Celui-ci passe par de nouvelles incriminations (par exemple le délit de bizutage, voir notre précédent numéro), mais également par l'élargissement des possibilités de poursuites des auteurs d'infractions et l'aggravation des peines.
Les possibilités de poursuivre les auteurs d'infractions sexuelles sont élargies. C'est ainsi que la loi reporte le point de départ du délai de prescription pour certaines infractions, rend la loi française applicable à l'ensemble des crimes et délits commis contre des mineurs à l'étranger ou encore engage la responsabilité pénale des personnes morales.
Jusqu'ici, le délai de prescription de l'action publique d'un crime ou d'un délit commis sur un mineur ne commençait à courir qu'à compter de la majorité uniquement lorsque l'auteur de l'infraction était un ascendant ou avait autorité sur le mineur.
Le point de départ spécifique du délai de prescription s'appliquera désormais, qu'il s'agisse de crimes ou de délits, quel que soit l'auteur de l'infraction.
Si la règle selon laquelle le délai de prescription ne commence à courir qu'à la majorité de la victime s'applique à tous les crimes contre les mineurs, les parlementaires ont souhaité que les délits pour lesquels elle s'applique soient inscrits de façon ostensible dans le code de procédure pénale à l'article 8 où sont indiqués les délais de prescription en matière délictuelle. Sont donc visés les violences délictuelles, les agressions sexuelles délictuelles, le proxénétisme, la corruption de mineurs, les atteintes sexuelles sans violence.
Par exception et en raison de leur gravité, il est désormais prévu que les agressions sexuelles autres que le viol et les atteintes sexuelles sans violence commises sur un mineur par une personne ayant autorité sur la victime se prescrivent par 10 ans, soit un délai identique à celui applicable en matière de crime.
Ces nouvelles règles de prescription sont applicables aux infractions non encore prescrites lors de l'entrée en vigueur de la loi, soit le 20 juin 1998. Il s'agit donc d'une dérogation au principe selon lequel les lois relatives à la prescription de l'action publique sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur « sauf quand elles auraient pour résultat d'aggraver la situation de l'intéressé », ce qui est partiellement le cas ici.
L'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction actuelle, énonce que les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent par 10 ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation.
La loi prévoit une exception à cette règle en portant ce délai à 20 ans lorsque le dommage est causé par des tortures, des actes de barbarie, des violences ou des agressions sexuelles commises à l'encontre d'un mineur.
Première partie : le suivi socio-judiciaire
Dans notre numéro 2077 du 26 juin 1998, page 17 :
• Les personnes susceptibles d'être condamnées
• La condamnation
• Les effets du suivi socio-judiciaire
Dans notre numéro 2078 du 3 juillet 1998, page 21 :
• L'exécution du suivi socio-judiciaire
• Le relèvement
• Les dispositions diverses
Deuxième partie : la protection des mineurs victimes
Dans notre numéro 2081 du 21 août 1998, page 15 :
• L'instauration d'un « statut du mineur victime »
• Le renforcement de la répression des atteintes sur des mineurs
Dans ce numéro :
• Le renforcement de la répression des atteintes sur des mineurs (suite)
- L'élargissement des possibilités de poursuites des auteurs d'infractions sexuelles
- Une aggravation des peines
• Les dispositions diverses
- L'assimilation des délits à caractère sexuel au regard de la récidive - Une nouvelle définition du délit de harcèlement sexuel
- Les réductions de peines soumises à expertises psychiatriques- L'information du chef d'établissement scolaire - La preuve de la vérité des faits diffamatoires
La loi du 17 juin procède à l'extension de l'application de la loi pénale française à l'ensemble des crimes et des délits à caractère sexuel commis contre des mineurs à l'étranger par des Français ou des personnes résidant habituellement en France.
Jusqu'ici, cette clause d'extraterritorialité ne s'appliquait qu'aux atteintes sexuelles sans violence, contrainte, menace ni surprise qui s'accompagnaient du versement d'une rémunération. « Or, il semble que cette disposition ne soit pas suffisante pour lutter contre un tourisme sexuel qui ne se traduit pas toujours par une rémunération », note Frédérique Bredin (Rap. A. N. n° 228, Bredin).
Dans le cadre de l'action commune relative à la lutte contre la traite des êtres humains et à l'exploitation sexuelle des enfants, adoptée récemment par le Conseil de l'Union européenne, les Etats membres se sont engagés à appliquer la loi pénale nationale lorsque l'auteur de l'exploitation sexuelle d'enfants est « un de ses ressortissants ou une personne résidant habituellement sur son territoire ». Par les termes « d'exploitation sexuelle d'un enfant », l'action commune vise l'incitation d'un enfant à se livrer à une activité sexuelle illégale et l'exploitation d'un enfant à des fins de prostitution ou de production de spectacles ou de matériels à caractère pornographique.
Pour se conformer à cette action commune et afin d'améliorer la répression du « tourisme sexuel », la loi pénale française est rendue applicable à toute agression sexuelle contre un mineur commise à l'étranger par un Français ou une personne résidant habituellement sur le territoire français. Et ce, même si les faits ne sont pas punis par la législation du pays où ils ont été commis et sans exiger une plainte préalable de la victime ou une dénonciation officielle des faits par les autorités du pays. Ainsi, le viol par un Français d'un mineur de 15 ans dans un pays étranger pourra être puni de 20 ans de réclusion criminelle, quel que soit le droit local applicable et sans que la victime ait à porter plainte.
La clause d'extraterritorialité s'applique aux Français, mais également aux personnes « résidant habituellement sur le territoire français ». Cette expression, qui reprend celle utilisée dans l'action commune du Conseil de l'Union européenne, devra encore voir son champ d'application précisé par la jurisprudence, a indiqué Frédérique Bredin. Rappelons, à titre d'exemple, qu'en matière fiscale, est considéré comme résidant celui qui demeure au moins 6 mois par an sur le territoire français.
L'applicabilité de la loi pénale française est étendue, dans les mêmes conditions, au délit de corruption de mineurs (art. 227-22 du CP), à celui d'atteinte sexuelle sur mineur (art. 227-25 à 227-27 du CP) ainsi qu'au délit de diffusion d'une image de mineur présentant un caractère pornographique (art. 227-23 du CP) commis à l'étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français. Là encore, même si les faits ne sont pas punis par la législation du pays où ils ont été commis et sans exiger une plainte préalable de la victime ou une dénonciation officielle des faits par les autorités du pays.
Est inséré dans le livre du code pénal consacré à la répression des infractions mettant en péril des mineurs, un article 227-28-1 prévoyant la responsabilité pénale des personnes morales pour un certain nombre de délits.
Cette responsabilité, qui s'inscrit dans les conditions générales de la responsabilité des personnes morales, pourra être engagée en cas de provocation d'un mineur à faire un usage illicite de stupéfiants ou à en faire le trafic (art. 227-18 et 227-18-1 du CP), à consommer de façon habituelle et excessive des boissons alcooliques (art. 227-19 du CP), à mendier (art. 227-20 du CP), à commettre habituellement des crimes et des délits (art. 227-21 du CP) et à se livrer au délit de corruption de mineur (art. 227-22 du CP).
Les personnes morales pourront également être déclarées pénalement responsables en cas de diffusion d'images pornographiques de mineurs (art. 227-23 du CP), de fabrication ou de diffusion de messages violents, pornographiques ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité de la personne humaine susceptibles d'être vus par un mineur(art. 227-24 du CP) ou encore, en cas d'atteintes sexuelles aggravées ou non sur mineur (art. 227-25 et 227-26 du CP).
Les personnes morales encourent une amende, dont le taux maximum est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques. En outre, elles peuvent se voir appliquer les peines suivantes :
• l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de 5 ans au plus, d'exercer directement ou indirectement l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise
• le placement sous surveillance judiciaire pour une durée de 5 ans au plus
• la fermeture définitive, ou pour une durée de 5 ans au plus du ou des établissements ayant servi à commettre les faits incriminés
• l'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de 5 ans au plus
• l'interdiction, pour une durée de 5 ans au plus, d'émettre des chèques
• la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de celle qui en est le produit
• l'affichage de la décision prononcée ou sa diffusion soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle.
La dissolution, considérée comme « la peine capitale » des personnes morales, n'a pas été retenue. Elle pourra néanmoins être prononcée lorsque la personne morale a été créée ou détournée de son objet pour commettre une atteinte sexuelle sur la personne d'un mineur de 15 ans, accompagnée du versement d'une rémunération. Une disposition qui vise les agences de voyages spécialisées dans le tourisme sexuel.
Un article 450-4 est inséré dans le code pénal afin de permettre de déclarer les personnes morales pénalement responsables de l'infraction d'association de malfaiteurs (1). Une disposition qui va bien au-delà de l'objet de la présente loi, mais qui, comme le précise l'exposé des motifs, sera notamment applicable aux agences de voyages proposant du tourisme sexuel. En effet, l'atteinte sexuelle sur un mineur de 15 ans accompagnée du versement d'une rémunération, qui constitue la forme la plus répandue du tourisme sexuel, selon Frédérique Bredin, est punie de 10 ans d'emprisonnement et de 1 million de francs d'amende, ce qui lui permet de répondre aux critères de l'association de malfaiteurs.
Les sanctions prévues sont l'amende, dont le montant maximum est égal au quintuple de celui applicable aux particuliers, soit en l'espèce 5 millions de francs et également la dissolution, l'interdiction d'exercer l'activité dans l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, le placement sous surveillance judiciaire, la fermeture de l'établissement ayant servi à commettre l'infraction, l'exclusion des marchés publics, l'interdiction de faire appel public à l'épargne, celle d'émettre des chèques, la confiscation de la chose destinée à commettre l'infraction ou de son produit et enfin l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée.
Ce nouvel article pourra également s'appliquer à certaines sociétés qui, sous couvert d'agences de services, se livrent à certaines formes de proxénétisme (Rap. A. N. n° 228, Bredin).
Le renforcement de la répression des atteintes sur les mineurs se traduit également par la création de deux peines complémentaires dans le code pénal et de nouvelles circonstances aggravantes et par l'aggravation de la peine encourue pour atteinte sexuelle sans violence sur un mineur.
Le droit actuel sanctionne de un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende la violation du secret professionnel. Certaines exceptions à cette règle sont toutefois autorisées par le code pénal. Ainsi, hormis les autres cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret, la règle est levée :
• d'une manière générale, à l'égard de quiconque informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives dessévices ou privations dont il a eu connaissance et qui ont été infligés à un mineur de 15 ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique
• et, s'agissant plus particulièrement des médecins, à l'égard de ceux d'entre eux qui, avec l'accord de la victime, portent à la connaissance du procureur de la République les sévices qu'ils ont constatés dans l'exercice de leur profession et qui leur permettent de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises.
Afin de faire apparaître clairement la possibilité pour les assistantes sociales ou les enseignants, par exemple, de dénoncer des atteintes sexuelles commises, même sans violence, à l'égard de mineurs de 15 ans ou d'une personne particulièrement vulnérable, la loi mentionne explicitement les atteintes sexuelles parmi les « sévices » qui peuvent être révélés aux autorités judiciaires, médicales ou administratives, sans porter atteinte au secret professionnel.
Par cohérence, la loi prévoit que l'obligation de dénonciation de mauvais traitements ou privations infligés à un mineur de 15 ans s'applique également en cas d'atteintes sexuelles.
Afin de protéger les mineurs contre une éventuelle récidive, une nouvelle peine complémentaire est instituée à l'encontre des personnes reconnues coupables d'atteintes volontaires à l'intégrité de la personne (tortures et actes de barbarie, violences, menaces), d'agressions sexuelles (viol, autres agressions sexuelles, harcèlement sexuel) ou de trafic de stupéfiants. Il s'agit de l'interdiction d'exercer une activité, qu'elle soit professionnelle ou bénévole, impliquant un contact habituel avec des mineurs. Cette interdiction, qui s'ajoute aux sanctions inhérentes à chacune de ces infractions, peut être définitive ou temporaire lorsqu'elle est temporaire, elle ne peut excéder 10 ans.
Cette nouvelle peine vient compléter la liste de celles déjà prévues par l'article 222-45 du code pénal pour les coupables de ces infractions, à savoir la privation de leurs droits civiques, civils et de famille ainsi que l'interdiction d'exercer une fonction publique. Etant rappelé que les intéressés peuvent également se voir infliger les peines complémentaires suivantes :
• l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise ;
• l'interdiction de détention ou de port d'arme
• l'annulation ou la suspension pour une durée de 5 ans au plus du permis de conduire
• la confiscation de véhicule, d'arme ou de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.
A noter : comme dans le cadre du suivi socio-judiciaire(voir ASH n° 2078 du 3-07-98), lorsqu'une personne a été condamnée à la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, la réhabilitation n'est effective qu'à la fin de cette peine (art. 133-16 modifié du CP). Dans le même esprit, le bulletin n° 3 du casier judiciaire comprend, pour toute la durée de la mesure, les décisions prononçant la peine d'interdiction (art. 777 modifié du CPP). Et par exception au droit commun, la peine d'interdiction d'exercer une activité impliquant un contact avec les mineurs qui accompagne une condamnation avec sursis réputée non avenue, continue de figurer au bulletin n° 2du casier judiciaire pendant la durée de la mesure (art. 775, 736 et 746 modifiés du CPP).
L'article 227-29 du code pénal énumère les peines complémentaires susceptibles d'être prononcées à l'encontre des personnes physiques reconnues coupables des atteintes aux mineurs et à la famille que sont le délaissement de mineur, l'abandon de famille, les atteintes à l'exercice de l'autorité parentale ou à la filiation et la mise en péril des mineurs.
Ces peines complémentaires consistent en une interdiction des droits civiques, civils et de famille, une suspension pour une durée de 5 ans au plus du permis de conduire, l'annulation de ce permis et une interdiction, pour une durée de 5 ans maximum, de quitter le territoire de la République.
A cette énumération, s'ajoutent désormais :
• la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de celle qui en est le produit
• l'interdiction, soit à titre définitif, soit pour une durée de 10 ans au plus, d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs.
Le développement des techniques de télécommunications a rendu certaines infractions à caractère sexuel à la fois plus faciles à commettre et plus difficiles à sanctionner :elles permettent en effet d'entrer en contact avec un grand nombre d'interlocuteurs alors que l'auteur du message n'est souvent pas aisément identifiable ces procédés induisent une internationalisation de délits dont la prévention et la répression se révèlent complexes.
Les auteurs du projet de loi ont donc souhaité punir plus sévèrement certains délits lorsque la victime a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation d'un réseau de télécommunications (Internet, Minitel, réseau de télécommunications classique), pour « la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé », cette formulation permettant d'exclure les correspondances purement privées. La loi fait ainsi de l'utilisation d'un tel réseau une circonstance aggravante en cas :
• de viol. La peine est alors portée de 15 à 20 ans de réclusion criminelle
• d'agressions sexuelles autres que le viol. En cas d'utilisation d'un réseau de télécommunications, ces agressions sont punies de 7 ans d'emprisonnement et de 700 000 F d'amende (contre 5 ans d'emprisonnement et 500 000 F d'amende en règle générale)
• de proxénétisme. La peine passe alors de 5 à 10 ans d'emprisonnement et de 1 million à 10 millions de francs d'amende
• de corruption de mineur. L'auteur des faits encourt 7 ans d'emprisonnement et 700 000 F d'amende (au lieu de 5 ans d'emprisonnement et 500 000 F d'amende)
• d'atteintes sexuelles sur un mineur de 15 ans. Le délit est, dans cette circonstance, puni de 10 ans d'emprisonnement et de 1 million de francs d'amende (contre 2 ans d'emprisonnement et 200 000 F d'amende).
« Tous les élus et les parents connaissent et déplorent les bandes organisées qui sévissent à proximité des établissements scolaires et qui perturbent l'entrée et la sortie des élèves. Vols, racket, trafic de stupéfiants s'exercent souvent à l'extérieur des bâtiments sous le regard impuissant des chefs d'établissement qui expriment, à chaque occasion qui leur est donnée, leur volonté de voir cette réalité prise en compte », constatait Ségolène Royal lors des débats parlementaires (J. O. A. N. (C. R.) n° 50 du 1-10-97).
C'est pourquoi le gouvernement a souhaité aggraver les peines concernant un certain nombre d'infractions mettant en cause des mineurs dès lors que celles-ci sont commises au sein d'un établissement d'enseignement : le fait de se rendre coupable de ces délits« à l'intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif » ou « aux abords d'un tel établissement » sera désormais considéré comme une circonstance aggravante, au même titre que l'implication d'un mineur de moins de 15 ans. Pour éviter de punir plus sévèrement des infractions sans lien avec le milieu scolaire, il est précisé que les faits lorsqu'ils ont lieu aux abords d'un établissement scolaire doivent se produire « à l'occasion des entrées et des sorties des élèves ».
Les infractions visées sont les suivantes :
• délit de provocation d'un mineur à l'usage de stupéfiants, puni de 7 ans d'emprisonnement et de 1 million de francs d'amende (au lieu de 5 ans d'emprisonnement et 700 000 F d'amende) (art. 227-18 du CP)
• délit de provocation d'un mineur à participer à un trafic de stupéfiants, sanctionné par 10 ans d'emprisonnement et 2 millions de francs d'amende (contre 7 ans et un million de francs) (art. 227-18-1 du CP) ;
• délit de provocation d'un mineur à la consommation habituelle et excessive de boisson alcoolique, puni de 3 ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende (au lieu de 2 ans et 300 000 F) (art. 227-19 du CP)
• délit de provocation d'un mineur à la commission de crimes ou de délits, puni de 7 ans d'emprisonnement (au lieu de 5 ans) et de 1 million de francs d'amende (art. 227-21 du CP)
• délit de corruption de mineur correspondant au délit d'excitation habituelle de mineurs à la débauche dans l'ancien code pénal, désormais puni de 7 ans d'emprisonnement et de 700 000 F d'amende (contre 5 ans et 500 000 F) (art. 227-22 du CP)
• violences ayant entraîné uneincapacité totale de travail pendant plus de 8 jours, punies de 5 ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende (au lieu de 3 ans et 300 000 F) (art. 222-12 du CP)
• violences ayant entraîné uneincapacité de travail inférieure ou égale à 8 jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail, punies de 3 ans d'emprisonnement et 300 000 F d'amende(art. 222-13 du CP).
A l'initiative du Sénat, la diffusion de représentations de mineurs à caractère pornographique (par exemple des images virtuelles) est réprimée.
Ainsi, le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d'enregistrer ou de transmettre l'image ou la représentation d'un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique, ou encore de la diffuser par quelque moyen que ce soit, de l'importer ou de l'exporter, de la faire importer ou exporter, est puni de 3 ans d'emprisonnement (au lieu de 1 an) et de300 000 F d'amende. Des peines qui sont portées à 5 ans d'emprisonnement et à 500 000 F d'amende lorsqu'un réseau de télécommunications a été utilisé pour la diffusion de l'image ou de la représentation du mineur à destination d'un public non déterminé.
Ces dispositions sont également applicables aux images pornographiques d'une personne dont l'aspect physique est celui d'un mineur, sauf s'il est établi que cette personne était âgée de 18 ans au jour de la fixation ou de l'enregistrement de son image.
Est portée de 2 à 5 ans d'emprisonnement et de 200 000 F à 500 000 F d'amende la peine encourue pour atteinte sexuelle sur un mineur de 15 ans commise par un majeur « sans violence, contrainte, menace ni surprise ». Une aggravation des sanctions justifiée, selon l'exposé des motifs,« à la fois par la gravité de ces agissements et par le fait qu'en cas de circonstances aggravantes, les peines sont portées à 10 ans d'emprisonnement et 1 million de francs d'amende. »
Rappelons que ces circonstances aggravantes sont l'inceste, l'infraction commise par une personne ayant autorité sur la victime ou abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, l'infraction commise par plusieurs personnes ou encore celle accompagnée du versement d'une rémunération.
La loi du 17 juin comporte également un certain nombre de mesures diverses d'importance inégale. En voici les principales.
Un nouvel article est inséré dans le code pénal précisant que les délits d'agressions sexuelles et d'atteintes sexuelles sont considérés comme une même infraction au regard de la récidive.
Actuellement, le délit de harcèlement sexuel est défini comme « le fait de harceler autrui en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, pour une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions » et est puni de un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende. La loi complète l'article 222-33 du code pénal afin d'y ajouter le fait d'exercer « des pressions graves ».
Cette modification des éléments constitutifs du délit a suscité de vifs débats. Dans sa rédaction initiale, le projet de loi évoquait « des pressions de toute nature ». Une mention qui, pour Charles Jolibois, rapporteur du projet au Sénat, « ne définissait pas suffisamment l'infraction et revenait à donner un pouvoir d'appréciation considérable au juge ». C'est donc finalement la notion de « pressions graves » qui a été retenue par la commission mixte paritaire. Laquelle a considéré que cette rédaction était de nature à harmoniser les définitions du code pénal et du code du travail (2), et à qualifier de façon précise un type de comportement qui ne relève pas à proprement parler de la menace ou de la contrainte. « Il appartiendra [donc] au juge d'apprécier au cas par cas la manière dont se seront effectuées ces pressions », a indiqué Frédérique Bredin (J. O. A. N. (C. R.) n° 57 du 4-06-98).
L'article 722 du code de procédure pénale prévoit une expertise psychiatrique préalablepour les aménagements de peines accordées aux personnes condamnées pour meurtre ou assassinat d'un mineur de 15 ans précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ou pour infractions sexuelles. Cette expertise n'est toutefois pas exigée pour les réductions de peines et les autorisations de sortie sous escorte.
Il est désormais prévu que seules les réductions de peine n'entraînant pas de libération immédiate ne nécessitent pas une expertise. A contrario, une expertise sera donc nécessaire pour les réductions de peine entraînant une libération immédiate, c'est-à-dire pour celles accordées lors de la dernière année de l'incarcération.
En outre, la loi étend l'obligation de l'expertise à tous les meurtres ou assassinats avec viol ou actes de barbarie commis contre des mineurs, quel que soit leur âge.
Désormais, les chefs d'établissements scolaires doivent être informés des audiences de jugementconcernant les crimes et délits commis dans leur établissement. La loi impose en effet au ministère public d'aviser le chef d'un établissement scolaire de la date et de l'objet de l'audience de jugement d'un crime ou d'un délit lorsque cette infraction a été commiseà l'intérieur de l'enceinte de son établissement ou a concerné, aux abords immédiats de celui-ci, un de ses élèves ou un membre de son personnel.
Cet avis est adressé par lettre recommandée 10 jours au moins avant la date de l'audience ou, en cas de comparution immédiate, « dans les meilleurs délais et par tout moyen ».
Selon l'exposé des motifs, cette disposition« permettra au chef d'établissement de faire connaître, s'il le souhaite, ses observations au tribunal, tout en étant informé des suites données à une plainte ou une dénonciation (qui émane d'ailleurs peut-être de lui-même) concernant des infractions qui intéressent le fonctionnement de son établissement ».
Cet article a pour objet de modifier l'article 35 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presseen ses dispositions relatives à la preuve de la vérité des faits diffamatoires.
Cet article 35 prévoit trois hypothèses dans lesquelles la vérité des faits diffamatoires ne peut être prouvée :
• lorsque l'imputation concerne la vie privée de la personne
• qu'elle se réfère à des faits qui remontent à plus de 10 années
• ou à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision.
Afin d'éviter qu'une personne victime d'une infraction sexuelle faisant publiquement état des sévices subis ne soit systématiquement condamnée pour diffamation, alors même que les faits sont avérés, la loi exclut de l'application de ces dispositions les faits diffamatoiresconstitutifs d'agressions ou d'atteintes sexuelles commis contre un mineur. Concrètement, est désormais donnée à la personne poursuivie pour diffamation, la possibilité d'apporter la preuve du fait diffamatoire constitutif d'infractions sexuelles, mais uniquement lorsque celui-ci concerne sa vie privée ou remonte à plus de 10 ans. L'impossibilité de prouver la vérité des faits constitutifs d'infractions sexuelles lorsqu'ils sont amnistiés, prescrits ou ont donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision est en revanche maintenue.
Valérie Balland
(1) L'article 450-1 du code pénal définit le délit d'association de malfaiteurs comme la formation d'un groupement ou l'établissement d'une entente en vue de la préparation d'un crime ou d'un délit puni de 10 ans d'emprisonnement, cette préparation devant être caractérisée par des faits matériels. L'association de malfaiteurs existe même si l'infraction en vue de laquelle le groupement a été constitué n'a pas été réalisée, ni même tentée.
(2) Rappelons, que l'article L. 122-46 du code du travail interdit les sanctions ou le licenciement de salariés ayant subi ou refusé de subir des agissements relevant du harcèlement sexuel ainsi que de ceux qui auraient témoigné de ces agissements. Et que l'article L. 123-1 prévoit qu'aucune mesure intéressant la vie professionnelle du salarié, notamment en matière d'embauche, ne peut être décidée en prenant en considération de tels agissements. Des dispositions analogues existent dans le statut général de la fonction publique.