La loi du 12 novembre 1996 sur le développement de la négociation collective permet, à titre expérimental, la conclusion, par des salariés expressément mandatés, d'accords collectifs dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, à condition qu'un accord de branche le prévoie. Présentant ce dispositif, une note de la direction des relations du travail du 30 janvier 1997 avait toutefois laissé ouverte la possibilité d'un mandatement, dans certains cas, « dans l'attente d'un accord de branche » (1). A tort, vient cependant de décider le Conseil d'Etat qui était saisi par FO et la CGT.
L'administration du travail s'était fondée sur l'existence d'une jurisprudence de 1995 de la Cour de cassation qui a admis la conclusion d'accords dans les petites entreprises dépourvues de représentation syndicale avec un salarié mandaté par un syndicat représentatif. Le Conseil d'Etat, au contraire, considère que « le législateur a entendu définir limitativement les cas et conditions dans lesquels des accords collectifs de travail pourront être négociés et conclus dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux [...] en particulier, la faculté pour un salarié expressément mandaté de négocier et conclure un accord d'entreprise, doit être prévue par un accord de branche ». Le ministre du Travail alors en fonction, Jacques Barrot, a donc « méconnu le sens et la portée des dispositions législatives dont il entendait fixer, en termes impératifs, l'interprétation », poursuit le Conseil d'Etat. Lequel annule, pour excès de pouvoir, le passage incriminé de la note.
S'agissant des accords relatifs à la réduction du temps de travail, la portée pratique de cet arrêt devrait cependant rester limitée. En effet, le projet de loi sur les 35 heures, en cours d'examen devant le Parlement, prévoit que dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, l'accord pourra être conclu par un salarié mandaté à cet effet par un syndicat (2). En outre, un amendement sénatorial pourrait rétroactivement valider les accords déjà intervenus.
(1) Voir ASH n° 1997 du 15-11-96 et n° 2011 du 21-02-97.
(2) Voir ASH n° 2049 du 12-12-97.