Martine Aubry a présenté au conseil des ministres du 10 novembre, une communication sur les orientations de la politique de lutte contre les exclusions. Laquelle s'articule autour d'un programme d'action et se déclinera en une loi d'orientation et diverses lois « thématiques ».
Ainsi, le programme fixant les orientations de la lutte contre les exclusions pour les deux années à venir, dont elle avait présenté la philosophie fin octobre aux associations, sera « arrêté au début de l'année 1998 » (1). Il comprendra une loi d'orientation qui sera déposée en février ou mars au Parlement et diverses autres lois ou propositions d'actions sur des thèmes spécifiques (l'endettement, par exemple...) qui relèveront de chacun des 18 ministres ou secrétaires d'Etat concernés.
Pour élaborer ce programme, qui s'inspire des travaux antérieurement menés notamment avec les associations, quatre principes ont été dégagés. Premier d'entre eux : la prévention des exclusions, ce qui impliquera notamment, a expliqué Martine Aubry, un réaménagement de la loi sur la prévention des expulsions locatives. Mais, et c'est là son deuxième principe, il faut éviter « tout phénomène de stigmatisation », a-t-elle déclaré. Aussi, les actions en faveur des plus démunis seront-elles insérées « aussi souvent que possible » dans le cadre des dispositifs de droit commun (mise en place de l'assurance maladie universelle...). Autre axe d'action : la participation active des personnes exclues à la conception et à la mise en œuvre des actions leur permettant de sortir de l'exclusion. La ministre a ainsi indiqué que des mesures seront annoncées le 1er décembre pour relancer le « i » du revenu minimum d'insertion. Enfin, une politique systématique d'information des personnes sur leurs droits sera menée par tous les organismes concernés et par les associations. Plus concrètement, l'action du gouvernement portera principalement sur l'emploi. Ainsi, les divers dispositifs destinés aux chômeurs de longue durée seront-ils recentrés sur les publics les plus en difficulté et notamment les CES. Au chapitre du logement, il s'agira « d'accroître la sécurité de ceux qui sont menacés et d'offrir un logement à ceux qui en sont démunis », a expliqué la ministre.
Enfin, le dispositif institutionnel de lutte contre les exclusions sera réformé. Aussi, la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales sera-t-elle rénovée en 1998 afin de « donner un meilleur statut juridique aux institutions les plus récentes de réponse à l'urgence sociale, et aux formations au travail social ».
Le projet de loi contre les exclusions sera également l'occasion de « repenser » la décentralisation en matière d'aide sociale, en raison des « différences extrêmement larges » existant d'un département à un autre, a affirmé Martine Aubry. Elle souhaite ainsi revoir la décentralisation pour qu'il n'y ait « pas de rupture d'égalité territoriale » dans les domaines de l'aide sociale (insertion professionnelle des bénéficiaires du RMI, aide médicale aux plus démunis, aide à l'enfance, aux personnes handicapées, aux personnes âgées ou dépendantes...) mais également parce que la répartition des responsabilités entre l'Etat et les départements « n'a pas été totalement claire ». Cette réflexion sera « un des chantiers majeurs », même s'il s'annonce « difficile » parce qu'il « touche à des intérêts politiques », a averti la ministre.
Martine Aubry a également précisé que la future loi contre les exclusions, veillera à la « cohérence des minima sociaux ». Si elle n'est pas revenue sur la réforme des conditions d'accès à l'allocation de solidarité spécifique (ASS), mise en place par le précédent gouvernement, elle a toutefois de nouveau rappelé que l'ASS sera revalorisée. Elle a également confirmé que l'allocation des bénéficiaires d'ASS de plus de 55 ans ayant cotisé plus de 40 ans sera majorée de 1 500 F par mois.
Enfin, au-delà de ce programme, la ministre a insisté pour que les situations d'urgence ne soient pas oubliées. Elle a ainsi rappelé qu'elle avait adressé aux préfets, fin octobre, une simple lettre (et non la traditionnelle circulaire) sur l'accueil et l'hébergement d'urgence des personnes sans domicile fixe pendant la période hivernale (2). Elle estime, en effet, que « pour l'essentiel, les besoins d'accueil d'urgence sont aujourd'hui couverts ».
(1) Voir ASH n° 2043 du 31-10-97.
(2) Voir ASH n° 2044 du 7-11-97.