Le service social public « a encore de beaux jours »

« Oui, public et privé se complètent... Oui, le service social s'adresse à tous les usagers. [...]Il y a certainement des permanences où le grand nombre d'usagers nous sollicitant [le service social public], nous avons plus de difficulté à rester disponible et à “traiter” le cas immédiatement. Mais qui nous oblige en service social à répondre dans l'urgence, voire dans l'heure ? [...].

« Nous ne sommes pas, dans le service social du service public, assujettis à la logique de consommation ni à l'obligation de réponses absolues, parcellaires, coïncidant du fait de la “demande exprimée” par l'usager, mais dans une conception d'aide globale à la personne humaine dans laquelle “l'acte professionnel”, l'aide financière, le prêt, les interventions pour le maintien dans les logements, le mode de garde à trouver, s'inscrivent dans un projet contractuel entre le travailleur social et la personne. Ceci nécessite la prise en compte, pour le travailleur social, de la notion de durée, de temps : l'écoute, l'évaluation, les actes, l'évaluation des actes, le projet avec la personne. C'est donc aussi [...] la nécessité de tenir compte de la propre faculté de l'usager à s'approprier l'aide proposée par le service social... Encore du temps !

« [...] Nous sommes, nous aussi, évalués sur nos capacités à donner les “bonnes réponses”, à comptabiliser nos actes, à produire des rapports d'activité ;et sans ce résultat, nous serions très vite amenés à nous expliquer devant nos directions et les instances consultatives et paritaires.

« Non, nous ne “bâclons” pas et, pourtant, nos conditions de travail ne sont pas toujours exceptionnelles ! Mais nous gardons en nous des valeurs communes de démocratie républicaine qui nous font encore penser que c'est dans le service public que les finalités du service social, d'accompagnement ponctuel de personnes précaires, de restauration de leur autonomie et de leur citoyenneté, peuvent trouver encore les moyens, le temps, la liberté de penser d'abord plus à l'être humain qu'au nombre de personnes à recevoir pour assurer nos fins de mois.

« Si le service public a ses contraintes, effectifs trop lourds de population à suivre, s'intégrer dans les projets institutionnels... il offre aussi cette garantie formidable de pouvoir répondre au plus grand nombre quels que soient leurs moyens... C'est l'égalité de droits pour chaque citoyen d'avoir accès aux meilleures prestations quels que soient sa catégorie sociale et ses moyens. Une des finalités du service public, non partagée par les “free-lances”, est aussi cette nécessité d'assurer “des plans sociaux”. [...] Le service social public participe ainsi à la mise en place d'un monde plus humain, fait pour tous, où l'argent n'est pas l'unique critère dans un projet de vie, mais où le service social a une part importante pour faire vivre des valeurs humanistes, progressistes, fondamentales, dans des actions de prévention, de suivi, d'évaluation de ses propres prestations...

« Notre “boutique” me semble plus vaste que [celle du libéral] et ses fondations ont encore de beaux jours... les usagers trancheront sans doute sur la qualité de nos actes professionnels. »