Dans un rapport, rendu public le 13 février sur Les oubliés de la prévention. Handicaps mentaux, sexualité et VIH, le Conseil national du sida (CNS) (1) rappelle « qu' aucun dépistage systématique et autoritaire du VIH » ne doit être pratiqué chez les résidents d'établissements spécialisés accueillant des handicapés mentaux. Et, en cas de test prescrit par un médecin, il réaffirme la nécessité du respect des règles de confidentialité, les résultats ne devant être communiqués « qu'à l'intéressé, son tuteur éventuel ainsi qu'aux personnes qu'ils estiment nécessaire d'informer ».
Au-delà de ces recommandations, le CNS revient sur la question de la sexualité des handicapés mentaux et des risques de transmission du VIH. Soulignant que ces publics ont été les oubliés des politiques de prévention jusqu'à la circulaire du 10 décembre 1996 (2), le rapport met en évidence « l'impossible discours sur le sida » au sein des services et établissements spécialisés en raison du tabou autour de la sexualité. Pour le conseil, le poids des représentations mais aussi « l'organisation quotidienne » constitueraient d'importants obstacles à la prévention. Le constat est particulièrement sévère : le foyer pour handicapés mentaux, assimilé par le CNS à « un espace de surveillance » où la sexualité est interdite et l'intimité « impossible », n'offrirait de toute façon qu'un « espace de prévention extrêmement restreint ». Une analyse jugée « dans une certaine mesure caricaturale », par Patrick Gohet. Si le directeur général de l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (Unapei) (3) se félicite de voir réaffirmés certains principes éthiques, il déplore ne pas avoir été auditionné par le CNS. Et surtout, l'analyse des pratiques de prévention au sein des établissements spécialisés ne tient pas compte « des efforts faits par certains », regrette Patrick Gohet, tout en reconnaissant la disparité des situations.
C'est d'ailleurs dans l'esprit de généraliser les initiatives menées en matière de prévention que l'Unapei devrait rendre publique, prochainement, l'étude du groupe de travail « sida, personne handicapée mentale, institutions » (4). A partir d'une enquête auprès des parents, professionnels et usagers des établissements, celle-ci reconnaît, en effet, que la prise de conscience du risque lié au VIH est « récente et n'est pas générale ». Et elle relève le « désarroi » existant parfois chez les familles et les professionnels, le sida pouvant mettre en évidence les contradictions au sein des pratiques éducatives. Cependant, ajoute le groupe de travail, des actions de prévention sont menées, notamment par les institutions ayant déjà mis en place des dispositifs favorisant la prise de parole autour de la sexualité ou confrontées elles-mêmes à des cas de séropositivité. Insistant sur la nécessité que ces stratégies s'insèrent dans « une action éducative globale », l'étude invite à considérer le mode d'accompagnement de la sexualité, autrement que sous l'angle de la contraception. Et à aller le plus possible vers la prise en charge des méthodes de prévention par les personnes handicapées elles-mêmes.
(1) CNS : 25/27, rue d'Astorg - 75008 Paris - Tél. 01 44 56 38 50.
(2) Voir ASH n° 2002 du 20-12-96.
(3) Unapei : 15, rue Coysevox - 75876 Paris cedex 18 - Tél. 01 44 85 50 50.
(4) Cette étude poursuit les premiers travaux de l'Unapei sur « la vie affective et sexuelle des personnes handicapées mentales » - Voir ASH n° 1925 du 5-05-95.