L'allégement de charges sociales sur les bas salaires constitue une mesure présentée par certains experts comme une des réponses aux problèmes de chômage des personnes les moins qualifiées, à côté de la réduction du temps de travail.
Dans cet esprit, deux dispositifs ont été mis en place : l'exonération de la cotisation des allocations familiales en 1993 et la réduction des charges patronales de sécurité sociale sur les bas salaires en 1995.
Ces deux mesures ont été fusionnées, pour une durée temporaire par la loi de finances pour 1996, l'exonération de cotisation d'allocations familiales subsistant, de façon résiduelle, pour certaines entreprises. La loi de finances pour 1998 a donné un caractère permanent à la ristourne des cotisations sociales, tout en y apportant quelques modifications. En particulier, le plafond de salaire mensuel a été ramené de 133 % à 130 % du SMIC et le principe de la proratisation pour les salariés à temps partiel, suspendu en 1996, a été rétabli.
Au total, pour cette année, ce sont quelque 43 milliards de francs qui seront dépensés par l'Etat pour compenser, auprès des organismes de sécurité sociale, ces réductions de cotisations.
Les bénéfices en termes d'emploi font l'objet d'évaluations très différentes :l'instance d'évaluation de la loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle estimait, dans son rapport de janvier 1997, le nombre d'emplois créés entre 120 000 et 145 000, alors que le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts (CSERC) situe ce chiffre dans une fourchette allant de 40 000 à 200 000 emplois à moyen ou à long terme (Rap. A. N. n° 305, annexe n° 24, Bapt).
• Articles L. 241-6-2, L. 241-6-4 et L. 241-13 du code de la sécurité sociale, modifiés par l'article 115 de la loi de finances pour 1998 n° 97-1269 du 30 décembre 1997, J.O. du 31-12-97.
• Articles D. 241-7, D. 241-9 et D. 241-11 du code de la sécurité sociale modifiés par le décret n° 97-1330 du 31 décembre 1997, J.O. du 3-01-98.
• Circulaires DSS n° 95/73 du 6 octobre 1995, B.O.T.R. n° 95/22 du 5-12-95 n° 735 du 5 décembre 1996, B.O.M.T.A.S/M.A.T.V.I. n° 96/52 du 25-01-97 et n° 98/134 du 25 février 1998, à paraître au B.O.M.E.S.
• Lettre-circulaire ACOSS n° 1998-031 du 10 mars 1998.
En 1997, la ristourne dégressive de cotisations patronales de sécurité sociale a concerné environ 6 millions de personnes. Les modifications apportées par la loi de finances pour 1998 s'appliquent aux rémunérations versées depuis le 1er janvier.
Peuvent bénéficier de la réduction de charges sur salaires, les employeurs soumis à l'obligation d'assurance contre le risque de privation d'emploi, soit :
• les entreprises industrielles, commerciales, artisanales et agricoles
• les offices publics et ministériels
• les professions libérales
• les sociétés civiles, les syndicats professionnels et les associations.
Peuvent également ouvrir droit à la réduction de charges certains employeurs du secteur public ou parapublic que sont :
• les établissements publics industriels et commerciaux des collectivités territoriales
• les sociétés d'économie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire
• les entreprises nationales.
En revanche, ne peuvent bénéficier de ce dispositif :
• l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif
• les employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale
• France Télécom et La Poste
• les particuliers employeurs.
Depuis le 1er janvier 1998, la réduction est fixée en fonction des heures de travail du salarié. Elle est donc désormais proratisée, autrement dit réduite pour les salariés ne travaillant pas à temps complet sur le mois.
Par rémunération, on entend toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.
L'indemnité compensatrice de congés payés versée aux salariés sous contrat à durée déterminée ou sous contrat de travail temporaire est désormais incluse dans la rémunération permettant de calculer la réduction de charges.
En revanche, les allocations versées aux salariés poursuivant une activité et bénéficiaires des conventions d'allocations temporaires dégressives et les allocations de préretraite progressive et d'aide au passage à temps partiel ne sont pas comprises dans la rémunération.
Deux modes de calcul coexistent selon que la rémunération versée aux salariés est égale ou supérieure au SMIC ou bien inférieure à ce montant. En outre, la réduction est minorée pour les salariés ayant travaillé moins que la durée légale ou conventionnelle applicable à leur entreprise.
Si la rémunération mensuelle est égale ou supérieure au SMIC (6 663, 67 F actuellement) et inférieure au plafond (130 % du SMIC, soit 8 662, 77 F), la réduction de cotisation est égale à la différence entre le plafond et le salaire multiplié par 0, 607 (contre 0, 550 avant le 1er janvier).
La réduction ne peut être supérieure à 1 212, 79 F. La direction de la sécurité sociale nous a confirmé que cette limite, déterminée en fonction du SMIC (SMIC x 0, 182), ne suivra plus l'évolution de celui-ci et restera « gelée » à ce niveau.
L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) rappelle qu'il est admis d'arrondir, au franc le plus proche, le plafond de 130 % du SMIC (soit 8 663 F) et le montant maximum de la réduction. Dans ce cas, l'employeur procède au calcul de la réduction sur la base de ces paramètres ainsi arrondis pour l'ensemble des salariés.
Exemple (source ACOSS) : soit un salaire mensuel de 7 500 F pour un temps complet, la réduction est de :
0, 607 x (8 663 F - 7 500 F) =705, 94 F.
A noter : pour la réduction de charges, l'employeur peut utiliser le barème de calcul simplifié élaboré par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité (voir ci-après). L'ACOSS indique que ce choix n'a pas un caractère définitif. Toutefois, il s'appliquera à tous les salariés de l'entreprise sur une même échéance de cotisations.
Si la rémunération est inférieure au SMIC mensuel, la réduction est égale au salaire soumis à cotisations multiplié par 0, 182(inchangé).
Sont visés :
• les salariés de moins de 18 ans et les salariés d'aptitude physique réduite (reconnus travailleurs handicapés) pour lesquels le code du travail prévoit la possibilité d'un abattement sur le SMIC
• les salariés d'une entreprise ayant un horaire collectif inférieur à 169 heures.
Exemple (source ACOSS) : soit un salaire de 6 505, 95 F, pour 165 heures de travail (horaire conventionnel), la réduction est de :
(6 505, 95 F x 0, 182) =1 184, 08 F
Lorsque le nombre d'heures rémunérées est inférieur au nombre d'heures correspondant à la durée légale ou conventionnelle collective du travail applicable dans l'établissement ou partie d'établissement où est employé le salarié, le montant de la réduction est minoré en fonction du rapport entre ces deux nombres.
• pour un salaire de 5 900 F correspondant à 131 heures de travail dans une entreprise appliquant la durée légale (169 heures), la réduction est de :
((5 900 F x 0, 182) x 131 / 169 ) = 832, 35 F
• pour un salaire de 7 000 F correspondant à 82 heures d'activité dans une entreprise appliquant une durée conventionnelle de 165 heures, la réduction est de :
([ (8 663 F - 7 000 F) x 0, 607] x 82 / 165 ) = 501, 66 F
Selon le ministère, lorsque l'emploi d'un même salarié au cours d'un mois civil est effectué dans le cadre de plusieurs contrats, il y a lieu de prendre en compte le total des heures de travail rémunérées au cours du mois pour réaliser la proratisation.
Il est précisé que les périodes de suspension du contrat de travail donnant lieu au maintien de tout ou partie de la rémunération sont prises en compte pour un nombre d'heures égal au produit de la durée habituelle du travail du salarié par le pourcentage de la rémunération demeuré à la charge de l'employeur.
Toutefois, indique la direction de la sécurité sociale, lorsque la rémunération mensuelle inclut une période non travaillée donnant lieu au maintien de la rémunération intégralement à charge de l'employeur (congés payés par exemple), il n'y a pas lieu de proratiser la réduction.
Les entreprises nouvelles ou situées en zone de revitalisation rurale peuvent, non seulement bénéficier de la ristourne de cotisations patronales de sécurité sociale, mais également d'une exonération de la cotisation d'allocations familiales. Les deux n'étant pas cumulables l'employeur doit doncchoisir, pour chaque salarié, et chaque mois,le dispositif le plus avantageux pour lui.
Selon les informations que nous avons obtenues auprès de la direction de la sécurité sociale, il convient de distinguer plusieurs situations :
• si le salaire est supérieur à 119 % du SMIC (121 % avant le 1er janvier), l'exonération de la cotisation d'allocations familiales est toujours plus avantageuse
• si la rémunération est inférieure au SMIC, l'exonération de la cotisation d'allocations familiales est, en principe, plus intéressante si le salarié travaille moins d'un mi-temps
• si le salaire est compris entre le SMIC et 119 % du SMIC, la situation est variable selon le temps de travail.
Les règles de cumul n'ont pas été modifiées par la loi de finances pour 1998.
Ainsi, le bénéfice de la réduction de charges sur les bas salaires ne peut être cumulé, pour un même salarié, avec celui d'une autre exonération, totale ou partielle de cotisations patronales ou l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou montants forfaitaires de cotisations. L'employeur choisit le dispositif le plus favorable.
Il demeure, toutefois, deux exceptions. Ainsi, le cumul est possible avec :
• l'abattement de 30 % des cotisations patronales de sécurité sociale applicable au travailà temps partiel. Notons que le rétablissement de la proratisation rend ce cumul moins intéressant pour l'employeur
• l'allégement de charges sociales, dit « de Robien-Chamard » (1), en cas d'aménagement ou de réduction conventionnels du temps de travail. Rappelons que la loi dite « de Robien » devrait être abrogée par la loi d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail, étant précisé que les accords signés avant l'entrée en vigueur de cette dernière continueront à s'appliquer.
Notons, enfin, que selon le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, les aides accordées pour les bas salaires par la loi d'incitation à la réduction du temps de travail devraient se cumuler avec le dispositif existant d'allégement de charges sur les bas salaires (2).
Les employeurs sont soumis à un certain nombre d'obligations, qu'il s'agisse de ceux qui bénéficient de l'exonération de la cotisation d'allocations familiales ou de la réduction dégressive des charges sociales.
L'employeur doit établir un document justificatifdu montant des réductions qu'il a opérées indiquant :
• par établissement et par mois civil, la durée du travail applicable, le nombre de salariés concernés et le montant total des réductions appliquées
• ainsi que, pour chacun des salariés, son identité, le montant de la rémunération versée, le nombre d'heures rémunérées, le nombre d'heures pris en compte au titre des périodes de suspension du contrat de travail ayant donné lieu à rémunération et le montant de la réduction appliquée.
Ce document sera à la disposition des agents chargés du contrôle que sont les agents des Urssaf lors de toute vérification.
Depuis le 1er octobre 1996, le bulletin de salaire doit obligatoirement comporter le montant de la réduction prévue au titre de l'allégement de charges.
L'employeur doit porter le montant global de la réduction ainsi que l'effectif concerné sur la ligne du bordereau récapitulatif des cotisations (BRC) destinée à cet effet.
Le dispositif d'exonération de cotisation d'allocations familiales, qui ne concerne que certains employeurs, a été légèrement modifié pour des raisons techniques.
Peuvent bénéficier de l'exonération de cotisation des allocations familiales :
• les entreprises situées en zones de revitalisation rurale, définies par le décret n° 96-119 du 14 février 1996 (J. O. du 15-02-96)
• les entreprises exonérées de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les bénéfices en vertu de l'article 44 sexies du code général des impôts
• les employeurs relevant de certains régimes spéciaux de sécurité sociale (EDF-GDF, SNCF, RATP...), pour leurs salariés non statutaires, mais avec des seuils d'exonération particuliers.
La Poste et France Télécom sont, en revanche, explicitement exclus.
L'exonération totale de la cotisation d'allocations familiales s'applique désormais pour les salaires inférieurs à 150 % du SMIC (soit 9 995, 50 F actuellement). Le seuil de 121 % a été supprimé par la loi de financement de la sécurité sociale, pour des raisons techniques.
L'exonération est partielle (taux de 2, 7 %) pour les salaires compris entre 150 % et 160 % du SMIC mensuel (soit 10 661, 87 F). Au-delà, le taux de la cotisation d'allocations familiales est de 5, 4 % (taux normal).
Pour les employeurs relevant de certains régimes spéciaux de sécurité sociale (EDF-GDF, SNCF, RATP...), l'exonération est totale jusqu'à 120 %du SMIC et partielle jusqu'à 130 % du SMIC.
L'exonération de la cotisation d'allocations familialesne peut être cumulée avec une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales de sécurité sociale (comme la réduction dégressive vue précédemment), ni avec l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou montants forfaitaires de cotisations. En revanche, le cumul est possible avec l'abattement prévu pour l'embauche d'un salarié à temps partiel.
Christophe Divernet
Ce barème simplifié a été établi par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité. Il indique les réductions applicables pour les rémunérations versées à un salarié à temps complet et comprises entre le SMIC (6 663, 67 F au 1er janvier 1998) et 130 % du SMIC (8 662, 77 F). Le montant indiqué doit être proratisé en cas d'activité incomplète. Selon les salaires, le barème et la formule de calcul peuvent donner des résultats différents de quelques francs en plus ou en moins. L'utilisation de ce barème est facultative. Si l'employeur la choisit, cette option vaut pour l'ensemble des salariés.
Attention : pour les salaires inférieurs au SMIC (6 663, 67 F), le barème n'est pas applicable. Il convient alors d'utiliser la formule suivante : salaire soumis à cotisation x 0, 182.
(Source : Ministère de l'Emploi et de la Solidarité)
(1) Voir ASH n° 1995 du 1-11-96.
(2) Voir ASH n° 2058 du 13-02-98.