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Conférence de la famille

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Retour à l'universalité des allocations familiales et abaissement du plafond du quotient familial. Telle est la mesure phare annoncée à l'issue de la conférence de la famille, qui s'est tenue à Matignon le 12 juin. Pour le reste, les orientations détaillées par le Premier ministre ne commenceront à s'appliquer qu'en 1999 et nécessiteront pour la plupart de nouvelles concertations et des groupes de travail.

C'est entouré de six de ses ministres (Emploi, Justice, Ville, Logement, Jeunesse et Sports, Enseignement scolaire), que Lionel Jospin a présidé, le 12 juin, à Matignon, la conférence nationale de la famille, qui a réuni, pour la troisième année consécutive, associations familiales, partenaires sociaux, représentants des caisses de sécurité sociale et autres associations, notamment de parents d'élèves. Précédée d'un long travail de diagnostic, de réflexion et de concertation, elle constituait, pour le Premier ministre, « le point de départ pour une nouvelle politique familiale ». « Si la famille est aujourd'hui diverse, multiforme, jamais sans doute sa présence dans notre société n'a-t-elle été aussi essentielle », a-t-il souligné. Il s'est ainsi employé à définir « une politique familiale qui s'adapte à la réalité de notre société » et qui « se doit d'être juste ».

Comme prévu, le Premier ministre est revenu sur la mise sous condition de ressources des allocations familialesdécidée « à titre transitoire » par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 et entrée en vigueur le 1er mars dernier (1). Une mesure qui avait suscité la grogne du mouvement familial, très attaché au principe d'universalité des allocations familiales, faisant même de leur rétablissement un préalable à toute participation à la conférence du 12 juin. D'où la satisfaction aujourd'hui d'Hubert Brin, président de l'Union nationale des associations familiales (UNAF), qui voit dans ces décisions « un bon compromis ». Même s'il appelle « à faire progresser, dans l'année qui vient, la question de l'aide aux jeunes » et juge « nécessaire » de réfléchir, au sein de la CNAF, à un « meilleur équilibre entre prestations et action sociale ».

Reste que, pour l'essentiel, les dispositions arrêtées le 12 juin ne seront applicables qu'en 1999. En outre, certaines des pistes avancées doivent encore donner lieu à concertations ou requièrent la mise en place de groupes de travail. Selon les premiers chiffrages du gouvernement, l'ensemble des mesures coûtera 2, 5 milliards en 1999(3 milliards par an ensuite) dont 1, 7 milliard à la charge de la branche famille et 800 millions à celle de l'Etat.

Les aides financières

ABAISSEMENT DU PLAFOND DU QUOTIENT FAMILIAL

Suivant les recommandations des rapports Thélot et Gillot (2), Lionel Jospin a donc décidé de substituer à la mise sous condition de ressources des allocations familiales une limitation de l'avantage fiscal résultant de la présence d'enfants. Toutes les familles d'au moins deux enfants auront à nouveau droit aux allocations familiales mais, pour les plus aisées d'entre elles, la réduction d'impôt apportée par le quotient familial sera plafonnée à un niveau moins élevé qu'auparavant. Une mesure que le Premier ministre estime « plus progressive et plus redistributive que celle adoptée l'an dernier ».

Concrètement, pour les revenus 1998(imposés en 1999), le plafond du quotient familial  (3) sera abaissé de 16 380 F à 11 000 F par demi-part, à l'exception des demi-parts spécifiques aux invalides et aux anciens combattants. Pour les familles monoparentales, le plafond de la part relative au premier enfant sera maintenu à 20 270 F.

Conséquences : le versement des allocations familiales sera rétabli en janvier 1999 pour les 386 000 familles pour lesquelles elles avaient été réduites ou supprimées l'an dernier. Selon le gouvernement, 130 000 familles récupéreront leurs allocations familiales sans être touchées par l'abaissement du quotient tandis que 100 000 récupéreront plus en allocations qu'elles ne paieront d'impôts supplémentaires. Quant aux familles d'un enfant, qui ne perçoivent pas les allo-cations familiales, elles seront touchées par ce nouveau dispositif à partir de 36 000 F de revenus mensuels nets. Ces impôts supplémentaires (de 3 à 3, 5 milliards de francs) seront restitués à la branche famille sous une forme encore à l'étude.

REPORT DE L'ÂGE OUVRANT DROIT À MAJORATIONS

Pour tenir compte de l'évolution des âges scolaires, les majorations pour âge des allocations familiales seront reportées de 10 à 11 ans et de 15 à 16 ans pour les enfants atteignant leur dixième et leur quinzième anniversaire après le 1er janvier 1999. Pour mémoire, ces majorations sont actuellement de 192 F pour les enfants âgés de 10 à 15 ans et de 341 F à partir de 15 ans.

BÉNÉFICE DES MAJORATIONS POUR ÂGE AUX TITULAIRES DU RMI

Actuellement, les allocations familiales et leurs majorations pour âge sont prises en compte pour la détermination du montant du RMI. Le RMI étant une prestation différentielle, lorsque les ressources de la personne s'accroissent du fait de la majoration pour âge, les ressources des titulaires n'augmentent pas pour autant  c'est le montant de la prestation différentielle qui se réduit.

Comme le préconisait Marie-Thérèse Join-Lambert dans son rapport sur les minima sociaux (4), les titulaires du RMI bénéficieront des majorations pour âge des allocations familiales. Celles-ci seront exclues des ressources prises en compte pour établir le montant de la prestation à verser au titulaire du RMI. Au total, 110 000 familles seraient concernées par cette mesure qui sera intégrée dans le projet de loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, actuellement en discussion.

ALIGNEMENT DES DURÉES DE VERSEMENT DES PRESTATIONS FAMILIALES

Depuis le 1er janvier dernier, l'âge limite ouvrant droit aux prestations familiales a été relevé de 18 à 19 ans pour les jeunes inactifs ou ceux dont l'activité procure une rémunération au plus égale à 55 %du SMIC (5). Pour les étudiants, il est de 20 ans. A compter du 1er janvier 1999, cette limite d'âge sera relevée à 20 ans, quelle que soit la situation des jeunes à charge. 60 000 familles devraient ainsi bénéficier de cette extension.

EXTENSION DE L'ALLOCATION DE RENTRÉE SCOLAIRE

Afin d'aider les familles modestes à prendre en charge la scolarité de leur premier enfant, le droit à l'allocation de rentrée scolaire sera étendu,à la rentrée 1999, aux familles n'ayant qu'un seul enfant à charge qui remplissent la condition de ressources. La condition de perception parallèle d'une autre prestation (allocations familiales, APL,  AAH ou RMI), qui exclut du bénéfice de l'allocation environ 350 000 familles modestes n'ayant qu'un seul enfant à charge, sera supprimée.

REVALORISATION DES AIDES AU LOGEMENT

Les loyers plafonds retenus en allocation de logement familiale seront augmentés en moyenne de 25 %sur 3 ans, en plus de la revalorisation annuelle. Cette hausse sera de l'ordre de 150 F par enfant à charge. Quelque 530 000 familles logées dans le parc privé devraient en bénéficier. En outre,l'ensemble des aides personnelles au logement (allocations de logement familiale et sociale, aide personnalisée au logement) seront revalorisées au 1er juillet 1998 en fonction de l'indice des prix à la consommation hors tabac, de la valeur de l'indice du coût de la construction et de l'augmentation des charges locatives. Enfin, est mise à l'étude la prise en compte de la présence de jeunes adultes à charge dans le calcul de l'allocation logement.

Mieux concilier vie familiale et vie professionnelle

TEMPS PARTIEL FAMILIAL

Le gouvernement envisage de mettre en place un temps partiel familial, organisé sur l'année et à leur initiative, permettant aux salariés de suspendre leur contrat de travail pendant les périodes de vacances scolaires. Ses modalités devraient être discutées avec les partenaires sociaux, « afin de trouver le bon équilibre entre les attentes des parents et les contraintes de l'entreprise ».

CONGÉS LIÉS AUX ÉVÉNEMENTS FAMILIAUX

Après concertation avec les partenaires sociaux, la création d'un congé parental d'accompagnement scolaire sera envisagée, par fractionnement du congé parental d'éducation. Entre la naissance et le troisième anniversaire, le principe resterait celui d'une période continue d'une durée initiale de un an renouvelable jusqu'au troisième anniversaire. Les semestres non pris dans cette période pourraient l'être entre 3 et 16 ans par périodes de 6 mois. Dans le même esprit, un « congé parent dépendant », d'une durée initiale de 6 mois renouvelable une fois, sur le modèle du congé parental pour enfant malade ou handicapé, sera institué pour prendre en charge un parent dont l'état de santé nécessite la présence d'une tierce personne.

MODES DE GARDE DES JEUNES ENFANTS

Le gouvernement a annoncé que les schémas locaux de développement de l'accueil des jeunes enfants de moins de 6 ans seront rendus obligatoires dans lescommunes de plus de 5 000 habitants et les modes de garde innovants, comme les crèches parentales, dotés d'un cadre réglementaire. Les aides des caisses d'allocations familiales aux communes pour le développement des crèches seront accrues et mieux orientées vers les communes les plus pauvres. Le système actuel sera ainsi inversé, les caisses apportant une contribution d'autant plus importante que celle des familles est faible. Ce seront les caisses et non plus les communes qui supporteront les effets de la modulation familiale. Etant rappelé que le gouvernement attend prochainement les conclusions du rapport Hespel/Thierry chargé d'établir un diagnostic de l'ensemble des services existants d'aide aux personnes (garde des enfants, personnes âgées et handicapées)   (6).

Conforter les parents dans leur rôle éducatif

Lionel Jospin a insisté sur « le rôle éducatif irremplaçable des parents ». Outre une série de mesures visant à mieux associer les parents à la scolarité de leurs enfants (développement des classes passerelles, de la médiation socio-culturelle...), il a notamment annoncé le développement d'un réseau d'appui, d'écoute et de conseil aux parents, animé par des professionnels, conformément aux préconisations de Dominique Gillot. Il s'appuiera sur la création et le renforcement de 1 000 « points d'information parents », gérés notamment par des centres sociaux, ou le développement de lieux d'accueil parents-enfants type maison verte, ou encore de la médiation familiale.

Elisabeth Guigou a confirmé, pour sa part, lacréation d'un groupe de travail sur la réforme du droit de la famille. Prolongeant les réflexions engagées par Irène Théry (7), les travaux partiront de l'enfant et du lien avec ses parents, a indiqué la ministre de la Justice. La réflexion devra englober tous les secteurs du droit de la famille : mariage, régime matrimonial, situation des couples vivant ensemble sans être mariés, divorce, autorité parentale, filiations légitime et naturelle, adoption, successions. Les travaux, qui commenceront début juillet, devront aboutir en1999.

Création d'une délégation interministérielle à la famille

Comme le souhaitaient les associations familiales, une délégation interministérielle à la famille va être créée. Placée auprès de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, elle sera chargée d'animer et de coordonner le travail des pouvoirs publics dans ce domaine. Elle préparera les travaux de comités interministériels, que le Premier ministre présidera, et ceux de la conférence de la famille. Première mission du prochain délégué, qui va être bientôt nommé en conseil des ministres : suivre les décisions arrêtées le 12 juin concernant l'appui à la fonction éducative des parents et faire des propositions au gouvernement,  après concertation avec les associations familiales et les partenaires sociaux, sur les aides à la garde, la situation des jeunes adultes, l'articulation entre vie familiale et vie professionnelle, la simplification des prestations familiales.

Valérie Balland

Notes

(1)  Voir ASH n° 2063 du 20-03-98.

(2)  Voir ASH n° 2072 du 22-05-98 et n° 2074 du 5-06-98.

(3)  Le mécanisme du quotient familial consiste à diviser le revenu imposable de chaque contribuable en un certain nombre de parts, qui est fonction de sa situation de famille (célibataire, marié, veuf ou divorcé) et du nombre de personnes fiscalement à charge (un enfant compte pour une demi-part, ou une part à compter du troisième).

(4)  Voir ASH n° 2060 du 27-02-98.

(5)  Voir ASH n° 2052 du 2-01-98.

(6)  Voir ASH n° 2058 du 13-02-98.

(7)  Voir ASH n° 2072 du 22-05-98.

LES POLITIQUES SOCIALES

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