La loi « d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail » a été définitivement votée, le 19 mai, par le Parlement. Les amendements retenus ne bouleversent pas l'économie générale du projet de loi, présenté en décembre dernier (1). L'un d'entre eux, toutefois, adopté après moult débats, définit désormais dans le code du travail la notion de « travail effectif ». Sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel, qui devait être saisi par l'opposition, voici les principales dispositions de la loi.
La durée légale du travail est fixée à 35 heures au 1er janvier 2002 pour toutes les entreprises et dès le 1er janvier 2000 pour celles de plus de 20 salariés (si ce seuil est atteint entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2001, la date d'entrée en vigueur est reportée au 1er janvier 2002). D'ici là, les organisations syndicales sont invitées à négocier les modalités de réduction effective de la durée adaptées à la situation des branches et des entreprises. Une seconde loi, votée au plus tard le 31 décembre 1999, fixera les modalités concrètes de passage aux 35 heures, en tenant compte notamment du bilan des négociations déjà menées.
La réduction du temps de travail est applicable aux salariés aujourd'hui soumis à la durée légale du travail. Ne sont donc pas concernées les professions particulières habituellement exclues du champ de la durée, dont les assistantes maternelles, et les fonctionnaires. Dans les 12 mois suivant la publication de la loi, le gouvernement présentera néanmoins un rapport sur les perspectives de la réduction du temps de travail dans la fonction publique.
La réduction peut prendre la forme de jours de repos supplémentaires. Lesquels pourront alimenter en partie un compte épargne temps.
La réglementation relative à la durée du travail est basée sur la notion de travail effectif. Ce dernier est désormais expressément défini dans le code du travail comme « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ».
La loi instaure en outre dans le code du travail un temps de pause et un repos quotidien minimaux obligatoires.
Pour inciter les entreprises à négocier dès maintenant une réduction du temps de travail, une aide financière est mise en place sous la forme d'un abattement forfaitaire et dégressif sur les cotisations sociales patronales.
A l'exclusion de certains organismes publics, son champ d'application est quasi identique à celui fixé pour la nouvelle durée légale. Pour y ouvrir droit, la réduction doit, à la fois, être d'au moins 10 % de la durée initiale de travail et porter le nouvel horaire collectif au maximum à 35 heures. L'entreprise doit en outre accroître ses effectifs d'au moins 6 %. La réduction doit être organisée par un accord d'entreprise ou d'établissement. Dans les entreprises dépourvues de représentation syndicale, les organisations syndicales peuvent, sous certaines conditions, mandater un salarié aux fins de négocier un tel accord. La réduction peut aussi être organisée par une convention collective ou un accord de branche étendu (ou agréé en application de l'article 16 de la loi du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales), sous réserve d'un accord complémentaire d'entreprise si celle-ci a au moins 50 salariés.
L'aide est accordée, par convention avec l'Etat, pour cinq ans. La première année, son montant sera, par an et par salarié, de 9 000 F pour les entreprises entrant dans le dispositif en 1998, de 8 000 F pour celles y entrant au cours du premier semestre 1999 et de 7 000 F pour celles attendant le deuxième semestre 1999. L'aide sera ensuite réduite de 1 000 F chaque année, sans pouvoir être inférieure à 5 000 F.
Ce montant de base sera majoré de 1 000 F pour les entreprises qui embauchent des jeunes, des chômeurs de longue durée, des personnes handicapées ou qui vont au-delà des exigences minimales en termes d'emplois ou recourent à des contrats à durée indéterminée. Et de 4 000 F lorsque les horaires sont réduits d'au moins 15 %, en une ou deux fois, et les effectifs augmentés de 9 %. Une majoration supplémentaire de 4 000 F est également prévue pour les entreprises comportant une forte proportion d'ouvriers et de bas salaires.
Un dispositif parallèle est mis en place pour les entreprises qui, dans le cadre d'une procédure collective de licenciement pour motif économique, préservent des emplois grâce à la réduction du temps de travail. L'aide est alors attribuée pour une durée de trois ans, éventuellement prolongée de deux ans.
Une série de dispositions vise à mieux encadrer le recours au temps partiel.
Ainsi, le plancher de l'horaire hebdomadaire ouvrant droit à l'abattement de 30 % sur les cotisations patronales de sécurité sociale est relevé de 16 heures à 18 heures. L'abattement est supprimé pour les embauches ou transformations d'emploi à temps partiel annualisé sauf si ce dernier s'inscrit dans le cadre d'un accord d'entreprise sur le temps choisi. Il est maintenu pour les contrats fixant une durée comprise entre 28 et 32 heures dans les entreprises qui procéderont à une réduction conventionnelle de la durée du travail d'ici à l'an 2000 ou 2002 selon les cas.
Par ailleurs, seul un accord de branche peut désormais autoriser l'employeur à augmenter la proportion d'heures complémentaires jusqu'au tiers de la durée du travail inscrite au contrat.
L'amplitude de la journée de travail est également réduite. A compter du 1er janvier 1999, les horaires de travail des salariés à temps partiel ne pourront comporter, au cours d'une même journée, qu'une seule interruption d'activité et aucune interruption supérieure à deux heures.
Une modification du contrat est en outre prévue lorsque pendant une période de 12 semaines consécutives, l'horaire moyen réellement effectué dépasse de deux heures au moins par semaine l'horaire prévu au contrat.
Enfin, est pérennisée la possibilité, pour les employeurs, de continuer à cotiser sur la base du travail à temps plein pour la retraite de salariés dont le contrat de travail à temps complet est transformé en contrat à temps partiel ce dispositif avait été mis en place en 1993, pour une durée de cinq années.
A compter du 1er janvier 1999, le seuil au-delà duquel s'appliquera, dans les entreprises de plus de dix salariés, le repos compensateur de 50 % sera abaissé de 42 heures à 41 heures. Le régime des heures supplémentaires applicable une fois la nouvelle durée légale en vigueur, sera précisé par la loi qui sera votée à la fin de l'année 1999.
(1) Voir ASH n° 2049 du 12-12-97.