Que recouvre la notion du « consentement éclairé » ? Comment définir le devoir d'information et le souci de vérité du médecin ? Chargé, en février 1993, par Bernard Kouchner, alors ministre de la Santé et de l'Action humanitaire, de conduire une réflexion sur l'information des personnes qui se prêtent à des actes de soin ou de recherche, le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE) vient enfin de rendre son avis, le 14 septembre (1). Il rappelle que depuis le début des années 90, en France, de nombreux textes législatifs, réglementaires ou jurisprudentiels ont affirmé ou réaffirmé l'obligation faite aux médecins et, d'une façon générale, aux services de santé, d'informer les patients et de solliciter leur accord avant toute investigation ou intervention thérapeutique. En ce sens, la doctrine soutenue par les textes français - objet « d'un large consensus européen » - est « forte et homogène », assure-t-il : « Pas d'intervention médicale sur un être humain sans son consentement préalable et pour qu'il puisse faire un choix judicieux, obligation de l'informer de façon honnête et complète. » Néanmoins, note le CCNE, il faut constater le décalage entre les principes et les pratiques extrêmement hétérogènes. Sans compter que certains patients ne sont pas en état d'exprimer leur volonté, ni de recevoir des informations ou n'ont pas la capacité juridique de prendre des décisions pour eux-mêmes (mineurs, malades protégés), souligne-t-il. Pourtant, « les malades dits'incapables" ont souvent des capacités de compréhension qui justifient leur information et légitiment la recherche d'un consentement aux soins qui ne doit pas être présumé ».
« Toute personne, affirme donc le comité d'éthique, doit être présumée capable a priori de recevoir des informations et de donner un consentement'libre et éclairé" à un acte médical qu'on lui propose, à moins qu'il ait été établi que cette capacité lui fait défaut. » Et dans ce cas, il propose d'étudier la possibilité pour le patient de désigner « un représentant » (ou « mandataire » ou « répondant » ) qui serait l'interlocuteur des médecins aux moments où il est hors d'état d'exprimer lui-même ses choix. Ce dernier serait, pour les médecins, « la première personne à informer, et à consulter sur les choix à faire, pendant que le patient est dans l'incapacité de répondre pour lui-même ».
Cette possibilité de désigner un représentant existe d'ailleurs dans certains pays anglo-saxons, défend le comité. Lequel s'appuie sur une enquête sur « le consentement éclairé à la notion de représentant », menée de février à juillet 1997, dans un service de réanimation de la région parisienne. Et dont les résultats montrent que dans 35 % des cas, la « personne à prévenir » notée sur les formulaires d'admission ne correspond pas au nom de la personne désignée comme représentant par les patients qui ont pu s'exprimer. « Le malade ne choisit pas toujours sa famille et préfère parfois qu'un compagnon décide pour lui », souligne le Pr Geneviève Barrier, membre du CCNE et chef de service d'anesthésie-réanimation. Reste néanmoins à définir si le représentant aura seulement un rôle consultatif ou s'il sera habilité à participer aux décisions, voire à consentir à un acte de recherche pour la personne en incapacité, indique le comité.
(1) Consentement éclairé et information des personnes qui se prêtent à des actes de soin ou de recherche - CCNE : 71, rue Saint-Dominique - 75007 Paris - Tél. 01 44 42 48 52.