ASH : Comment analysez-vous la colère des associations de chômeurs et les réponses du gouvernement ? H.F. : Les actions collectives menées par les associations de chômeurs entrent en consonance avec une situation que nous ne cessons de dénoncer. Nous constatons, sur le terrain, l'extrême lassitude des personnes qui fréquentent nos associations. Il y a, chez elles, une certaine désespérance de voir prises en compte leurs difficultés quotidiennes et, surtout, d'être reconnues. En ce qui concerne les mesures annoncées par le gouvernement, la réflexion qui va être engagée sur les minima sociaux nous semble absolument primordiale. Un certain nombre de travaux antérieurs ont bien montré que les montants de ces minima condamnent leurs bénéficiaires à une situation qui relève de la survie. En outre, il existe une réelle inégalité entre le montant du RMI ou celui des allocations de fin de droit et le montant de prestations telles que les minimums invalidité ou vieillesse. Alors qu'il s'agit bien souvent, hélas, de situations également durables. Il est donc nécessaire de revoir tout ça. ASH : Etes-vous favorable, par exemple, à l'instauration d'un revenu minimum d'existence ? H.F. : L'Uniopss ne se prononce pas sur cette question. Ce qui nous paraît essentiel, c'est que l'on procède à une mise à plat des dispositifs dans la mesure où ils sont devenus inadéquats face à une précarisation durable. D'ailleurs, je me méfie des appellations « valises » que l'on n'a pas définies en termes de montant, de droits dérivés, de contrepartie, d'identité sociale... Car tous les dispositifs n'ont pas la même origine ni la même histoire. Par exemple, il est clair que les allocations issues du régime d'assurance chômage continuent à conférer une identité de travailleur. Par ailleurs, on ne prend pas suffisamment en compte les différences de revenus concernant un certain nombre d'aides complémentaires, qu'il s'agisse des allocations de logement ou d'un certain nombre de prestations sociales. Elles devraient être de même niveau pour des gens qui ont le même type de revenu. Ce qui n'est pas le cas. ASH : Les associations se sont réunies, le 8 décembre dernier, au sein de la commission « Lutte contre la pauvreté et l'exclusion » de l'Uniopss. Qu'en est-il ressorti ? H.F. : Il nous paraît très important d'insister, une nouvelle fois, sur le caractère inacceptable de la situation des plus pauvres. A cet égard, un certain nombre d'engagements politiques ont été pris pour une politique globale et ambitieuse. Il est absolument nécessaire que le projet de loi dit d'orientation-programmation de prévention et de lutte contre les exclusions, dont la préparation a été engagée dès la constitution de l'actuel gouvernement, voie son aboutissement très prochainement. Ce qui nous a été présenté par Martine Aubry va dans le bon sens. Mais, dans la mesure où les délais commencent à être un peu serrés, les associations rappellent que le mois de février ne doit pas s'achever sans qu'une présentation de cet avant-projet ait eu lieu. De façon à ce que l'on aboutisse à une discussion parlementaire et un vote avant la fin du mois de juin. L'objectif étant que tout ce processus soit bien inscrit dans la loi de finances 1999 et inspire les décisions politiques à partir de la rentrée prochaine. Sinon, nous craignons beaucoup que le gouvernement soit condamné à éteindre une série d'incendies qui se déclareront ici et là. Nous venons d'ailleurs de demander audience au Premier ministre à ce sujet. Propos recueillis par J.V.
(1) Uniopss : 133, rue Saint-Maur - 75541 Paris cedex 11 - Tél. 01 53 36 35 00.