Le Haut Comité de la santé publique a rendu public, le 20 février, un rapport réalisé par un groupe de travail présidé par le docteur Jean-Daniel Rainhorn et consacré à la progression de la précarité et à ses conséquences sur la santé (1). Ce document, préalablement remis à Martine Aubry et à Bernard Kouchner, doit, selon le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, « contribuer à la préparation du programme de prévention et de lutte contre les exclusions », qui sera présenté au conseil des ministres du 4 mars prochain.
Le phénomène de précarisation est devenu aujourd'hui massif puisque, estime le comité, il touche 20 à 25 % de la population totale vivant en France, soit de 12 à 15 millions de personnes. Et la progression de cette précarité est « susceptible, à moyen terme, de provoquer une réelle dégradation de la santé des couches sociales les plus défavorisées [ particulièrement les jeunes ] et au-delà celle de la population tout entière ». En effet, souligne le rapport, l'augmentation de l'espérance de vie qu'ont connue les Français s'explique beaucoup plus par l'amélioration des conditions socio-économiques que par les progrès de la science médicale. Et d'ajouter, que « les problèmes de santé [...] ne sont que des manifestations de logiques [sociales] inégalitaires ».
Aussi, les recommandations émises par le Haut Comité ne se limitent-elles pas au seul secteur de la santé. Elles se regroupent en trois catégories :
des « mesures générales d'intégration et de cohésion sociale à caractère préventif » : lutte contre la précarité de l'emploi mais aussi contre la dégradation des conditions de travail et de la santé au travail prévention de l'illettrisme, protection de la vie scolaire et périscolaire des enfants et adolescents, introduction de l'éducation sanitaire dès l'école primaire garantie du droit à un logement décent et mise en place de l'assurance maladie universelle sous simple condition de résidence
« des mesures spécifiques de réinsertion à caractère curatif » : accès à la protection sociale des personnes en grande difficulté (notamment grâce aux cellules d'alerte « pauvreté/précarité » décentralisées, à la prise en charge du ticket modérateur, au développement du tiers payant ou d'une couverture complémentaire...) prévention des formes majeures de souffrance psychique en particulier chez les adolescents renforcement des mesures visant les personnes âgées dépendantes
« des mesures qui permettent d'améliorer la connaissance des effets de la précarité et de la pauvreté sur la santé », les conséquences de la précarisation socio-économique sur les processus de santé étant mal connues.
(1) La progression de la précarité en France et ses effets sur la santé - Haut Comité de la santé publique - Février 1998 (non publié).