'aide médicale supprimée, sauf l'aide médicale Etat pour les populations très marginalisées. La couverture complémentaire quant à elle serait étendue. Cette option conduirait à la création d'une allocation personnalisée santé (APS) couvrant une partie de l'affiliation à une complémentaire librement choisie pour les personnes dont le revenu est égal ou inférieur au barème du minimum vieillesse et qui ne touchent pas le RMI. Lesquelles pourraient également s'acquitter d'une cotisation personnelle de 30 F par mois. Et là, les mutuelles, les institutions de prévoyance et les assurances - d'accord sur «  le principe du partenariat »

- seraient mises à contribution à travers l'extension de leur périmètre en faveur des bénéficiaires de l'APS ou en contribuant à un fonds de péréquation. Et comme garde-fou à une « mutuelle des pauvres », Jean-Claude Boulard propose la négociation d'une couverture complémentaire de référence de qualité. Pour lui, ce scénario a l'avantage d'aller dans le sens d' « une généralisation du droit commun de la couverture maladie  ».

Les exclus de la santé

 0,3 % de la population, soit 150 000 personnes, n'accède pas à un régime de base ;

 16 % de la population ne disposent pas de couverture complémentaire : 4 %bénéficient d'une prise en charge à 100 %au titre de l'aide médicale gratuite ou de l'exonération du ticket modérateur ; 12 %, soit 7 millions de personnes, n'ont aucune couverture. Les plus touchés par l'exclusion des soins sont les chômeurs et les jeunes. Et les renonciations les plus importantes concernent le domaine dentaire (40 %), l'optique médicale (15,8 %) et les consultations de médecine de ville (29 %).

(Rapport Boulard)
Des associations impatientes

Première des associations à réagir, la FNARS exprime, dans un communiqué du 10 septembre, sa « très grande prudence » sur ce scénario, évoquant «  la rareté des expériences de mutualisation des exclus menées à bien de façon satisfaisante sur le long terme, et l'envie des assureurs de pénétrer ce marché ». Des réserves partagées par Médecins du monde (comme on le lira) et Médecins sans frontières. En revanche, à l'Uniopss, cette dernière proposition semble embarrasser le groupe « précarité-santé » qui veut «  prendre le temps » avant de réagir. Si celui-ci avait réussi à établir une plate-forme commune en juillet, il apparaît divisé aujourd'hui sur le principe de la participation des mutuelles et assureurs au système.

L'unanimité se réalise en tout cas sur l'urgence de la mise en œuvre de la réforme. Prévue initialement pour prendre effet en 1999, celle-ci risque de ne pas pouvoir entrer en application avant le 1er janvier 2000, craignent les associations. Une irritation d'autant plus compréhensible que le gouvernement avait présenté la question de l'accès aux soins des personnes démunies comme «  un élément clé » de la lutte contre les exclusions.

Enfin, au sujet du financement, le président de l'APCG, Michel Mercier, a indiqué, le 15 septembre, que dans le cadre de la recentralisation de l'aide médicale, les départements étaient prêts à ne plus percevoir l'enveloppe de 6,1 milliards de francs versés par l'Etat à titre de compensation (et non les 7,4 milliards qui représentent les dépenses réelles). Quant à l'effort supplémentaire de 5 milliards de francs par an que l'Etat entend dégager, il apparaît « bien inférieur au financement des emplois-jeunes ou de la réforme de la taxe professionnelle », relève la FNARS.

Isabelle Sarazin

Notes

(1)  Détaillées dans les ASH n° 2084 du 11-09-98.

L'ÉVÉNEMENT

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur